_: Santé . La canicule tue Depuis jeudi , la chaleur a causé plusieurs décès de personnes âgées . Les services d' urgence ont du mal à faire face et tirent la sonnette d' alarme . La responsabilité des pouvoirs publics est mise en cause . La prolongation de la canicule fait des ravages . Et plus seulement d' ordre écologique . Même si les chiffres exacts sont inconnus , il est maintenant certain que la chaleur tue . Les personnes âgées sont les premières victimes de cette " hécatombe " , pour reprendre le terme du docteur Patrick Pelloux . Le président de l' Association des médecins urgentistes hospitaliers de France ( AUHF ) n' hésite pas à parler d' une cinquantaine de morts dues à la chaleur en quatre jours sur la région parisienne . Un bilan contesté par la direction générale de la santé , qui assure ne posséder aucune statistique réelle . La difficulté à établir un chiffre précis tient au manque de recul . Mais également à la multiplication des paramètres à prendre en compte . La chaleur est rarement la cause unique d' un décès . Comme le reconnaît Patrick Pelloux , " les personnes qui meurent ont des pathologies sous-jacentes : des cancers , des problèmes cardio-vasculaires ou d' autres soucis de santé qui les fragilisent " . Pour Dominique Meyniel , chef de service aux urgences de l' hôpital Tenon , la canicule est " comparable à une épidémie de grippe , en plein hiver : elle fauche les personnes en fin de vie . Une personne en bonne santé n' a aucun risque de succomber à des températures extrêmes " . À la maison de retraite , une infirmière pour 72 personnes Reste que la situation prend des proportions inquiétantes . " C' est l' horreur , estime -t-on au SAMU de Saint-Denis . Le nombre de demandes d' intervention pour une première quinzaine d' août est anormalement élevé . " Aux urgences d' Île-de-France , la fréquentation a enregistré une augmentation de 100 % en une semaine par rapport à la même période l' été dernier . Le chef de service de l' hôpital Tenon reconnaît n' avoir jamais connu pareille situation en seize ans de métier . " D' habitude , aux urgences , on se situe autour d' un décès par semaine , explique -t-il . Depuis la semaine dernière , on en a déjà enregistré dix . " Selon lui , tout s' est joué ces quatre derniers jours . " Au début , les patients tenaient le coup . Et puis , petit à petit , la résistance des personnes les plus fragiles s' est émoussée . " On est loin des traditionnels cas de déshydratation enregistrés chaque année à cette période de l' été . " La plupart des patients qui viennent nous voir souffrent de vrais cas d' hyperthermie , poursuit -il . Avec des fièvres de 40 ou 41 øC ! Elles sont dans un état proche de la mort , au-delà de ce que l' on peut faire pour elles . " Pour ne rien arranger , l' été est une période dramatique dans les services d' urgence . Manque de lits , manque de personnel : les médecins ont du mal à faire face à l' afflux de malades . À l' hôpital Tenon , où deux salles de médecine sont fermées , on a résolu le problème en colonisant le service de chirurgie . Mais la solution reste imparfaite . " En chirurgie , le suivi est moins régulier , explique le docteur Meyniel . On ne passe voir le malade qu' une fois par jour , au lieu de cinq à six fois en médecine . " Une saturation qui a des répercussions en chaîne . À la maison de retraite médicalisée des Lilas , à Vitry-sur-Seine , les personnes âgées victimes d' hyperthermie se voient refuser le transfert aux urgences . " Tout le monde est débordé , explique le médecin , Françoise Nay . Quand on appelle le 15 , ils nous répondent de prendre en charge les malades nous-mêmes , sur place . C' est ce qu' on fait . Mais on ne peut pas dire que ce soit idéal . " Effectivement , avec une infirmière pour 72 personnes , il est difficile d' accorder des soins et de l' attention à tout le monde . Sans parler des problèmes de compétence . De l' aveu même de Françoise Nay , une fois les perfusions posées , le personnel soignant se trouve un peu démuni . Polémique sur l' impréparation des pouvoirs publics Pour Patrick Pelloux , la France est au bord de la " catastrophe sanitaire " . Le président de l' AMUHF accuse les autorités sanitaires d' une gestion " incroyablement scandaleuse " de la situation . " Pendant l' épidémie de SRAS au printemps dernier , l' état d' alerte a été décrété dans les hôpitaux , souligne -t-il . Pareil pour l' anthrax fin 2001 . Dans les deux cas , cela a été la mobilisation générale , alors qu' il n' y a pas eu de mort à déclarer . " Ce discours ne fait toutefois pas l' unanimité chez le personnel médical . Pour le docteur Meyniel , il est trop facile de rejeter la faute sur les pouvoirs publics . La situation n' est pas différente d' un hiver très froid . Le gouvernement n' en est pas responsable . Une position assez proche de celle de Bernard Kouchner . Pour l' ancien ministre socialiste de la Santé , qui s' exprimait hier sur Europe 1 , " si on pense que le gouvernement va changer la nature des choses et la température , on se trompe " . De l' avis du docteur Meyniel , la solution repose sur la solidarité de proximité . Il faut s' occuper des personnes âgées autour de soi , passer les voir régulièrement , veiller à ce qu' elles boivent , contrôler que tout aille bien . Des précautions importantes , certes , mais qui n' excluent pas d' autres moyens d' action . Dans cette optique , les mesures d' urgence prises par l' Assistance publique des hôpitaux de Paris sont les bienvenues . Pour faire face à la situation , la direction de l' AP-HP a décidé d' augmenter sa capacité en lits et de reporter les hospitalisations programmées non urgentes . Une solution provisoire , en espérant que la baisse prochaine des températures promises par Météo France arrive vite ...