L1: un deux trois bon on va commencer tu vas me raconter en fait euh pourquoi tu es venue en France en quelle année quel âge tu avais L2: je viens de la Tunisie de NNAAMMEE exactement au bord de la mer je suis venue en France parce que mon père il travaillait comme ébéniste en France et puis la vie lui a plu et puis il nous a fait venir il a commencé par travailler à NNAAMMEE il a quitté NNAAMMEE en soixante-six pour s' installer à NNAAMMEE et puis il a trouvé que la vie à NNAAMMEE était très très calme il a fait venir mon frère avec lui et par la suite en soixante-sept il s' est décidé de nous faire venir L1: toute ta famille L2: donc maman mon petit frère et moi L1: tu avais quel âge L2: j' avais exactement vingt et un ans je et je me suis d' ailleurs quand je suis arrivée à NNAAMMEE ça m' a pas plu du tout parce que j' ai trouvé vraiment une ville très très froide pas chaleureuse du tout les gens très froids personne regardait personne et je me suis pas plu du tout je voulais retourner en Tunisie tout de suite et mes parents ils m' ont pas ils n' ont pas accepté ils voulaient que je reste avec eux mais je ne me suis pas plu du L1: tout tu faisais quoi en Tunisie tu travaillais L2: oui je travaillais comme secrétaire de direction au garage NNAAMMEE depuis l' âge de dix-sept ans j' ai commencé par euh se~ petite secrétaire et puis après j' ai monté en grade j' avais toute la responsabilité après le patron L1: tu parlais le français et l' arabe tu as été à l' école euh L2: ah oui j' ai été à l' école franco-arabe au départ euh donc euh l' école euh publique et après j' ai été chez les soeurs dominicaines j' ai terminé toutes mes études chez les soeurs L1: donc tu as fait des études arabe littéraire classique et puis euh L2: oui oui L1: de français L2: de français oui L1: donc euh quand tu es arrivée L2: en c' est une langue qui m' a toujours t~ plu j' ai toujours aimé le la langue française j' ai toujours eu des bonnes notes j' ai toujours bien travaillé L1: et quand tu es arrivée en France tu as fait quoi alors puisque tu as lâché un boulot là-bas L2: donc euh du fait que mes parents ils m' ont pas laissée retourner en Tunisie ben j' ai cherché du travail et j' étais un petit peu déprimée aussi parce que la vie n' est pas la même j' arrive de la Tunisie au bord de la de NNAAMMEE que c' est le bord de la mer qu' on s' amusait bien et tout ce n' était pas la vie de la fatma que avec ses foulards sur la tête ou le tchador ou des choses comme ça pas du tout j' étais une fille tout à fait libre j' ai fréquenté pas mal de gens de qui m' ont apporté énormément psychologiquement et pour tout et c' était des gens bien des français comme des des tunisiens et quand je je me suis trouvée à NNAAMMEE je me suis trouvée vraiment bête parce que je ne connaissais personne à part ma ma famille on était cinq personnes et j' avais pas d' amis j' avais pas de j' avais pas de travail et rien du L1: tout tu faisais quoi de tes journées L2: ben je lisais L1: tu lisais L2: je lisais énormément aussi bien que de la lecture euh banale que des beaux romans L1: et quand tu es arrivée en France tu savais que ce serait pour une longue période ou euh L2: ah non absolument pas je suis venue en France pour un mois ou deux d' ailleurs je n' ai jamais pris mon compte en Tunisie du fait que je partais j' avais pris un mois de vacances et un mois sans solde L1: hum L2: et je vous dis et j et j' ai toujours dit à tout le monde là-bas que je leur disais au revoir mais pas adieu je suis arrivée en France eh ben il fallait rester là L1: et pourquoi il fallait rester L2: il fallait rester parce que ma famille c' est une famille très très traditionnelle il fallait que la fille elle soit sous la coupe de son père et de ses frères qu' ils fassent attention et tout ça et puis moi j' ai j' avais un caractère très très libre et mes parents ne supportaient pas ils avaient peur de me laisser partir en Tunisie à cause de ma liberté que j' ai toujours considérée dans ma tête que j' étais libre L1: et donc ensuite tu as fait quoi tu as cherché du travail L2: ensuite j' ai cherché du travail j' ai je je connaissais personne je ne savais pas quelle porte qu' il fallait frapper personne renseignait personne et je me suis dit com-~ du fait que j' ai fait mes études chez les soeurs j' ai été m' adresser à la mère supérieure à l' hôpital central et de là la mère supérieure elle m' a elle m' a guidée vers la maison Saint Charles parce que pour travailler à l' hôpital central il fallait avoir la nationalité française moi je l' avais pas mais à la maison Saint Charles ils m' ont accepté comme aide euh soignante et c' était pas mal du tout au départ bon c' était très très dur parce qu' il fallait soigner les les personnes âgées les nettoyer tout et je ne j' avais du vraiment du mal à l-~ supporter de nettoyer ces personnes-là et tout et j' étais tout le temps pratiquement tous les jours malade avoir mal à l' estomac rendre tout ça et grâce au professeur NNAAMMEE qui m' a convoquée dans son bureau pour savoir si j' ai fait des études si j' étais apte à les soigner à soigner être en dessous de l' infirmière et de là quand il a accept-~ il m' a acceptée dans son service L1: et tu es restée combien de temps à son service L2: a son service j' y suis restée trois ans L1: pourquoi tu es pas repartie en Tunisie en fait puisque tu étais majeure tu avais vingt et un ans là-bas la majorité c' est vingt et un ans aussi L2: c' est marrant la majorité en Tunisie c' est elle est faite pour les garçons mais pas pour les filles dans le temps-là bon il y avait pas autant j' étais libre dans un sens mais dans l' autre sens il me fallait mes papiers mes parents ils ont caché mon passeport ma carte d' identité tunisienne et du fait que je n' avais pas d' argent pour même prendre un billet parce que j' aurais pu aller au consulat puis leur expliquer mais pour me faire mes papiers mais du fait que je n' avais pas de d' argent pour pour faire ces papiers-là déjà d' une et de deux pour payer un ben-~ billet de bateau un billet d' avion ça fait que j' ai resté bloquée L1: une fois que tu as travaillé tu as commencé à avoir de l' argent L2: une fois que j' ai travaillé j' ai commencé à avoir de l' argent puis j' ai commencé à avoir ma liberté disons avec beaucoup énormément de mensonges du fait que je travaillais du matin je disais que je travaillais toute la journée parce que l' après-midi pour moi c' était ma liberté d' aller au cinéma d' aller boire un verre avec mes copines d' aller au restaurant et et puis le temps il a commencé à couler puis j' ai commencé à m' habituer à à NNAAMMEE j' ai commencé à m' habituer aux gens L1: c' est bizarre quand même puisque tu étais tu étais la la plus âgée donc tu as quasiment élevé tes tes deux frères L2: eh ben moi de toute façon tu pourras dire que c' est des mensonges mais j' ai élevé mon dernier petit frère j' avais cinq ans et demi maman elle travaillait je on n' avait personne pour garder mes frères ben c' était moi qui les gardais mes deux frères ils ont été à l' école avant moi et j' ai été à l' école à neuf ans L1: donc on te donnait des responsabilités pour élever tes tes frères mais euh pas pour sortir L2: ah non la fille euh d-~ dans la famille d' ailleurs j' étais la seule fille qui a fait des études maintenant il y en a énormément parce que la mentalité a changé les filles elles se sont révoltées tout mais je sais que j' étais très très révoltée mais j' étais la seule révoltée de la famille pour eux j' étais un peu la brebis galeuse parce que ils ils voulaient pas accepter que je fasse des études que moi je voulais à tout prix faire des études ils voulaient pas que je sorte euh en mini-jupe que c' était la mode dans les années soixante la mini jupe et moi je le faisais et puis malgré tout ça je prenais des coups par maman mais je n' hésitais pas le faire L1: et tu étais révoltée contre quoi contre la famille ou aussi contre ta religion puisque tu étais musulmane et tu l' es encore d' ailleurs L2: moi j' estime la religion c' est dans le dans le coeur et dans la tête chacun a sa religion mais on n' est pas obligé de subir pour dire je suis musulmane on peut être musulmane libre croire en Dieu et puis pour tout le monde pareil que ce soit pour les musulmans les juifs ou les catholiques c' est la même chose Dieu il est pour tout pour moi personnellement Dieu il est pour tout le monde pareil il y a pas de différence mais de assumer toutes ces choses-là la religion mais ce que je n' assu~ je ne supportais pas du tout et je le supporte toujours pas d' ailleurs que on rajoute sur la religion dans le Coran c' est écrit une chose et puis les traditions ils rajoutent ils rajoutent sans arrêt et dans ma famille c' est la pire des familles pour moi parce que j' ai vécue dedans pe~ peut-être il y en a des pires il y en a des moins pires mais pour moi ma famille elle est elle est très dure avec ses traditions L1: c' est bizarre parce que tu critiques euh les traditions et euh et un peu ce que tu as vécu là-bas mais c' est quand même ta plus belle période que tu as vécue en Tunisie quoi depuis que tu es née jusqu' à ta à l' âge adulte L2: non oui parce que j' ai construit ma ma vie dans ma tête de de tous les jours L1: tu faisais quoi là-bas L2: j' ai je construis ma vie du fait qu' on a on est dans un pays chaud déjà il y a la mer il y a les amis tout ça je n' ai j' avais mes fréquentations à moi j' essayais de me relever la tête de ne pas être la femme soumise sous la coupe de papa et de maman et des frères et soeurs et de toute la famille d' une et de deux je m' estimais comme je me suis toujours considérée femme libre L1: tu as pas voulu te marier là-bas L2: ah ben moi mon cousin il m' a demand ma famille ils m' ont fiancée avec un cousin à moi j' avais trois mois et mon cousin il avait dix-huit ans L1: et alors L2: et alors quand j' étais petite j' étais contente d' avoir un fiancé quatre cinq ans six ans euh fiancé il m' achetait des glaces il m' achetait des bonbons et il m' achetait tout ce que je voulais il me sortait il me tenait par la main L1: ça t' amusait L2: quoi ça m' a amusé d-~ d' avoir un fiancé qui fait que c' était une grande perche d' un mètre quatre vingt et que moi j' étais toute petite mais en grandissant à l' âge de neuf ans je quand ils ont dit on fait les fiançailles j' ai dit mais vous êtes complètement mabouls il n' en n' est pas question L1: tu commençais à comprendre en fait L2: ben ça c' est sûr j' ai eu des amourettes j' ai j' ai fréquenté j' ai flirté mais sans euh sexualité sans rien mais j' ai je peux dire j' ai flirté L1: et quand tu es arrivée en France donc tu as travaillé à l' hôpital euh L2: donc je travaillais bon ben par la suite comme je t' ai raconté par la suite le docteur NNAAMMEE m' a pris à son service j' étais j' ai eu le il m' a fait passer un stage et j' ai fait l' aide soignante après ça me plaisait parce que je m' occupais des médicaments je me d~ occupais je m' occupais du des malades tout ce qui leur le nécessaire les courriers tout ça et j' ai connu euh ton euh NNAAMMEE qui était ami un ami de longue date à mon frère puis on a commencé à sortir ensemble L1: un français L2: un français ce que les parents ils n' ont jamais accepté ni par religion ni par euh rien du L1: tout donc euh quand tu as commencé à travailler tu as commencé à prendre un appart ou euh tu vivais encore avec tes parents L2: eh ben au départ quand on est arrivés à NNAAMMEE on avait un F deux pour cinq personnes c' était pas très très rose par la la suite moi quand j' ai travaillé j' ai commencé à travailler le deux mai mille neuf cent soixante sept à s-~ la maison Saint Charles euh rue NNAAMMEE et j' ai demandé à la propriétaire de qui a loué l' appartement à mon père de me si elle a un appartement de libre et elle m' a dit oui et elle avait un donc un de libre on l' a pris mais pour moi c' était je l' ai pris avec mon frère qui est en dessous de moi pour vivre L1: tu t' entends bien avec L2: très très bien on s' entendait très très bien on avait tous nos affaires ensemble tout on était beaucoup plus amis que frère et soeur déjà d' une de deux je l' ai aidé énormément il m' a aidée énormément psychologiquement aussi et on voulait vivre ensemble de dire on travaille tous les deux on met notre argent de côté pour se payer des voyages on a fait des tas de projets ensemble et mes parents n' ont pas accepté on a j' ai pris quand même l' appartement à mon nom je le payais mais c' est mes parents qui vivaient dedans avec moi et non mon frère mon frère il a resté au premier étage avec le L1: petit donc ensuite qu' est-ce que tu as fait tu as tu as été euh vivre avec euh NNAAMMEE ou euh L2: ensuite euh j' ai commencé à fréquenter NNAAMMEE on s' est fréquenté quelques mois et il y a eu des gens donc des amis de mes parents qui m' ont vue avec ils ont été rapporter la chose à mes à ma mère surtout ma mère au lieu de ne rien dire à mon père elle a ameuté tout le monde elle en a parlé puis ça commencé la galère qui commençait elle n' a jamais vou~ pour elle j' ai fait le pire des péchés du fait que j' étais musulmane pratiquante maintenant je suis toujours musulmane dans ma dans mon coeur mais musulmane à ma façon croire en Dieu et non à l' homme L1: donc tu t' es installée avec euh NNAAMMEE chez L2: alors j' ai voulu m' installer avec NNAAMMEE j' en ai parlé à maman comme toutes les filles elle s je me suis dit bon avec maman ça ira beaucoup mieux les choses elle pourra adoucir la chose envers la famille et tout mais maman elle a jamais accepté et j' ai été obligée de partir L1: donc tu as été t' installer L2: où j' ai été m' installer chez euh NNAAMMEE chez ses parents d' ailleurs L1: et ils ont été comment avec toi L2: très corrects très très gentils sa maman elle me servait de mère elle m' a c' était une femme formidable je peux dire je n' ai jamais vu quelqu' un aussi indulgent aussi gentil que cette femme -là elle était elle m' a appris l' indulgence elle m' a appris de ne pas juger l' autre et pourtant dans la religion musulmane on ne doit pas juger mais j' étais sous la l' influence de mes parents de la religion j' ai appris par mes parents et je me suis rendue du-~ compte que par la suite que la la religion musulmane c' était une très très belle religion parce que t~ c' est l~ la religion de l' indulgence du pardon de donner de soigner le malade de s' occuper des personnes âgées de faire attention à un enfant et tout ça on me l' a pas appris mais je l' ai appris avec ma belle-mère donc qui était catholique et elle c' était pareil c' était une catholique dans son coeur et non dans à l' église elle ne croyait pas du tout au curé mais elle était vraiment croyante en Dieu L1: donc tu es restée combien de temps chez eux L2: chez ma belle-mère j' ai resté trois ans L1: ah trois ans quand même L2: trois ans chez ma belle-mère on a fait trois enfants deux enfants donc j' ai fait l' aînée de mes filles la deuxième et je me suis trouvée enceinte du troisième enfant et c' est de là qu' on a pris un appartement L1: et vous habitez où avant chez euh la belle-mère c' était L2: où on habitait au vieux village euh derrière le vieux village L1: à NNAAMMEE L2: à NNAAMMEE oui on est j' ai jamais quitté NNAAMMEE L1: et ensuite au bout de trois ans vous avez pris un appartement L2: au bout de trois ans on a pris un appartement parce que on était obligés de le prendre parce que ça devenait un peu trop petit chez ma belle-mère mais quand je me suis trouvée toute seule dans l' appartement bon avec m~ pas toute seule avec mes enfants et mon mari eh ben j' ai déprimé parce que ma belle-mère elle me manquait sauf que tous les jours je retournais j' allais la voir L1: tu allais la voir avec tes enfants L2: avec mes enfants je prenais mes enfants j' allais la voir elle a toujours été présente jusqu' au quatrième enfant à mes accouchements que maman elle a été jamais été présente à un accouchement que ma belle-mère elle a toujours été avec moi elle a toujours été là présente L1: et tu as arrêté de travailler alors L2: de delà j' ai travaillé au départ j' ai continué à travailler à partir du troisième j' ai j' ai travaillé à mi-temps et à partir du quatrième j' ai arrêté de travailler L1: et entre temps tu revoyais ta famille tes frères euh L2: oui je l' ai revu c' est par hasard dans la rue on s' est rencontrés on s' est regardés on s' est mis à pleurer puis on s' est mis l' un dans les bras de l' autre et on a pleuré on s' est embrassés on j' étais heureuse je n' ai jamais été aussi heureuse que le jour-là parce que je l' aimais énormément il m' aimait il m' aime toujours énormément c' est pour moi mon frère c' est ma moitié c' est mon ami L1: ils habitent où tes frères ils sont en France ou en Tunisie L2: oui ils sont en France les deux il y en a un il habite à NNAAMMEE il travaille au comme chauffeur de bus le plus jeune il travaille à la clinique euh d' NNAAMMEE et puis il habite à NNAAMMEE L1: ils ont des enfants L2: oui l' aîné donc le mon ami mon frère comme il dit elle dit la chanson il a s~ quatre et le deuxième il en a cinq L1: et ça fait combien de temps que tu es pas retournée en Tunisie L2: eh ben depuis soixante-sept depuis que je suis arrivée en France j' ai jamais quitté la L1: France soixante-seize L2: soixante-sept L1: ah soixante-sept L2: le douze avril mille neuf cent soixante-sept mais je n' ai pas retourné en Tunisie pour la simple raison c' est pas que je ne voulais pas j' aurais bien aimé emmener mes enfants y passer des vacances là-bas mais c' est ma mère qui m' a faite jurer et comme je suis croyante en Dieu comme je te l' ai dit tout à l' heure ça fait que je n' irais pas en Tunisie tant qu' elle est du monde je pense que maintenant mes parents ils sont décédés tous les L1: deux il y a longtemps L2: mon père ça fait cinq ans non quatre ans pardon et ma mère ça fait deux ans L1: donc tu repenses que tu retourneras là-bas quand même L2: oui je pense avec un de mes enfants on pourra retourner là-bas puis j' emmènerais mes petits-enfants parce que j' en ai six des petits-enfants L1: et tu as la nationalité de française depuis quand alors L2: j' ai eu la nationalité s~ française en quatre-vingt-deux voilà le problème c' est que j' ai j' allais dire qu' on a vécu dans le péché c' est que j' ai eu six enfants sans être mariée pour la simple raison que mes parents ils n' ont jamais accepté de laisser la la personne qui travaillait à la municipalité de NNAAMMEE c' était un cousin à mon père donner délivrer les papiers qu' il me fallait certificat de nationalité certificat de euh célibataire et j' ai jamais eu et grâce euh à notre maire cette année-là c' était monsieur NNAAMMEE lui il a tapé sur la table puis il a écrit lui-même il a demandé ces papiers-là on lui a délivré là on a pu se marier en octobre le vingt-deux octobre mille neuf cent quatre-vingt-deux et de delà bon j' ai fait tout de suite ma demande pour la sa- pour les papiers pour la pour le la nationalité française et ça été très très vite ils m' ont délivré tout de suite les papiers il y avait pas de problème du L1: tout tu as combien de petits enfants maintenant L2: eh ben euh six et puis le septième il est en route pour le mois de février ou mars L1: et tes enfants ils font quoi ils ont une profession ils sont étudiants ou L2: j' ai l' aînée elle est mère au foyer L1: elle a combien d' enfants elle L2: elle a eu quatre enfants L1: ensuite L2: ensuite euh la deuxième elle est euh responsable chez NNAAMMEE elle est responsable régionale donc c' est elle attend son bébé son premier bébé le troisième lui il travaille à l' NNAAMMEE il est célibataire endurci le quatrième il vit avec une fille il est boulanger chez NNAAMMEE il a deux enfants la cinquième c' est une fille elle elle travaille comme animatrice chez NNAAMMEE et mon doudou le dernier il est à la faculté il continue ses études L1: et tous tes enfants habitent dans la région L2: j' en ai qu' une qui donc la deuxième de mes filles qui habite à NNAAMMEE elle a quitté la région elle se plaisait pas dans la région elle l' a quittée c' est son travail aussi qui l' a emmenée là-bas puis elle est très heureuse là -bas de temps temps quand on a le temps on va la voir on passe quelques jours chez elle et on est contents de se revoir L1: donc tu la vois tout le temps de toute façon L2: oui ben euh tu elle me téléphone tous les jours on est toujours en contact non sincèrement j' ai une très très bonne entente avec mes enfants il y a aucun problème L1: et euh avec euh tes frères euh tu les vois aussi souvent L2: non on se voit pas très très souvent on peut pas dire qu' on se voit tout le temps tout le temps on est pas les uns sur les autres mais quand on se retrouve on est bien contents de se voir surtout un l' autre on ne on se voit pas pratiquement pas on se fréquente pas L1: non plus tu as souvent des nouvelles de la Tunisie L2: oui par téléphone de temps en temps L1: tu appelle la famille qui est là-bas L2: ben oui quand j' ai envie d' avoir des nouvelles euh j' appelle autrement euh personne n' appelle L1: hum et tes enfants ils sont quoi ils sont musulmans chrétiens euh L2: alors mes enfants ils sont ils ont le droit de choisir moi on m' a imposé une religion je n' aime pas imposer des choses aux autres j' aime pas du fait qu' on m' a imposé pas mal de choses je n' aime pas imposer aux enfants de dire tu seras reli-~ de la religion de la religion catholique ou tu seras musulman non pas du tout absolument pas j' ai choisi déjà des prénoms qui donnent un peu de là-bas un peu d' ici que c' est pas des prénoms euh olé olé mais pour ça je ne voulais pas la religion non pas du tout maintenant ils sont grands ils peuvent choisir celui qui veut venir devenir musulman il a le choix celui qui veut devenir juif il a le choix ou catholique ils font ce qui les intéresse d' ailleurs mes petits-enfants ils sont pas baptisés non plus parce que j' estime qu' un être humain il a le choix de faire ce qu' il a envie de faire L1: et maintenant tu continues à travailler ou euh L2: ben j' ai repris le travail depuis mille neuf cent quatre vingt janvier mille neuf cent quatre vingt j' ai travaillé à temps complet puis depuis trois ans j' ai je travaille à mi-temps L1: et euh ça L2: parce que pour moi le travail c' est la liberté c' est une liberté d' esprit c' est une liberté d' argent c' est c' est le travail c' est la liberté c' est pour un être humain L1: comment tu es autonome tu es autonome tu es libre en fait L2: je suis autonome je suis libre et je je fais ce que je veux avec mon argent ben pas des bêtises automatiquement mais euh c' est une liberté L1: et dans ta vie il y a quelqu' un qui a vraiment beaucoup compté pour toi qui t' a un peu aidée euh quand tu avais des des problèmes ou euh qui t' a qui t' a élevée ou L2: il y a eu deux personnes mais ça vient toujours euh je peux dire avant c' était une personne pour moi qui qui a compté énormément et jusqu' à maintenant je l' oublierais jamais c' était ma grand-mère la mère à ma mère c' était une femme qui est restée veuf à l' âge de vingt ans vingt et un ans son mari est décédé elle a jamais remplacé elle a élevé ses enfants et pour moi c' était une femme qui était extraordinaire elle était d' une gentillesse inouïe elle était sévère et gentille à la fois c' était une femme formidable d' ailleurs cette femme-là elle est venue en France malgré son son âge elle avait soixante dix ans elle s' est dérangée de la Tunisie et comme elle a su que ma mère elle ne voulait pas que j' aille là-bas elle a dit si ma fille ma petite-fille elle ne peut pas venir me voir c' est moi qui va la voir et elle est venue en France pour me voir et elle a accepté la situation que j' étais avec un français ça l' a pas dérangée la seule chose elle l' a regardé dans le yeux dans les yeux elle a dit que c' était un homme il baisse pas le les yeux c' est un homme et elle a accepté elle a accepté mes enfants et je cette période-là je l' oublierais jamais parce que j' avais ma grand-mère je la voyais tous les jours j' allais la chercher L1: elle est restée longtemps en L2: France elle a resté deux ans en France et malheureusement elle est tombée gravement malade et elle est décédée L1: en L2: France non elle est est décédée trois jours après son arrivée en Tunisie parce qu' elle voulait à tout prix revoir ses le restant de la famille avant de mourir d' ailleurs quand elle est venue de la Tunisie elle était déjà malade mais avec les médecins ici tout ça on est arrivé à la maintenir quand même deux ans mais je lui ai promis si elle est malade qu' elle retournerait en Tunisie vivante et moi j' ai fait tout mon possible pour elle pour qu' elle puisse rentrer vivante en Tunisie pour voir toute la famille et ça je pour moi c' est quelque chose d' extraordinaire que j' ai pu faire parce que j' ai tenu ma promesse et tenir sa promesse est quelque chose de bien et la deuxième personne c' est ma belle mère la façon qu' elle m' a accueillie chez elle comme une fille elle m' a pas rejetée du fait que maman elle a fait pas mal de cirque elle euh de racisme et tout ça que ma belle mère pas du tout elle elle en avait rien à faire de tout ce qu' elle disait maman et tout ça et elle m' a acceptée elle m' a donné l' amour elle m' a do-~ tout donné jusqu' à sa mort et ça je l' oublierai pas non plus puis la chose maintenant qui me rend vraiment heureuse c' est mes enfants et mes petits-enfants L1: et ton père tu en pensais L2: quoi ton mon père c' était un homme qui malheureusement il était très très soumis à maman elle elle disait que tout ça venait de lui mais lui il disait toujours c' est ta mère c' est ça vient d' elle et là je me suis rendue compte après le décès de mon père que c' était ma mère qui menait la barque et non mon père L1: autrement tes parents ils vivaient où en France ou en Tunisie ils ont eu envie de rentrer quand même au bout d' un moment L2: non eh ben oui bien sûr et puis ils avaient leur maison ils étaient pas la rue non plus ben ils ont vécu en ils vivaient en France trois mois ils vivaient en Tunisie trois mois et à la fin de leur vie eh ben je les eus souvent à la maison on s' est arrangé mais toujours pas pour moi j' avais toujours pas le droit d' aller en Tunisie mais moi je m' en foutais du fait que je voyais mes parents pour moi c' était le principal je les accueillis à la maison ils ont restés chez moi ils étaient malades je les soignés comme mon père il était malade il avait la maladie de Parkinson ben il fallait fallait vraiment s' occuper de lui puis c' était quelqu' un de très très sensible aussi alors il je pouvais pas le laisser seul alors ça fait qu' il est parti là depuis il devait être parti en Tunisie pour des vacances comme toujours mais là-bas il est tombé malade et puis il est rentré dans un coma profond puis ma foi il est parti il est décédé décédé le premier octobre et j' ai eu très très très mal mais je pensais pas que je prendrai euh aussi mal du fait que j' avais des enfants des petits-enfants tout ça mais il y avait quelque chose qui de moi qui est partie avec lui mais je l' oublie pas tous les jours je pense à lui L1: et il voulait mourir là-bas de toute façon L2: eh ben oui parce que mê~ même moi si il décédait en France je l' aurais fait rapatrier parce qu' il pour moi il était musulman pratiquant il avait ses traditions à lui tout ça et je l' aurais jamais fait enterrer en France pour lui moi j' aurais bien aimé qu' il soit enterré ici et que je puisse aller sur sa tombe ben ma mère après ça elle a fait une forte dépression nerveuse elle est revenue en L1: France et ta mère L2: elle a été très très malade et euh on est arrivé à la soigner je l' ai gardée mais elle se plaisait pas avec moi elle voulait à tout prix aller chez le plus jeune parce qu' elle aimait bien sa femme et tout mais malheureusement pour elle elle a pas eu ce qu' elle voulait elle elle voulait une fille musulmane qui s' occupait d' elle et tout mais ma be-~ belle soeur s' est pas occupée d' elle ils ont envoyée en Tunisie on a pris quelqu' un pour la garder pour faire attention à elle et puis elle est décédée au bout de de deux deux ans elle a rejoint mon père L1: euh tu en veux un autre et tu aurais préféré vivre en France avec ta famille ou euh ben tu as vécu en France avec ta famille ou en Tunisie L2: en France parce qu' en Tunisie j' aurais pas pu vivre euh aussi large que qu' en France du fait que mes enfants ils sont très très gâtés c' est des enfants gâtés mes petits-enfants aussi qu' en Tunisie c' est pas le même train de vie et rien que pour manger on est on est je ai jamais été privée là-bas mais c' est pas le même train de vie ça n' a rien à voir et puis mes enfants ils auraient pas pu supporter parce que en France les familles ben on se voit on se dit bonjour on se on s' invite les uns les autres qu' en Tunisie aussitôt qu' il y a une famille qui est installée tout le monde débarque à n' importe quelle heure et les gens ils se sentent chez eux du fait que j' ai ma une soeur qui a qui a onze enfants là-bas ça ne ça n' aurait jamais été puis ça m' aurait pas intéressée du du fait que ces choses-là je les supportais déjà pas en étant jeune je vivais à part alors mes enfants je pense pas qu' ils auraient acceptée cette vie-là non plus mais par contre mes enfants ils étaient en vacances en Tunisie c' est pas dans la famille mais ils ont été euh avec des camps ils ça leur a plu et je pense quand même que je retournerais en Tunisie avec mes enfants mes petits-enfants L1: tes enfants ils parlent l' arabe L2: ah non pas du tout ça n' a pas été facile pour leur apprendre l' arabe du fait que moi j' étais la seule mon mari français parlait pas l' arabe moi parlant la la langue française correctement je ne parlais pas l' arabe et ça m' arrive de parler un peu en arabe avec mon frère quand on se trouve tout seuls mais par respect pour mes enfants et mon mari quand il y a mes on est tous autour de la table je ne parle jamais en arabe avec lui même si il se permet de me parler en arabe je réponds en français L1: ils ont jamais essayé d' apprendre l' arabe L2: ils ont essayé mais le maître il est qu' ils ont eu l' instituteur qu' ils ont eu de tunisien il se prenait pour Dieu le Père du fait qu' en Tunisie on doit respecter l' instituteur ce qu' il dit ainsi de suite mes enfants ils n' ont pas pu supporter ça et puis ils ont refusé d' y aller L1: un peu comme en France euh au début du siècle ou euh L2: ben voilà justement l' instituteur c' était quelque chose d' extraordinaire alors le ce jeune-là il a gardé la mentalité-là mais il a oublié que c' est c' est des jeunes français qui voulaient apprendre l' arabe il aurait été un peu plus souple avec eux je j' en suis sûre ils auraient appris mais moi la maison je ne pouvais pas leur apprendre parce que j' étais la seule qui parlait la langue-là c' était pas facile avoir six enfants et essayer de leur apprendre l' arabe avec je menais la barque à la maison il fallait tout faire leurs devoirs tout ça alors je pouvais L1: pas et ça te manque pas tu aurais pas aimé qu' un de tes fils ou de tes une de tes filles parle arabe L2: si j' aurais peut-être j' aurais aimé bon parler mais pfff je peux dire que je ne je n' y ai même pas pensé pas du tout du fait qu' on se comprend on se comprend très très bien en français je vois pas où elle est l' utilité de se mettre à deux à parler une autre langue que les deux les autres sont autour de la table L1: ouais mais pour les traditions garder les traditions euh L2: ben les traditions je les pas aimées c' est pas pour les inculquer à mes enfants L1: ouais mais tu fais quand même euh certaines fêtes comme l' Aïd L2: oui l' Aïd tout ça parce que c' est dans le Coran parce que ça c' est dans le Coran l' Aïd les le l' Aïd El Kébir le la fête du sacrifice tout ça oui d' acc~ je suis tout à fait d' accord pour montrer quand même je fais la cuisine de de chez moi aussi pour mes enfants pour qu' ils sachent ce que c' est aussi je veux pas les laisser ignorants euh se trouver avec un copain tunisien et se trouver tout bêtes qu' est-ce que qu' est ce que tu manges là qu' est-ce que c' est il y a certaines cuisines qu' ils aiment beaucoup il y a certaines cuisines qu' ils n' aiment L1: pas du tout bientôt là c' est la période du Ramadan je crois que ça commence vers le cinq ou le sept décembre tu continues à faire le Ramadan L2: non du fait que je mange du porc je j' estime que je n' ai pas le faire L1: ça te manques pas tu l' as fait quand même pendant plus de vingt et un ans vingt-deux ans L2: je l' ai fait pendant non pas autant que ça quand même j' ai commencé à l' âge de huit ans à le faire