_: La menace est toujours là Le Pen souhaite une Assemblée où les élus FN seraient les arbitres , formeraient un groupe charnière . Dans l' hypothèse d' une victoire de la droite , il ne se considèrerait plus tout à fait d' opposition . La campagne des élections législatives est une morne plaine . A cinq jours du scrutin , l' atonie du débat politique a atteint les limites de l' imaginable , battant les records d' avant le premier tour de l' élection présidentielle . Un comble quand on se souvient du terrible résultat du 21 avril : le candidat de la haine propulsée en finale . Plus qu' un coup de massue , la montée en puissance de Le Pen a agi comme un électrochoc . L' extraordinaire mobilisation de la jeunesse a réveillé la conscience de millions de citoyens . Ce n' est qu' à ce prix que le score de l' extrême droite fut contenu le 5 mai dernier . Mais les causes profondes , le terreau de désespérance dans lequel s' est instillé le venin lepéniste n' ont pas pour autant disparu . Ce serait une tragique illusion que de croire le danger évanoui , et se préparer à un nouveau désastre . Le risque est grand que l' extrême droite , forte de son succès à la présidentielle , ne transforme l' essai en faisant élire des députés . Un pas de plus serait franchi dans la légitimation politique du racisme , de l' exclusion , du libéral-fascisme . Le chef du FN annonce la couleur , quand il souhaite une Assemblée où les élus FN seraient les arbitres , formeraient un groupe charnière . C' est à dire , pour parler clair , que dans l' hypothèse d' une victoire de la droite chiraquienne , Le Pen ne se considèrerait plus tout à fait d' opposition , mais entendrait peser sur le gouvernement , voire soutenir toute mesure considérée par lui comme suffisamment réactionnaire . C' est d' ailleurs l' attitude qu' il adopte dès maintenant quand il prodigue des amabilités à Nicolas Sarkozy , ce jeune homme qui fait preuve de bonne volonté . Le Pen adresse quelques signaux à l' UMP , promettant de décider au cas par cas ses consignes de vote en faveur de personnalités de droite . Il renvoie l' ascenseur au président-délégué du RPR , Serge Lepeltier qui prônait la semaine dernière le maintien des candidats dans des triangulaires profitables au FN , l' élection de quelques députés frontistes ne ( lui ) posant pas problème . Pas problème ? Les dernières révélations faites par quatre citoyens algériens , qui ont reconnu Le Pen parmi leurs tortionnaires en 1957 à la Casbah d' Alger , sa fréquentation de la villa Susini , le centre des supplices , où affirme l' avoir croisé le général tueur Aussarresses ... cet utile rappel du passé montre combien la haine est une vieille compagne chez Le Pen et ses acolytes . L' obsession du gouvernement transitoire est de faire du scrutin du 9 juin une formalité qui donnerait une majorité à la droite , en esquivant tout débat lui préférant la communication : six milliards pour la sécurité , consultations médicales à 20 euros , 5 % de baisse d' impôt sur le revenu ... mais les smicard attendront des jours meilleurs . Gagner à tout prix , y compris en faisant en sous-main quelques gestes en direction du FN . C' est ce que Le Pen a bien compris , et qui fait son miel . Face à de telles perspectives , quels sont les femmes et les hommes de gauche , les jeunes des facs et des quartiers populaires , qui resteraient les bras croisés après s' être dressés contre l' assaut lepéniste le 5 mai ? La défense des valeurs de progrès et d' humanité , des acquis sociaux des travailleurs passent par une nouvelle mobilisation . On pense à l' enjeu pour la démocratie que représenteront la réélection des députés communistes et un bon score pour le PCF en se souvenant que les premiers mots de Le Pen au soir du 21 avril furent de se réjouir de la défaite de ce parti . On pense aussi au rassemblement nécessaire autour des candidats uniques de gauche dans les circonscriptions les plus directement menacées par les affidés du chef frontiste . Cette mobilisation est seule capable d' empêcher que la morne plaine ne débouche sur un nouveau Waterloo .