_: Communication SOURIANT , pédagogue , répétant sa " détermination " , le premier ministre n' a pas manqué sa première grande apparition publique sur France 2 , jeudi 26 septembre . En maître es sciences de la communication , il a su apparaître comme il le souhaitait : un responsable décidé mais bonhomme , direct et proche des gens . En réponse aux interrogations sur le sens de la politique qu' il mène depuis cinq mois , Jean- Pierre Raffarin devait médiatiquement prouver que le gouvernement sait où il va . Il s' est acquitté de cette mission en multipliant les phrases calculées pour être simples et imagées : " Le cap est fixé , nous sommes au travail . Il reste beaucoup à faire " , " La France n' est pas en bon état " , " J' ai de la ténacité " , " Il faudra du courage " , " Tout est organisé " . La France est gouvernée , bien gouvernée , avec humanité et avec volonté , le bon équilibre . Le bilan de la politique menée depuis cinq mois ne correspond pas toujours à ce message rassurant d' un personnage rassurant . Le gouvernement mène une politique marquée autant dans le domaine économique et social que sur les questions de société par des inspirations datées des années 1970 . Le budget en fort déséquilibre présenté la veille est celui d' une droite d' avant l' Europe , dépensière et ignorante des disciplines de l' Union . Privé des recettes d' une forte croissance , Jean-Pierre Raffarin est pris de court et il hésite comme saisi d' effroi au souvenir des grèves du secteur public de 1995 . Il faut " maîtriser la vitesse [ des réformes ] pour ne pas bloquer la société française " , a argumenté le premier ministre , ajoutant que " l' horizon est la fin du quinquennat " . Sans doute . Mais cette stratégie d' attente est périlleuse , car faute de convaincre les acteurs économiques , elle risque de différer ou d' affaiblir la reprise . Cette prudence , cette valse-hésitation en matière économique et sociale ne se retrouve pas sur les questions de société . Là , Jean-Pierre Raffarin incarne un conservatisme sans faux-semblant . L' héritage n' est pas celui de Valéry Giscard d' Estaing d' Estaing , c' est celui de Georges Pompidou . Les Français ont fait savoir que l' insécurité était l' une de leurs préoccupations . Il est légitime que le gouvernement en tienne compte . Mais les ballons d' essai qu' on laisse s' échapper du ministère de l' intérieur - sur la réforme du code pénal et du code de procédure pénale - véhiculent une inquiétante mentalité , une disposition à rogner sur les libertés publiques comme on n' en voit dans aucun autre des quinze pays européens , Italie berlusconienne mise à part . Des appels à la dénonciation anonyme au régime de la garde à vue , en passant par une manière de méfiance généralisée à l' égard des jeunes , ce qui s' annonce est un recul des libertés . Et face aux objections des juristes , il est un peu court d' évoquer , comme l' a fait Jean-Pierre Raffarin , les états d' âme des " salons du cinquième arrondissement " . Le premier ministre était là dans un antiélitisme populiste , très loin du libéralisme conséquent du grand Charles Alexis de Tocqueville dont M. Raffarin s' est bien imprudemment réclamé .