Note de l'Ifri

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ANNODIS (E)
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Note de l'Ifri
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Institut Français des Relations Internationales (IFRI)
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écrit scientifique
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article
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Le lobbying dans l' Union européenne : les intérêts des entreprises concordent -ils avec la politique étrangère ? Alan Butt Philip Ce texte , issu d' un article préparé pour la conférence de l' Ifri tenue les 14 et 15 novembre 2002 à Paris , a été traduit de l' anglais ( Royaume-Uni ) par Benjamin Bloch . Introduction : le contexte institutionnel du lobbying européen Le système de gouvernement de l' Union européenne est unique . Ce simple fait exige des groupes de pression qu' ils recourent à des stratégies variées tout en conservant à l' esprit les multiples contraintes qui résultent de la structure même de l' Union , de sa grande diversité culturelle et politique , ainsi que des nombreux intérêts qui la traversent . Pendant longtemps , on accusa le système européen de prise de décision d' être une sorte de " jardin secret " dont seuls les initiés avaient la clef - malgré les efforts affichés de transparence des décisionnaires européens . L' aspect hermétique du système européen résulte certes de cette absence de transparence à certains moments -clefs de la prise de décision , mais il découle aussi de la complexité et de la spécificité de ce système ainsi que de son éloignement de la plupart des capitales nationales . La première caractéristique importante du système de gouvernance européen concerne son cadre légal , déterminé par une série de six ( bientôt sept ? ) traités dont l' application relève des tribunaux , en particulier de la Cour de justice des Communautés européennes ( CJCE ) . Les traités définissent , et théoriquement limitent , les compétences des institutions européennes , bien qu' il faille admettre que toute initiative relevant d' une logique fondée sur un approfondissement des principes du marché unique est susceptible d' être justifiée par les articles 95 et 308 ( anciennement 100a et 235 du traité initial instituant la CEE ) . En pratique , il existe peu de contraintes empêchant l' Union d' investir de nouveaux domaines politiques , à la condition expresse que tous les Etats membres y soient disposés et que la Commission et le Parlement européens y apportent leur soutien . Il en va de même pour la politique étrangère , les questions de sécurité , les aspects judiciaires et les affaires intérieures , si ce n' est que la Commission et le Parlement n' ont pas d' influence directe . En second lieu , les instruments législatifs utilisés par l' Union ont des caractéristiques dont les spécificités doivent être assimilées par les organes de lobbying . La directive , adressée par l' Union à tous les Etats membres , définit les objectifs d' une politique , mais en laisse les moyens à l' appréciation des gouvernements nationaux . Pour un groupe de pression , cela signifie qu' il peut promouvoir ses intérêts au moins à deux niveaux . Le règlement s' applique à l' ensemble de l' Union et ne peut être modifié par les gouvernements des Etats membres . Il est généralement assez détaillé et précis , et peut très bien intervenir dans le cadre plus large d' une directive . Une décision de l' Union , pouvant provenir de la Commission , de la CJCE ou du Conseil des ministres avec ou sans le concours du Parlement européen , est obligatoire seulement pour ceux auxquels elle s' adresse - par exemple une entreprise ou un Etat membre , pris individuellement . Enfin , une recommandation de l' Union est un avis non contraignant souvent destiné à exprimer une préférence politique commune à la plupart des Etats membres , et peut être prise en considération par la CJCE lorsque celle -ci se prononce sur une affaire . Un troisième aspect qu' il faut garder à l' esprit concerne les emplacements géographiques . La plupart des principales institutions européennes sont situées à Bruxelles , mais pas toutes . Le Luxembourg abrite la CJCE , la Banque européenne d' investissement ( BEI ) et le secrétariat du Parlement européen . Strasbourg accueille les séances plénières du Parlement , qui exigent la présence physique de plusieurs commissaires européens , accompagnés de leur équipe , ainsi que de presque tous les députés européens , et donc de nombreux membres actifs de groupes de pression , tous contraints à un pénible pèlerinage mensuel dans la capitale gastronomique de l' Europe ! Les agences para-étatiques de l' Union sont éparpillées dans tous les Etats membres , et les avant-postes de la recherche menée en interne se trouvent en Belgique , en Italie , en Allemagne et au Royaume-Uni . Certaines des caractéristiques les moins plaisantes des organisations internationales se retrouvent aussi dans le cas de l' Union . On observe une tendance à rechercher en permanence une répartition équitable des prérogatives , notamment pour l' attribution des postes politico-administratifs importants au sein des institutions européennes . La CJCE a catégoriquement condamné toute nomination ou mutation qui ne serait pas fondée sur le mérite , mais cela ne semble pas avoir infléchi beaucoup une pratique qui est devenue monnaie courante . La prise de décision au sein de l' Union dépend toujours des dispositions hybrides introduites par le traité de Maastricht en 1992 . Les principales politiques économiques communes ainsi que beaucoup d' autres sont élaborées dans le cadre du premier pilier , la Communauté européenne , et sont soumises aux exigences institutionnelles de l' Union . La Commission a l' initiative des propositions législatives , que peuvent amender le Parlement européen et le Conseil des ministres . La CJCE juge toute infraction à la législation ainsi adoptée et tranche lorsqu' un doute apparaît dans des affaires particulières ou concernant les fondements mêmes du traité . Le second des trois piliers définit la politique étrangère et de sécurité commune ( PESC ) , dont l' objectif est d' assurer une plus grande coordination et une meilleure entente entre les Etats membres sur une série de questions étrangères , militaires et sécuritaires . La Commission et le Parlement ont une marge d' action très limitée au regard du second pilier , et la prise de décision relève essentiellement des Etats , qui agissent à l' abri des regards . Bien que la PESC soit aujourd'hui représentée publiquement par Javier Solana , qui est attaché au Conseil des ministres , les opportunités offertes aux groupes de pression pour agir au niveau européen restent très circonscrites . Dans la mesure où , dans ce domaine , la plupart des décisions ne sont prises que lorsqu' un consensus a été trouvé au Conseil , la meilleure stratégie à adopter pour ceux qui cherchent à avoir une influence sur ces politiques consiste à se rapprocher de certains gouvernements dans un cadre national . Ceci suppose que les représentants des lobbies sachent ce qui est en cours de discussion au Conseil , et de telles informations ( jugées généralement confidentielles ) sont souvent plus accessibles à Bruxelles qu' ailleurs . Dans leurs grandes lignes , ces considérations sont valables pour le troisième pilier qui recouvre les affaires judiciaires et intérieures ( voir l' annexe ci après ) . Le rôle des principales institutions européennes est décrit dans le document joint à cet article , mais quelques remarques complémentaires devraient permettre une meilleure compréhension . Jusqu'en 2005 , la Commission continuera à être dirigée par aux moins 20 commissaires nommés par les Etats membres , mais son président ( actuellement Romano Prodi ) verra son rôle renforcé avec de plus amples pouvoirs pour remanier et réorganiser son équipe , et une responsabilité plus affirmée devant le Parlement . Depuis la démission forcée , le 16 mars 1999 , de la Commission Santer , beaucoup considèrent que la Commission a perdu de son influence et de sa confiance en elle . Sans doute s' efforce -t-elle de moins légiférer et de trouver de nouvelles façons d' impliquer davantage d' acteurs dans les décisions collectives ( voir infra ) , mais son rôle de moteur du système européen au regard de l' intégration économique et politique demeure inchangé . La Commission est toujours directement responsable de la conduite des affaires dans des secteurs -clefs tels que les relations extérieures ( dont le commerce international ) , la gestion des marchés agricoles et la politique de concurrence de l' Union , donnant ainsi son aval aux fusions et aux aides étatiques , tout en traitant des affaires antitrust plus classiques . D' après une importante enquête sur Paal et ses activités , publiée par Joshua Micah Marshall dans l' hebdomadaire The New Republic , la majeure partie de l' équipe de Douglas Paal - c' est-à-dire les collaborateurs permanents du Centre eux-mêmes ! De surcroît , c' est à la Commission que de tels groupes d' intérêt doivent se plaindre s' ils estiment que la législation européenne est trop contraignante ou mal appliquée dans les Etats membres , ou s' ils réclament qu' une enquête soit ouverte sur des cas de dumping , de subventions étatiques illégales ou de comportements anti-concurrentiels . C' est à elle qu' incombe la tâche délicate de convaincre les Etats membres réticents de mettre en oeuvre les engagements communautaires pris à Bruxelles et , si nécessaire , de conduire les gouvernements nationaux récalcitrants devant la CJCE . C' est aussi la Commission qui , sur la base de décisions prises en accord avec le Conseil et le Parlement européens , organise la distribution des subventions provenant des fonds structurels , des programmes de recherches et autres mannes communautaires . Il se peut que l' électorat se désintéresse du Parlement européen ( la participation lors des élections de 1999 n' était que de 52 % ) , mais son pouvoir a été accru du fait des modifications introduites par les nouveaux traités . En effet , l' Acte unique européen de 1986 soumettait la plupart des mesures relatives au marché unique à un vote à la majorité pondérée au Conseil et autorisait le Parlement , une fois exprimées les opinions du Conseil , à exercer un droit de regard , et éventuellement de veto . Le Parlement continue à rencontrer des problèmes dans l' accomplissement de ses nombreuses attributions et souffre de son incapacité à traiter convenablement toutes les questions importantes . Mais il a suffisamment de pouvoir , du fait de la nouvelle procédure de codécision où il partage le dernier mot avec le Conseil des ministres , pour exercer , dans la plupart des cas , une influence cruciale lors de la phase finale de la prise de décision . Les dernières étapes , qui nécessitent un processus de conciliation , offrent aussi d' importantes opportunités au lobbyiste astucieux et bien informé . Quoique l' on accorde une grande attention aux séances plénières du Parlement , auxquelles se réfèrent fréquemment les commissaires et les représentants du Conseil , le détail de ses travaux est effectué par ses vingt comités permanents , dont le président et le rapporteur sont , dans chaque cas particulier , des acteurs importants . Le rôle des partis politiques Au Parlement européen , les partis politiques ressemblent plus à de vagues coalitions de gens de même sensibilité ou de mouvements qui se trouvent porter le même nom . Sur les questions d' importance nationale , leur discipline interne est souvent mise à mal , bien qu' il existe des signes d' une cohésion partisane croissante . Ce sont cependant les neuf groupes politiques du Parlement , notamment les deux formations les plus importantes , les chrétiens-démocrates et les socialistes , qui y contrôlent la plupart des activités ainsi que le partage des prérogatives et des avantages ( présidences de comités , temps de parole lors des séances plénières ) entre les différentes sensibilités politiques . Dans la mesure où il est peu probable qu' un groupe soit un jour susceptible d' être majoritaire au Parlement , et étant donné la nécessité imposée par les traités de se prononcer à la majorité absolue sur les principaux défis qui se présentent aux autres institutions européennes , le Parlement est le plus efficace lorsqu' il est capable d' établir un large consensus à travers les différents groupes . Le Conseil des ministres et le sommet des chefs d' Etat et de gouvernement de l' Union connu sous le nom de Conseil européen prennent aussi plus d' importance à mesure que le programme de l' Union s' étoffe . C' est notamment le Conseil , et non la Commission , qui pilote la PESC et les questions touchant aux affaires judiciaires et intérieures ( essentiellement la coopération policière , et la lutte contre le terrorisme et le crime organisé ) . Cependant le secrétariat du Conseil ne s' accommode guère du lobbying dans la mesure où il n' a pas le même pouvoir discrétionnaire que la Commission . Ainsi , ceux qui ont des intérêts à promouvoir doivent s' efforcer de se faire entendre dans les capitales nationales ou auprès des délégations permanentes des Etats membres à Bruxelles . Dans son travail , le Conseil est aujourd'hui subdivisé en trois sections : l' agriculture , la PESC ... et le reste . Mais presque toutes les délégations nationales viennent à ces réunions avec des instructions de leur gouvernement . D' où l' accent placé sur les efforts de lobbying au niveau national pour faire pression sur le Conseil . Cela peut se révéler particulièrement fructueux si un Etat membre est sur le point d' en assumer la présidence . En effet , chaque présidence est amenée à élaborer une série d' objectifs pour la durée de son mandat , et elle a une influence sur l' ordre de priorité des discussions lors des réunions du Conseil qu' elle anime . Le Conseil des ministres multiplie aussi les groupes de travail constitués de responsables nationaux qui examinent la législation et d' autres questions . En outre , la Commission , qui détient toujours l' " unique droit d' initiative " dans le système politique de la Communauté , représente nécessairement la première étape pour ceux qui ont des intérêts à promouvoir , dans la mesure où elle reste l' initiatrice " par excellence " de la politique européenne . Bien qu' il ne soit pas possible d' exercer une pression directe sur ces groupes , des lobbyistes dévoués sont présents " à leurs marges " , donnant leur avis aux élus qui sortent de ces réunions afin qu' ils puissent aider les responsables à mieux comprendre les implications des idées qui ont émergé au cours du débat . La CJCE de Luxembourg n' est pas du tout réceptive aux formes habituelles du lobbying , mais son influence va croissant tandis que de plus en plus d' affaires sont portées à sa connaissance ( et à celle de sa cour adjointe , le Tribunal de première instance ) . C' est le résultat logique de l' élargissement des compétences de l' Union et de l' inflation permanente qui caractérise la législation européenne . La CJCE peut cependant constituer une étape importante dans les campagnes menées par les groupes de pression , et elle a pris des décisions importantes au regard de la politique sociale et de celle de la concurrence , pour lesquelles la législation existante reste incomplète , obligeant ainsi à une interprétation des principes contenus dans les traités . Syndicats et entreprises ont fréquemment porté des affaires devant elle afin d' évaluer ce que les droits et principes que renferment les traités et le droit jurisprudentiel signifient réellement dans la pratique . La décision rendue en 1986 dans l' affaire Nouvelles frontières , par exemple , a certainement accéléré la dérégulation des services proposés aux passagers des avions dans la Communauté européenne . L' affaire Barber , en 1990 , a eu pour effet de modifier radicalement les dispositions relatives aux régimes de retraite dans la plupart des Etats membres . L' équilibre institutionnel de l' Union Ces commentaires visent à expliciter comment chacune des quatre grandes institutions européennes prend part au processus de décision au sein de l' Union . Cependant , le lobbyiste doit aussi savoir où réside le pouvoir dans l' ensemble du système politique . L' Union est clairement devenue un acteur politique plus important , à la fois internationalement et au regard de la politique intérieure de chaque Etat membre . Le Conseil continue d' être le principal acteur politique sur la scène européenne , mais sa marge de manoeuvre est limitée par d' autres acteurs . Historiquement , les progrès de la Communauté et de l' Union européenne ont dépendu du " dialogue " entre le Conseil et la Commission . Les Commissions Delors ( 1985 - 1994 ) étaient réputées énergiques , et il se peut que la rapidité avec laquelle progressait l' intégration ait inquiété , mais leurs actions se fondaient sur une étroite collaboration avec le Conseil . Depuis 1995 , la Commission a perdu de sa confiance en elle , a été affaiblie par des scandales et est aujourd'hui absorbée par sa propre réforme . Cela a considérablement renforcé l' influence du Conseil , mais il reste que l' on ne peut envisager de véritables progrès au sein de l' Union sans que la Commission soit de la partie . Dans le même temps , les pouvoirs du Parlement européen ont été progressivement renforcés , notamment avec l' invention et l' extension de la procédure de codécision , mais aussi par rapport à la Commission , surtout depuis que celle -ci est affaiblie . Cela a encore accentué le marchandage , mené dans la confidentialité , entre les différentes institutions . Ainsi , et alors que les principales institutions européennes voudraient accroître leurs pouvoirs , la prééminence du Conseil reste la principale caractéristique du système décisionnel de l' Union , et cela semble devoir durer . Les agences de l' Union Le rôle futur de la Commission et les différentes manières d' éviter une centralisation excessive au sein de l' Union font l' objet d' un débat permanent . Une solution a consisté à séparer un certain nombre d' agences européennes indépendantes du noyau institutionnel de l' Union . Ces agences sont aujourd'hui une douzaine . De fait , la première d' entre elles fut la Banque européenne d' investissement ( BEI ) , crée en 1959 , à Luxembourg . Elle a été délibérément détachée des autres institutions européennes , bien qu' elle soit régie par des éléments du socle conventionnel , les Etats membres étant directement impliqués dans la direction de cette banque à travers la nomination des membres de son conseil d' administration . Europol , formée en marge de La Haye dans les années 1990 , comporte certaines similitudes avec la BEI , du fait de l' étroite participation des Etats membres à ses activités . Mais il s' agit là d' exceptions au modèle habituel des agences de l' Union , pour lequel la principale contribution des gouvernements nationaux se situe beaucoup plus en amont , lorsqu' il s' agit de s' assurer de l' installation d' une institution européenne sur le territoire national ! Après cela , chaque agence travaille dans un cadre fixé par la législation européenne , mais peut évidemment faire l' objet de pressions considérables de la part des entreprises - au premier rang desquelles on peut citer celles subies par l' Agence européenne pour l' évaluation des médicaments ( EMEA ) , située à Londres , qui délivre les autorisations de commercialisation des produits médicaux pour l' ensemble de l' Union . Une autre agence mérite d' être mentionnée : l' Agence européenne pour l' environnement ( AEE ) , située à Copenhague . Son rôle consiste à surveiller l' état de l' environnement en Europe et à contrôler la mise en place et l' efficacité de la législation environnementale européenne . Son travail repose en grande partie sur une coopération avec les autorités nationales de chaque Etat membre , une relation symbiotique se développant ainsi entre les deux niveaux . En fin de compte , si l' AEE se trouve insatisfaite des critères environnementaux d' un Etat membre , il est probable que ce mécontentement se répandra à travers le système bruxellois et aura des conséquences négatives pour le pays en question . Il est donc dans l' intérêt des Etats membres de maintenir de bonnes relations avec l' agence et de chercher à dissiper rapidement tout incertitude quant à leurs états de service et à leurs pratiques en matière d' environnement . Questions à venir à propos de la gouvernance de l' Union L' Union doit faire face à un futur plutôt incertain , la perspective de l' élargissement venant modifier ses priorités institutionnelles et l' équilibre financier entre les contributeurs et les bénéficiaires nets du budget européen - tout cela au moment où la légitimité démocratique de l' Union est de plus en plus mise en question . Du point de vue des groupes de pression , il n' est pas du tout évident que des pays comme l' Espagne et l' Irlande , qui ont beaucoup profité des transferts de fonds d' Etats membres plus riches , soient toujours aussi enthousiasmé par les activités de l' Union alors que leurs avantages à être membres apparaissent moins clairement . Et si le traité de Nice ( 23 février 2001 ) achève le processus de ratification , les grands Etats membres ne seront plus représentés à la Commission que par un commissaire à partir de 2005 , les petits Etats - dont , désormais , beaucoup de nouveaux pays d' Europe centrale et orientale -accroissant toujours un peu plus leur emprise sur cet organe . L' élargissement va évidemment gonfler le nombre des députés européens , des juges à la CJCE , des membres du Comité économique et social ( ECOSOC ) et du Comité des régions ( CDR ) , diluant soi-disant le pouvoir des grands Etats de l' ouest de l' Europe . Cependant , une reconfiguration complexe du système de vote à la majorité qualifiée au Conseil des ministres doit permettre aux plus grands Etats membres de récupérer une partie de leur pouvoir . Les quatre plus grands pays ( l' Allemagne , la France , l' Italie et le Royaume-Uni ) ainsi que l' Espagne ou la Pologne seront en mesure de bloquer les décisions au Conseil des ministres , qui comprendra alors 25 Etats . Il se peut que l' axe franco-allemand soit encore un peu plus affaibli , mais les grands acteurs européens auront toujours la possibilité de diriger les affaires , quoique d' une autre manière . En tout cas , l' élargissement pourrait entraîner une modification des priorités politiques de l' Union , qui reflétera le nouvel équilibre des intérêts au sein d' un groupe plus vaste d' Etats membres . En un mot , on doit s' attendre à un intérêt plus faible pour l' approfondissement de la politique environnementale , et un intérêt renouvelé pour les questions agricoles et de sécurité . L' élargissement de l' Union devrait centrer l' attention sur l' application du principe de subsidiarité adopté lors du traité de Maastricht . Jusqu'ici , cette déclaration d' intention ne semble pas avoir entraîné de modification tangible du travail des institutions européennes , si ce n' est une diminution de la production législative . Mais la diversité des situations va s' accroître avec l' incorporation , dans le processus décisionnel , de tant de nouveaux Etats membres . On peut alors envisager un regain d' intérêt pour les décisions prises au niveau national , réputées mieux convenir aux conditions locales . La Commission elle-même pourrait bien se trouver submergée par l' énorme tâche consistant à s' assurer du respect des 80 000 pages de l' acquis communautaire sur un territoire aussi vaste et divers . Ces deux évolutions parallèles pourraient à leur tour susciter des demandes de renationalisation des politiques actuellement menées depuis Bruxelles , la plus souvent citée étant l' agriculture . La Convention sur l' avenir de l' Europe ( notamment composée de représentants des Etats membres et des pays candidats ) cherche aussi des moyens d' enraciner le principe de subsidiarité avant la conférence intergouvernementale de 2004 . A lui seul , cet événement peut reconfigurer la structure de prise de décision ainsi que les compétences de l' Union , et ce qui découlera de cette situation particulièrement ingérable est loin d' être clair . Une Constitution européenne simplifiée permettrait peut-être aux citoyens et aux gouvernements nationaux de contester devant les tribunaux certains aspects des projets politiques européens qui outrepasseraient leurs compétences ou violeraient le principe de subsidiarité . Dans le même temps , il faut conserver à l' esprit deux autres éventualités . L' une d' elles est que le rôle de la Commission elle-même pourrait changer devant l' ampleur du défi bureaucratique que constitue l' élargissement . La Commission pourrait s' orienter davantage vers une activité de soutien ou de médiation dans l' évolution politique , en fondant son influence et son autorité sur sa position centrale , au carrefour de nombreux réseaux politiques et de communautés " épistémiques " . Un autre scénario pourrait voir la Commission , avec le concours des Etats membres et d' un large échantillon de groupements d' intérêts , élaborer , dans des domaines précis , un programme politique européen fondé sur le consensus et des mesures concertées prises simultanément à plusieurs niveaux ( local , national , européen ) . Cette " méthode ouverte de coordination " a été amorcée par les décisions prises lors de la rencontre au sommet des dirigeants de l' Union , à Lisbonne , en avril 2000 , et elle est en cours d' application dans des domaines politiques aussi variés que l' éducation , les retraites , l' exclusion , l' immigration ou la compétitivité industrielle . Dans quelle mesure cela représente -t-il une perte d' influence pour la Commission ou le Parlement ? Il est trop tôt pour le savoir . Mais il paraît évident que ce processus laisse des occasions aux gouvernements nationaux et aux groupes d' intérêts pour modifier l' agenda européen , en intervenant politique par politique . La structure du lobbying à Bruxelles . Le mot " lobby " est un terme vague , employé pour caractériser une nébuleuse d' intérêts cherchant à se faire représenter et à exercer une influence dans les centres de pouvoir où sont prises les décisions . Dans le cas de Bruxelles , la pratique du lobbying est particulièrement opaque : les règles régissant les rapports entre les groupes de pression et ceux qui la subissent sont très imprécises , et la frontière entre les organisations pratiquant le lobbying et les structures gouvernementales sont souvent ténues . Le mot renvoie ici à tous les acteurs du processus décisionnel autres que les institutions européennes elles-mêmes , ce qui comprend les intérêts sectoriels , les groupes défendant des convictions et , parfois , les gouvernements de pays tiers . Il serait trop facile de circonscrire le phénomène du lobbying européen aux 800 et quelques fédérations paneuropéennes d' associations et/ou d' entreprises nationales spécialistes des arcanes de la vie politique , qui forment une sorte de club fermé d' interlocuteurs dialoguant avec les institutions européennes . En réalité , des centaines d' autres entités sont régulièrement de la partie : cabinets d' avocats , agences comptables , cabinets de conseil en gestion , services de consultants en politique et/ou en affaires publiques , associations fédératives nationales , associations commerciales et élus locaux . A Bruxelles , il existe aujourd'hui environ 1 800 organisations qui s' adonnent au lobbying , employant près de 10 000 personnes . Il y a vingt ans , elles étaient au nombre de 400 pour environ 3 000 employés . Ces organisations ne sont pas toutes présentes dans tous les Etats de l' Union , certains de leurs membres ne travaillent pas sur son territoire , et une large minorité d' entre elles n' ont pas leur siège à Bruxelles . Certaines associations industrielles n' acceptent pas , parmi leurs membres , les producteurs japonais installés en Europe ( comme les constructeurs automobiles ) , tandis que d' autres sont très influencées par les investisseurs étrangers ( les fabricants d' appareils électriques , par exemple ) . En outre , le lobbying prend de plus en plus la forme de coalitions temporaires et de structures ad hoc constituées en vue de réagir à des propositions ou des événements particuliers . Il y a ensuite les activités des gouvernements , notamment les gouvernements non européens , qui , par le biais de la diplomatie ou de démarches plus caractéristiques du lobbying , tentent de persuader les décideurs européens de prendre en compte leurs intérêts . En réalité , n' importe qui peut faire du lobbying auprès de l' Union , mais peu de gens savent comment s' y prendre . Le lobbying n' est pas véritablement réglementé , bien que la Commission tienne à jour sa propre liste d' informations sur quelque 700 organisations . Mais cette liste omet les intermédiaires rémunérés par de nombreux groupes d' intérêts ainsi que les organisations éphémères issues d' un Etat membre n' ayant pas d' affaires régulières à Bruxelles . Le Parlement européen essaie aussi de limiter le nombre de laissez-passer accordés aux membres des groupes de pression ( et qui constituent un avantage pour ceux qui travaillent régulièrement à Bruxelles ) afin d' éviter aux députés d' être contraints de consacrer trop de temps à l' examen de telle ou telle préoccupation dans le cadre de leurs activités parlementaires . La Commission et le Parlement européens ont aujourd'hui des règlements stricts interdisant à leurs membres ou à leur personnel de recevoir des cadeaux importants , mais le Parlement , depuis le rapport Ford de 1996 , semble rencontrer des difficultés à s' assurer que tous les députés suivent scrupuleusement ce nouveau code de conduite . Deux groupes de consultants en lobbying ont rédigé des chartes déontologiques à l' intention de leurs membres , mais seule une petite douzaine d' entreprises les ont paraphées , cette décision étant totalement facultative . Tout le reste de l' activité des lobbies n' est pas réglementée à Bruxelles , si ce n' est peut-être indirectement du fait du statut légal des organisations en Belgique qui les laisse libres de décider pour elles-mêmes . Depuis le milieu des années 1980 , les universitaires ont fait des efforts croissants pour comprendre l' essence et le degré d' influence des organisations pratiquant le lobbying à Bruxelles . Les théoriciens de l' intégration considèrent depuis longtemps les groupes d' intérêts comme un indicateur fondamental du caractère des institutions européennes : soit leur influence est faible , et le cadre institutionnel européen peut être considéré comme intergouvernemental ; soit elle est importante , et ce cadre se rapproche alors du modèle fédéraliste ou fonctionnaliste . Ce débat , qui agite la communauté universitaire , est loin d' être clos , mais il semble que les opinions s' articulent autour de deux pôles . Le premier est le pôle " intergouvernemental libéral " , aujourd'hui plus enclin à accepter que certaines organisations non gouvernementales ( ONG ) aient du pouvoir au sein du système européen . L' autre est le pôle " néo-institutionnel " , qui soutient que les Etats membres , les groupes d' intérêts et les institutions européennes interagissent et s' influencent mutuellement . L' émergence , dans les années 1990 , de la nouvelle école institutionnaliste a principalement découlé d' études de cas sur la prise de décision au niveau politique et individuel . Ces études montraient que des groupes d' intérêt sectoriels ou sous-sectoriels - qu' ils soient ancrés dans le monde de l' entreprise ou axés sur la promotion de convictions - pouvaient jouer , et jouaient effectivement , un rôle important dans le processus de prise de décision de la Communauté / Union européenne . Ce n' est que lorsqu' il s' agit de questions " politiques de la plus haute importance " que les groupes d' intérêt sont plus ou moins exclus du processus de prise de décision . En d' autres termes , lorsqu' il s' agit de questions techniques , non politisées et de peu d' importance , les ONG peuvent exercer une grande influence . Mais , plus une question devient politique et met en jeu des intérêt gouvernementaux , plus il sera difficile pour les groupes d' intérêt de contrôler le débat , sans parler d' influencer les résultats . Quand la Communauté européenne est devenue l' Union européenne et que de nouveaux traités ont étendu les compétences de ses institutions , une autre évidence s' est faite jour : la structure du lobbying avait changé . Dans les années 1960 , ces activités concernaient essentiellement l' agriculture et l' alimentation ; les intérêts sociaux et environnementaux commencèrent à s' organiser collectivement seulement dans les deux décennies suivantes ; la perspective du marché unique fit naître de nouvelles préoccupations commerciales en mal de représentation ; les traités de Maastricht et d' Amsterdam incitèrent à la promotion de nouveaux intérêts recouvrant le social , la santé , l' éducation , la justice et l' immigration . Globalement , plus l' Union est devenue un acteur international fort et cohérent ( sur les questions commerciales et environnementales , par exemple ) , plus le dialogue institutionnel s' est extrait des zones périphériques du pouvoir à Bruxelles comme dans l' ensemble de l' Union . Ainsi , ces dernières années , le Trans-Atlantic Business Dialogue ( TABD , " Dialogue transatlantique des milieux d' affaires " ) , né il y a à peine dix ans , est devenu l' un des plus importants forums représentant l' " opinion étrangère " à Bruxelles . Il n' est pas non plus possible de prétendre que les opinions des milieux d' affaires des Etats-Unis ont été , par le passé , relativement sous-représentées auprès des institutions européennes , dans la mesure où l' on s' accorde à dire que le comité européen de la Chambre de commerce américaine ( AMCHAM ) est l' un des lobbies les plus efficaces sur la scène bruxelloise . En revanche , on peut affirmer qu' étant donné les intérêts économiques concurrents de l' Union et des Etats-Unis en matière de commerce international , ajoutés à une traditionnelle propension à se brouiller sur certaines questions , un nouveau forum était nécessaire pour améliorer la compréhension mutuelle et insister sur les intérêts stratégiques que partagent les deux partenaires . La souplesse et l' opportunisme caractérisant la pratique du lobbying à Bruxelles doivent aussi être analysés . Le lobbying ne s' y déploie pas dans un cadre bien établi , et les structures dans lesquelles la représentation des groupes d' intérêt est préalablement déterminée ( comme le Comité économique et social ou les centaines de comités consultatifs officiels ) ne sont souvent pas les plus efficaces . Si , dans le dispositif institutionnel actuel , l' expression de certains intérêts particulièrement importants n' est pas possible , il est facile de créer de nouvelles structures ou de trouver de nouveaux canaux pour faire entendre ces points de vue . Le plus important est de savoir comment jouer la partie politique à Bruxelles . Les organisations qui y sont établies doivent savoir ce qu' il faut qu' elles fassent . Etant donné la qualité des systèmes de communication modernes , les organisations et les professionnels du lobbying qui réussissent n' ont pas toujours besoin d' être présents à Bruxelles . Un déficit de compétences ou de connaissances dans une campagne précise de lobbying peut toujours être comblé par le recours à l' univers hautement concurrentiel des cabinets de conseil . Une étude plus approfondie des styles de lobbying sera entreprise plus loin . Au coeur du processus décisionnel bruxellois ( qui articule évidemment un niveau national , et parfois aussi infra-national ) , on trouve le besoin de la Commission de recueillir des informations pour pouvoir formuler des propositions pertinentes dans tous les secteurs et suivre les événements dans les domaines politiques qui l' intéressent . Ces renseignements sont fréquemment indisponibles et ne peuvent parfois pas être fournis par les gouvernements des Etats membres . La Commission se tourne donc inévitablement vers les organes représentatifs afin d' obtenir informations et opinions pouvant orienter son action . C' est là le fondement de la relation symbiotique entre la Commission et les groupes d' intérêts , qui , à leur tour , se renseignent sur les opinions et les projets de la Commission afin de pouvoir y répondre rapidement ou même les anticiper . L' état de dépendance mutuelle où se trouvent ces deux groupes d' acteurs a été renforcée par l' hégémonie du Conseil des ministres dans la plupart des grandes décisions de l' Union . Mais un partenariat solide entre la Commission et des groupes d' intérêts bien organisés au niveau européen peut permettre parfois de véritablement contourner le Conseil , ou du moins de marginaliser un Etat membre qui exprimerait de vigoureuses objections . Ainsi , l' alliance , à la fin des années 1970 , entre la Commission et EUROFER ( Association européenne de la sidérurgie ) a permis de contrer les réserves allemandes à propos d' une intervention sur le marché de l' acier , alors très touché par la crise . Et l' enthousiasme des banquiers français , à la fin des années 1970 , en faveur de la libéralisation de leur environnement économique intérieur l' emporta grâce au concours de la Commission et des institutions européennes , et malgré les objections de Paris . Depuis 1986 , il y a eu plusieurs changements importants dans le système décisionnel de la Communauté / Union européenne , lesquels ont aussi influencé la nature du lobbying sur beaucoup de points . Les quatre traités , ou amendements aux traités existants , conclus par les Etats membres depuis la conférence intergouvernementale de Luxembourg , en 1985 , ont consacré la généralisation progressive du recours au vote à la majorité qualifiée au Conseil des ministres , ce qui a rendu du pouvoir à la Commission et au Parlement . Le rôle de celui -ci a été élargi depuis l' institution du suffrage universel direct en 1979 , mais le changement le plus important a été l' adoption de la procédure de codécision ( instaurée par le traité de Maastricht ) qui donne au Parlement des prérogatives décisionnelles communes à celles du Conseil des ministres dans un nombre croissant de domaines politiques ( pour une grande partie des politiques relatives au marché unique et à l' environnement , par exemple ) , la Commission intervenant parfois comme médiateur en cas de désaccord entre le Conseil et le Parlement . Dans l' Union , toute prise de décision se fait dans le cadre d' un règlement très complexe qui émane des fondements contractuels et législatifs relatifs au secteur en question et au type de décision devant être pris . On dit qu' il existe au moins vingt-trois structures décisionnelles différentes en exercice au sein de l' Union , et les stratégies de lobbying doivent ainsi s' adapter à la fois à l' état du règlement et à l' équilibre des forces politiques en présence . Selon les domaines , la Commission ou le Conseil peuvent prédominer , tandis que le Parlement peut bloquer les progrès sur certaines questions et qu' un recours devant la CJCE en suivant la procédure légale peut se révéler très efficace . Ceux qui veulent véritablement promouvoir leurs intérêts à Bruxelles avec des chances de succès doivent ainsi élaborer une stratégie spécifique pour chaque question politique et chaque étape du processus décisionnel . Les styles de lobbying Le système de prise de décision au sein de l' Union est un mélange unique de styles de lobbying , où coexistent des cultures politiques très diverses , de sources continentales et anglo-saxonnes , combinées aux contraintes d' une configuration institutionnelle particulière . Confrontées à un sujet précis , la plupart des organisations de lobbying doivent d' abord déterminer le degré auquel elles souhaitent s' investir . Très souvent , ces organisations sont réticentes ou inaptes à consacrer beaucoup de ressources à cette activité , ce qui confère un avantage à celles qui s' en donnent la peine . En général , il convient de suivre quelques règles importantes . Trouvez un Euro-groupe ( association commerciale , corps professionnel ou un équivalent ) reflétant vos préoccupations . S' il n' en existe aucun , formez -en un qui rassemble des entreprises et des organisations provenant ( de préférence ) de plusieurs Etats membres , ce qui apportera beaucoup de crédit à votre cause auprès de la Commission . Les décideurs européens veulent savoir si vos points de vue représentent un véritable courant d' opinion plutôt que les intérêts commerciaux d' une entreprise particulière . Exprimez vos vues à temps . La Commission , dans la mesure où elle détermine le calendrier des événements , est certainement l' endroit par où commencer . Il est préférable de l' approcher avant que la Direction générale ( DG ) concernée ne se forge ses propres idées . A cette fin , les organisations doivent avoir à la fois une bonne connaissance de l' évolution de la scène politique bruxelloise et des contacts bien placés . Cela nécessite une certaine forme de représentation à Bruxelles ( directement ou par procuration ) et le développement régulier d' un réseau de relations . Repérez les acteurs -clefs et faites pression sur eux . La Commission , par exemple , n' est pas un monolithe mais une bureaucratie célèbre pour son morcellement . Ainsi , si la personne responsable d' une DG constitue une cible évidemment importante , d' autres voies peuvent se révéler fructueuses pour le lobbying . Le Commissaire et son cabinet rattachés à la DG en question doivent être approchés , ainsi que toute autre DG concernée par le sujet ( parfois , plusieurs le sont ) . De cette façon , tout l' environnement politique dans lequel travaille le responsable de la DG devrait se trouver sous influence . Il existe encore d' autres personnes dignes d' attention , comme les membres du comité approprié du Parlement européen , ceux de l' ECOSOC et ceux du Comité des régions . Il faut identifier précisément la chaîne décisionnelle pour le sujet qui vous intéresse , et chaque maillon doit faire l' objet d' un travail de lobbying approprié . Cherchez des alliés là où c' est possible . A Bruxelles , l' univers du lobbying est très actif et regroupe beaucoup de gens . Si les positions d' une organisation semblent assez faibles , ses membres doivent trouver d' autres alliés dans la nébuleuse du lobbying . Il est clair qu' avoir dans son camp des acteurs de premier plan , comme la " Table ronde des industriels européens " ( ERTI , Europe Round Table of Industrialists ) ou le comité européen de l' AMCHAM , peut se révéler fort utile . C' est pourquoi il faut aussi les approcher et tenter de les influencer , de même que toute association fédérative , telle l' Union des confédérations de l' industrie et des employeurs d' Europe ( UNICE ) . Par ailleurs , il peut se révéler nécessaire de former un groupe dédié à un objectif unique ou bien de rassembler une coalition aux préoccupations plus vastes qui donnera davantage de poids aux positions défendues par votre organisation . Mais il se peut que cette option exige l' abandon de certaines de vos revendications dans le cadre de concessions politiques . La profusion excessive de groupes de pression est un vrai problème à Bruxelles . Dès lors , les lobbyistes sérieux doivent souvent s' associer pour être sûrs de se faire entendre . Exercez des pressions à différents niveaux . L' Union est un parfait exemple de système de gouvernance à plusieurs strates dans lequel les institutions politiques d' un niveau interagissent avec et influent sur les échelons supérieurs et inférieurs . Etant donné la prééminence du Conseil des ministres , il est souvent essentiel d' influencer les positions des gouvernements nationaux . Le plus efficace est de le faire dans les capitales des pays membres , par le biais d' entreprises ou d' organisations locales . De plus en plus , cela doit être fait en même temps qu' auprès des acteurs présents à Bruxelles et Strasbourg dont on doit s' assurer le soutien . Tout cela nécessite du temps , de l' argent et la mise en place d' un réseau de relations . Etant donné les pouvoirs décisionnaires accrus du Parlement européen , il n' est pas judicieux de vouloir influencer les députés européens trop tardivement , bien que cela puisse se révéler une bonne manoeuvre dilatoire destinée à faire ressortir un aspect non encore considéré ou identifié d' une proposition . Souvent , la synchronisation est un facteur essentiel , notamment lorsqu' il s' agit de s' orienter à travers la complexité des calendriers électoraux des Etats membres , ce qui signifie que le laps de temps dont dispose le Conseil pour prendre une décision délicate est assez court . La crédibilité est un facteur essentiel de succès . Elle peut s' acquérir de plusieurs façons : en démontrant la représentativité de votre cause , en fournissant un service de qualité en tant que lobbyiste ( en proposant des informations et des analyses pertinentes , en comprenant les règles du jeu politique , les contraintes et les potentialités des traités fondamentaux , et en arrivant avec des idées solides qui pourront aider les décideurs européens à trouver un compromis ) . Cette crédibilité peut encore être renforcée si vous trouvez des alliés improbables parmi les groupes d' intérêt " adverses " ( comme dans le cas du dialogue de Shell avec Greenpeace ) . Le lobbying et la politique étrangère Au niveau de l' Union , les efforts de lobbying se sont traditionnellement et principalement concentrés sur des questions politiques intérieures , notamment celles touchant au marché unique et au développement du commerce . Le commerce a cependant des dimensions à la fois intérieures et extérieures , et dans la mesure où les institutions européennes cherchent à réglementer ou autoriser les relations commerciales entre des pays tiers et le marché intérieur européen , ces relations comportent une dimension de politique étrangère . L' Union se rend parfois coupable de ne pas reconnaître pleinement les implications extérieures de ses décisions politiques intérieures , l' exemple récent le plus évident en étant le fameux Livre blanc de 1985 sur l' achèvement du marché intérieur qui omit totalement de les aborder . Cet aspect quelque peu introverti d' une grande partie de la politique de l' Union rend d' autant plus important pour les acteurs extérieurs ( gouvernements et entreprises ayant des intérêts sur le marché européen ) le fait d' être représentés à Bruxelles et d' exercer des pressions sur les décideurs de l' Union au niveau national , en plus du niveau européen . Il n' est pas exagéré d' affirmer que les gouvernements des pays tiers sont devenus partie intégrante de l' infrastructure du lobbying européen . Ce type de lobbying excède désormais les questions liées au commerce depuis que les second et troisième piliers des compétences de l' Union , spécifiés dans le traité de Maastricht et approfondis dans le traité d' Amsterdam , sont d' actualité . Il se peut que le système décisionnel intergouvernemental soit quelque peu différent , mais l' intérêt des pays tiers pour les domaines politiques couvert par la PESC et la coopération en matière de justice et d' affaires intérieures ( JAI ) est évident . Cet intérêt des pays tiers peut se manifester dans un cadre strictement bilatéral , lorsque le gouvernement ou son territoire sont directement concernés ; ou bien , dans un cadre plus collectif , lorsque , par exemple , un accord international est en cours de négociation sur des sujets tels que le terrorisme , le blanchiment d' argent , le trafic de stupéfiants ou la création d' une Cour pénale internationale . Il est peut-être utile d' insister dès maintenant sur le fait que la politique étrangère est un concept plutôt large et mal délimité . Le terme est employé ici pour caractériser toute politique menée par un gouvernement national en relation avec d' autres pays ou des organisations internationales . Il existe en permanence plus de 200 groupes de ce type en activité . D' où l' intérêt de beaucoup de gouvernements de pays tiers pour les décisions de la Communauté européenne bien avant que les années 1990 ne donnent jour aux traités de Maastricht et d' Amsterdam . L' Union est la plus grande entité commerciale du monde , et ses décisions sont d' une grande importance pour la plupart des pays impliqués dans le commerce international . La Communauté européenne n' a pas craint non plus d' établir des liens entre la politique commerciale et la politique étrangère . Ce fut clairement le cas en 1982 , lorsqu' elle décida d' un embargo à l' encontre de tous les biens provenant d' Argentine , après l' invasion , par ce pays , des îles Malouines . En 1986 , elle menaça aussi de suspendre son accord commercial avec la Syrie en réponse aux éléments , dans l' affaire Hindawi , attestant que la Syrie avait hébergé en connaissance de cause une organisation terroriste ainsi que les véritables auteurs d' une tentative d' attentat contre un avion de ligne israélien à l' aéroport de Heathrow . Les forces de la mondialisation ont étendu le champ d' action de la politique étrangère au commerce des services et des biens , aux marchés financiers , à la criminalité internationale , au terrorisme , etc. Du fait de la croissance rapide du commerce mondial depuis 1945 , les préoccupations de la politique étrangère sont devenues plus économiques et commerciales . En 1982 , l' Administration Reagan se soucia des implications stratégiques qui découlaient , pour l' Europe occidentale , de la construction d' un pipeline destiné à l' importation de ressources énergétiques russes sur le marché européen . La Maison-Blanche craignait qu' une dépendance énergétique si importante à l' égard de l' Union soviétique entame la capacité de l' Europe à répondre vigoureusement à une menace sécuritaire émanant du bloc communiste . Les Etats-Unis menacèrent donc de mettre sur liste noire toute entreprise américaine ou étrangère fournissant des pièces ( voire des services ) pour la construction de ce pipeline , les entreprises ainsi mises à l' index étant exclues des appels d' offre de la Maison-Blanche et ne pouvant obtenir de contrat privé avec les entreprises américaines . La Communauté européenne annonça des mesures de représailles commerciales au cas où la menace serait suivie d' effets , et une entreprise au moins , British Aerospace , se trouva au banc des accusés pour avoir ignoré l' embargo . La position des Etats-Unis suscita des critiques très virulentes dans le monde entier et fut d' ailleurs rapidement abandonnée . La réglementation du régime d' importation des bananes de l' Union Peu d' aspects de la politique de l' Union auront suscité de débats plus douloureux et d' activités de lobbying plus intenses que la question de la réglementation du régime européen d' importation des bananes . Des gouvernements du monde entier ainsi que des groupements d' intérêt économique et des ONG ont passé plus d' une décennie à faire pression sur l' Union et à porter leurs revendications devant la CJCE , l' Accord général sur les tarifs douaniers et le commerce ( General Agreement on Trade and Tariffs , GATT ) et l' Organisation mondiale du commerce ( OMC ) . Les résultats et conséquences des décisions de l' Union ont été évoqués de façon dramatique : le libre-échange contre le commerce équitable ; la survie économique de quelques micro-Etats des Caraïbes ; l' obligation morale des ex-puissances coloniales européennes de soutenir leurs anciennes colonies ; l' incitation à la culture de drogues illicites comme seule alternative viable à la culture de bananes ; la capacité des multinationales américaines à adapter les règles commerciales à leur avantage sans considération pour les autres , notamment avec l' aide de Washington . Le problème du régime d' importation des bananes date des débuts de la CEE : la signature du traité de Rome fut retardée de plusieurs jours pendant qu' un protocole final était adopté qui autorisait l' Allemagne à importer des bananes sans taxes ( et donc peu chères ) , tandis que la France et les autres pays pouvaient garantir l' accès à leur marché à leur anciennes colonies et aux DOM-TOM , à des prix plus élevés . Cet accord constituait une dénégation du principe de marché unique . Et lorsque d' autres Etats , comme la Grande-Bretagne , rejoignirent la Communauté / Union européenne , l' accord fut étendu , puis inclus dans la Convention de Lomé par laquelle l' Union accordait un accès préférentiel au marché unique européen pour de nombreux produits des pays d' Afrique , des Caraïbes et du Pacifique ( ACP , aujourd'hui au nombre de 77 ) , ainsi qu' une aide financière et alimentaire , un partage de compétences et des systèmes de stabilisation des recettes d' exportation . Le fondement de ces dispositions complexes fut remis en question par le Livre blanc sur l' achèvement du marché intérieur , publié par la Commission en 1985 , et en particulier par la promesse d' abolir tous les contrôles aux frontières au sein de la Communauté . Les quotas et les taxes d' importation différenciées , qui avaient permis aux marchés nationaux voisins de définir les conditions du commerce de la banane complètement différemment les uns des autres , commencèrent à devenir inutiles et inopérantes . Il fallait soit mettre en place un marché libre de la banane au sein de l' Union ( avec pour effet l' éviction des producteurs européens locaux et de beaucoup de producteurs antillais ) , soit concevoir un régime d' importation nouveau permettant de concilier de nombreux intérêts contradictoires . Plusieurs grands Etats européens s' étant publiquement prononcés en faveur de la seconde option dans le but de protéger leurs intérêts locaux et ceux de leurs ex-colonies , il était évident , dès 1986 , que la solution du marché libre ne serait pas retenue et qu' un nouveau régime d' importation devait être élaboré . Cela ne fut réalisé qu' en 1993 , six mois après l' entrée en vigueur du nouveau marché unique , tellement il fut difficile de trouver un accord entre les parties . Mais ce nouveau régime ne devait pas durer longtemps . Les intérêts impliqués dans le processus de lobbying sur cette question étaient à la fois puissants et divers . De toute évidence , les producteurs européens locaux des Açores , des Canaries , de Crète et de Laconie avaient trouvé une oreille attentive auprès de leurs gouvernements respectifs ( le Portugal , l' Espagne et la Grèce ) , tous représentés au Conseil des ministres , lequel devait donner son aval à la nouvelle réglementation sur la banane . Les producteurs martiniquais et guadeloupéens , ainsi que ceux de beaucoup d' anciennes colonies , pouvaient compter sur la bienveillance du gouvernement français , soucieux de les aider . Les producteurs des anciennes colonies et dépendances britanniques des Caraïbes et du Pacifique trouvèrent un gouvernement britannique tout aussi disposé à les assister . Les Italiens ne tenaient pas à délaisser les intérêts des producteurs somaliens , autre ancienne colonie . Par ailleurs , les gouvernements caribéens constituèrent , avec les principales entreprises cultivant la banane sur leur territoire , une association , la CBEA ( Caribbean Banana Exporters Association ) . Parallèlement , les producteurs d' Amérique latine adoptèrent une attitude discrète mais comptaient sur leurs gouvernements ( la plupart des Etats d' Amérique centrale , la Colombie et l' Equateur ) pour défendre leur point de vue . Ils se déclaraient en faveur d' un respect rigoureux des principes du libre-échange - ce que l' Union est normalement disposée à accepter - afin de pouvoir tirer pleinement bénéfice de leurs faibles coûts de production , avantage qu' ils avaient sur les autres pays ACP , notamment caribéens . La Maison-Blanche entra aussi dans la partie à la demande des multinationales américaines ( notamment Chiquita / United Brands ) une fois qu' il fut évident que l' Union avait décidé de soutenir un régime d' importation de bananes qui pouvait être en désaccord avec les règles du GATT ( et plus tard de l' OMC ) . Chiquita et son directeur général de l' époque , Carl Lindner , ont ouvertement admis avoir octroyé d' importantes donations aux Partis démocrate et républicain afin de s' assurer que leur voix serait entendue tout au long du débat sur le régime européen d' importation des bananes dans les années 1990 . Voilà pour les acteurs gouvernementaux . Les acteurs industriels adoptèrent plusieurs approches différentes tandis que les problèmes émergeaient . Parmi les entreprises productrices , certaines choisirent de se battre ouvertement en association étroite avec leur gouvernement ( Chiquita et l' Administration des Etats-Unis , Noboa et le gouvernement équatorien ) ; d' autres décidèrent de se prémunir et de développer des stratégies commerciales leur permettant de résister aux conséquences les plus prévisibles ( Dole , Del Monte et l' anglo-irlandais Fyffes ) ; tandis que d' autres encore furent tentées de laisser les gouvernements des pays dans lesquels elles cultivaient la banane se charger de l' effort politique ( à nouveau Dole et Fyffes ) . A l' autre bout de la chaîne , les entreprises commercialisant les bananes dans l' Union étaient représentées par leur association commerciale ( l' European Community Banana Trade Association , ECBTA ) , mais ne semblent pas avoir influencé d' importantes décisions sur la question . En effet , la nature de leur association changea durant la période du fait du rachat des plus importantes filières de distribution de fruits par les principaux producteurs et convoyeurs de bananes - une conséquence évidente de l' intégration verticale du marché du secteur , rendue nécessaire par l' intensification de la concurrence . Des ONG ont également manifesté un vif intérêt pour ce débat , pour l' essentiel des organisations humanitaires et caritatives , comme Oxfam ( Oxford Committee for Famine Relief ) , des groupes impliqués dans le développement des pays du Tiers-Monde , et beaucoup d' organisations confessionnelles . Leurs efforts conjoints ont permis de mobiliser des centaines de milliers de gens qui ont protesté auprès de leurs gouvernements à propos de la situation critique dans laquelle se trouvaient les producteurs de bananes des pays ACP , attirant l' attention des médias sur la question du commerce des bananes : de nombreux documentaires télévisés et campagnes pétitionnaires s' ensuivirent ! L' histoire résumée du régime d' importation des bananes de l' Union Arrivés à ce point , il nous faut résumer l' histoire et l' évolution du conflit commercial autour de l' importation des bananes dans l' Union . Cette histoire est longue et complexe . Les origines du conflit commercial sur la banane remontent à la création de la CEE . La signature du traité de Rome , en mars 1957 , fut retardée de quatre jours tandis qu' un accord était recherché sur le protocole très contesté concernant la banane . Celui -ci accorda à la République fédérale d' Allemagne ( RFA ) une exemption du tarif extérieur commun pour les bananes que tous les autres Etats membres étaient tenus d' appliquer . Le consommateur allemand a joué un rôle important tout au long de ce débat en persuadant son gouvernement de recourir à tous les moyens possibles pour maintenir l' approvisionnement du marché allemand en bananes à bas prix . Comme on peut s' y attendre , les Allemands détiennent le record de consommation de banane par habitant pour toute l' Union . Et l' Union dans son ensemble représente 30 % en volume du commerce mondial de la banane ( 45 % en valeur ) . Quand fut lancé , en 1985 , le programme destiné à achever le marché unique , il devint tout à fait clair que la fragmentation délibérée du marché de la CEE résultant de l' organisation du commerce de la banane ne pouvait plus durer , du fait de l' élimination des contrôles aux frontières à l' intérieur de la Communauté . Un nouveau régime d' importation des bananes commun à l' ensemble de la Communauté devait être élaboré , comme dans le cas des voitures neuves . L' article 115 du traité de la CEE fournissait à chaque Etat membre la possibilité d' adopter un régime d' importation des bananes spécifique puis de le faire valider et appliquer par la Communauté . Les séries de conventions de Yaoundé et de Lomé promettaient , dès 1991 , qu' aucun pays ACP ne serait " placé , en ce qui concerne ses marchés traditionnels et ses avantages sur ces marchés , dans une position moins favorable que par le passé ou qu' aujourd'hui " . Ainsi , tout était prêt pour de longues et classiques négociations au sein de la Communauté , lesquelles débouchèrent sur la décision , prise en 1993 , d' introduire un régime d' importation de bananes commun , se caractérisant par un système de quota pour l' importation des " bananes dollars " ( initialement établi à 2 millions de tonnes ) et un tarif extérieur commun de 20 % . Douze Etats ACP continuaient à bénéficier d' un accès détaxé au marché à hauteur de 620 000 tonnes de bananes par an . La Commission devait conserver un quota discrétionnaire qu' elle pouvait répartir librement tandis que le marché de la banane continuait son expansion . Les importations de bananes dollars étaient cependant contrôlées par un système de licences uniquement accordées aux importateurs promettant de vendre des bananes provenant des pays ACP ou d' Europe . On prévoyait que le nouveau système accorderait 30 % des licences d' importation ( en volume de ventes ) aux négociants ayant commercialisé des bananes en provenance des pays ACP traditionnels , 60 % aux négociants ayant commercialisé des bananes dollars et 10 % aux nouveaux venus sur le marché et aux négociants en bananes cultivées en Europe . Le système est administré par le Comité de gestion de la banane de l' Union et par la Commission . Le nouvel accord fut entériné avec beaucoup de difficulté par un vote à la majorité qualifiée , le changement d' avis du Danemark se révélant décisif . Cet accord fut violemment attaqué par l' Allemagne qui le contesta , sans succès , devant la CJCE , l' accusant d' être contraire aux principes économiques garantis par le traité de Rome . Une autre attaque fut lancée dans le cadre du GATT par les Etats-Unis et plusieurs producteurs de bananes dollars d' Amérique latine . La décision du GATT sur le nouveau régime d' importation conduisit à une augmentation du quota de bananes dollars à 2 , 1 millions de tonnes . Cela signifiait qu' avec la fin du GATT , en 1994 , la procédure de résolution du litige sous l' égide de l' OMC devait repartir de zéro , cette fois à l' instigation de l' Equateur et des Etats-Unis . En 1997 , l' OMC se prononça contre le régime européen d' importation de bananes , le déclarant discriminatoire à l' encontre des producteurs d' Amérique latine . L' Union introduisit des modifications dans son régime d' importation qui entrèrent en vigueur en janvier 1999 , mais un panel de l' OMC décida en avril 1999 que , même modifié , ce régime perpétuait cette discrimination . Avant que l' Union ait proposé une réponse à cette dernière décision , le gouvernement des Etats-Unis introduisait un système de sanctions commerciales révisables ( " carrousel approach " ) d' un montant de 200 millions de dollars contre les Etats européens , notamment ceux favorables au régime européen d' importation des bananes . L' Union déclara que les Etats-Unis enfreignaient les règles de l' OMC en agissant de la sorte , mais il était évident que la Maison-Blanche était alors exaspérée par les retards européens . En janvier 2001 , Chiquita , l' un des principaux producteurs et négociants de bananes dollars , intenta un procès pour dommages et intérêts à hauteur de 525 millions de dollars ( soit , à l' époque , 564 millions d' euros ) , invoquant les pertes subies depuis que le nouveau régime avait été mis en place en janvier 1999 . En avril 2001 , cependant , l' Union semblait avoir trouvé un compromis avec les Etats-Unis , se fondant sur une révision du système de licences afin de favoriser les fournisseurs traditionnels du marché européen , au grand dam d' un autre producteur et négociant américain , Dole , et du gouvernement équatorien . La question du commerce de la banane illustre bien les forces et faiblesses institutionnelles de l' Union . Les divisions au sein du Conseil des ministres furent profondes , et le règlement du conflit par l' application du vote à la majorité qualifiée obligea simplement la minorité dissidente à rechercher , sans succès , un secours du côté de CJCE . Dans cette affaire , la Commission eut la malchance d' être emmenée par la DG VI ( celle de l' agriculture ) qui prend toujours fait et cause pour les producteurs plutôt que pour les consommateurs . Mais faire évoluer la position adoptée par la DG VI fut un véritable casse-tête " acronymique " de directions générales , chacune avec son lot d' organisations de lobbying - la DG I ( relations extérieures ) , la DG III ( affaires industrielles ) , la DG VIII ( développement et coopération ) , la DG XV ( marché intérieur ) , la DG XVI ( affaires régionales ) - auxquelles il faut ajouter le Comité européen d' administration de la banane . C' est donc toute une superposition de problématiques qu' il fallut démêler . Les pays en développement ( PED ) étaient profondément divisés en deux camps : les pays ACP et les pays non ACP . Les principes du marché unique étaient en jeu , favorisant la consolidation du régime d' importation de la banane au niveau de l' Union ; mais la libéralisation de l' accès à ce marché nouvellement intégré devait être mis en balance avec les politiques protectionnistes destinées à préserver le niveau de vie de gens comptant parmi les plus pauvres du monde . Sur cette question , les lignes de clivage traditionnelles entre les Etats pratiquant le libre-échange et ceux plus enclins au protectionnisme se désagrégèrent , le Royaume-Uni adoptant un point de vue plus protectionniste ( soutenu par la France , l' Italie et les Pays-Bas ) en raison des intérêts des PED . Finalement , et c' est peut-être le plus important , l' ensemble des relations de l' Union avec les Amériques furent menacées par ce conflit commercial : entre l' Union et les Etats-Unis ( relations qui se dégraderont encore sur d' autres questions ) , entre les Etats caribéens et ceux d' Amérique centrale , entre ces derniers et les Etats d' Amérique du Sud ( notamment l' Equateur ) , enfin entre les Etats radicaux d' Amérique centrale , comme le Honduras , et des Etats plus modérés , comme le Costa Rica . Le programme Auto-Oil L' acceptation par l' Union , en 1997 , des propositions du protocole de Kyoto sur la réduction des émissions de gaz à effets de serre a eu des répercussions pour les constructeurs automobiles et les compagnies pétrolières présents sur le marché européen . L' Union a accepté de réduire ses émissions de 8 % d' ici à 2010 par rapport au niveau de 1990 . Mais ces réductions devront être plus importantes dans certains pays ( 12 % pour le Royaume-Uni ) , tandis que d' autres ( l' Irlande ) seront autorisés à accroître leur niveau d' émissions ( jusqu'à 13 % ) . Le protocole de Kyoto affecte les intérêts des entreprises en Europe , alors qu' elles doivent déjà faire face à d' intenses pressions réglementaires de Bruxelles pour parvenir à une allocation plus efficace des ressources , une pollution automobile plus faible et un meilleur recyclage . Ces pressions reflètent les préoccupations écologiques d' un grand nombre d' Etats membres ( six d' entre eux sont considérés comme constituant l' avant-garde de la politique environnementale ) et du Parlement européen . Les deux principaux groupements d' intérêt concernés et menacés ( les constructeurs automobiles et les compagnies pétrolières , représentés par des fédérations paneuropéennes telles que l' Association des constructeurs européens d' automobile ( ACEA ) et l' Association de l' industrie pétrolière européenne ( EUROPIA ) ) ne se sont pas laissé imposer séparément un agenda déterminé par les institutions européennes selon des critères politiques plus qu' industriels . Ils ont au contraire annoncé , en 1996 , qu' ils feraient des propositions communes pour aider à réaliser les objectifs environnementaux de l' Union , puis ceux définis à Kyoto en matière d' émissions de gaz automobile d' ici à 2008 - 2012 , le tout en concertation avec la Commission et sous réserve de l' approbation finale du Conseil des ministres et du Parlement . D' autres accords ont aussi été conclus avec les constructeurs automobiles japonais et coréens . Malgré les appréhensions de beaucoup de députés européens , cette approche a été acceptée et le premier programme Auto-Oil voté - et ce , en dépit de désaccords ouverts entre les deux industries concernées sur la façon de répartir le fardeau de la réduction des émissions de gaz d' origine automobile . Des ONG écologistes prétendent aussi que ces deux industries ont édulcoré les exigences politiques de l' Union . Un second programme Auto-Oil est actuellement en cours de négociations , avec une plus grande harmonie entre les deux secteurs et une plus grande implication des ONG . Ce processus soulève d' importantes questions touchant la légitimité démocratique et la nature de l' autorité habilitée à élaborer , appliquer et évaluer une politique publique . Il permet aussi aux intérêts industriels d' exercer un plus grand contrôle sur l' agenda politique , et d' être hostiles au protocole de Kyoto d' un côté de l' Atlantique tout en se montrant apparemment disposés à aider à la réalisation des objectifs de Kyoto sur l' autre rive de l' océan . Aspects positifs et négatifs du lobbying Les aspects positifs Au premier abord , le lobbying peut être considéré comme un élément inévitable du processus démocratique . Les lobbyistes sont en droit de faire connaître directement leurs points de vue aux décideurs européens ainsi qu' aux membres du Parlement . Chose rare , ce dernier n' est pas le seul organe législatif au sein du dispositif décisionnel européen ( il partage ce rôle avec le Conseil des ministres ) et il n' a pas non plus l' initiative des propositions législatives ( qui relève de la Commission ) . Ainsi , on peut considérer de façon simpliste que le lobbying est une manifestation de la démocratie à l' oeuvre , et qu' il est susceptible de garantir une certaine responsabilité des institutions européennes au moins devant ceux qui sont le plus concernés par les décisions de l' Union . Le lobbying se révèle aussi très utile à la Commission , qui cherche à sonder l' opinion des entreprises et des ONG avant de prendre des initiatives politiques radicalement nouvelles . On trouve un autre exemple important dans la longue liste des conflits commerciaux entre les Etats-Unis et la Communauté / Union européenne . Compte tenu de la dimension relativement réduite de la Commission et de l' impossibilité où sont ses fonctionnaires de connaître par eux-mêmes toutes les spécificités sectorielles de chaque Etat membre , l' échange d' informations entre la Commission et les groupes de pression est souvent essentiel pour les deux parties . Une Commission bien informée a plus de chances de faire des propositions politiques légitimes et susceptibles d' être mises en oeuvre . Le raisonnement consiste à dire que le lobbying peut conduire à un processus politique plus efficace , dans lequel les décideurs sont finalement conduits à adopter les mesures ayant le plus de chances d' aboutir aux résultats politiques escomptés , en prenant pleinement en compte les réalités et les aspects pratiques tels qu' ils sont perçus sur le terrain par les intérêts immédiatement concernés . Les mêmes groupes d' intérêt peuvent donner leurs impressions sur la mise en oeuvre de la politique de l' Union en recourant à des méthodes identiques vis-àvis de la Commission . Le processus de lobbying est aussi de plus en plus interactif dans la mesure où les différents intérêts sont en concurrence pour obtenir gain de cause et où les lobbyistes , pour se faire vraiment écouter , doivent essayer de développer une vision européenne globale qui aborde les questions -clefs de leur domaine politique à l' échelle de l' Union . Deux conséquences pourraient en résulter . La première serait l' élaboration de consensus au niveau européen dans la mesure où un ensemble d' intérêts se cherchant des alliés est contraint de se préoccuper des autres , qui n' ont pas nécessairement des intérêts compatibles . L' autre conséquence , qui pourrait émerger parallèlement au développement du consensus , serait que le contact direct avec les institutions européennes favorise le processus d' intégration sur le long terme au travers d' une influence progressive sur ceux qui façonnent les opinions , une dialectique que les universitaires ont appelé " engrenage " . Les aspects négatifs Le lobbying au niveau européen est très critiqué pour des raisons relevant de considérations démocratiques . Il y a d' abord le relatif secret qui entoure à la fois le processus de prise de décision et la pratique du lobbying . Ce secret nourrit les soupçons selon lesquels les accords sont conclu , à l' abri des regards , entre les entreprises et les décideurs européens , sans grands égards pour l' intérêt général ou le bien public . Ainsi les structures démocratiques se trouvent -elles en un sens contournées et la responsabilité devant les citoyens marginalisée au profit d' une responsabilité prise par rapport à quelques intérêts particuliers . Une multinationale étrangère pourrait obtenir une plus grande attention de Bruxelles à ses points de vue qu' un groupe inexpérimenté de citoyens européens . Ces soupçons sont renforcés par le fait qu' il est fort coûteux de faire pression avec succès sur les institutions européennes , tout comme cela exige du temps et des compétences . D' une façon générale , l' univers du lobbying à Bruxelles est dominé par des groupes de pression commerciaux qui défendent des intérêts économiques pour lesquels ils sont souvent en mesure - et disposés -à payer le prix fort . Une telle démarche n' est pas envisageable pour des groupes poursuivant des objectifs plus généraux ou altruistes , comme ceux représentant les intérêts des réfugiés , des travailleurs immigrés , des personnes handicapées ou des chômeurs . Elle compte alors souvent , avant de se déterminer , sur des associations commerciales et professionnelles pour obtenir des données et des analyses sur les secteurs concernés . La Commission reconnaît le bien-fondé de cet argument en subventionnant quelque soixante ONG actives à l' échelle européenne , mais cette réponse comporte aussi le risque de compromettre l' indépendance des organisations mises en places pour représenter de tels intérêts . Une autre inquiétude concerne la représentativité des organisations censées incarner l' opinion européenne sur tel ou tel sujet . La Commission prête attention à la structure et au nombre de membres des organisations qui prétendent représenter des groupes sociaux , économiques ou professionnels particuliers . Une question tout aussi importante consiste à savoir dans quelle mesure les positions adoptées par une organisation au niveau européen prennent réellement en compte les préoccupations et les exigences des associations nationales , et si elles ont été validées démocratiquement au sein de l' organisation . L' arrivée d' Internet et de la messagerie électronique a certainement modifié les moyens , pour une ONG basée à Bruxelles , de rester en contact étroit avec ses membres au niveau national . Mais il est encore difficile de savoir dans quelle mesure ces pratiques ont permis une décentralisation et une plus large contribution à la prise de décision , auparavant dévolue aux initiés qui dirigent les groupes d' intérêts à Bruxelles . En fin de compte , les fonctionnaires de la Commission et les députés européens font souvent référence à l' excès de lobbying , alors même que la structure fragmentée du processus de décision européen en est une des causes . On peut ainsi affirmer que les intenses efforts de lobbying , impliquant parfois des centaines d' organisations , empêchent une prise de décision rapide et cohérente dans le cadre de l' Union . Conclusions : questions à venir Malgré l' élargissement à 25 prévu pour 2004 , la structure et les évolutions futures de l' Union sont plutôt incertaines . Pour les organisations de lobbying , l' élargissement signifie que tout un ensemble d' intérêts entièrement nouveaux ( et parfois contradictoires ) devront être intégrés au sein d' organisations particulières , et assimilés par les institutions européennes . L' élargissement devrait aussi éloigner le Conseil des ministres des préoccupations écologiques et le réorienter vers les questions de sécurité . L' élargissement accentuera certainement la tension existant entre ceux qui recherchent une plus grande standardisation européenne et ceux qui donnent la priorité au principe de subsidiarité . Beaucoup d' entreprises aimeraient une plus grande centralisation du pouvoir de décision . Leur vie serait simplifiée , et leur coûts réduits , si les décisions prises à Bruxelles s' appliquaient partout sur le territoire de l' Union . C' est la raison pour laquelle les grands groupes d' intérêt représentant les entreprises firent cause commune avec les écologistes , en 1992 , contre la proposition de Jacques Delors en faveur de règles environnementales décidées et administrées au niveau national . En ouvrant la voie à davantage de variations nationales et régionales dans la définition et l' application des règles , les partisans de la subsidiarité courent inévitablement le risque de s' éloigner de la notion de concurrence " sur un pied d' égalité " entre les entreprises , notion constitutive du marché unique . Mais cela ne sera -t-il pas la conséquence inévitable du prochain élargissement , même sans aucun renforcement du principe de subsidiarité ? Une autre question est celle du processus décisionnel alternatif annoncé au sommet de Lisbonne , en 2000 : la " méthode ouverte de coordination " , mentionnée plus haut . Bien qu' elle envisage un partenariat interactif entre les institutions européennes , les gouvernements nationaux et les principaux groupes d' intérêts pour développer des réponses politiques dans des domaines pour lesquels plusieurs niveaux de gouvernement , dont celui de l' Union , sont compétents , les inquiétudes sont déjà légion quant au risque d' exclure les élus du processus et de n' y inclure que les groupes d' intérêts déjà bien connus des autorités ou ceux qui ne sont pas susceptibles de " jouer les trouble-fête " . Dans la mesure où les sujets déjà concernés par la méthode ouverte de coordination sont plutôt décisifs , plus ce processus prendra de l' importance , plus cette question deviendra sérieuse . Finalement , l' intégration du processus décisionnel bruxellois est rendu plus difficile par des activités de lobbying ad hoc et protéiforme auprès d' une Commission fragmentée et des autres institutions européennes . Il pourrait bien y avoir des arguments en faveur de forums consultatifs plus formalisés auxquels seraient invités à participer toutes les parties intéressées , et à travers lesquels devrait passer toute représentation auprès de l' Union , ainsi qu' en faveur de la publication de tous les documents , Position Papers et autres débats que pourront susciter de tels forums . Non seulement cela favoriserait la transparence auprès du public dans son ensemble , mais cela contribuerait aussi à améliorer la transparence au sein de la Commission et des autres institutions européennes , et entre les différents groupes de pression .