_: RUGBY . Bleus et Blacks se rencontrent pour une symbolique troisième place La petite finale de la Coupe du monde opposera , jeudi 20 novembre , à Sydney , l' équipe de Nouvelle-Zélande à un XV de France composé pour l' essentiel de remplaçants . Au terme de la compétition , l' entraîneur des Français , Bernard Laporte , plaide pour un jeu moins figé L' ÉQUIPE DE FRANCE a été presque totalement remaniée pour la petite finale qui l' oppose jeudi 20 novembre , 10 heures ( en direct sur France 2 ) , au XV de NOUVELLE-ZÉLANDE . Treize des quinze joueurs tricolores alignés au départ de ce match pour la troisième place n' étaient en effet pas titulaires pour la demi-finale perdue contre l' Angleterre . LES ALL BLACKS , à l' inverse , aligneront leur équipe-type pour cette rencontre placée sous le signe d' un rugby ouvert , quand les deux finalistes de samedi 22 novembre , AUSTRALIE ET ANGLETERRE , passent pour les représentants d' un jeu moins spectaculaire , plus défensif et fermé . Les Anglais ont préparé cette finale dans une ATMOSPHÈRE D' ESPIONNITE , tandis que les Australiens se sont retirés dans un hôtel paisible de la ville de Coast Harbour , à six heures de route de Sydney . Quand il évoque le rugby moderne , Bernard Laporte dit « bien l' aimer » . Enfant , il adorait Béziers , machine à gagner des années 1970 . Joueur , il manoeuvrait le pack de Bègles et sa fameuse technique de la tortue , consistant à cacher la balle à l' adversaire et au public pendant toute une rencontre . Entraîneur du XV de France , il a essayé d' adapter son équipe au calvinisme du moment . Il prône une défense de fer ( 138 placages contre l' Angleterre en demi-finales ) , la loi du muscle et l' occupation militaire du terrain . Il affirme se sentir à l' aise dans ce schéma , initié en 1999 par les champions du monde australiens et aujourd'hui magnifié par l' Angleterre , qui est au rugby ce que le « catenaccio » était au football des années 1960 . Les défaites en demi-finales de la Nouvelle-Zélande et de la de la France face à l' Australie et à l' Angleterre , caricaturées en une débâcle du beau jeu face au rigorisme , le confirment dans cette idée . La froideur du sélectionneur lui intime que là seul est le chemin de la victoire . « On dit que les Anglais ne jouent pas bien , mais je constate qu' ils gagnent » , répète -t-il . Jeudi 20 novembre , au stade olympique , son équipe disputera aux All Blacks la finale des désenchantés , pour une symbolique troisième place . UN HOMME DE SPECTACLE Mais Bernard Laporte est également un homme de spectacle . Volontiers disert , il cherche la lumière , les caméras de télévision , soigne sa popularité , à l' inverse de Clive Woodward , son homologue anglais , qui cultive la détestation des autres comme une source supplémentaire de motivation . Entraîneur du Stade français , le premier il a fait venir des pom-pom girls et a remporté une des plus attrayantes finales du championnat de France , en 1998 . Pendant toute cette Coupe du monde , il a soigné l' image de marque des Bleus . Il sait que le rugby professionnel a besoin du public , qu' il doit être vendeur . Et là il s' inquiète . « Je ne suis pas certain que le jeu pratiqué aujourd'hui plaise forcément aux gens peu initiés » , expliquait -il après , mais également avant , la défaite contre l' Angleterre . Le technicien milite pour une modification des règles qui « offrirait plus de latitudes » à un jeu menacé de perdre son originalité . « Il faut faire attention , explique -t-il . Le rugby actuel ressemble de plus en plus au XIII : on favorise les ballons portés et les points de rencontre. » Le XIII , autrefois l' ennemi juré , devient doucement la référence . L' équipe d' Australie a ainsi récupéré quelques bulldozers de la maison d' en face , accentuant le métissage de son jeu déjà entrevu en 1999 . Bernard Laporte Laporte a lui-même fait entrer le loup dans la bergerie en s' adjoignant les services d' un treiziste anglais , David Ellis , chargé du secteur défensif . L' homme , jovial et direct , est moins un mercenaire qu' un nomade du ballon ovale . Ses récits de voyages , depuis trente ans , au sein du XIII , du XV mais également du football américain ou du football australien , sont instructifs . Ce libre-penseur constate que « le rugby à XV devient maintenant la synthèse de trois sports » . Du XIII , il adopte les techniques pour « la conservation du ballon » , du football américain « la spécialisation du buteur , d' ailleurs affirme -t-il , Jonny Wilkinson ne fait pas grand-chose dans le jeu , il est là pour transformer les pénalités » , et de l' aussie rules , le football australien , sport qui se pratique sur un terrain démesuré , « l' importance du jeu tactique au pied » . Jacques Brunel , autre adjoint de Bernard Laporte , estime que « sur les secteurs traditionnels , mêlée ou touche , il est difficile de développer une action , car les défenses sont bien en place » . Quant à David Ellis , il constate que le rugby à XV , devenu professionnel sur le tard , est en train d' adopter « le refus du risque » des sports suscités , plus anciens dans le business . Il plaide également pour une inflexion des règles vers plus de liberté . « Mais ce n' est pas nous qui déciderons , ce sont , estime -t-il , les télévisions , les gens qui ont de l' argent. » Rupert Murdoch a déjà pesé sur le jeu de l' hémisphère Sud en achetant les compétitions , comme il a modifié la durée des matches de cricket quand il en a acquis les droits télévisés . Les télévisions américaines ont adapté les temps morts du football américain à la durée de leurs spots publicitaires . La rediffusion rapprochée , cette semaine , des précédents Australie-Angleterre par les chaînes locales rend criante l' évolution du jeu et plus encore celle des morphologies . Olivier Merle , encore baptisé « l' homme et demi » par ses adversaires il y a moins de cinq ans , serait aujourd'hui un rugbyman presque standard avec son 1 , 98 m et ses 128 kilos . Dans les trente joueurs sélectionnés pour représenter l' Australie , sept seulement font moins de 100 kilos . Les autres équipes sont à l' avenant , avec leur contingent de quintaux . Cette surenchère musculaire et les tentations de recourir au dopage qui en découle ne sont pas sans inquiéter David Ellis . « Ça me fait peur , avoue -t-il . Je suis allé dans plusieurs clubs de football américain et je ne voudrais pas voir ce qui se passe là-bas arriver dans le rugby. » Cette Coupe du monde bruit des rumeurs de joueurs ayant pris du volume en un temps record , « information » distillée avec des sourires entendus . Tel joueur aurait ainsi développé dix kilos de muscle en deux ans . « S' il s' agit vraiment de kilos de muscle , dans un temps aussi court , c' est très surprenant . Ça doit être difficile de façon naturelle » , avance prudemment un responsable de la lutte anti-dopage française .