1: De la temporalité vécue à la temporalité racontée :
2: hypothèses et observations concernant le développement de la mise en mots du temps chez l' enfant
3: Marie Carcassonne
4: IUT de l' Oise , Université de Picardie , Université Paris V
5: Résumé & 226;& 128;& 148; Cette contribution rassemble un certain nombre de remarques ( personnelles ou rapportées ) allant dans le sens de l' idée suivante :
6: à toutes les étapes du développement communicationnel ( et donc avant même l' acquisition des premiers mots ) , il est possible de relever des indices témoignant d' une étroite relation entre récit et temporalité et cette temporalité est d' abord implicite parcqu' » atmosphérique » ou « affective » avant d' être « chronologique » .
7: Abstract & 226;& 128;& 148; This paper collects several remarks ( own and reported ) about the following idea :
8: at all stages of communication development ( therefore even before acquisition of first words ) , it is possible to detect signs of a close relationship between narration and temporality , and this temporality is first implicit because this temporality is « atmospherical » or « affective » before being « chronological » .
9: Introduction
10: Je propose d' aborder la temporalité vécue en distinguant au moins deux aspects nécessairement intriqués dans l' expérience comme dans la mise en mots :
11: les aspects chronologiques et atmosphériques .
12: La temporalité « chronologique » est objective , mesurable .
13: Elle renvoie au temps « qui passe » et auquel tous les êtres vivants sont soumis , qu' ils en aient conscience ou non .
14: Cette temporalité concerne à la fois le temps chronique et le temps linguistique mis en évidence par E. Benveniste ( 1966 ) .
15: La temporalité « atmosphérique » ou « affective » renvoie à la façon dont chacun d' entre nous « éprouve » la temporalité chronologique , avec son propre rapport à la durée et à l' espace , dans son interaction avec autrui .
16: Cette approche de la temporalité s' inscrit dans la tradition phénoménologique ( cf. revue ALTER , 1994 ) qui vise à une description directe de l' expérience .
17: Pour E. Husserl ( 1905 ) , le temps est donné au sujet dans une synthèse passive qui lui vient , qui l' affecte , et cette synthèse est une condition de l' émergence du moi .
18: C' est par l' affection , en tant qu' événement qui a lieu , que le temps atteint la conscience .
19: M. Heidegger évoque la notion d' existentiaux ( 1927 ) , existentiaux qui sont avant tout des manières d' être au monde , et qui renvoient à des affects tels que la tristesse , la colère , l' espoir ...
20: M. Merleau Ponty ( 1945 ) , s' accorde avec Husserl et Heidegger pour dire que la temporalité en tant que « flux temporel » , n' est pas un objet de notre savoir , mais une dimension de notre être .
21: La relation du sujet incarné au monde n' est pas de l' ordre de la mise à distance réflexive mais relève de l' immersion .
22: Cette temporalité ne renvoie pas seulement à un temps individuel , biographique mais aussi à un temps social .
23: Avant d' être narré , l' événement vécu est pris dans un enchevêtrement de temporalités chronologiques et atmosphériques différentes et la mise en récit impose un « choix parmi un ensemble de « possibles narratifs » ( selon l' expression de C. Bremond , 1973 ) .
24: P. Ricoeur explique comment le fait d' articuler narrativement rétrospection et prospection permet de parler de l' unité narrative d' une vie .
25: J. Bres ( 1994 , p . 136 ) insiste sur cette possibilité offerte par l' activité narrative :
26: en s' inspirant de la théorie guillaumienne , il présente le récit comme permettant une mise en ascendance du temps raconté par le temps racontant .
27: On peut ajouter , à partir d' une étude antérieure ( M. Carcassonne , 1997 ) , que le récit permet également une mise en affectivité ou une mise en atmosphère du temps raconté par le temps racontant .
28: De ce point de vue , le récit constitue un mode privilégié de la mise en mots du temps vécu .
29: Tout en insistant sur le caractère fondamentalement dialogique de l' activité narrative et donc sur le caractère interactionnel du développement du récit , j' aimerais montrer comment , à toutes les étapes du développement communicationnel ( et donc avant même l' acquisition des premiers mots ) , il est possible de relever des indices témoignant d' une étroite relation entre récit , temporalité atmosphérique ou affective et temporalité chronologique .
30: Ces observations se feront à partir d' enregistrements dans un cadre familial et de notes prises sur le vif concernant des échanges entre mes deux fils et moi-même .
31: 1 . Structure pré-narrative du temps chronologique
32: Ricoeur ( 1983 ) a montré qu' il y avait une structure pré-narrative du temps chronologique .
33: La mimésis 1 est une préfiguration du champ pratique .
34: Elle renvoie à l' expérience pratique qui est à l' origine d' un texte , à la temporalité effective du vécu .
35: C' est-à-dire qu' elle renvoie par exemple au fait que tout être humain a un passé et un avenir .
36: Le parallèle qu' on peut établir entre la mimésis 1 et la notion « script » , de « schéma » permet de jeter un pont entre l' approche de Ricoeur et les nombreuses expériences ayant montré l' impact facilitateur du respect d' un ordre canonique pré-linguistique dans un récit pour la compréhension et la mémorisation de ce même récit .
37: Cet aspect facilitateur n' est pas mis en évidence avant l' âge de 4 ans , ce qui s' expliquerait qu' avant 4 ans , les enfants n' ont pas conscience de , & 226;& 128;& 147; et/ou n' ont pas les moyens linguistiques de dire & 226;& 128;& 147; , l' opposition actuel / inactuel , même s' ils peuvent renvoyer par ailleurs , on va le voir à l' aspect atmosphérique et affectif de la temporalité et même s' ils ont accès aux courbes temporelles d' un moment actuel ( opposition marquée dans la mise en mots à partir de 2 , 6 ans par le biais de l' opposition aspectuelle accompli / inaccompli , comme l' a montré E. Sabeau-Jouannet , 1973 ) .
38: 2 - Structure pré-narrative du temps atmosphérique ou affectif
39: Sans le thématiser , Stern ( 1989 ) montre qu' il y a une structure pré-narrative du temps affectif :
40: pour cet auteur , le nourrisson appréhende le monde environnant en partie par le biais d' « affects de vitalité » .
41: L' auteur justifie ce terme par le fait que « de nombreux caractères des émotions ne rentrent pas dans le lexique existant ou dans la taxinomie des affects .
42: ( ... ) Ces caractères insaisissables sont mieux rendus par des termes dynamiques , kinétiques tels que « surgir » ,
43: « s' évanouir » ,
44: « fugace » ,
45: « explosif » ,
46: « crescendo » ,
47: « decrescendo » ,
48: « éclater » ,
49: « s' allonger » , etc. ( ... ) .
50: Ce sont des émotions qui sont provoquées par des changements d' états de motivation , d' appétit ou de tension .. » ( Ibid , p . 78 ) .
51: Ces « processus vitaux » ne nous quittent jamais que nous en soyons conscients ou non , tandis que les affects « ordinaires » vont et viennent .
52: Ainsi en est -il des conduites parentales qui consistent à prendre son bébé , plier les couches , se peigner ou peigner son bébé , prendre le biberon ...
53: Les affects de vitalité dans lesquels le nourrisson est immergé comportent un début , un milieu et une fin ( c' est-à-dire une courbe temporelle ) .
54: A partir de là , Stern propose la notion de « contour de vitalité » ( 1997 ) qui rend mieux compte de la notion de courbe temporelle à laquelle elle est intrinsèquement liée .
55: Ce ne sont pas les seuls affects qui sont concernés par cette courbe temporelle , mais tout ce que peut recouvrir le terme feeling :
56: pensée , perception , sensation ...
57: La courbe temporelle , peut éventuellement présenter un « apex » , un « moment émergent » par rapport auquel auquel l' enfant ( et la ou les personnes qui sont présentes ) seront plus sensibles et se rencontreront dans une certaine intersubjectivité .
58: Stern établit alors un parallèle entre la courbe temporelle d' un « contour de vitalité » et la ligne de tension dramatique d' un récit .
59: Le bébé percevrait donc une courbe temporelle dans le moment présent .
60: Cette observation peut être mise en parallèle avec le fait que les premières marques verbales « spécialisées » renvoyant au temps et utilisées par l' enfant concernent des suites incluses dans le moment présent ( et non une opposition entre l' actuel et l' inactuel ) , et sont marquées par des oppositions aspectuelles ( accompli / inaccompli ) .
61: Comme l' a montré E. Sabeau-Jouannet ( 1973 ) , en dessous de 2 , 6 ans , l' utilisation par l' enfant de la forme « maintenant » , du signifiant « présent » ou encore du signifiant « futur périphrastique » renvoient à la verbalisation d' un événement faisant suite ou précédant un événement non verbalisé ;
62: elle constate de plus que l' enfant intègre dans le signifié de « maintenant » et de « aller » + infinitif un aspect affectif ( réalisation d' un désir ) .
63: 3 . Les premiers mots et l' étayage temporel de l' adulte par rapport à l' enfant
64: Si l' on se place dans une perspective labovienne et , de façon plus générale , dans une perspective bakhtinienne , les composantes du récit sont des réponses à des questions sous-jacentes .
65: Par rapport à l' approche de Labov ( 1978 ) , on peut remarquer que seuls le récit minimal et le « résultat » peuvent se rapprocher d' une structure chronologique .
66: Les autres « composantes » répondent à des exigences dialogiques ;
67: l' évaluation me paraît renvoyer de façon très efficace aux affects et à la temporalité « atmosphérique » ou « affective » .
68: Si il existe des gens qui sont " spéciaux " et " qu' ils raisonnent différement que la plupart des gens en employant des cheminements de pensées différents " .
69: c' était terrifiant , périlleux , mystérieux , extravagant , insensé ;
70: ou bien drôle , hilarant , merveilleux ;
71: ou bien encore , plus généralement , étrange , peu commun , extraordinaire & 226;& 128;& 147; en un mot mémorable .
72: C' était tout le contraire du banal , du quotidien , de l' ordinaire » , précise Labov ( Ibid , p . 308 ) .
73: De ce point de vue , les observations que j' ai pu faire lors d' échanges entre mes enfants et moi-même montrent que lorsque je veux faire raconter une histoire à mes enfants , j' ai tendance à poser une question relevant d' une temporalité plus atmosphérique lorsque j' estime intuitivement que mon « étayage temporel chronologique » risque d' être sans effet .
74: C' est-à-dire que lorsque j' estime des questions comme « et après qu' " est -ce qui s' est passé ? » ou , s' il s' agit d' une histoire biographique « qu' est -ce que tu as fait aujourd'hui ? » sont en dehors de la « zone proximale de développement » ) , je m' oriente vers des questions du type : « elle t' a fait peur cette histoire ? » , ou s' il s' agit d' une histoire « biographique » : « tu t' es bien amusé aujourd'hui ? » ou encore « avec qui tu as joué aujourd'hui ? » .
75: 4 . Le chronotope comme évocation interactive d' un temps atmosphérique
76: Une autre manière d' évoquer ( ou de faire évoquer ) une temporalité atmosphérique renvoie à la notion de chronotopes .
77: Certaines approches du temps dans des textes littéraires , & 226;& 128;& 147; qui peuvent être transposées à des approches de productions ( orales ou écrites ) non littéraires & 226;& 128;& 147; , se fondent essentiellement sur des éléments de contenu , en tant qu' ils sont liés à des valeurs :
78: par exemple l' oeuvre de G. Poulet ( 1952 ) mais aussi l' approche de M. Bakhtine ( 1978 ) , qui met en évidence la notion « chronotope » comme liaison quasi-nécessaire de l' espace et du temp .
79: Dans une perspective d' analyse de la temporalité dans des récits d' enfants , les contenus « évocation d' un lieu » et " évocation d' autrui " apparaissent primordiaux pour dégager une temporalité atmosphérique .
80: En effet , l' enfant est capable très tôt , avec le seul maniement de « mots-phrases » , d' évoquer un lieu , ou le prénom d' un enfant , quand on le questionne sur ce qu' il a fait dans la journée .
81: Exemple 1 :
82: [ [ Richard Lynn ] ] & Co
83: Lorsqu' il revient le dimanche soir , je lui pose la question suivante :
84: En effet , [ ... ] ce que disent les procédés évaluatifs , c' est :
85: Il me répond :
86: « magasin » , avec un air ravi .
87: Sachant que son père l' a emmené avec son frère dans un grand magasin de jouets , je réponds :
88: « Tu as été au magasin de jouets avec papa ! » .
89: Exemple 2 :
90: Mon fils Pacôme , âgé alors de 2 , 6 ans vient de passer une journée habituelle à la crèche .
91: Je le questionne :
92: « Tu as passé une bonne journée ? » ;
93: Il me répond :
94: « Medhi » , d' un air content .
95: Sachant que Medhi est un de ses amis avec qui il joue souvent , je lui réponds :
96: « Ah tu as joué avec Medhi ! » .
97: Notons que dans ces exemples , ce ne sont pas les mots-phrases de l' enfant qui sont en eux-mêmes porteurs d' une temporalité atmosphérique ou affective , mais la relation entre la question , la réponse ( verbale et non-verbale , c' est-à-dire corporelle en tant qu' elle exprime des émotions ) et le savoir partagé par l' adulte et l' enfant .
98: En fonction de ce savoir partagé , je peux interpréter la temporalité atmosphérique dans laquelle a vécu Pacôme comme « positive » , sachant que Pacôme est allé dans un magasin de jouets avec son père ou que Medhi est le prénom d' un de ses amis .
99: Il s' agit donc ici de rendre compte de la façon dont le sens émerge ( en partie ) des enchaînements entre actes discursifs ou non discursifs ( F. François , 1993 ; E . Veneziano , 1997 ) .
100: 5 . Hypothèses finales
101: Un autre exemple extrait de mes corpus montre que les outils linguistiques permettant d' énoncer le temps chronique s' acquièrent plus tardivement que certaines mises en mots de temporalités atmosphériques .
102: En effet , Gabriel ( 5 , 5 ans ) répond ainsi à une de mes remarques :
103: Mère :
104: Tu sais que demain tu es invité chez Victoire
105: Gabriel :
106: N' importe quoi .
107: Anne-Marie [ mère de Victoire ] elle a dit que c' était à la fin de la semaine .
108: Mère :
109: Mon fils Pacôme , alors âgé de 2 , 5 ans est parti avec son frère et son père pour le week-end , sans moi .
110: Aujourd'hui on est samedi et demain c' est dimanche alors qu' il est capable de produire au même moment des récits porteurs de procédés évaluatifs contribuant à l' émergence d' une temporalité « atmosphérique » .
111: Une étude de J. Reilly ( 1992 ) s' interrogeant sur les modalités de l' expression affective dans des narrations enfantines va dans le même sens .
112: Elle indique qu' à 3 - 4 ans , l' expression affective par le biais de procédés évaluatifs paralinguistiques , et surtout intonatifs , sert de support pour construire une histoire à partir d' un livre en images .
113: Les remarques évoquées précédemment au sujet du développement de la mise en mots du temps ( Stern ) , les observations faites sur mes conduites d' étayage « spontanées » ou sur les mises en mots de mes fils amènent à présenter la temporalité affective ou atmosphérique , en tant que temporalité implicite dans l' interaction , comme un point d' appui pour l' acquisition de la mise en mots de la temporalité .
114: En outre , il semblerait à partir des observations de Sabeau-Jouannet , Fayol , Reilly ou encore de celles que j' ai pu faire sur mes fils , que la temporalité affective et atmosphérique est mise en mots avant la temporalité chronologique .
115: Ce qui s' accorderait avec l' idée plus générale selon laquelle « la place affective » , non seulement précède ( dans le développement du langage ) mais aussi colore toujours la « place discursive » dans un échange verbal hic et nunc .
116: « Alors tu t' es bien amusé ? » ;
117: et ces aspects ne peuvent pas ne pas être communiqués ni interprétés , quel que soit le cadre interactif de l' échange auquel enfants comme adultes peuvent prendre part .
118: Rérérences bibliographiques
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171: Le temps « linguistique » correspond au temps conçu comme la relation posée entre le moment de l' énonciation et le moment de l' événement exprimé par l' énoncé .
172: « How to tell a good story :
173: Le temps dit « chronique » par Benveniste correspond au temps « qu' on peut mesurer » , et on peut y renvoyer grâce à des données lexicales comme jour , nuit , mais aussi les années , les heures et les dates .
174: Le temps social renvoie donc à une temporalité atmosphérique vécue sur un mode collectif , cette collectivité étant toute relative .
175: Heidegger H. , ( 1964 ) , tr .
176: « dès le début du vingtième siècle , des sociologues et des anthropologues ont insisté sur le fait que le temps est construit différemment selon les groupes et les sociétés .
177: En France ,
178: E . Durkheim , H. Hubert , M. Mauss , M. Halbwacks se sont intéressés à l' hétérogénéité du temps social .
179: Cette lecture trouve son équivalent aux Etats-Unis :
180: P.A . Sorokin et P. K. Merton ,
181: E . Hall , dans une période plus récente , montrent que le temps est significativement lié aux activités qui le composent. » Dans un texte encore largement méconnu , G. Gurvitch ( 1950 ) se propose d' identifier de manière systématique les temps sociaux caractéristiques des sociétés et dénombre huit types de temps différents qui combinent de manière spécifique la continuité et la discontinuité , la durée et la succession , le qualitatif et le quantitatif et surtout le passé , le présent et l' avenir .
182: E . , ( 1905 ) , tr .
183: Dans la mesure où ces observations seraient à confirmer sur des corpus plus importants , c' est plus un travail prospectif qui va être ici présenté qu' un travail abouti .
184: Pour une revue des différents auteurs ayant mené des expériences concernant cet aspect , voir M. Fayol , 1985 , pp .
185: 45 - 62 et 77 - 96 .
186: J. H. Flavell ( 1981 ) et E. Esperet ( 1984 ) décrivent ainsi le « schéma narratif » fonctionnant comme une « métaprocédure » plus ou moins consciente .
187: D . Stern s' inspire en partie de l' approche phénoménologique du temps .
188: Comme le remarque L. Servel ( 1997 , p . 222 ) ,
189: par exemple ;
190: la façon qu' a le maître de prendre la craie , de passer dans les rangs , etc .
191: Il suggère à partir de là ( 1994 , 1997 , pp. 108 - 133 ) que « les moments émergents » peuvent être représentés dans au moins cinq « formats » schématiques , basiques , séparés et parallèles :
192: les schémas sensori-moteurs , les perceptions , les scripts , les moules d' émotions temporelles et les enveloppes narratives .
193: temps du dire sous-tendu par celui de l' à-dire .
194: Mais on peut le transposer à d' autres types d' interaction :
195: Les formes verbales ( opposition présent / passé composé ) attestées au même âge montrent une « adhérence » à la situation d' énonciation :
196: « l' enfant exprime l' accomplissement d' un événement , donc d' un état , dont il affirme l' actualité maintenant , au moment où il parle » ( ibid. ) , le passé composé renvoyant à un événement accompli ( « a sali , est tombé » ) et le présent à un événement en cours ( « i pleure , minou i pas dort » ) .
197: Cette étude s' inscrit dans les lignées du travail de E. Ferreiro ( 1971 ) , qui a découvert que ce n' est qu' au niveau où s' installe la " renversibilité " dans les épreuves de conservation ( 5 ans , 5 , 5 ans ) que les adverbes désignant le passé et le futur sont employés correctement .
198: L' enveloppe narrative est proposée comme un format représentant l' expérience globale , tandis que le moule d' émotion temporelle est proposé comme un format représentant les affects .
199: L' auteur établit la synthèse suivante concernant la développement de la mise en mots du temps par les enfants :
200: à partir d' une opposition aspectuelle première , des paliers de distanciation , de décollement par rapport à la situation au moment de l' énonciation peuvent être mis en évidence de la façon suivante :
201: 1 ° Vers 2 ans :
202: Etude longitudinale effectuée pendant quatre ans par E Sabeau-Jouannet ( 1973 ) concernant des enfants âgés de 1 , 6 ans à 4 ans .
203: opposition entre ÉTAT ( accompli ) et PROCES ( duratif ) ;
204: 2 ° Vers 2.6 ans :
205: opposition entre l' actuel et l' inactuel ;
206: indifférenciation dans l' inactuel : ( signifiants dont les signifiés pourraient se dégager comme « pas maintenant » ) ;
207: 3 ° V ers 3 ans :
208: opposition de l' antériorité et de la postériorité par rapport à un point de repère M0 :
209: Moment de la parole ( signifiants dont les signifiés pourraient se dégager comme : « avant » / » après » ) ;
210: 4 ° Vers 4 ans :
211: Opposition de l' antériorité et de la postériorité par rapport à un point de repère M0 = moment de la parole .
212: W. Labov distingue en effet le récit minimal des autres composantes du récit .
213: Le récit minimal est constitué d' une suite de deux propositions « narratives » , c' est-à-dire de deux propositions indépendantes et temporellement ordonnées , unies ( et séparées ) par une seule jonction temporelle .
214: Ce récit minimal correspond à la composante du récit que W. Labov nomme « développement » , et répond à la question implicite « et après , qu' est -ce qui s' est passé ? » .
215: A côté du récit minimal , W. Labov distingue d' autres composantes dans les récits qu' il étudie .
216: Ces composantes s' ajoutent selon lui au récit minimal par le biais de propositions « libres » , c' est-à-dire non fixées par une jonction temporelle .
217: Ces composantes correspondent :
218: au « résumé » et aux « indications » qui précèdent généralement le développement .
219: Le résumé répond à la question implicite « de quoi s' agit -il ? » Les indications répondent à la question implicite « qui , quand , quoi , où ? » .
220: Elles précisent le moment , le lieu , les personnes concernées , leur activité ou leur situation dans le récit .
221: Le résultat répond à la question implicite « comment cela s' est -il fini ? » .
222: La chute ne répond à aucune question mais les écarte toutes .
223: C' est un procédé grâce auquel le narrateur signale que son récit est achevé .
224: « Elle clôt le développement et indique qu' aucun des événements qui ont suivi n' a d' importance pour le récit » ( Ibid , p . 302 ) .
225: L' évaluation correspond « aux procédés qu' emploie le narrateur pour indiquer le propos de son histoire , sa raison d' être :
226: pourquoi il raconte , où il veut en venir. » . ( Ibid , p . 303 ) .
227: Elle écarte la question méprisante « et alors ? » pour faire en sorte au contraire que la seule remarque appropriée soit « Vraiment ? » ,
228: « ou toute autre expression apte à souligner le caractère mémorable des événements rapportés » . ( Ibid , p . 303 ) .
229: Cette notion est empruntée à L. S. Vigotski ( 1962 ) qui préfère la notion de « zone proximale de développement » à la notion piagétienne de « stade » dans la mesure où les limites de ce que peut faire un enfant ne sont pas entièrement déterminées et vont dépendre du rôle de « l' autre étayeur » .
230: Elle constate en outre que les narrations des enfants de 7 ans apparaissent plus cohérentes au détriment de l' expression affective , ce n' est qu' à partir de 10 ans que les enfants construisent des histoires cohérentes comportant en même temps , par le biais de procédés lexicaux et paralinguistiques , une expression affective .
231: Etre observateur de soi-même constitue un biais important ;
232: cette hypothèse demande de ce fait à être vérifiée sur des données plus « objectives » .