_: L' enjeu de Porto Alegre LE MOUVEMENT antimondialisation doit gagner en crédibilité . Il a jusqu'ici parfaitement réussi à grossir et à bousculer les gouvernements et les organisations internationales , OMC , FMI , Banque mondiale . Mais cette réussite risque de n' avoir pas de longue suite si les arguments en faveur d' " une autre mondialisation " ne gagnent pas en poids et les propositions en réalisme . Tel est l' enjeu du Forum social mondial qui se tiendra à Porto Alegre , au Brésil , du 31 janvier au 5 février . Le pari n' est pas simple , parce que le succès du mouvement a reposé jusqu'ici , justement , sur son côté irréaliste , hétéroclite et joyeux . Il ne sera pas facile de continuer à croître tout en s' ordonnant , à poursuivre d' un côté sa conquête d' idéal attrape-tout et , de l' autre , à se limiter à quelques revendications sérieuses et à faire le tri entre des logiques internes très contradictoire entre protectionnistes et internationalistes . Les militants antimondialisation correspondent à l' époque . Le succès du mouvement vient de son premier objectif : s' opposer . Manifester contre la " marchandisation du monde " sur tous les modes , depuis le défilé festif aux actions violentes , à chaque réunion des organismes internationaux . L' ambition est radicale : bloquer la mondialisation ultralibérale . La méthode est inédite : il n' y en a pas . Pas de direction centrale , pas de mot d' ordre , l' initiative est laissée à chaque groupe sur le terrain et , autre innovation , sur le réseau Internet , qui joue un rôle majeur dans la coordination et dans le combat idéologique . Le mouvement refuse de se structurer comme ses prédécesseurs dans la lutte sociale du XIXe ou du XXe siècle et entend conserver sa forme en réseau non hiérarchisé . La déclinaison plurielle de ses buts sociaux , sanitaires , agricoles , écologiques l' y contraint . Le mouvement se veut d' abord une école civique internationale destinée à favoriser une prise de conscience dans l' opinion mondiale , chez les jeunes en particulier . Il n' y a dans ce cadre " rien à négocier " avec les instances politiques nationales ou internationales . L' action doit continuer , sans préalable , sans direction fixée , au gré des possibles , au mieux , pour convaincre et grandir . A côté de ce spontanéisme , le mouvement veut aussi élaborer cette autre mondialisation qu' il assure possible . Le Forum social de Porto Alegre en est l' occasion annuelle . Il s' agit là de proposer et non plus de s' opposer . Mais si le dialogue entre les 50 000 participants venus de tous pays avec des préoccupations très diverses est foisonnant , il est resté souvent folklorique . Toutefois , deux revendications sont de bonnes pistes . La suppression des paradis fiscaux , d' abord . Aucun gouvernement ne l' imagine possible , à tort . Ces îlots autorisent le financement du terrorisme comme on l' a vu le 11 septembre . L' autre proposition , celle de réformer les organisations internationales pour les rendre plus démocratiques , est également justifiée . C' est là que doivent porter les réflexions de Porto Alegre .