De_La_Salle_GRAND-MERE_MENSONGE_2

Un locuteur raconte un conte
(FRENCH ORAL NARRATIVE)

Projet ORFEO © 2015 CNRS

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Corpus FRENCH ORAL NARRATIVE

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DeLaSalle:	tous les matins je me mets à ma table de nuit euh ce ce de devant ma table de nuit devant mon miroir et je lui dis miroir miroir gentil miroir suis-je la plus belle princesse menteuse du monde et qu' est-ce qu' il me dit le miroir oui oui ah ça me regonfle alors je peux partir mais à le le soir comme j' ai plus ma table de nuit alors je vais chercher d' autres miroirs comme ceux que je vois à l' instant même et je leur demande miroirs miroirs gentils miroirs suis-je la plus belle princesse menteuse du monde et ils me disent quoi oui tu es la plus belle princesse menteuse du monde ça c' est la démocratie des miroirs ça ça aide tout le monde à dire ça c' est la vérité hé hé et alors maintenant j' ai vraiment besoin de vous il était une fois normalement vous pourriez dire rien qu' une fois après je dis l' histoire d' un instant rien qu' un instant alors peut~ vous posez qui où comment pourquoi hein euh Corneille quoi qui où comment pourquoi vous pourriez dire qui où comment
Public:	pourquoi qui où comment
DeLaSalle:	pourquoi je vais vous le dire et vous recommencez mais qui où comment pourquoi ah oui il y en a un qui peut dire qui et l' autre où comment pourquoi je vais vous dire ça ça ça ça ça et alors euh après dis dis dis dis dis dis voilà c' est la la nouvelle chorale d' Argentan on recommence il était
Public:	une fois rien qu'
DeLaSalle:	une fois l' histoire d' un instant
Public:	rien qu' un instant qui où comment
DeLaSalle:	pourquoi je vais vous le dire
Public:	qui où comment
DeLaSalle:	pourquoi je vais dire ça ça ça ça ça dis dis dis ah oui ah ben oui une fois qu' on a raté ah c' est foutu ça commencé il y a longtemps c' est ça commencé il y a tellement longtemps que c' était déjà presque dans l' avenir nous étions ma grand-mère mon arrière-grand-mère et moi-même nous nous aimions beaucoup nous étions les deux êtres les plus chers l' un pour l' autre nous tournions autour de la terre et nous regardions tout ce qui existait et ça n' était que des merveilles et puis voilà la famille a grandi ma grand-mère a vieilli et puis voilà que moi j' arrivais j' étais un nouveau bébé je n' avais qu' à grandir et comme elle était très vieille alors on l' a mis au on l' a mise au grenier pour sécher et moi comme je n' étais pas encore capable de marcher de fabriquer quelque chose on m' a mis à la cave pour que je pousse avec les endives et puis voilà que la terre a tourné quelque chose s' est passé et nous nous sommes retrouvés tous les deux seuls sur la terre alors j' ai donné tout ce que j' avais à ma grand-mère et elle m' a donné tout ce qu' elle avait elle aussi qui lui servait plus et moi tout ce qui ne me servait pas encore ce qui fait c' est surtout nos âges que nous nous sommes donnés nos années moi les années que j' avais à vivre et elle les années qu' elle avait vécues alors de de petit bébé que j' étais euh et et et même nous avons changé de sexe tous les deux ce qui fait que de d' arrière-grand-mère elle est devenue grand-mère puis elle est devenue m~ mère enfin non elle était arrière-grand-mère elle est devenue arrière-grand-père puis elle est devenue grand-père puis elle est devenue père puis elle est devenue frère puis elle est devenue fils et puis elle est devenue mon grand amour de bébé et moi pendant qu' elle devenait ça je devenais euh euh fille femme mère grand-mère arrière-grand-mère et j' ai retrouvé ce bébé c' était plus moi c' était elle que je l' aime que je l' aime que je l' aime que je l' aime que je l' aime elle m' a ahh elle m' a dit maintenant que tu as un bébé il faut que tu t' occupes de de lui toute la journée toute la nuit quand il crie quand il a envie de faire pipi et je l' ai fait et puis elle s' est mis à grandir quand même un petit peu enfin il s' est mis à grandir mon grand amour de bébé et puisqu' il y a un enfant dans la maison il faut faire à manger il faut et faire frites faire des frites sans empoisonner toute la maison euh faire la vaisselle pendant que les autres regardaient la télévision et je l' ai fait il faut lui faire réviser ses leçons ses devoirs le s' occuper de lui l' habiller repriser aller acheter des vêtements préparer les vacances je l' ai fait il faut raconter des histoires toute la journée même la nuit quand il a peur quand il fait des cauchemars je l' ai fait et je suis devenue la meilleure conteuse du monde que j' avais jamais rencontrée parce que j' en avais jamais rencontré d' autres et alors pour lui faire plaisir à mon grand amour de bébé qui commençait à grandir un peu je lui ai raconté la plus belle histoire que j' ai jamais entendue qu' on ait jamais inventée encore plus belle que les mille et une nuits et alors pour lui faire plaisir j' ai inventé la plus belle princesse menteuse du monde qu' il puisse imaginer et il est tombé amoureux d' elle et il est parti avec elle je l' ai vu disparaître dans mon imagination et je ne sais pas où il est passé je me suis retrouvée toute seule dans mon landau alors que j' avais à peine fini de raconter il n' était plus là je me suis retrouvée toute seule et j' ai vu que j' avais vieilli pour rien je me suis mise à marcher dans la rue sans comprendre ce qui pouvait arriver les gens m' ont bousculée j' ai été cognée j' ai je je suis tombée on m' a marché dessus mais je me suis relevée on m' a retapée usée raclée repassée rabotée et ainsi je me suis mise à rouler comme les cailloux comme les feuilles emportées à l' automne je suis devenue comme un grain de sable emporté dans l' eau du Caniveau je suis devenue un presque rien presque rien du tout et à force d' être renversée poussée cognée balayée je suis arrivée dans un endroit qui n' était nulle part aucune route n' y menait aucune route n' en sortait il y avait des des montagnes qui étaient plates il y avait des plaines qui étaient montagneuses il y avait de il y avait euh euh des rivières qui étaient sèches elles transportaient de l' eau qui n' était faite que de cauchemars il y avait des des forêts de malentendus il y avait un eu-~ je suis arrivée de dans cette forêt de malentendus il y avait une grande allée qui n' était pas encore tracée et elle était bordée d' arbres centenaires qui n' avaient pas encore poussé et au bout de cette allée il y avait une maison cachée par des broussailles euh qui avaient disparu depuis longtemps et dans cette maison qui n' avait ni plancher ni murs ni toit ni fenêtres ni porte et qui n' était pas plus grande qu' un petit pois il y avait des millions de gens qui s' agitaient dans cette maison-là elle était entourée par un terre-plein qui était creux je me suis approché pour voir et j' ai vu des gens qui montaient les escaliers pour aller à la cave et ils n' avaient pas de jambes ils étaient culs-de-jatte ils allaient chercher des provisions que personne avait jamais apportées jamais apportées ils les mettaient sur leurs bras et ceux-là ils étaient manchots ils les descendaient dans la cuisine dont on ne savait pas encore où elle serait bien parce que la maison était très très pleine et dans cette cuisine il y avait le maître d' hôtel qui devait décider du menu qu' on allait manger le jour même il consultait un livre de recettes sur lequel rien n' était écrit et qui était maculé de sauce tomate et il était aveugle alors il il a lu la recette mais il était aussi muet et les marmitons qui devaient préparer la cuisine et les cuisiniers qui eux étaient soit qu' est-ce qu' ils étaient sourds voilà ils étaient sourds c' est vrai mais certains autres étaient décapités et ils hochaient la tête ou ils se léchaient les babines en écoutant la recette et ensuite ils se sont mis au travail il y avait une une table qui était sans surface ni pieds et moi je suis arrivé vieille mendiante du bout du monde presque rien du tout j' ai demandé l' hospitalité et tout de suite ils ils me l' ont offert ils sont vite allés chercher un tabouret qui n' avait pas de qui n' avait qu' un pied mais qui était cassé alors je me suis assise dessus et puis ils m' ont apporté un café dans une tasse en porcelaine et le café n' était pas fait mais passé alors j' ai bu et j' ai regardé tous ces gens j' ai vu qu' il y avait un grand feu au milieu de la cuisine et qu' est-ce qu' il faisait ce feu pardon il brûlait pas et il y avait un trépied qui était posé sur ce feu et qu' est-ce qu' il avait ce trépied il en avait pas et dessus il y avait un chaudron rempli à ras bord il avait pas de fond c' est ça et dedans qu' est-ce qu' il y avait si c' était plein il y avait un rrr-~ un un comm~ un civet un civet de lièvre que personne avait chassé mais personne ne l' avait tué non plus parce qu' il n' était pas encore né et et mais pourtant on l' avait bien dépecé coupé et on l' avait fait d' abord revenir comme vous savez avec des rondelles euh carrées d' oignons de carottes euh de poireaux euh et puis de lardons mais pas les rondelles et on l' avait fait déglacer dans du vin rouge qui était blanc et puis ensuite on avait mis euh le le le sang pour faire le le lapin et on avait laissé mijoter tout ça et ça sentait bon et ça sentait bon alors tout d' un coup le maître d' hôtel a crié c' est cuit c' est cuit tout le monde à table à table à table et tout le monde s' est mis à dégringoler les gens sont descendus de la cave ou alors ils sont montés du grenier et pour manger ils ont débarrassé la table ils ont mis une nappe en glace parce que c' était l' hiver et ils ont installé des assiettes mais parlez
Public:	invisibles
DeLaSalle:	oui ah invisibles mais en quoi elles étaient faites sans des assiettes sans fond des assiettes sans fond oui pourquoi pas oui oui be-~ ou en beurre et il y avait des fourchettes ça c' est facile ça sans dents euh des cuillères sans manches des couteaux ah le ment~ des verres sans pieds ou des verres à dents ou des verres euh sans rebord ah sans rebord des verres sans pieds sans rebord à dents sans dents sans dents et et on s' est tous mis et on s' en est fichu pleins la lampe et quand il y en avait plus on n' avait plus qu' à raconter et ça se remplissait à nouveau et on mettait des bananes des fraises des spaghetti des des des semi-remorques tout ce qu' on avait envie de manger il suffit de le dire pour que ça ça rentre dans la soupière que d' ouvrir la bouche et les oreilles pour que ça rentre dans notre ventre puis que ça ressorte en mots et quand on a eu fini de manger qu' on n' en pouvait plus que plus rien ne pouvait sortir ni rentrer alors on s' est tous arrêtés et moi j' ai vu combien c' était bien quand on est rien de partager un peu de rien avec d' autres riens ah oh petit bout petit bout de bien petit bout de chien petit bout de daim petit bout de faim petit boudi bout de lien petit bout de mien petit bout de nain petit bout de pain petit bout de rien petit bout de faim petit boudi bout de vin oh petit bout de mot petit bout de mot petit bout de mot petit bout de mot aidez-moi raconter à dire la vérité hé hé hé

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