_: Sept jours ( Toutes les énergies , tous les regards sont désormais tournés vers le 1er mai . Ce jour -là , l' imposture sociale de Le Pen doit être défaite . ) La semaine qui s' annonce va être décisive pour l' avenir de notre pays . Les centaines de milliers de manifestants qui défilaient samedi un peu partout en France ont pris la mesure du défi à relever . Il reste sept jours pour convaincre des millions d' électeurs d' utiliser le bulletin Chirac le 5 mai . Pas un seul de ces jours ne sera de trop . Toutes les mobilisations vont compter . Toutes les explications devront être déployées . Depuis une semaine , la jeunesse donne le ton . Elle est entrée massivement en campagne pour écraser le score de Le Pen dans les urnes . Samedi , en province comme dans l' immense défilé parisien , elle a encore fourni le gros des troupes . La fin des vacances scolaires devrait décupler son énergie . Tant mieux . Son exceptionnel engagement pourrait beaucoup compter dans le résultat final . Stimulés par l' entrée massive des jeunes dans la bagarre électorale , tous les combats s' épaulent . Hier , dans toute la France , les cérémonies de la Journée de la déportation ont connu une émotion et une affluence inégalées . L' appel à la mémoire lancé par les anciens a répondu en écho à l' invitation des jeunes à penser au monde de demain . Sur les marchés de France , dans les cages d' escalier , les militants communistes , bien que sonnés par leur résultat électoral , sont engagés à fond , sans ambiguïtés ni arrière-pensées . Dans les églises , on n' a parlé dimanche que de cela . Et les paroles d' Olivier de Béranger , président de la commission sociale des évêques de France , ont partout résonné : " Le FN relève d' une culture qui est contraire à l' inspiration chrétienne . " En fin d' après-midi , c' est le monde la culture , toutes professions confondues , qui a investi le Zénith à Paris , pour dire son refus de la haine et de la xénophobie , tandis qu' on manifestait à la même heure dans les rues de la capitale contre l' antisémitisme à l' appel de la LICRA . Toutes les énergies , tous les regards sont désormais tournés vers le 1er Mai . Ce jour -là , Le Pen veut faire une démonstration de force . Mais ce pourrait bien être le contraire . La mobilisation des démocrates s' annonce exceptionnelle . Et surtout , cette journée traditionnelle de solidarité du monde du travail , de mobilisation sociale et syndicale peut marquer un tournant . Elle doit servir à faire tomber le masque dont s' affuble le leader de l' extrême droite . Elle doit dénoncer l' imposture sociale à laquelle il se livre . Qu' aurait à gagner le monde du travail à une victoire de Le Pen ? De meilleurs salaires , des emplois qualifiés , des nouveaux droits et des pouvoirs d' intervention , de meilleurs services publics ? Mais voilà tout ce qu' exècre le chef du FN . Alors , quoi , une meilleure sécurité ? Mais c' est confondre le couvre-feu et la tranquillité , les milices armées et une police de service public . De Le Pen , le monde du travail ne peut attendre que du sang et des larmes , et pour le coup les mots ne sont pas usurpés . Tous les régimes d' extrême droite sont des régimes de régression sociale et culturelle . Derrière les diatribes anti-immigrés , se cache le refus de toutes les solidarités ouvrières . La société lepéniste , c' est la société de la loi du plus fort , celle où les plus faibles doivent être écartés , c' est un libéralisme féodal et primaire . Pour vendre ses dangereux boniments , Le Pen cherche à incarner le rejet de la politique de Jacques Chirac . Il faut déjouer le piège . Pour sortir de la crise , redonner de la dignité aux plus démunis , la France a besoin d' un sérieux coup de barre antilibéral , pas d' un sérieux retour en arrière . Il reste sept jours pour s' expliquer . Dans les cités , sur les lieux de travail , dans les quartiers , sur les marchés , le désespoir a gagné trop de terrain . C' est peut-être le moment de la reconquête politique .