_: Clémence royale ou démocratie sociale D' un côté , des histoires ordinaires de militants syndicaux ; de l' autre , des intimidations policières et judiciaires disproportionnées . José Bové est la partie visible de l' iceberg . Les faits que nous rapportons aujourd'hui sont graves . Très graves . Un syndicaliste de La Poste poursuivi pour un feu de palettes , un autre , militant dans une banque , menacé de sanction pour un tract envoyé par e-mail , d' autres encore interpellés à la fin d' une manifestation ou après une action revendicative destinée à défendre leur outil de travail ... tous témoignent , abasourdis par la violence des poursuites dont ils sont victimes . D' un côté , des histoires ordinaires de militants syndicaux ; de l' autre , des intimidations policières et judiciaires totalement disproportionnées . Comme si la menace d' une sanction devait désormais pendre comme une épée de Damoclès au-dessus de la tête de n' importe quel citoyen décidé à ne pas se laisser faire . L' accumulation des cas , manifeste depuis des mois , est accablante . Nous assistons bel et bien à une tentative de criminalisation de l' action syndicale au moyen d' une pénalisation individuelle répétée de militants . José Bové est la partie la plus visible d' un iceberg malheureusement très profond . Ce recours à l' intimidation est le pendant d' une politique violemment antisociale . Projets antidémocratiques , parodies , voire absences totales de négociations , accords minoritaires , forcing parlementaire , mépris des représentations syndicales , associatives ou politiques quand elles s' opposent au diktat gouvernemental ... le scénario se répète désormais dans tous les cas . Alors que le jusqu'au-boutisme patronal et gouvernemental ne laisse souvent aucun choix aux salariés concernés , les grèves sont réduites à du chantage et de la prise d' otages . Le service minimum est brandi comme une menace , comme le symbole d' un couperet qui devrait couper l' herbe sous le pied de l' action syndicale . C' est une inquiétante évolution que celle qui voit le pouvoir se couper du peuple , mais redoubler de coups pour s' en protéger . C' est surtout une répression illusoire face à la montée d' une opposition majoritaire à sa politique de démolition sociale . Imprudent et sûr de lui , conseillé par un Nicolas Sarkozy aveuglé par les projecteurs médiatiques , le pouvoir pensait trouver l' onction publique en Corse . Le label du suffrage universel apposé sur un référendum concocté sur mesure devait faire taire la montée des résistances . Mais les Corses ont voté . Et le gouvernement a perdu . Preuve que la température populaire n' est pas celle des thermomètres officiels . Gageons que d' autres mésaventures seraient au programme si le pouvoir tentait le diable à propos des retraites , de l' école ou des intermittents . Alors que reste -t-il à ceux qui ne veulent pas démordre de leurs projets libéraux : le bâton , l' arme des puissants , et la clémence royale , délivrée au compte-gouttes depuis les jardins de l' Élysée . Quatre petits mois pour José Bové , autrement dit la prison jusqu'en décembre , et pour le reste , circulez , y'a rien à voir . Le drapeau des libertés est en berne . Pour lui redonner des couleurs , l' amnistie de toutes les discriminations et sanctions pour activités syndicales serait la seule des mesures qui vaillent . Au-delà , la modification des règles sociales pour permettre le respect de l' opinion majoritaire des salariés et de leurs syndicats devient un enjeu essentiel . La démocratie sociale est , entre autres , à ce prix . Quelle est donc cette République française qui revendique le suffrage universel comme un de ses piliers et le bafoue tous les jours à l' entreprise et dans la vie sociale ?