_: Nous voulons offrir le Festival d' Avignon aux artistes Jean-Jacques Aillagon l' a annoncé le 27 novembre : Vincent Baudriller , actuel administrateur de production du festival , succédera à Bernard Faivre d' Arcier à la tête de la plus importante manifestation théâtrale internationale . Entretien avec le nouveau , et jeune - 35 ans - , pape d' Avignon Quelles raisons vous ont in- cité à présenter votre candidature à la direction du Festival d' Avignon d' Avignon , avec Hortense Archambault comme directrice adjointe ? Hortense et moi travaillons ensemble au festival depuis quatre ans et nous avons développé une complicité qui repose sur un point essentiel : l' accompagnement des artistes dans leur travail , sur le plan de la production pour Hortense , et sur celui de la programmation pour moi . Quand nous avons appris que Bernard Faivre d' Arcier ne serait pas renommé , nous avons décidé de nous jeter dans la bataille . Le festival , c' est avant tout un public extraordinaire et disponible - cent mille personnes s' y rendent chaque année - et la mémoire d' une histoire qui remonte à Jean Vilar , pour laquelle nous avons un amour énorme . Les festivals que j' ai vus un peu partout dans le monde , ces dernières années , m' ont convaincu qu' Avignon reste unique , dans sa rencontre entre une ville , des artistes et un public . Que s' est -il passé entre le moment où vous avez fait acte de candidature , le 8 septembre , et votre nomination aujourd'hui ? Nous avons suivi le chemin de croix habituel . Nous avons rencontré à plusieurs reprises les conseillers et le ministre . Jean-Jacques Aillagon me disait que le fait que je travaille dans l' équipe de Bernard Faivre d' Arcier d' Arcier était un problème , parce qu' il avait envie de quelque chose de nouveau . Mais en même temps , il n' a jamais écarté notre candidature . Nous n' avons donc pas cessé d' affiner notre projet , en accord avec le ministère qui va proposer nos noms au conseil d' administration du festival , lequel se réunira en décembre . Nous devrions recevoir alors notre lettre de mission et être officiellement nommés . Quel est l' axe principal du projet que vous entendez mener ? Faire un festival d' artistes plutôt que de spectacles . Les artistes qui ont un univers propre , construisent une oeuvre sur la durée , m' intéressent , plutôt que les faiseurs de spectacles qui enchaînent les mises en scène sans avoir de projet ou de ligne directrice . Il est vrai qu' il y a une forme d' usure à Avignon : les artistes viennent présenter un spectacle , la presse est là , ils sont très tendus . Nous avons eu pas mal de dépressions de metteurs en scène après leur passage dans la Cour d' honneur , ces dernières années ... Nous voulons offrir le Festival aux artistes . Nous allons donc garder le même volume de spectacles , une quarantaine , mais nous inviterons moins de metteurs en scène ou d' auteurs , ce qui permettra à chacun de déployer son oeuvre , et au public de pénétrer dans leur univers . C' est ce que nous avons fait , cette année , avec Rodrigo Garcia ou Pippo Delbono . Quand j' ai rencontré Rodrigo Garcia à Buenos Aires , il m' avait dit que le Festival était un supermarché de la culture et qu' il ne tenait pas beaucoup à venir . Mais on a discuté , on a pris le temps , et finalement , nous avons présenté un vrai parcours Rodrigo Garcia dans le festival , avec trois mises en scène , la projection d' un de ses films , et trois lectures . Je tenais beaucoup à montrer que Rodrigo Garcia , qui est polémique et provocateur dans ses formes , n' est pas seulement quelqu' un qui balance des saucisses en scène , mais qu' il tient un vrai propos d' auteur . A la fin , quand je voyais des jeunes gens lui courir après pour qu' il dédicace ses textes , j' étais vraiment ému . Cela a été un peu la même chose avec Pippo Delbono , pour qui il n' y avait pas beaucoup de réservations à l' ouverture du festival . A la fin , c' était bondé . C' est dans ce cadre que vous avez décidé d' associer chaque année un metteur en scène au festival ? Oui . Pour pousser le bouchon un peu plus loin . Nous avons envie de nous confronter à des artistes qui ont une pratique particulière et bousculent nos habitudes . Cela va nous obliger à reconsidérer à chaque édition les conditions de production et le contenu artistique . L' artiste associé travaillera en amont avec l' équipe . Il proposera des projets en écho avec son oeuvre et présentera lui-même une création et deux ou trois spectacles . Il y aura ainsi huit à neuf spectacles autour de cet artiste , à qui le festival dit : Voilà , nous t' ouvrons les bras et t' offrons ce qui peut te faire rêver . Thomas Ostermeier , Jan Fabre , Josef Nadj et Frédéric Fisbach sont les premiers artistes associés . Sur proposition du ministère , ou de vous-même ? C' est moi qui les ai proposés . Je suis intransigeant sur ma liberté de programmation . J' ai choisi des artistes qui mènent des recherches spécifiques très fortes et dans des directions très différentes , des hommes curieux des autres , aussi . Cela va permettre de donner une couleur au Festival . J' aime en Thomas Ostermeier qu' il interroge la réalité d' aujourd'hui , en travaillant essentiellement avec des auteurs contemporains . En Jan Fabre , qu' il explore le mystère de l' âme et du corps , la folie et le chaos . En Josef Nadj , la posture d' artiste voyageur . En Frédéric Fisbach , le désir de rencontrer d' autres artistes pour créer . Notre gageure est de les inviter devant cent mille spectateurs . Ce qui nous guide est le pacte de confiance du public avec le festival . Selon une enquête récente , 70 % des spectateurs d' Avignon ne connaissent pas le nom du directeur du festival . Qu' en pensez -vous ? C' est très bien comme ça . Cela veut dire que nos prédécesseurs étaient au service d' Avignon . Je m' inscris dans cette lignée , que je trouve belle .