1: L' APRES GUERRE EN IRAK .
2: Reportage .
3: A Nassiriya , les « Seabees » se retroussent les manches pour réparer les dégâts de la guerre et du pillage
4: 200 soldats du génie s' affairent sur une douzaine de chantiers éparpillés dans la ville
5: « Une centrale électrique , une station de pompage , deux écoles , un hôpital , un orphelinat , un parc municipal , deux commissariats , un tribunal , et j' en oublie ...
6: C' est beaucoup pour un détachement de 200 Seabees [ soldats du génie de la Marine ] , mais nous avons de l' argent et du matériel. » Le commandant Dean Vanderley , qui dirige le 7e bataillon de construction mobile de l' US Navy à Nassiriya , supervise une douzaine de chantiers de réparation éparpillés dans la ville .
7: La centrale électrique qui alimente la région ne fonctionnait plus .
8: Au début de l' invasion , l' US Air Force avait lâché sur la zone une bombe « à fibre de carbone » , qui bloque la production d' électricité en provoquant un gigantesque court-circuit .
9: Dès leur arrivée , les Seabees sont allés expliquer aux électriciens irakiens ce qui leur était arrivé .
10: C' était leur première mission dans la population , ils étaient lourdement armés , ne sachant pas à quoi s' attendre :
11: « Nous avons été accueillis chaleureusement , et nous nous sommes tout de suite retrouvés entre professionnels .
12: Quand les techniciens irakiens nous ont vus poser nos armes et mettre des casques de chantier , ils ont découvert que nous étions comme eux , des électriciens , des soudeurs , des charpentiers » .
13: L' hôpital des femmes , près du centre-ville , avait aussi reçu un obus américain , qui a traversé le toit et détruit plusieurs chambres .
14: Les gravats ont été déblayés , mais le trou béant est toujours là .
15: Le commandant Vanderley veut évaluer lui-même l' importance des travaux .
16: Il arrive dans l' hôpital avec son escorte , sans prévenir , et monte directement au dernier étage .
17: Il estime qu' il faudra installer des tiges d' acier , il ira demander l' aide de la petite aciérie locale :
18: « Je connais le patron , il est venu me voir , il voulait que nous le protégions contre les pillards. »
19: Alertés , les responsables de l' hôpital viennent le saluer .
20: L' un d' entre eux explique que leur réservoir d' eau a également été percé par des éclats d' obus .
21: La réparation sera délicate , car il est perché sur une tour de 30 mètres .
22: Les Irakiens assurent qu' ils sauront le faire , si les Américains leur procurent le matériel .
23: Le commandant promet , mais il ne peut pas donner de date .
24: Les Seabees s' intéressent aussi à une école primaire dans un quartier pauvre .
25: Elle a été repérée par le major Visconti , un Marine de New York , dont l' unité est installée dans une caserne toute proche :
26: « Ici , c' est comme New York , les gens du centre-ville vivent à peu près bien , mais autour , c' est la misère .
27: C' est là qu' il faut intervenir. »
28: sourires forcés
29: Le convoi militaire encercle la petite école délabrée , ceinte de détritus et d' égouts à ciel ouvert .
30: A tout hasard , des sentinelles en armes s' installent dans la rue et sur le toit .
31: Tout se passe bien .
32: Les Marines sont déjà connus ici , leur camion-infirmerie vient quatre fois par jour .
33: Par ailleurs , ils ont commencé à détruire des maisons qui risquaient de s' écrouler sur la route .
34: Ils ne sont pas sûrs que les habitants soient contents , mais la rénovation de l' école devrait faire passer le reste .
35: Le directeur de l' école , un homme frêle au sourire timide , fait visiter les lieux .
36: Les Seabees inspectent les sols et les plafonds , prennent des mesures :
37: « Il faut tout installer ici , l' électricité , l' eau courante , les sanitaires .
38: Trois jours de boulot , et c' est bon » .
39: La réfection des bâtiments administratifs sera plus complexe , car ils ont été pillés de fond en comble .
40: Le commandant Vanderley a étudié la méthode de travail des pillards :
41: « Cela n' a pas été fait par des vandales ni des foules en colère , mais par des équipes d' artisans , de façon professionnelle .
42: Rien n' a été arraché des murs , tout a été démonté dans les règles de l' art. Tout ce butin est stocké quelque part , et on va sans doute le voir réapparaître bientôt sur les marchés .
43: Je suis sûr que nous allons pouvoir en racheter une bonne partie , pour le remettre là où il a été volé .
44: Ce n' est pas très régulier , mais , si ce commerce permet de faire redémarrer l' économie locale , pourquoi pas ? »
45: Ce shopping n' est pas toujours de tout repos .
46: Dans les ruelles grises et délabrées du marché central de Nassiriya , les Seabees prennent le contrôle des carrefours .
47: Avec l' aide d' un comptable venu spécialement en avion du Koweït avec une valise de dollars en petites coupures , le commandant achète des centaines d' articles , ce qui prend plusieurs heures .
48: Dehors , les sentinelles ont du mal à contenir les hordes d' enfants qui s' attroupent dans la rue .
49: Il faut encore aller chercher des portes et des fenêtres , dans un autre quartier .
50: Le convoi s' arrête au milieu d' une rue commerçante , provoquant un embouteillage .
51: A la vue des soldats , la foule est prise d' agitation .
52: Certains hurlent « America good !
53: Saddam finished finished ! » , d' autres veulent discuter dans un anglais incompréhensible .
54: Mais la plupart gesticulent en tous sens , voulant absolument obtenir quelque chose , tout de suite :
55: de l' argent , de l' eau , un couteau , un téléphone portable ...
56: Les soldats restent stoïques , sauf quelques-uns qui ont du mal à contenir leur irritation , surtout face aux adolescents qui les abordent avec des sourires forcés , des gestes brutaux et des regards oscillant entre le respect et l' insulte .
57: En tête de convoi , l' ambiance est plus joyeuse .
58: La foule a repéré que l' un des Marines montant la garde sur un camion était une jeune femme .
59: Aussitôt , les hommes applaudissent , lui lancent des baisers et des compliments .
60: Prise par l' ambiance , elle ôte son casque , faisant retomber sur ses épaules sa longue chevelure rousse .
61: C' est le délire , une énorme ovation monte de la rue .
62: Les autres soldats ricanent :
63: « Demain , il faut qu' on revienne dans cette putain de rue .
64: Tu devrais répéter ton numéro , tu feras un malheur » .
65: En attendant , le soir , les soldats vont pouvoir se défouler .
66: Dans l' ancienne caserne irakienne où ils vivent , ils ont organisé des matches de boxe par équipes , Seabees contre Marines .