_: M. Raffarin amorce un changement de cap sur les baisses d' impôts Pour la première fois , lundi 26 août à La Rochelle , le premier ministre a jugé " prioritaire " la baisse des charges par rapport à la poursuite de la réduction de l' impôt sur le revenu . Il doute désormais que la croissance puisse atteindre 3 % en 2003 , comme il le postulait jusqu'ici S' exprimant à La Rochelle , lundi 26 août , le premier ministre a placé , pour la première fois , l' allègement des charges sociales au premier rang des priorités gouvernementales , ouvrant la voie à une pause dans la baisse de l' impôt sur le revenu , promesse phare de la campagne de Jacques Chirac . Il tranchait ainsi le débat interne à la majorité qu' avait lancé pierre méhaignerie , en déclarant , le 22 août : " La baisse de l' impôt sur le revenu peut bien attendre 2004 ou 2005 . " François Fillon a commencé , mardi 27 août , à recevoir les partenaires sociaux . Il souhaite compenser la hausse du coût du travail qui découlera de l' harmonisation du smic par une baisse des charges patronales . François Hollande ( PS ) accuse MM. Chirac et Raffarin d' avoir " multiplié des promesses qu' ils savaient impossible à tenir " . " NOUS METTRONS le curseur sur les priorités qui nous paraîtront les plus importantes dans les circonstances économiques de 2003 ( ... ) . Il va de soi qu' aujourd'hui , compte tenu de la situation de l' emploi , le dossier des charges sociales paraît prioritaire " : l' air de rien , comme s' il s' agissait d' une évidence , Jean-Pierre Raffarin , qui inaugurait , lundi 26 août , les nouveaux locaux de France 3 à La Rochelle , a amorcé , en quelques mots , un retournement dans les choix de politique économique du gouvernement . Car ce qui " va de soi " désormais pour le premier ministre n' allait pas de soi hier . Jusqu'ici , la baisse des charges sociales constituait , certes , l' une des priorités affichées par Jacques Chirac et son gouvernement , mais ne figurait pas en tête de liste : c' est la baisse de l' impôt sur le revenu qui avait la faveur de Matignon et de l' Elysée . Le président de la République en avait fait la promesse-phare de sa campagne électorale , en s' engageant à une diminution de 15 milliards d' euros - c' est-à-dire de près d' un tiers - en cinq ans . Pour preuve de sa détermination , M. Chirac avait souhaité , aussitôt réélu , que les Français profitent de cette mesure dès cette année . En dépit de comptes publics dégradés et d' une conjoncture incertaine , le gouvernement a donc préparé et fait adopter durant l' été par le Parlement un collectif budgétaire prévoyant une baisse de 5 % de l' impôt sur le revenu - ce qui représente 2 , 6 milliards d' euros . Au terme d' une semaine de débats internes à la majorité , lancés par Pierre Méhaignerie dans Le Monde sur la poursuite en 2003 de la baisse de l' impôt sur le revenu ( nos éditions du 22 août ) , le premier ministre a ainsi dévoilé , lundi , l' orientation probable du budget 2003 - qui sera examiné en conseil des ministres le 18 septembre . Certes , il a assuré que la baisse de l' impôt sur le revenu restait une priorité au même titre que celle de l' impôt sur les sociétés ; mais la conjoncture , et notamment le ralentissement des créations d' emplois , ne permet plus de la défendre à tout prix . SCEPTICISME AFFICHE M. Raffarin , qui affichait encore , le 11 août , dans une tribune publiée par Sud-Ouest , son " optimisme " sur la croissance , ne cache plus désormais son scepticisme . " Je crois que nous sommes dans la capacité de " , a -t-il estimé , lundi à La Rochelle , en ajoutant : " Est -ce qu' on pourra avoir ce rythme de 3 % sur l' année 2003 ? C' est une autre affaire [ que ] nous allons expertiser dans les jours qui viennent . " Le premier ministre doit , de fait , consulter les experts du ministère des finances dans les jours à venir . Or , c' est justement sur une prévision de 3 % de croissance que le gouvernement a calé , au début de l' été , l' évolution des dépenses de l' Etat pour 2003 préfigurant l' élaboration à partir de la même hypothèse du budget 2003 . Mais la majorité des économistes tablent à présent sur une croissance inférieure à 2 , 5 % l' an prochain , et le gouvernement semble souscrire à cette estimation . Dès lors , le budget doit nécessairement changer de visage : d' abord parce que les recettes fiscales seront insuffisantes ; ensuite - et surtout - parce que l' économie pourrait avoir besoin d' être soutenue , le " rebond " se faisant encore attendre . Sans rancune à l' égard de M. Méhaignerie , M. Raffarin a jugé sa " contribution " au débat " positive " , avec cette précision : " Nous sommes en grande compréhension ensemble . " Le président ( UMP-UDF ) de la commission des finances de l' Assemblée nationale avait estimé que l' hypothèse de 3 % de croissance pour 2003 était " un peu excessive " , déclarant sans ambages : " La baisse de l' impôt sur le revenu peut bien attendre 2004 ou 2005 . " M. Méhaignerie engageait aussi le gouvernement à faire " un pas vers la sincérité budgétaire " . Ces propos avaient ouvert une controverse au sein de la droite sur la manière dont les faibles marges de manoeuvre budgétaires attendues devaient être utilisées en 2003 . Si l' Etat n' a pas les moyens de financer toutes les promesses de M. Chirac , faut -il plutôt alléger les charges ou poursuivre la baisse de l' impôt sur le revenu ? M. Méhaignerie , lui , a encouragé le premier ministre à " concentrer ses efforts sur le pouvoir d' achat des bas salaires " - donc à alléger les charges pour augmenter le salaire net - , arguant que " ce gouvernement a besoin du soutien des classes populaires pour pouvoir faire les réformes nécessaires , notamment celle de l' Etat " . Nombre de parlementaires de la majorité , comme Jean Arthuis , le président ( UC ) de la commission des finances du Sénat , l' ont approuvé . Plus rares ont été les partisans - dont Edouard Balladur - d' une poursuite de la baisse de l' impôt sur le revenu . M. Raffarin a répondu , lundi , en ces termes : " Il va de soi que nous tiendrons compte de l' avis de tous les experts et donc , nous ferons à la fois quelque chose de sincère et de dynamique . " Le premier ministre pourrait construire un budget dans lequel plusieurs scénarios de croissance seraient envisagés . Dans ce contexte , l' ampleur de " l' intervention " qu' il promet quand même sur l' impôt sur le revenu ou sur l' impôt sur les sociétés varierait . De symbolique en cas de conjoncture molle , elle pourrait devenir plus significative en cas de rebond de l' économie . COMPENSER LE COUT DU TRAVAIL Quoi qu' il en soit , la baisse des charges , elle , sera effective . François Fillon , le ministre ( UMP-RPR ) des affaires sociales , doit aborder ce sujet avec les organisations syndicales et patronales , qu' il a commencé à recevoir mardi 27 août . M. Fillon compte alléger les charges patronales pour compenser la hausse du coût du travail pour les entreprises , qui découlera de l' harmonisation du smic ( Le Monde du 27 août ) . Les allégements de charges patronales , qui représentent aujourd'hui 15 , 6 milliards d' euros , seraient ainsi portés , à terme , à 19 milliards d' euros . La question est de savoir si le gouvernement souhaitera aller plus loin . En liant ouvertement le choix de sa politique économique aux évolutions de la conjoncture , M. Raffarin affiche un revirement certain . Dans son discours de politique générale , prononcé à l' Assemblée le 3 juillet , le premier ministre avait passé sous silence l' extrait de son texte qui indiquait que le rythme des baisses d' impôts dépendrait à l' avenir " de la vigueur de la croissance économique " . Le 14 juillet , M. Chirac avait affirmé , lui , que la baisse des impôts serait " plus ou moins liée à la croissance , mais plutôt moins que plus " .