_: Le hip-hop , ou l' art contre la violence des ghettos Un spectacle produit par Châteauvallon et la MC 93 de Bobigny sur les vingt ans de ce style artistique ON SE CROIRAIT dans une sauteuse à pop-corn géante . On se trouve tout simplement à la MC 93 de Bobigny , en pleine répétition de « beat-box » , cette technique vocale rap détonante obtenue la bouche vissée au micro . Amar Djennane , ambassadeur d' excellence de cette discipline , tape dans le mille . Impossible de décrire ces éruptions étrangement organiques qu' on dirait parfois jaillies d' une boîte à rythmes . Gros son viscéral façon bruitage cinéma qui réchauffe et fait vibrer . « Ils peuvent vraiment imiter tout un orchestre » , glisse , profitant d' une pause , Christian Tamet , subtil connaisseur de la scène hip-hop et directeur de Châteauvallon ( Var ) . Sur le qui-vive , il tient à l' oeil la trentaine de musiciens et danseurs qui débarquent pour l' ultime mise au point du spectacle Les Vingt Ans du hip-hop en France , produit par Châteauvallon et la MC 93 , sur une idée des danseurs Karim Barouche et Xavier Plutus . « No business » , précisent d' emblée les deux complices pour évoquer cette soirée spéciale , mitonnée comme un gâteau d' anniversaire avec plein de crème fouettée , des cierges magiques et que sais -je encore . Dans les loges , attablée autour du planning de la soirée , « l' internationale des lascars » , selon l' expression de Christian Tamet , serre les boulons de la soirée , salue les potes , s' emballe . « Pas question de sombrer dans une affaire de fric comme le rap n' arrive pas à l' éviter , appuie Xavier Plutus . Ici , c' est une affaire de coeur , une histoire familiale à l' ancienne avec les valeurs du hip-hop comme le respect , le partage . Le fric a fini par diviser les disciplines . On voit de moins en moins de soirées comme autrefois qui rassemblaient le graf , la danse , le DJ , la beat-box ... » Karim Barouche poursuit : « C' était le moment ou jamais de s' en offrir une pour marquer le coup de vingt ans de boulot. » Marquer le coup : enfoncer quelques clous . Au début des années 1980 , Afrika Bambaata , du quartier new-yorkais du Bronx , milite pour les valeurs positives de l' art contre la violence du ghetto . Sur TF1 , l' émission « Hip-Hop » , animée par Sydney , prend le relais des Américains et pose les premières pierres d' un mouvement qui va bouleverser les cités et les théâtres . Le hip-hop est devenu une culture à part entière , et la danse , dont on ne compte plus les adeptes en banlieue et ailleurs , appartient , quoiqu' en disent certains , au contemporain . « Lorsque j' ai découvert la danse hip-hop au début des années 1990 , j' ai su tout de suite qu' il était urgent de lui donner les moyens de se développer , rappelle Christian Tamet , qui se trouvait alors à la tête du Théâtre contemporain de la danse , à Paris , et lança les premières Rencontres de La Villette en 1996 . Lorsque Karim Barouche et Xavier Plutus , avec qui je travaille depuis deux ans , m' ont parlé de ce projet , je leur ai donné carte blanche . Ces danseurs possèdent éthique et technique . Que ce soit dans les quartiers de Châteauvallon , en Colombie ou au Brésil , en quelques semaines , ils permettent à des jeunes de monter un petit spectacle . La force du hip-hop , c' est la générosité avec laquelle il est partout chez lui. » INVENTER LA SUITE Généreux , le plateau de ces Vingt Ans ... l' est sans conteste : les pionniers DJ Chabin et Dee Nasty pour le tempo , tous les styles de danse , le dubble dutch ( technique de sauts chorégraphiés entre deux cordes , tournant l' une à l' intérieur de l' autre ) , des danseurs évidemment , mais aussi les Funky Ladies . Pas question de commémorer , mais de donner un coup de fouet au passé pour se donner une vraie chance d' avenir . Les interprètes historiques - Alex Benth , Hakim Maïche , Pascal Blaise Ondzie , Régis Truchy ... - flirtent avec la quarantaine , ils continuent de danser , ils veulent surtout inventer la suite . Chorégraphier bien sûr , transmettre aussi . « Il ne suffit pas d' être bon techniquement mais de faire des choix et de conserver l' esprit du hip-hop » , affirment Karim Barouche et Xavier Plutus . Ils citent les comédies musicales grand public qui ont inspiré nombre de danseurs hip-hop . Evoquent les « battles » , ces combats de danseurs qui « cassent les corps et plombent l' imagination » . S' inquiètent de l' atomisation des compagnies pionnières , de la menace de formatage qui crispe les spectacles des plus jeunes . DJ Chabin vient d' arriver , mais Sydney , monsieur Loyal de la soirée , est malade . C' est Christian Tamet qui le remplacera lors de la répétition : « La générosité des danseurs hip-hop a changé ma vie et ma façon de concevoir mon métier . Que d' autres profitent de cette capacité à créer des liens directs et d' égal à égal me rend heureux. » « Les Vingt Ans du hip-hop » : soirée proposée par Karim Barouche et Xavier Plutus . MC 93 , Bobigny ( Seine-Saint-Denis ) , le 20 novembre . A Châteauvallon , Ollioules ( Var ) , les 28 et 29 novembre , à 14 h 30 et 20 h 30 . Tarif 18 euros . Gratuit pour les détenteurs de la carte Châteauvallon ( 15 euros ) . Tél. : 0 - 800 - 089 - 090 .