_: DEVOIR D' INGÉRENCE Si l' urgence n' échappe plus à personne , seules des mesures concrètes seront capables de faire fléchir Sharon . On assiste enfin à un regain spectaculaire d' activités diplomatiques au Proche-Orient . Les jours qui viennent , marqués par l' arrivée de Colin Powell sur place , s' annoncent sans doute cruciaux . Sans qu' on puisse bien entendu encore parler d' un retour de l' espoir vers un règlement négocié , la communauté internationale semble au moins avoir saisi l' urgence de la situation . Les clignotants d' alerte s' allument en effet les uns après les autres . Kofi Anan se déclare " franchement horrifié " par la crise humanitaire que les destructions de l' armée israélienne provoquent sur les territoires palestiniens . Les risques de débordement de la guerre se confirment . Déjà les escarmouches se multiplient sur la frontière israélo-libanaise . Et dans une région , oh combien stratégique pour les intérêts américains , les régimes arabes alliés traditionnels de Washington voient d' un bien mauvais oeil , l' effervescence qui gagne leurs opinions publiques et craignent une déstabilisation , voire une progression des mouvements intégristes qui font leur miel de l' agression israélienne . Du coup Washington a quitté une posture très complaisante à l' égard d' Israël et le secrétaire d' État américain semble décidé à rencontrer samedi Yasser Arafat . On évalue encore mal le degré d' inflexion de l' administration américaine . Mais quoi qu' il en soit de ses intentions et de sa détermination le devoir d' ingérence international est plus que jamais à l' ordre du jour . Il est plus que temps en effet d' arrêter un Sharon obsédé par ses chimères ultra-nationalistes qui annonce de plus en plus clairement la couleur en intégrant les partisans ouverts du grand Israël dans son gouvernement . Le premier ministre israélien dénonce " les pressions " et tente de manoeuvrer en accusant sans rire , un Arafat assiégé , obligé de s' éclairer à la bougie , d' être le responsable de l' horrible attentat terroriste de Haïfa . Une manoeuvre d' autant moins crédible que tous les observateurs sérieux de la scène israélienne relèvent à quel point Tsahal s' en prend prioritairement aux membres de l' Autorité palestinienne , détruisant systématiquement ses infrastructures , alors que les fous de dieu du Hamas sont remarquablement peu touchés , que leur chef , le cheikh Ahmed Yassine , libre de ses mouvements , multiplie déclarations incendiaires et interview sur CNN ou Al Jehzira . La ficelle est si grosse que même les diplomates américains , singulièrement englués depuis le 11 septembre dans leur propre rhétorique antiterroriste , semblent en avoir perçu toute la perfidie . Pour Sharon qui a choisi la guerre il vaut mieux enfoncer tout ce qui peut représenter l' ébauche d' un État , d' une société civile palestinienne quitte à ne plus avoir comme " partenaires " que les ennemis de la paix . Car ceux là , capables des pires atrocités sur les populations civiles , peuvent lui fournir sans cesse de nouveaux prétextes d' intervention militaire . Mais si ces manoeuvres font long feu , si l' urgence n' échappe plus à personne , seules naturellement des mesures concrètes seront capables de faire fléchir Sharon . C' est pourquoi le vote du Parlement européen proposant de suspendre l' accord d' association avec Israël , doit effectivement être mis en application dès lors que Tel-Aviv poursuit son offensive militaire . C' est pourquoi il faut rapidement décider de l' envoi d' une force armée internationale de protection du peuple palestinien . Il n' est point besoin d' obtenir pour cela l' accord des autorités israéliennes puisqu' il s' agit de venir au secours d' une population menacée comme l' a fait la communauté internationale en d' autres temps et en d' autres lieux . De surcroît ce déploiement de casques bleus aurait lieu uniquement aux confins de la Cisjordanie et de la bande de Gaza , c' est-à-dire sur des territoires qui , du point de vue du droit international , n' appartiennent pas à Israël .