_: Au-delà de Parmalat QUAND à l' automne 2001 puis au début de 2002 les Etats-Unis ont connu , avec Enron ou WorldCom , une cascade de scandales financiers , l' Europe a joué la vertueuse . Ainsi est l' Europe financière . Le refrain est dans toutes les mémoires : il est prévisible , entendait -on , que l' Amérique trébuche , c' est inscrit dans son système comptable ; en revanche , l' Europe sera épargnée par ces dérives , puisque son système comptable est moins « pousse-au-crime » . Las ! Deux ans plus tard , l' histoire à laquelle on assiste est inverse : l' Amérique a fait le ménage dans ses affaires ; et l' Europe , elle , s' est révélée beaucoup moins vertueuse qu' elle ne le prétendait . Les Etats-Unis ont vite réagi . Avec la loi Sarbanes-Oxley , ils ont pris des mesures énergiques pour punir lourdement les manipulations comptables . Et ils ont même , de facto , mis à mort Arthur Andersen , le plus gros cabinet comptable . Pendant ce temps -là , que faisait la vertueuse Europe ? Il faut se rendre à l' évidence : les « affaires » , que l' on disait auparavant inconcevables , s' y sont multipliées . Il y a d' abord eu le « cas » Vivendi , qui n' est évidemment pas de même nature , mais qui a révélé un grave problème de « sincérité » des comptes . Le gendarme boursier américain , la SEC , l' a récemment confirmé , en infligeant une lourde sanction à l' ancien patron du groupe , Jean-Marie Messier , et en mettant en cause « des faux communiqués de presse » ainsi que des corrections apportées aux résultats de « manière impropre » . Puis , il y a eu la tourmente Ahold , le géant néerlandais de la distribution , qui a été accusé de manipulation comptable , et est aujourd'hui au bord de la faillite . Plus grave , les autorités des marchés , en Europe , se sont gardées de se montrer aussi pugnaces que leur homologue américaine . Telle est , par exemple , l' autre confirmation qu' apporte l' affaire Vivendi : c' est la SEC américaine , paradoxalement , qui , la première , a pris une sanction ; la Commission française des opérations de Bourse ( COB ) , elle , s' est longtemps refusée à faire place nette et ne s' est que très tardivement intéressée à la « sincérité » des comptes du groupe . Il a fallu que M. Messier soit évincé pour que la COB s' y résigne , avant de transmettre finalement le dossier au parquet . Ainsi sont les autorités de marché , en France : dans une conception ultralibérale de leurs fonctions , elles exercent plus un pouvoir de régulation que de sanction . Mais cette critique en laisser-faire vaut aussi pour l' Europe . Si prompt à dénoncer la moindre aide d' Etat , Bruxelles n' a jamais mené de croisade contre ces paradis fiscaux qui sont au c oeur de l' affaire Parmalat . Qui ne se souvient de ce que répétaient , en choeur , ministres des finances , banquiers , grands patrons ou professionnels des marchés ? Tournant le dos à une harmonisation des règles , elle est beaucoup plus laxiste que les Etats-Unis . Avec le scandale Parmalat , elle récolte aussi ce qu' elle a semé .