_: L' après EDF ( La leçon est à retenir : quoi qu' en laissent paraître les rapports de forces électoraux du printemps , le gouvernement n' a pas les coudées franches . ) Après le refus majoritaire exprimé le 10 janvier par les électriciens et gaziers sur le relevé de conclusions définissant l' avenir de leur régime de retraites , quelles conséquences fallait -il tirer de ce vote ? La conclusion venue de la Fédération CGT énergie , qui avait été à l' origine de cette consultation démocratique , a été immédiate : respect de l' opinion majoritaire , pas de signature de l' accord . Mais celle qui émane de l' Élysée et du gouvernement n' a pas non plus attendu . " Nous ne tiendrons aucun compte de ce vote " , ont successivement déclaré en substance Francis Mer Mer , Jean-Pierre Raffarin et Jacques Chirac . Un seul message , donc , " on continue comme si de rien n' était " , révélateur de la conception que les dirigeants de la droite au pouvoir rêvent d' imposer dans la concertation engagée sur la réforme du système de retraites . Mais , touchés au vif , l' Élysée et Matignon ne se contentent pas de ce passage en force . Ils cherchent dans la foulée à imposer une caricature assez classique : celle qui résumerait la vie de ce pays à l' opposition de deux camps : un camp de la réforme , emmené , devinez par qui , Jacques Chirac et Jean-Pierre Raffarin bien entendu ; et un camp du conservatisme , rassemblant tous ceux qui leur résistent . Mis en difficulté par un puissant mouvement social au cours de l' hiver 1995 , Jacques Chirac avait déjà largement usé cette corde . Aujourd'hui , le même refrain est repris . Et n' en doutons pas , il va être abondamment utilisé dans les jours à venir pour tenter de lézarder l' unité syndicale réalisée il y a quelques jours sur les retraites autour d' une plate-forme revendicative commune et d' un appel à manifester le 1er février . La pression est mise sur la CGT , qui serait ainsi sommée de choisir , à l' aune de cette caricature , son camp . Une fois de plus , ceux qui rêvent d' un tel scénario risquent fort d' être déçus . Le vote chez EDF-GDF est un moment important et tous ceux qui voudraient en éluder les leçons en seront à coup sûr pour leurs frais . En effet , au-delà des opinions qui partageaient les salariés de ces entreprises sur les acquis ou les limites du relevé de conclusions , et on sait qu' elles partageaient aussi la CGT jusqu'au plus haut niveau de sa direction fédérale , c' est à l' évidence le refus plus global de se laisser entraîner dans un engrenage de privatisation et de liquidation des acquis qui a emporté la décision . Une majorité de salariés ont considéré que les acquis contenus dans l' accord ne pesaient pas assez lourds face à ses points de faiblesses , et surtout face aux prétentions affirmées , par ailleurs , par le gouvernement en matière de retraites et de services publics . La leçon politique est à retenir : quoi qu' en laissent paraître les rapports de forces électoraux issus du printemps , le gouvernement n' a pas les coudées franches . Pour rebondir , il cherche aujourd'hui à diviser , car il ne veut pas d' un débat sur la réforme des retraites dans le pays qui lui impose un autre terrain que celui qu' il entend choisir . La plate-forme commune mise au point par sept syndicats en vue du 1er février l' inquiète . Contrairement à ses déclarations antérieures , Jacques Chirac met aujourd'hui l' accent sur le maintien des principes de la répartition et du droit à la retraite à 60 ans , mais il vise une mise en cause plus insidieuse de ces droits . Le vote EDF-GDF , la plate-forme syndicale , tout cela montre que les salariés ne se contentent pas du flou que le gouvernement tente d' entretenir . Si le monde du travail joue serré , il peut non seulement écarter les mauvais coups , mais imposer une bonne réforme des retraites , dont les salariés ont absolument besoin pour relancer l' avenir d' un régime apprécié de tous .