Sonia_Branca-Rosoff: voilà je crois que c' est André_Morange: bon Sonia_Branca-Rosoff: ah cette fois c' est réglé André_Morange: pas de test à faire particuliè-~ particulier Sonia_Branca-Rosoff: oui euh on va juste vérifier que votre voix passe aussi bien que André_Morange: la mienne d' accord donc euh je suis André Morange c' est bon allons-y alors Sonia_Branca-Rosoff: c' est parfait André_Morange: et bien écoutez allons-y je vous écoute alors Sonia_Branca-Rosoff: oui donc euh je voudrais d' abord savoir comment vous ou vos parents vous étiez arrivés à Montreuil puisque pour moi vous êtes d' abord un habitant de Montreuil André_Morange: oui oui c' est ça donc en fait oui donc je suis né à Montreuil euh en mille neuf cent cinquante et un rue de Paris là justement et j' ai habité pendant vingt ans euh au quarante-quatre au quarante-quatre rue de Paris au deux au deux deux cent quarante-quatre rue de Paris pardon excusez-moi O K mes parents alors ma mère vient de de de la province Sonia_Branca-Rosoff: euh André_Morange: euh de l' Oise euh ils ont ma mère est arrivée là euh pendant la guerre de quatorze je crois quand sa mère est arrivée à Montreuil pendant la guerre de quatorze elle est née en mille neuf cent dix-sept et mon père euh habitait à Montgeron il est issu de une famille portugaise qui a migré dans les années trente à cause de Salazar et puis enfin de des problèmes politiques d' accord Sonia_Branca-Rosoff: et et donc Montreuil c' était un choix c' était André_Morange: c' était c' est une nécessité économique je crois Sonia_Branca-Rosoff: oui et alors vous euh donc au début le problème ne s' est pas posé vous avez vécu là et vous partez André_Morange: je suis né là j' ai vécu là donc les premières vingtaines les vingt premières années d' accord ensuite je me suis marié je suis allé en banlieue en Seine-et-Marne très exactement vivre une dizaine d' années et je suis revenu vivre à Montreuil ensuite jusqu' à il y a deux ans où j' ai déménagé il y a deux ans Sonia_Branca-Rosoff: oui et pourquoi déménager André_Morange: pour des raisons familiales parce qu' en fait j' ai j' ai une petite fille depuis deux ans et demi là et nos enfants euh enfin une partie de nos enfants habitaient en Seine-et-Marne donc on s' est rapprochés d' eux pour s' occuper de notre petite fille voilà Sonia_Branca-Rosoff: d' accord donc ça n' est pas du tout une volonté de quitter Montreuil non vous y étiez plutôt bien oui André_Morange: oui ben oui oui toujours n' importe comment je c' est ma ville entre guillemets c' est la ville c' est ce qu' on appelle on parle de racines pour moi les racines c' est ça c' est le c' est le fait d' être d' être né Sonia_Branca-Rosoff: quelque part tout Montreuil ou ce André_Morange: quartier non justement ce quartier c' est paradoxal mais enfin en connaissant bien Montreuil non euh c' est vraiment ce quartier c' est le quartier de de son enfance enfin bon voilà quoi le quartier où on a bon voilà Sonia_Branca-Rosoff: et vous ne regrettez pas trop d' être parti André_Morange: bah non enfin bon il y a quand même le fait de s' occuper de ses de ses petits enfants c' est bien maintenant je regrette toute la convivialité qu' il y avait à Montreuil qui n' existe Sonia_Branca-Rosoff: plus j' allais vous demander ce qui vous plaisait André_Morange: ben la convivialité euh la diversité euh tout ce qui fait qu' une ville peut peut s' enrichir Sonia_Branca-Rosoff: quoi c' est quoi la convivialité comment ça se marque André_Morange: ben c' est les différences de culture Sonia_Branca-Rosoff: non mais André_Morange: apprendre si vous voulez euh la culture des autres ça c' est très important et pouvoir discuter avec les gens de son immeuble Sonia_Branca-Rosoff: alors André_Morange: c' est naturellement Sonia_Branca-Rosoff: vous aviez une vie d' immeuble réelle André_Morange: très réelle très agréable où on di-~ où on pouvait discuter euh très facilement où c' était ce qui est plus du tout le cas là où je suis c' est des ce sont des pavillons individuels la mentalité n' est pas la même elle est plus bourgeoise entre guillemets qu' ouvrière enfin c' est plus du tout les mots adaptés mais vous voyez la différence entre beaucoup de spontanéité Sonia_Branca-Rosoff: euh tout à fait maintenant quand vous dites discuter ça se faisait s~ sur le pas de la porte André_Morange: pas forcément Sonia_Branca-Rosoff: ou on s' invitait André_Morange: on pouvait on s' invitait aussi prendre le café bien dans l' immeuble oui il y avait en fait c' é~ on on Sonia_Branca-Rosoff: et dans l' immeuble André_Morange: on réfléchissait pas ça c' était spontané on venait prendre un café on discutait sur le plat de l' immeuble ça dépendait du d' des circonstances mais euh voilà la la convivialité qu' on avait à cette époque là mais qui qui perdu-~ qui a perduré très longtemps qui existe encore certainement Sonia_Branca-Rosoff: mais quand vous êtes parti vous aviez l' impression que c' était déjà en train de se défaire André_Morange: non Sonia_Branca-Rosoff: non non vous l' avez perdu en déménageant André_Morange: oui Sonia_Branca-Rosoff: euh et qui vivait dans l' immeuble alors André_Morange: moi c' était Sonia_Branca-Rosoff: vous avez parlé du plaisir de la diversité André_Morange: alors quand j' étais jeune alors quand j' étais jeune euh l' émigration n' était pas encore comment dire il y avait pas il y avait pas un phénomène d' émigration dans les années cin~ au début des années cinquante les les les comment dirais-je euh enfin mes souvenirs parce que ils sont ils sont quand même assez je vous disais tout à l' heure diffus les cafés étaient tenus par exemple par des des Auvergnats le bougnat on appelait ça le bougnat le le Sonia_Branca-Rosoff: le vous vous avez utilisé ce mot bougnat André_Morange: bougnat oui le charbonnier quoi enfin le bougnat c' est-à-dire celui qui à la fois était ca-~ le cafetier quoi celui qui qui avait sa femme sa femme plutôt et lui qui l' homme qui qui livrait le charbon parce que nous euh Sonia_Branca-Rosoff: vous vous chauffiez au charbon André_Morange: oui parce que on a des appa-~ on avait des appartements de la loi de quarante-huit donc on avait pas les toilettes sur euh à l' intérieur les toilettes étaient sur le palier on avait des poêles à des poêles quoi pour se chauffer enfin c' était le début des années cinquante vous voyez donc c' était le bougnat du coin qui venait nous livrer en charbon Sonia_Branca-Rosoff: donc les cafés c' étaient les Auvergnats André_Morange: dans dans la cave dans la cave ouais et nous euh enfin mes parents ma mère allait chercher le charbon Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: euh les seaux à charbon voilà Sonia_Branca-Rosoff: ça j' ai ça également dans mon immeuble il y a encore il y a plus évidemment le charbon mais la cave il y a encore de la poussière de charbon André_Morange: ah oui la cave voilà bon ça c' est des souvenirs de jeunesse qui ont été assez longs ça duré assez longtemps puisque ça duré euh jusqu' au milieu des années soixante peut-être enfin je sais plus trop euh on avait pas la télé on avait pas enfin bon c' était une vie ouvrière vraiment ouvrière ouvrière Sonia_Branca-Rosoff: quoi c' est ce que faisaient vos parents André_Morange: oui ma mère elle travaillait dans le vingtième rue de la Réunion et elle travaillait chez les établis~ les établissements Foulon les bonbons et les dragées Foulon rue de la Réunion Sonia_Branca-Rosoff: ça a disparu maintenant les ateliers de André_Morange: les ça disparu oui depuis oui ça disparu et mon père était artisan euh alors lui il était artisan menuisier il avait donc une son il était à son compte puis ça marchait mal mais il était à son compte ça venait de son père qui était portugais donc qui a qui avait trouvé cette affaire voilà Sonia_Branca-Rosoff: euh et donc vous avez vu changer petit à petit André_Morange: la oui alors ça ça ça s' est passé enfin bon il y avait j' ai toujours connu dans ma tête hein comment dirais-je des des Français de du Maghreb il y a Nasser qui est là donc ça tombe bien qui est qui sont qui étaient français jusqu' en soixante-deux quoi qui étaient là au début des années cinquante je les toujours connus j' ai l' impression d' avoir d' avoir toujours vécu avec eux parce que ils ils étaient venus en France à la fin de la guerre un peu pour reconstruire le pays quoi vous voyez c' est l' impression que j' ai moi dans dans ma Sonia_Branca-Rosoff: tête avant la grande émigration massive les voilà André_Morange: avant les années cinquante voilà avant la grande émigration massive et ensuite il y a une émigration africaine purement africaine Afrique de l' Ouest ou Afrique de l' Est voilà au début des années soixante-dix quand le foyer Bara été créé Sonia_Branca-Rosoff: les Maliens oui André_Morange: c' est-à-dire en mille neuf cent soixante-dix exactement je crois il me semble Sonia_Branca-Rosoff: et donc des gens sont arrivés dans l' immeuble aussi André_Morange: alors euh à cette époque là non non parce que le foyer était vraiment alors si vous voulez la population de l' immeuble c' était des une population au début à ma connaissance française de type européenne ensuite on a eu une population mélange avec une population maghrébine l' émigration des années cinquante cinquante-cinq cinquante-six enfin à peu près je crois dans ces années là mais la population africaine est restée reste plutôt était restée plutôt en foyer avec le foyer Bara alors par contre dans les années beaucoup plus récentes quand je suis revenu euh je suis revenu à Montreuil dans les années quatre-vingt quatre quatre-vingt cinq là il y avait un mixte plus important de populations avec les populations une partie des populations africaines d' Afrique de l' Ouest ou d' Afrique de l' Est francophones qui faisaient partie de l' immeuble avec des populations maghrébines aussi et des populations euh alors les populations indiennes et asiatiques ont commencé à arriver à ma connaissance au début des années quatre-vingt-dix vers vers les années quatre-vingt-dix Sonia_Branca-Rosoff: quoi je ne savais même pas qu' il y avait euh une pression forte des Indiens ici je pensais que c' est souvent des Pakistanais d' ailleurs André_Morange: pas forte pas forte mais enfin quand je dis Indiens je dis euh de type indien alors je sais pas exactement de quel pays mais de type indien d' accord voilà donc quand je suis parti on avait un vraiment un un melting pot de l' ensemble des continents des continents des continents quoi dans l' immeuble Sonia_Branca-Rosoff: et donc et alors ça ça ça déteint sur euh les je sais pas les cuisines les est-ce que du coup euh vous avez l' impression que vous avez adopté aussi des façons de de manger entre autres André_Morange: euh pas pas pas complètement euh mff pas dans mes souvenirs Sonia_Branca-Rosoff: en tout cas donc vos parents ne sont pas passés de la blanquette au couscous André_Morange: non non mais enfin enfin les cuisines euh j' allais dire de tous les jours Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: par contre on allait assez régulièrement au restaurant à Montreuil rue de Paris là et on allait manger souvent un couscous ou on allait euh Sonia_Branca-Rosoff: mais c' est pas allé jusqu' à ce que les que ça fasse une espèce de syncrétisme dans la dans la cuisine André_Morange: on peut pas parler de syncrétisme Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: enfin à ma connaissance mes souvenirs mes souvenirs mes souvenirs d' enfance hein je parle des vingt premières années là ne me font pas dire que il y avait un syncrétisme culinaire entre les différentes populations Sonia_Branca-Rosoff: vous cohabitiez bien mais voilà culinaire André_Morange: à ma connaissance Sonia_Branca-Rosoff: et le langage vous avez du coup adopté des façons de parler des copains André_Morange: alors les façons de parler c' est à Montreuil oui c' est bon mais c' étaient euh des des langages purement montreuillois enfin purement il y a il y a une population de gitans à Montreuil qui ' est assez connue de Roms qui avait un langage particulier qu' on adoptait quand on était jeunes tout simplement Sonia_Branca-Rosoff: il vous en reste des mots André_Morange: ouais mais c' est des trucs euh c' est des trucs incompréhensibles maintenant que c' est Sonia_Branca-Rosoff: pas ah il y en a que je connais je sais dire gadjo par exemple ça c' est assez répandu André_Morange: oui gadjo mais c' est c' est des choses c' est très répandu ça oui c' est ça mais il y en a d' autres qui sont i~ il en connaît une partie Nasser Nasser: un petit peu un petit peu euh chourave Sonia_Branca-Rosoff: chourave oui André_Morange: chourave oui pour voler par exemple Sonia_Branca-Rosoff: et on dit pas j' ai chouravé on dit j' ai chourave André_Morange: oh on dit j' ai chouravé aussi Sonia_Branca-Rosoff: ah oui d' accord André_Morange: on dit aussi chouravé j' ai chourave j' ai chouravé euh il y a plein il y a plein de choses comme ça mais qui m' échappent encore qui m' échappent mais c' était vraiment spécifique un peu de de de la ville quoi hein de et ça venait un peu de du enfin de la population manouche quoi de la population Sonia_Branca-Rosoff: ça revient pas parce que vous aviez des copains à l' école André_Morange: on avait des copains euh qui représentaient euh la population de Montreuil Sonia_Branca-Rosoff: c' était une école très mélangée Manouches compris André_Morange: très mélangée alors non Manouches parce que Manouches même malgré leur sédentarité à ma connaissance hein et à mes souvenirs je crois qu' ils je suis pas certain qu' ils allaient à l' école hein à l' époque hein je suis pas certain je peux pas vous dire oui ou non je Sonia_Branca-Rosoff: ouais mais vous vous avez connu vous avez eu des amis des des copains euh je sais pas dans d' autres lieux André_Morange: non non Manouches Sonia_Branca-Rosoff: non ils étaient un peu à part hein tout le reste mélangé mais là à part André_Morange: oui oui oui oui oui oui c' est comme ça que je me souviens des des choses Sonia_Branca-Rosoff: et pourtant le langage passait André_Morange: le langage passait ouais alors ils venaient il y avait une règle il y avait une racine euh si vous voulez c' est bon c' est c' est c' est euh comment on appelle ça c' est c' est oral quoi donc euh il y a pas de tradition écrite de de de de de de ce genre de phénomène Sonia_Branca-Rosoff: quoi euh alors vous avez dit euh c' est pas Montreuil pour moi mes racines c' est ce quartier de la rue de Paris et vous vous le délimitez André_Morange: comment c' est que c' est c si si vous voulez si je peux parler de de mes racines c' est je lie ça si vous voulez au cosmopolitisme de de ce que j' ai vécu Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: je me sens à l' aise dans ce genre de co~ comment dire je me sens enfin mes racines sont là quoi avec des gens qui viennent de d' un peu partout là par exemple là où on est actuellement c' est beaucoup plus policé enfin entre guillemets quoi si vous voulez mais je me sens pas chez moi je sais pas comment dire ça c' est difficile Sonia_Branca-Rosoff: oh vous le dites très bien c' est très clair André_Morange: j' je sais pas comment dire ça Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: tandis que là c' était vraiment quelque chose que j' ai connu tout petit dans lequel j' ai bien vécu ou qui m' a enrichi aussi moi de mon côté et qui était bien quoi enfin qui était je me sentais à bien quoi voilà Sonia_Branca-Rosoff: et ça se passait sans tension il y avait pas des moments ah vous avez passé la guerre d' Algérie par exemple euh André_Morange: j' ai pas senti ça du tout en soixante-deux j' avais onze ans Sonia_Branca-Rosoff: donc il y avait pas à l' école du coup euh André_Morange: alors je ai pas j' ai pas eu l' impression que l' O A S est passé à Montreuil entre g Sonia_Branca-Rosoff: oui euh ils devaient pour dire les choses pas y sentir très bien en André_Morange: plus voilà non je j' ai pas eu ce sentiment qu' il y ait eu des frictions entre les populations maghrébine et puis euh française de type européenne au moment de la guerre d' Algérie surtout dans les années soixante euh ou plutôt début des années soixante où c' était avant soixante-deux où c' était quand même entre cinquante-huit et soixante et un c' était assez difficile quand même hein et la guerre d-~ l' armistice pour moi ce je veux dire s' est passé comme une boîte comme une lettre à la poste à mon âge Sonia_Branca-Rosoff: bien sûr André_Morange: j' ai pas eu le sentiment qu' il y ait eu des tensions avec des gens que je connaissais des copains de classe et tout ça ça jamais ça rejailli Sonia_Branca-Rosoff: sur et alors André_Morange: après pour moi dans mon expérience personnelle hein Sonia_Branca-Rosoff: oui mais c' est important André_Morange: donc c' est Sonia_Branca-Rosoff: c' est après dans les nouvelles vagues d' immigration ça s' est chaque fois plutôt bien passé ou est-ce que les derniers à arriver étaient regardés avec un peu de méfiance André_Morange: j' ai jamais eu cette impression donc je peux pas parce que c' est c' est c' est un point de vue personnel Montreuil c' est cent mille habitants si vous voulez il y a voilà quoi mais de de mon point de vue ça c' est toujours fait naturellement j' allais dire Sonia_Branca-Rosoff: alors vous vous étiez donc d' origine portugaise André_Morange: à moitié par mon père par mon père Sonia_Branca-Rosoff: oui est-ce que euh est-ce que vous étiez marqué comme ça l' école Le Portugais non André_Morange: pas du tout non non j' ai pas senti parce que j' ai peut-être pas le enfin je veux dire je suis pas non mais même c' est c' est même pas ces questions là c' est que on a pas l' im-~ j' avais pas l' impression qu' il y avait ces genres de considération Sonia_Branca-Rosoff: vous aviez gardé le portugais André_Morange: non comme langue non malheureusement non parce que justement quand on était quand on était mômes nos parents faisaient le maximum pour qu' on s' intègre rapidement et pour ça malheureusement on perd une partie de ses racines enfin de ses racines maternelles ou paternelles à l' époque hein dans les années cinquante donc on s' adapte vite on apprend le f-~ enfin moi j' avais j' ai toujours parlé français et du coup euh on nous apprend pas on nous conserve pas n~ notre langue d' origine donc euh Sonia_Branca-Rosoff: et vous n' alliez pas non plus l' été au Portugal André_Morange: non Sonia_Branca-Rosoff: non vous avez donc complètement rom André_Morange: non parce que mon grand-père a rompu enfin totalement avec euh avec son pays euh sous Salazar voilà à cause de la politique donc du coup euh il a alors j' ai des frères de mon père qui sont venus euh du Portugal en France pour le voir de temps en temps mais c' est vraiment un souvenir très vague et ça n' a pas duré très longtemps Sonia_Branca-Rosoff: à cause de la politique ça n' a pas duré André_Morange: c' est moi qui ai fait la démarche inverse il y a pas très longtemps en allant où est né mon grand-père pour essayer de retrouver la famille voilà mais sinon là c' est vraiment une branche qui s' est qui s' est éteinte quoi qui s' est tarie j' allais dire naturellement Sonia_Branca-Rosoff: quoi oui peut-être que vous l' auriez gardé le portugais si ça avait été votre mère André_Morange: vous voyez ben peut-être que alors là j' ai pas pensé à ça mais peut-être Sonia_Branca-Rosoff: je dis ça euh peut-être mais souvent le langage affectif du début André_Morange: c' est peut mais pff c' est des choses auxquelles on n' accorde aucune importance quand on est jeune enfin à mon époque et qu' on retrouve plus tard comment dirais-je en regrettant d' avoir perdu quelque chose Sonia_Branca-Rosoff: quoi donc vous avez quand même regretté André_Morange: oui bien sûr c' est une ri~ une partie de mon identité qui qui est disparue c' est certain Sonia_Branca-Rosoff: mais petit vous vous sentiez pas particulièrement portugais André_Morange: oh pas du tout du Sonia_Branca-Rosoff: tout - vous n' étiez pas en train de le revendiquer André_Morange: ah non non non alors absolument pas Sonia_Branca-Rosoff: non c' était ces identités à l' école c' était un problème ça sortait euh pour les Arabes on disait l' Arabe le Beur déjà non le Beur c' était André_Morange: non le Beur non c' était plus tard hein je crois mais non j' ai pas moi j' ai pas senti ça du tout hein il y avait une espèce d' harmonie euh à l' école qui était enfin c' est le sentiment que j' ai hein c' était alors ça se passait entre cinquante et un pas cinquante et un mais entre cinquante-quatre et soixante la fin des années soixante quoi peut-être j' ai jamais senti quelque enfin j' ai jamais eu le sentiment là d' avoir senti ce genre de choses Sonia_Branca-Rosoff: d' une communauté d' une ju~ juxtaposition André_Morange: non non c' était euh il y a une fluidité entre les comportements des gens c' é-~ c' était naturel il y avait pas ce cette réflexion qu' on vient d' ailleurs et qu' on est différent quoi je crois qu' on s' enrichissait plutôt de cette différence plutôt que de dire de faire un blocage là-dessus quoi peut-être que c' est différent maintenant j' en sais rien mais et si vous voulez euh j' ai toujours ressenti euh la ville dans laquelle j' ai vécu où j' ai eu mes racines comme ça Sonia_Branca-Rosoff: et alors alors vous vous aviez l' impression de faire partie d' une communauté de Montreuillois euh André_Morange: ça toujours été comme ça de Montreuillois qui avaient la chance comment dirais-je de contenir dans ses dans ses rangs des gens qui venaient de d' horizons différents et que c' était très enrichissant Sonia_Branca-Rosoff: de partout donc c' était une fierté de la ville plutôt euh André_Morange: plutôt pour moi ouais Sonia_Branca-Rosoff: plutôt oui euh alors par rapport aux Parisiens justement vous pour vous il y avait parce que c' est la la même ligne de métro euh donc vu de l' extérieur on pourrait se dire il y a pas une limite entre Paris et Montreuil mais il y a ce nom de Montreuil il y avait sans doute la coupure politique il y avait enfin des tas de est-ce que André_Morange: pour moi Paris c' est quelque chose d' étranger en fait Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: quelque chose qui comment vous expliquer ça à Montreuil c' est un monde en lui-même donc à côté enfin dans mes souvenirs quoi pas plus maintenant évidemment dans les années qui dans les dans les premières années il y a Paris pff je sais pas comment expliquer ça c' était Montreuil se suffisait à lui-même pour moi vous voyez ce que je veux dire Sonia_Branca-Rosoff: ça petit garçon André_Morange: oui petit garçon Sonia_Branca-Rosoff: alors après l' école primaire vous avez continué André_Morange: alors ben j' ai vécu jusqu' à l' âge de vingt ans là Montreuil mais je me suis pas posé des questions comment dirais-je philosophiques ou plutôt politiques alors mes mes parents étaient évidemment de enfin quand je dis évidemment étaient de gauche hein évidemment même à l' époque ben oui ben oui à l' époque on savait pas ce que c' était enfin on je veux pas faire de politique mais euh le stalinisme on connaissait pas enfin tout ce qu-~ tout ce qu' on a découvert entre guillemets surtout quand on est baigné dans ce climat si vous voulez de militantisme après on découvre des choses Sonia_Branca-Rosoff: bon ça s' entend dès la première phrase André_Morange: c' est autre chose Sonia_Branca-Rosoff: vos parents étaient militants André_Morange: moi mon père était militant ma mère non mon père était militant mon père était militant bon il Sonia_Branca-Rosoff: a ah oui il André_Morange: a il est allé au S T O il a il est allé envoyer en Allemagne enfin bon voilà quoi c' est un parcours comme beaucoup de jeunes à l' époque ont dû ont dû donc il était militant parce qu' il a vécu une expérience qui a fait que sans sans sans avoir d' esprit critique peut-être sur ce qui sur ce qu' il défendait quoi voilà par contre moi très assez vite je pense que sur ce plan là je me suis rendu compte parce que j' aime beaucoup lire je me suis rendu compte quand même qu' il y avait un problème après vous voyez donc je me suis un peu écarté voilà je me suis un peu écarté Sonia_Branca-Rosoff: donc vous avez pris vos distances André_Morange: c' est-à-dire qu' il y avait une contradiction entre le discours et la réalité Sonia_Branca-Rosoff: parce que euh comme enfant de militant vous êtes allé aux jeunesses communistes André_Morange: non non parce que justement j' ai j' ai j' ai j' ai pas accepté enfin j' aurais pu évidemment c' était c' était quelque chose de nat-~ ça aurait dû être quelque chose de naturel ça aurait dû être non mais quand j' ai comme j' ai j' ai commencé à lire très tôt les histoires qui m' intéressaient sur le communisme et sur les autres modèles de société tout de suite je me suis rendu compte qu' il y avait un problème entre entre la réalité des choses sur le terrain et le discours quoi enfin je me suis dit euh il y a il y a quelque chose qui va pas quoi enfin moi personnellement c' est mon analyse personnelle et je me suis dit je peux pas cautionner ce ce genre de choses c' est pour ça que que que que bon Staline est mort en cinquante-trois mais je veux dire en cinquante-trois j' avais deux ans hein donc euh mais mais à dix-sept ou dix-huit ans j' avais quand même c' était en en en soixante-huit alors c' était en pleine euh Sonia_Branca-Rosoff: ah oui c' est vrai vous êtes un vous avez pris soixante-huit dans la figure si je puis dire alors André_Morange: ben voilà et malgré ça malgré ça Sonia_Branca-Rosoff: soixante-huit vous êtes resté à l' écart André_Morange: ben je suis resté à l' écart euh oui enfin c' est-à-dire que bon j' ai pleuré quand le Che est mort en soixante-sept tout le monde a pleuré parce qu' on s' est dit c' est un moi j' étais euh Sonia_Branca-Rosoff: vous avez rêvé à Cuba André_Morange: rêvé moi j' ai rêvé à Cuba ça c' est clair mais je savais je j' arrivais peut-être déjà faire la différence entre Cuba et l' Union Soviétique à l' époque parce que c' était pas encore tout à fait euh sous l' influence vous voyez la différence entre l' espoir de faire autre chose que que la corruption totale d' avant Cuba enfin d' avant ce qui se passait à Cuba et le système soviétique qui existait déjà depuis mille neuf cent dix vous voyez essayer de faire une différence entre les deux un espoir avec le Che enfin Che Guevara qui pouvait amener autre chose dans ce modèle là plutôt que ce qu' on connaissait de de de l' Union soviétique en soixante-huit c' est-à-dire le vingtième congrès en cinquante-cinq et cetera on savait ce que c' était le stalinisme à l' époque hein on savait il y a eu Prague il y a eu Budapest enfin Sonia_Branca-Rosoff: bon oui vous avez André_Morange: vous voyez c' est moi j' ai enfin oui Budapest j' ai évolué avec ça je me suis dit il y a eu Budapest quand même il y a eu Prague je veux dire c' est pas possible quoi on peut je veux dire vous voyez et il y a quand même un espoir à Cuba donc je me suis écarté de mes pa-~ de mon père euh Sonia_Branca-Rosoff: ça été difficile André_Morange: oui c' était difficile parce que c' est c' est quand même un monde qui s' écroule quand même Sonia_Branca-Rosoff: il comprenait pas vraiment pour lui c' était une remise en cause trop forte André_Morange: oui oui trop forte oui quand on milite quelque part et qu' on s' aperçoit que enfin c' est quand même des millions de personnes qui disparaissent quoi on se il y a quand même vous voyez tandis que ma génération à moi a réussi à passer le cap plus facilement fait parce qu' elle s' est moins impliquée certainement dans Sonia_Branca-Rosoff: ouais mais en soixante-huit vous n' avez pas du tout été touché atteint par alors André_Morange: les ben si parce que j' étais comme tout le monde courant libertaire ben plutôt maoïste mais alors maoïste quand on quand on se rend compte de ce que Sonia_Branca-Rosoff: donc vous avez été maoïste André_Morange: ben oui mais maoïste pas trop longtemps non plus parce que quand on est on sait ce que ça été la Révolution culturelle et le Grand bond Sonia_Branca-Rosoff: en avant ça vous avez compris assez vite André_Morange: ben je me suis dit c' est pas possible enfin vous voyez on est toujours on on dans un cercle où on s' en sort pas quoi sur ces modèles de sociétés et on se dit mais qu' est ce qu' il faut enfin voilà quoi puis après euh quand il y a des intellectuels français mais ça c' est ma réflexion aussi sur Montreuil c' est un peu avec Montreuil parce que c' est ce qui baignait un peu à Montreuil hein c' est pour ça que je me permets un peu d' aller euh Sonia_Branca-Rosoff: mais oui bein sûr c' est très intéressant André_Morange: quand des intellectuels en France étaient maoïstes à l' époque et quand on sait que euh ils ont soutenu un peu le Cambodge euh le Kampuchea démocratique je me suis dit mais il y a un problème aussi vous voyez il y a on se heurte toujours à cette hi-~ à cette espèce de euh Sonia_Branca-Rosoff: de bonjour André_Morange: bonjour Patrick alors voilà on va pas te se Sonia_Branca-Rosoff: on fait pas trop de bruit je fais un petit interview j' espère André_Morange: ah excuse-moi oui oui la chaise L4: tu peux André_Morange: je je reprends un siège hein Sonia_Branca-Rosoff: oui bien sûr André_Morange: donc non non non non attends je vais prendre merci Patrick L4: sinon je vais prendre l' autre André_Morange: je me heurtais toujours à cette barrière infranchissable entre les théories et la réalité donc j' ai quitté assez rapidement le comment dirais-je le giron de mon père voilà parce que j' ai je me suis dit il y a rien à faire là-dedans quoi voilà vous voyez c' est mais tout vient de Montreuil enfin tout vient de de là où j' ai vécu Sonia_Branca-Rosoff: les groupes organisés euh parce que l' organisation enfin le le le oui le la gestion communiste de Montreuil était très sensible dans toute la vie quotidienne André_Morange: non c' était alors il y avait un paradoxe en plus dans le modèle de société proposé et la réalité sur le terrain dans une ville comme Montreuil de gestion qui était assez bien faite vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: oui oui on a toujours dit que les communistes étaient exemplaires dans la gestion locale André_Morange: la gestion communiste voilà dans le gestion de de la ville en local par contre euh Sonia_Branca-Rosoff: et alors localement qu' est-ce qui est-ce que est-ce que qu' est-ce qui était bien justement dans cette André_Morange: oui oui ben c' était bien c' étaient les colonies c' étaient euh les sorties en groupe sans endoctrinement particulier pas ma connaissance dans tout ce que je me souviens il y avait pas eu d' endoctrinement enfin c' était pas euh on emmenait pas les petits les les enfants dans les pays de l' Est forcément quoi quoique Montreuil était était jumelé avec des est encore jumelé avec des villes de du Viet-Nam je crois et Sonia_Branca-Rosoff: de jumelé vous n' êtes pas allé au Viet-Nam André_Morange: non mais il y avait pas euh les pionniers comme on peut parler dans les pays de l' Est quoi enfin j' ai pas ressenti cet comment dirais-je cet cet enrôlement cet endoctrinement à la limite de petits Montreuillois qui euh auraient alors peut-être qu' il y avait dans les sec-~ cellules du parti communiste à Montreuil ce genre de choses peut-être mais la gestion globale de la ville m' a semblé me semblait moi bien quoi on allait en colonie on organisait des choses vous voyez c' était euh il faut faire la différence entre sur le collectif le collectif positif la partie positive du collectif Sonia_Branca-Rosoff: oui vous insistez à nouveau sur le collectif André_Morange: vous voyez sans euh prise prise en main de de l' état d' esprit enfin de de de l' esprit critique des gens quoi c' est le sentiment que j' ai sur les vingt premières années que j' ai vécu à Montreuil de cinquante à à soixante-dix Sonia_Branca-Rosoff: quand vous êtes revenu André_Morange: ben euh quand je suis revenu le monde communiste avait dis-~ enfin pas disparu mais oui il y avait aut-~ c' était autre chose Sonia_Branca-Rosoff: euh Montreuil n' est plus communiste André_Morange: non ça c' est les Verts maintenant c' est euh Voynet Sonia_Branca-Rosoff: qui oui mais depuis depuis très peu d' années André_Morange: pas très longtemps oui très peu ben aux dernières élections mais comme Brard Jean-Pierre Brard n' est plus enfin est est un dissident enfin c' est compliqué Sonia_Branca-Rosoff: ah c' était déjà un dissident André_Morange: un dissident du Parti Communiste machin oh c' est c' est compliqué Sonia_Branca-Rosoff: donc ça avait déjà beaucoup évolué André_Morange: mais pas sur la gestion de la ville parce qu' on fait beaucoup de logements sociaux on fait beaucoup de choses positives vous voyez il y avait quand même il faut pas non plus être bêta et puis euh être anti-communiste primaire mais je veux dire la gestion de la ville est relativement bonne on peut dire globalement elle correspond au type de population qui réside à Montreuil ou qui résidait à Montreuil Sonia_Branca-Rosoff: qui résidait c' est en train petit à petit de s' embourgeoiser André_Morange: voilà beaucoup de cadres moyens ben écoutez quand j' ai vendu mon appartement moi je le je l' ai vendu cher relativement par rapport au prix où j' avais acheté et je l' ai acheté deux fois plus cher que le prix où les g-~ où les propriétaires précédents l' avaient acheté donc euh c' est la sélection naturelle entre guillemets de l' argent Sonia_Branca-Rosoff: donc on a beau militer on a beau lutter contre André_Morange: non j' ai l' impression qu' à Montreuil maintenant quand je suis parti même avant que je parte il y avait une large population j' allais dire de la bourgeoisie moyenne ce qu' on appelle bobo entre guillemets des gens qui gagnent pas mal d' argent mais qui votent à gauche comme on dit c' est idiot à dire ça mais je sais pas population bobo quoi qui qui ont acheté des des choses à Montreuil qui sont inachetables pour le le voyou quoi deux cent mille euros trois cent mille euros un appart Sonia_Branca-Rosoff: donc petit à petit les gens sont quand même en train de partir André_Morange: alors voilà la population se transforme pour ça la rue de Paris se transforme il y a la B N P qui s' est installée des grosses entreprises qui se sont installées il y a Air-France qui s' est installée vous voyez la ville change alors elle change en en f-~ comment dirai-je en sélectionnant la population par l' argent en gros les gens qui achètent maintenant ben il faut qu' ils aient des revenus hein quand même hein Sonia_Branca-Rosoff: et alors euh l' autre chose c' est vous avez dit que votre père était artisan qu' est-ce que c' est devenu euh André_Morange: ah ben il a fait faillite Sonia_Branca-Rosoff: il a fait faillite André_Morange: alors il a fait faillite euh j' allais dire euh si je me trompe pas euh au début des années soixante-dix il a retrouvé un travail de menuisier rue de Paris justement euh ben juste rue de Paris il y avait une euh une entreprise de menuiserie qui a fermé depuis déjà oui Sonia_Branca-Rosoff: qui a fermé aussi vous avez vu reculer aussi ça s' est transformé euh André_Morange: oui la transformation s' est faite euh avec le temps disons que l' immigration a participé un peu à la transformation du quartier aussi puisque là quand vous allez rue de Paris vous voyez il y a beaucoup de kebabs de choses comme ça de boucheries musulmanes et de choses comme ça c' est ce qu' on trouve maintenant de façon euh comment dirais-je je sais pas comment exprimer ça Sonia_Branca-Rosoff: de le charcutier remplacé par un boucherie euh une boucherie halal André_Morange: voilà voilà Sonia_Branca-Rosoff: oui chaque fois parce que la population change André_Morange: c' est une réalité parce que la population change Sonia_Branca-Rosoff: oui d' accord André_Morange: voilà ce que j' ai connu dans ma jeunesse moi ça n' existe plus ça s' est fait mais ça s' est fait par vagues immi-~ migratoires euh successives ce que vous disiez dans les années cinquante euh Sonia_Branca-Rosoff: et là vous n' avez pas eu de regrets sur la la disparition du du commerce André_Morange: au niveau du Maghreb ou soixante-dix non mais c' était pas euh une préoccupation particulière quoi moi disons que maintenant si j' ai envie de de trouver un boucher traditionnel à Montreuil je sais où il faut aller mais bon il faut que j' en fasse pas mal quoi bon c' est c' est comme ça voilà voilà c' est Sonia_Branca-Rosoff: c' est mais c' est comme ça c' est tout vous mangez des côtelettes André_Morange: et voilà c' est pas non c' est quoi c' est pas un problème de non non non c' est c' est voilà Sonia_Branca-Rosoff: du jambon disons André_Morange: non non non non mais c' est une transformation si on parle de transformation de quartier vous voyez c' est c' est euh alors par contre là ils sont en train de construire des immeubles dès qu' ils ont une place apparemment ils sont en train de mettre des des immeubles de bureaux je sais pas si vous avez remarqué qui remplacent un petit peu tous ces tous ces petits commerces ou ou des ateliers alors les ateliers alors r-~ à Montreuil rue de Paris ou aux alentours du quartier Robespierre Sonia_Branca-Rosoff: des ateliers André_Morange: il y avait énormément d' ateliers il reste une cheminée un peu plus haut là sur la gauche que vous avez peut-être vue avant la salle des des congrès là qui était construite il y a quelques années où il y a le Salon du livre il reste une cheminée devu debout c' était euh c' était un un ensemble d' usines et d' ateliers qui était très fréquentes à Montreuil dans les années cinquante même derrière là où ils ont construit où il y a une partie de de de de de l' administration qui s' est installée là au truc des immigrés là tout ça c' était tout ça c' étaient des ateliers avec des grandes cheminées vous savez euh qui étaient là moi c' était ma c' est ce que j' avais dans ma jeunesse donc tout ça ça totalement disparu il reste un bougnat là sur le en front là qui va disparaître aussi vous voyez c' est il reste plus rien moi dans ma vision de ma jeunesse très prime prime-jeunesse hein de de de concret quoi il y a ça disparu Sonia_Branca-Rosoff: quoi et je me demandais je sais pas ce que vous en pensez euh il devait y avoir une culture ouvrière fière de son André_Morange: de son appartenance Sonia_Branca-Rosoff: de son appartenance est-ce que ça ça n' a pas volé en éclat avec André_Morange: ouais si ces dernières années si si parce que le monde a changé enfin le les mais c' est peut-être antérieur encore à ce qui s' est passé en quatre-vingt-neuf ou quatre-vingt enfin la fin du communisme à l' Est ça ça été fondamental je pense enfin j' ai l' impression je sais pas mais je suis pas je suis pas un politicien ou mais ça c' était quelque chose qui s' est terminé quoi voilà ça c' est fini maintenant faut passer à autre chose je pense qu' à Montreuil ça eu certainement des des répercussions le le P C a un virgule neuf pour cent enfin je veux dire tout ça c' est un monde qui se termine je pense et qui a eu dans le le la vie des gens à Montreuil forcément euh ça été un un des facteurs certainement de de de d' un changement de mentalité je pense je pense Sonia_Branca-Rosoff: et un peu mélancolique André_Morange: et un peu mélancolique tout ça forcément on est toujours mélancolique de ses racines de ce qu' on a de sa jeunesse enfin en ce qui me concerne Sonia_Branca-Rosoff: c' est et alors de toute façon vous vous n' êtes donc pas resté ouvrier euh non vous avez donc eu une scolarité j' imagine de bon élève André_Morange: moyen j' ai j' ai j' ai j' ai aucune non j' ai j' ai pas du tout de de diplôme voyez contrairement j' ai j' ai juste mon certificat d' études primaires et ensuite j' ai commencé à travailler tout de suite Sonia_Branca-Rosoff: à l' école pff ça c' est passé comme ça André_Morange: sans oui elle est passée sans que je m' en aperçoive en gros Sonia_Branca-Rosoff: oui sans que ça vous intéresse plus que ça André_Morange: j' ai fait ce qui f plus que ça Sonia_Branca-Rosoff: et sans que vous soyez marqué ni en bien ni en mal André_Morange: par voilà c' était vraiment quelque chose de plat Sonia_Branca-Rosoff: oui la vie se passait à l' école oui de façon euh et je nous on a eu la chance à notre génération d' avoir de participer à la reconstruction donc euh ce qu' on appelle les Trente glorieuses hein donc on a eu toujours du travail vous voyez c' é-~ c' était plus facile de commencer dans la vie à notre époque sans diplôme et de pouvoir entre guillemets faire son trou quoi enfin faire sa carrière que la génération suivante je pense bien sûr André_Morange: donc j' ai on a on a jamais eu j' ai jamais eu de problème Sonia_Branca-Rosoff: vous avez commencé à travailler juste après le Certificat d' Etudes André_Morange: oui très jeune puisque je fais je fais partie des longues carrières ben à quinze ans j' ai mes premiers mes premiers euh enregistrements de trimestre sont en soixante-cinq donc à soixante-cinq oui cinquante et un quatorze ans Sonia_Branca-Rosoff: vous êtes plus jeune que moi et vous avez travaillé avant moi André_Morange: voilà donc vous voyez c' est c' était mais c' était un peu alors à Montreuil mais dans les villes ouvrières ou dans les quartiers ouvriers je crois la à ma connaissance la majorité des jeunes qui qui avaient ce parcours Sonia_Branca-Rosoff: quoi alors vous avez commencé en usine ou tout de suite André_Morange: à ma connaissance alors j' ai commencé à travailler un peu en usine euh quelques mois mais j' ai eu l' opportunité en informatique je l' ai saisie et et voilà Sonia_Branca-Rosoff: vous êtes un informaticien André_Morange: voilà depuis euh Sonia_Branca-Rosoff: depuis André_Morange: toujours depuis toujours oui avant que le mot informatique existe même donc euh voilà Sonia_Branca-Rosoff: euh donc euh vous vous avez été baigné aussi quand même dans un milieu plurilingue même si vous vous n' avez pas gardé le le portugais André_Morange: oui plurilingue c' est le mot c' est le mot parce que à Montreuil on parlait un peu toutes les langues on parlait euh bon l' arabe dans la rue on parlait le français bien sûr mais on parlait aussi l' africain à partir des années soixante-dix les dialectes africains du type malien ou voilà on parlait euh le portugais on parlait l' italien Sonia_Branca-Rosoff: donc ça ça André_Morange: peut-être le polonais et même le polonais ça je m' en souviens pas trop mais vous voyez il y avait vraiment un j' ai baigné un peu dans ça Sonia_Branca-Rosoff: et ça ça vous a les gens utilisaient donc les les langues on entendait dans la rue ça vous a plutôt fait plaisir d' être d' oui toutes ces langues André_Morange: oui oui absolument entendre Sonia_Branca-Rosoff: plutôt et vous avez attrapé des des bouts de langues non non pas du tout c' est pareil hein c' est coexistence mais pas appropriation André_Morange: non oui pas euh enfin pas curiosité euh de la langue par contre de curiosité des traditions des traditions enfin de la de la culture quoi sans la langue pas ben au niveau culinaire la religion Sonia_Branca-Rosoff: par exemple oui quoi par exemple oui la religion André_Morange: les traditions Sonia_Branca-Rosoff: vous vous pouvez en dire deux mots ça ça m' intéresse parce que on entend tellement de choses sur mon dieu mon dieu André_Morange: ben oui la religion c' est-à-dire non non mais la religion Sonia_Branca-Rosoff: ça m' arrive André_Morange: euh qu' est-ce que c' est que la religion qu' est-ce que c' est que enfin moi je suis euh chrétien mais chré-~ cath-~ catholique oui donc euh mais j' allais dire parce que alors encore une fois c' est un c' est un comment c' est un paradoxe entre le militantisme de de mon père et ma mère qui qui tenait absolument à ce que je fasse ma communion et que je sois baptisé vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: donc vous avez fait votre communion André_Morange: donc j' ai fait ma communion Sonia_Branca-Rosoff: avec beaucoup de ferveur non non avec la montre euh au bout de la communion André_Morange: non c' était pour les cadeaux Sonia_Branca-Rosoff: oui ben c' est ça André_Morange: oui seulement voilà excusez-moi oui oui c' est ça non vraiment c' est vous voyez mais sans avoir conscience vraiment de ce que ça représentait Sonia_Branca-Rosoff: les garçons avaient une montre hein André_Morange: d' accord donc connaître d' autres cultures c' est connaître d' autres religions et s' intéresser euh euh à la genèse de ces religions et ces choses là vous voyez enfin tout ce qui essayer de comprendre l' autre Sonia_Branca-Rosoff: vous en avez parlé avec vos voisins par exemple André_Morange: oui bien sûr ça c' est très intéressant pareil pour les les religions animistes africaines qui sont intéressantes aussi parce que donc ça c' est c' est vous voyez bien sûr absolument c' était euh ça faisait partie des thèmes principaux de de de de de communication aussi Sonia_Branca-Rosoff: oui donc ça pouvait être des thèmes de conversation d' immeuble ah oui André_Morange: cet cet aspect là parce que c' est c' est confronter les différentes cultures Sonia_Branca-Rosoff: personne ne voulait vraiment convertir l' autre l' autre mais il y avait oui André_Morange: ah non non il y a pas de prosélitysme enfin moi j' ai pas senti de prosélytisme de la part de des gens avec lesquels je discutais et moi j' en faisais pas évidemment puisque Sonia_Branca-Rosoff: et chacun racontait André_Morange: voilà voilà voilà voilà ça permet de comprendre pas mal de choses Sonia_Branca-Rosoff: ce que c' était pour lui oui et du coup ça veut dire que par exemple les les voiles des femmes ne vous ont pas agressé vous n' avez pas jugé que c' était André_Morange: enfin ici il y a enfin a~ alors il y a une exception quand même ce qui me ce qui m' agresse c' est le le le voile c' est pas le voile ce qui m' agresse mais totale Sonia_Branca-Rosoff: la burka André_Morange: c' est-à-dire euh Sonia_Branca-Rosoff: mais ce il y en a pas beaucoup ici André_Morange: mais non mais il y en a mais j' en connais j' en connais hein avec les gants Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: j' ai vu une personne avec des gants ben ça je comp~ ça je je dis euh je peux pas comprendre donc ça enfin ça m' agresse quand même Sonia_Branca-Rosoff: ça vous n' avez pas eu dans votre immeuble André_Morange: je sais même pas je suis je suis à à dix kilomètres de ça quoi enfin à dix-mille lieues de ça quoi c' est non du tout du tout du tout du Sonia_Branca-Rosoff: tout vous n' avez pas dans votre entourage proches des gens André_Morange: qui non mais ça c' est c' est c' est comme c' est très personnel si vous voulez c' est pas voilà c' est personnel c' est des choses personnelles c' est pas je suis allé travailler au Maroc là il y a il y a quelques temps chez les à Casablanca les jeunes femmes la plupart sont pas voilées du tout quoi enfin voy-~ vous voyez c' est pas enfin c' est pas c' est pas quelque chose Sonia_Branca-Rosoff: de en tout cas ça ça n' était pas un thème de important André_Morange: ah non non non non non non non non non non non non non c' est découvrir découvrir une culture différente à travers la religion essentiellement parce que c' est quand même quelque chose euh alors qu' elle soit religion monothéiste ou un athéisme quelcon~ ou un ou des religions africaines plus euh vous voyez animistes voilà c' est ça qui est intéressant Sonia_Branca-Rosoff: animistes André_Morange: c' est parce que ça tout ça ça fait une culture complète ça fait des comportements la façon de se comporter d' être et ça va-~ ça engendre ça englobe ça englobe une morale aussi des choses que qui qui nous permettent de comprendre quand même euh ce que représente une culture quoi en fait donc c' est très intéressant Sonia_Branca-Rosoff: et dans Montreuil au moment des fêtes religieuses est-ce que ça les uns et les autres s' invitaient vous êtes été invité à la rupture du jeûne non André_Morange: non j' ai pas j' ai pas souvenir de ça et même dernièrement quand j' étais encore à Montreuil Sonia_Branca-Rosoff: non vous coe André_Morange: sans sans qu' il y ait d' esprit communautaire de la part des personnes hein mais euh non mais on coexistait euh tranquillement ça nous empêchait pas d' aller déjeuner les uns avec les autres mais c' est mais euh on a pas participé j' allais dire comment dirais-je concrètement euh à la fête religieuse Sonia_Branca-Rosoff: quoi et vos enfants euh André_Morange: mon fils habite à Montreuil et j' ai un un de mes fils qui habite à Montreuil Sonia_Branca-Rosoff: là ils auraient vous pensez à peu près la même vision que vous André_Morange: ah ouais Dany oui Sonia_Branca-Rosoff: ils sont bien ils ont leurs copains leurs potes André_Morange: ah lui il euh même Montreuil c' est sa ville mais ouais ouais ouais ouais d' ailleurs quand on est parti il était euh quand on s' est dit il faut qu' on s' occupe de notre petite fille voilà donc euh on l' a fait pour ça il était un peu surpris pace qu' il sait bien qu' on qu' on est chez nous ici quoi voilà donc euh donc lui il vit à Montreuil ben depuis depuis trente ans maintenant et lui euh ben j' en ai un autre qui est qui est plus qui est pas Montreuil hein mais lui il est à Montreuil et puis voilà Sonia_Branca-Rosoff: quoi d' accord André_Morange: il est chez lui avenue Pasteur c' est à la Mairie Sonia_Branca-Rosoff: oui je vois où André_Morange: c' est avenue Pasteur mm Sonia_Branca-Rosoff: euh est-ce que les les difficultés économiques de récentes enfin qui vous avez parlé des Trente glorieuses on en est loin euh ça changé quelque chose dans la dans la vie du André_Morange: quartier oui oui ouais ouais Sonia_Branca-Rosoff: dans la autant que vous puissiez voir est-ce que vous est-ce que vous diriez que André_Morange: alors euh pff je sais pas pff je je je j' ai pas ça pas marqué ça ça m' a pas interpellé parce que j' ai comment dire enfin j' ai pas été confronté là où j' ai vécu aussi bien étant plus jeune il y avait pas de difficultés économiques enfin étant plus jeune mais là dernièrement là sur les quinze dernières années où j' ai vécu à Montreuil j' ai pas été interpellé par ça par ce problème Sonia_Branca-Rosoff: euh et au travail c' est pas les banques se portent bien donc euh on André_Morange: a au travail Sonia_Branca-Rosoff: c' est-à-dire oui euh est-ce que le je ne sais pas la peur du chômage est quelque chose de de non je parle pas pour vous en général globalement André_Morange: comment pour moi globalement alors elle est présente bien sûr je pense elle est elle est liée à la socié-~ à la la comment dirais-je à la situation économique au modèle de société euh capitaliste c' est c' est certain Sonia_Branca-Rosoff: oui vous sentez ça mais André_Morange: l' incertitude Sonia_Branca-Rosoff: donc c' est un thème qui revient André_Morange: alors nous on en parle juste alors si on ramène ça au quartier ou à la vie dans les quartiers à Montreuil je vous dis c' était pas un thème de discussion particulier alors on discutait on faisait oh on discutait oui oui non non c' était pas enfin à ma à mon à ma mes souvenances hein Sonia_Branca-Rosoff: voilà c' était ça ma question et vous n' avez pas euh été témoin ou votre femme de je ne sais pas moi de comportements euh chez les marchands là ah non c' est trop cher pour moi je peux plus euh les gens n' évoquent pas je peux plus acheter de viande ou André_Morange: je m' en je m' en je m' en souviens pas de ça Sonia_Branca-Rosoff: pas plus pour le l' essence l' auto là c' est passé André_Morange: ah ben si dernièrement Sonia_Branca-Rosoff: oui dernièrement André_Morange: ben si non mais là c' est pas lié forcément à la vie d' un quartier si vous voulez c' est vi-~ est c' est lié d' abord au prix de l' essence et c' est lié aussi aux revenus de chacun des des alors effectivement dans dans les quartiers mais quand vous disiez la population a changé j' ai et c' est vrai que j' ai vu évoluer la population vers des gens quand même qui avaient plus de moyens Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: donc qui avaient moins de préoccupations économiques qui avaient moins de préoccupations économiques donc c' étaient pas les thèmes de discussion euh comment dirais-je privilégiés dans les années suivantes où j' ai vécu à Montreuil où je suis revenu à Montreuil vous voyez où la population a évolué quoi et quand j' étais plus jeune c' était pas une c' était pas ma préoccupation vraiment euh Sonia_Branca-Rosoff: personne en parlait tellement André_Morange: pas ma connaissance était Sonia_Branca-Rosoff: pas mais justement alors euh petit garçon donc vous vous avez dit que l' école c' était pas votre préoccupation majeure comment c' était une enfance de de petit garçon à Montreuil André_Morange: non pas particulièrement non à Montreuil c' étaient c' étaient les copains Sonia_Branca-Rosoff: oui donc on était dans la rue dès que l' école était finie oui André_Morange: ouais ouais on tournait euh on était entre copains dans la rue rue de Paris euh je vais pas dire du matin au soir mais parce que les parents enfin ça dépendait des parents aussi certains parents euh avaient un minimum de discipline où il fallait quand même pas passer son temps dehors quoi donc mes parents en faisaient partie donc il y avait un cadre qui était fixé Sonia_Branca-Rosoff: alors vous aviez droit André_Morange: quoi par les parents tout de même mais j' avais des copains qui pouvaient euh vous voyez le cadre était différent suivant chaque famille donc moi j' étais quand même limité à je pouvais aller je pouvais avant déjeuner ou avant dîner avant le dîner rester avec mes potes euh après dîner euh Sonia_Branca-Rosoff: voilà avant l' c' était l' heure du dîner en gros sept heures du soir retour à la maison oui André_Morange: à partir d' un certain âge voilà oui c' est ça c' est ça en gros et ap~ après dîner alors ça c' était euh avec l' âge qui évoluait mais jusqu' à peut-être douze treize ans euh j' avais pas le droit de sortir après d~ après dîner quoi après bon euh Sonia_Branca-Rosoff: et alors dehors vous faisiez quoi qu' est-ce que c' était des jeux André_Morange: des conneries des bêtises Sonia_Branca-Rosoff: des bêtises c' est André_Morange: quoi ben je sais pas euh pff Sonia_Branca-Rosoff: d' abord André_Morange: petit ben petits oh oui Sonia_Branca-Rosoff: je sais pas c' était vélo patins André_Morange: oui c' est ça vélo patins on sonnait aux portes des gens ou vous voyez des choses des choses classiques on a l' habitude de faire quoi en mettant un portefeuille là dans la rue puis on tirait avec un quand les gens se baissaient pour le ramasser enfin vous voyez c' est des trucs euh puis après c' est Sonia_Branca-Rosoff: après vous avez des souvenirs comme ça André_Morange: oui oui oui absolument ah oui oui ça Sonia_Branca-Rosoff: le coup du portefeuilles vous l' avez vraiment fait André_Morange: ah oui on l' a fait oui çà c' est c' est clair j' ai ces souvenirs là embêter les gens avec les sonnettes mais ça bon c' est tout le monde l' a fait hein peut-être après plus tard alors c' étaient les blousons noirs c' est-à-dire que c' étaient les les bastons Sonia_Branca-Rosoff: quoi il y avait des bandes et vous vous étiez dans une des André_Morange: bandes ouais il y avait des bandes oui la bande Robespierre contre la bande Bel Air ou euh la bande du parc Montreau euh du Bel Air oui au-dessus de au-dessus de euh au-dessus du cimetière le quartier du Bel Air là là là ça bastonnait fort Sonia_Branca-Rosoff: et du Bel Air et donc euh oui parce que je trouve que les gens là se font toute une histoire pour les coups de poings échangés euh entre bandes jeunes André_Morange: non c' est de la rigolade enfin c' est pas de la rigolade mais bon je veux dire c' est des Sonia_Branca-Rosoff: on sent que ça toujours existé hein André_Morange: bien sûr bien sûr alors là par contre c' est entre deux là c' est entre deux quartiers peut-être de villes différentes proches tandis que là c' était entre différents quartiers de la même ville Sonia_Branca-Rosoff: ça ça commencé à quel âge André_Morange: oh quinze seize ans Sonia_Branca-Rosoff: quand vous dites bandes vous étiez André_Morange: combien oh je sais pas nous on était une dizaine une quinzaine Sonia_Branca-Rosoff: oui donc une quinzaine de copains qui se retrouvaient André_Morange: qui se retrouvaient tout le temps on discutait je sais plus de quoi bon des conneries quoi c' est enfin ce qu' on pouvait ce dont pouvait parler à l' époque de Salut les copains euh de des yéyé vous voyez c' est c' était surtout notre puis d' un territoire entre guillemets qu' il fallait éventuellement défendre si il y avait les mecs du bel Air qui venaient Sonia_Branca-Rosoff: et ils étaient interdits de territoire André_Morange: entre guillemets oui on les connaissait donc donc ça bastonnait alors on il y avait des provocs des machins vous voyez c' est mais ça jamais été grave dans le sens où ça Sonia_Branca-Rosoff: jamais donc vous n' avez jamais été en danger André_Morange: voilà jamais vraiment danger on sentait pas il y a pas de danger pas comme maintenant où Sonia_Branca-Rosoff: c' est André_Morange: et à mon avis plus important il y avait pas de drogue à l' époque trafic de drogue à l' époque à mon époque à moi quand j' étais plus jeune attention parce que après peut-être qu' à Montreuil mais ça je sais pas il y a peut-être eu des endroits où la drogue a circulé certainement Sonia_Branca-Rosoff: partout je pense hein André_Morange: partout oui mais à mon époque j' ai pas souvenance de ça dans les années cinquante soixante Sonia_Branca-Rosoff: et euh alors vous avez parlé de Salut les copains euh André_Morange: S L C Salut les copains oui c' est oui oui Tête de bois Age tendre et tête de bois enfin je me souviens un peu vaguement Sonia_Branca-Rosoff: donc vous avez écouté l' émission André_Morange: ah oui oui ça on était on était fans on était fans on s' habillait comme Johnny on enfin voilà quoi on vous voyez c' est il y a un espèce de mimétisme Sonia_Branca-Rosoff: vous aviez une moto comment vous aviez une moto André_Morange: non j' ai jamais eu de moto Sonia_Branca-Rosoff: d' accord c' est les parents qui ne voulaient pas ou André_Morange: non c' est une question financière une question d' argent Sonia_Branca-Rosoff: même avec le premier salaire André_Morange: non non Sonia_Branca-Rosoff: non ça pas suffit André_Morange: non non c' était ric rac à la maison quand même enfin c' était voilà j' ai jamais manqué de rien mais Sonia_Branca-Rosoff: bon mais vous vous souvenez de l' impression de manquer d' argent André_Morange: non enfin d' argent je ne manquais de rien seulement j' avais pas le voilà j' av~ bon quand j' ai commencé un peu à travailler si mais je veux dire euh ou alors j' étais pas porté par la moto peut-être que si si c' est pas c' est pas un truc qui me mobylette oui on avait des mobylettes vous voyez ou des solex peut-être Sonia_Branca-Rosoff: vous n' aviez pas d' argent de poche André_Morange: mais pas de motos des grosses motos euh Sonia_Branca-Rosoff: mais voilà c' est ma question c' étaient les bandes ça tournait pas aussi autour de André_Morange: de d' accessoires entre guillemets Sonia_Branca-Rosoff: oui enfin de défis euh avec les motos ou avec les des courses des André_Morange: ben ben peut-être pas j' ai pas l' imp-~ non c' était des surtout des la de préserver son quartier quoi enfin de préserver comment dire de si de on a son quartier quoi voilà Sonia_Branca-Rosoff: donc on les autres ne s' y hasardent André_Morange: pas non normalement enfin ceux qu' on Sonia_Branca-Rosoff: ou sinon c' est du défi André_Morange: voilà là ça c' est un défi c' était à l' époque un défi vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: et ça se passait comment non c' est pas ça euh vous-même vous êtes allé au Bel Air euh André_Morange: mal oui bien sûr ben c' est justement un défi on parle voilà c' est ça on parle de défi Sonia_Branca-Rosoff: vous alliez vous promener mais à à dix André_Morange: ah ben oui ben sinon c' est pas la peine Sonia_Branca-Rosoff: ça veut dire que tout seul vous ne pouviez pas y aller André_Morange: ben ça veut dire que c' était ris~ beaucoup plus risqué alors là par contre oui fallait être fallait que la bande soit là Sonia_Branca-Rosoff: quoi et pourquoi vous avez arrêté André_Morange: le monde a changé peut-être sans ça Sonia_Branca-Rosoff: au moment de votre mariage une vie de travail André_Morange: après c' est fini enfin voilà après quand on travaille on est dans le c' est c' est fini quoi vous savez les les amis les copains euh la racine la racine de la de la racine d' où on est né où on a vécu jeune on le garde je pense enfin quand on a été bien quand on était bien quelque part on garde ça par contre les les copains on peut les perdre de vue très vite Sonia_Branca-Rosoff: quoi oui André_Morange: et vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: c' est et cette bande de de copains de quinze ans vous avez tout perdu André_Morange: oui tout tout perdu du Sonia_Branca-Rosoff: tout vous n' avez plus c' est d' autres amis André_Morange: voilà d' autres complètement oui complètement complètement complètement Sonia_Branca-Rosoff: au moment où vous avez commencé à travailler ça n' allait plus c' était André_Morange: pas non c' était un une autre vie une vie différente vous voyez c' était autre chose après on je me suis marié on a eu un enfant euh voilà c' était fini on a déménagé vous voyez ça c' était autre chose c' est autre chose qui démarrait quoi en fait Sonia_Branca-Rosoff: mais au retour vous avez retrouvé des gens de votre enfance à Montreuil André_Morange: non non non j' ai découvert d' autres personnes qui étaient aussi intéressantes vous voyez il y a toujours cette continuité dans cette ville de de de bien d' être bien quoi quelle que soit l' époque en fait Sonia_Branca-Rosoff: alors j' ai j' ai une série de petites questions un petit peu sur son équipement euh de Montreuil quand vous êtes re~ revenu vous étiez content de c-~ de ce qu' il y avait vous sentiez qu' il manquait des choses vous savez tout ce qui est équipement culturel sportif espaces verts je sais André_Morange: pas non je pense que enfin ça c' est plus tard oui j' avais j' avais l' impression qu' au niveau enfin culturel si mais culturel orienté enfin entre guillemets je veux dire Sonia_Branca-Rosoff: donc vous n' aviez pas envie de vous en servir André_Morange: ben ce que j' aimais dans le dans la dans la partie culturelle de Montreuil c' est il y avait énormément il y a toujours énormément de spectacles qui font référence à la population c' est-à-dire que beaucoup de de spectacles africains ça c' est très Sonia_Branca-Rosoff: bien vous y êtes allé André_Morange: ah oui bien bien sûr ça c' est il faut profiter de ça Sonia_Branca-Rosoff: qu' est-ce que c' est des spectacles africains par exemple des griots André_Morange: ben ce sont des ce sont des groupes ce sont des groupes africains avec des des mo-~ des instruments typiquement africains genre calebasses euh genre kora vous voyez enfin tout ce qui est instruments africains et et le rythme donc la culture Sonia_Branca-Rosoff: donc la musique surtout André_Morange: la musique la culture donc euh tout ça c' est intéressant maintenant euh aller aller à des spectacles Sonia_Branca-Rosoff: au cinéma André_Morange: non mais je veux dire où où c' est orienté poli~ politiquement je veux dire où ça arrivait aussi Sonia_Branca-Rosoff: un théâtre qui reste très militant André_Morange: très militant ça ça m' intéresse moins Sonia_Branca-Rosoff: quoi vous n' alliez plus toujours Brecht André_Morange: parce que bon Sonia_Branca-Rosoff: parce que euh Gorky euh André_Morange: ben oui c' est enfin Brecht ça peut être intéressant sauf si d' un certain côté quand même mais mais euh mais Mère Courage veux dire Sonia_Branca-Rosoff: c' est tous les ans Mère Courage André_Morange: voilà c' est voilà c' est ça si vous voulez vous voyez c' est bon alors ce qui m' intéressait c' était la culture différente de la mienne les spectacles tout ça c' est très dynamique à Montreuil il y a beaucoup de choses comme ça et ça c' est vraiment vraiment très bien c' est ça la l' intérêt de la ville à Montreuil de la vie à Montreuil vous voyez c' est être confronté à des cultures différentes à tous les niveaux quoi et ça c' est bien ça enrichit vraiment Sonia_Branca-Rosoff: et ça la municipalité aide André_Morange: oui oui oui là il y a il y a vraiment euh pas de problème là là là Sonia_Branca-Rosoff: c' les bibliothèques vous avez lu André_Morange: alors la bibliothèque de la mairie moi j' y étais abonné depuis euh je passais mon mon temps à aller à la bibliothèque hein il y a énormément d' ouvrages il y a toujours des thèmes qui reviennent toutes les deux trois semaines tous les mois on change de thèmes donc tout ça c' est très dynamique ça c' est bien fait ce que j' ai-~ j' aimais pas c' était Sonia_Branca-Rosoff: les thèmes ça veut dire des par exemple des des lectures André_Morange: la Commune de Paris Sonia_Branca-Rosoff: non des petites expos André_Morange: oui il y avait des expos il y a des expos il y a quand je dis il y avait c' est pas en deux ans que ça que c' était Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: il y a des expos il y a des des des expos sur des thèmes Sonia_Branca-Rosoff: donc ça vous vous y vous y participiez André_Morange: oui j' aimais bien ça dépend des sujets ça dépendait des sujets vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: vous me donnez envie d' y aller de temps temps André_Morange: non mais c' est vrai c' est ça dépendait des mais ça ça toujours été dynamique et et on découvre plein de choses là c' est vraiment Sonia_Branca-Rosoff: donc la bibliothèque ça c' est formidable de dans cet endroit André_Morange: enfin pour moi la bibliothèque de Montreuil il y a elle est vraiment très intéressante il y en a plusieurs hein il y a Robert Desnos à côté mais il y a surtout la grande bibliothèque à la Mairie juste c' est juste à côté de la Mairie de Montreuil c' est oui oui non c' est vraiment euh enfin très intéressant enfin on s' enrichit on apprend des choses et enfin de compte c' est ce qui c' est ce qu' il faut Sonia_Branca-Rosoff: quoi les équipements sportifs vous vous en êtes servi André_Morange: enfin le le club athlétique de Montreuil est un club très connu en sp-~ en athlétisme hein ils sont premiers en Sonia_Branca-Rosoff: France et vous André_Morange: hein alors à Montreuil moi j' ai fait un peu de football mais c' était pas euh non je m' en suis pas vraiment servi Sonia_Branca-Rosoff: ni les gamins André_Morange: non oui non Sonia_Branca-Rosoff: non vos deux fils André_Morange: mais mon fils euh Mat n' est pas très euh mon premier fils n' est pas très sportif Sonia_Branca-Rosoff: euh et des espaces verts est-ce que André_Morange: ça c' est développé après je crois parce que les préoccupations des des munici-~ enfin Dufriche qui était maire avant Brard hein ils étaient vraiment à fond dans le comment dire comment expliquer ça Sonia_Branca-Rosoff: culture ouvrière André_Morange: oui mais euh plutôt à fond dans le militantisme vous voyez ce que je veux dire sans que je sache exprimer vraiment c' est ce qui passait en c' étaient les luttes sociales avant de s' occuper du reste entre guillemets quoi enfin je je vois c' oui il y a c' est une contradiction parce que il y a tout ce qu' il faut à Montreuil c' est bien euh vous voyez il y a la le le paradoxe entre les les deux quoi et et j' ai l' impression que les les rues piétonnes Sonia_Branca-Rosoff: mais en même temps vous avez dit finalement André_Morange: les rues pié-~ euh on parle de rues piétonnes à Montreuil il y en a pas vraiment hein c' est des rues semi-piétonnes où les voitures n' ont pas le droit de telle heure à telle heure enfin bon c' est pas la vraie rue piétonne mais quand même c' est un effort les les les les pistes cyclables ça c' est développé tard à Montreuil moi j' ai pas connu de pis~ de pistes cyclables avant euh le début des années deux mille Sonia_Branca-Rosoff: et les gens plutôt contents une fois qu' on le faisait ou hein oui André_Morange: vous voyez ce que je veux ben oui bien sûr mais pourquoi c' est pas venu avant alors vous voyez alors que la municipalité euh vous voyez i-~ on sent que la prise de conscience de ce genre de choses elle s' est faite tard Sonia_Branca-Rosoff: plutôt plus tard que André_Morange: que qu' elle aurait dû à mon avis hein Sonia_Branca-Rosoff: oui d' accord André_Morange: plutôt plus tard Sonia_Branca-Rosoff: donc André_Morange: en se disant-~ les voitures se garent partout sur la c' était le bordel à Montreuil hein je veux dire que les rues pas très propres aussi il faut le reconnaître tous ces efforts là n' ont pas été Sonia_Branca-Rosoff: la propreté c' était pas euh un objectif André_Morange: premier non mais bon c' est c' est agréable de enfin de pas marcher dans vous voyez c' est bon c' est Sonia_Branca-Rosoff: pas ah ben de pas marcher comme vous avez dit dans les animaux à Montreuil André_Morange: ben c' est partout oui partout mais c' est pas Montreuil spécialement je pense que là c' est vraiment euh un phénomène plutôt général quoi je sais pas si on peut l' adapter à une ville ouvrière comme Montreuil ça Sonia_Branca-Rosoff: il y a beaucoup de chiens et vous en pensez quoi vous en pensez quoi des chiens André_Morange: des chiens Sonia_Branca-Rosoff: des chiens dans la ville André_Morange: des chiens dans la vie oui enfin euh moi je veux dire occupons-nous des gens et après des chiens enfin je sais pas comment dire ça c' est idiot de dire ça Sonia_Branca-Rosoff: vous le dites très bien donc vous êtes pas spécialement un ami des chiens à quatre pattes parce qu' il y a trop de déjections André_Morange: mais c' est même pas c' est même pas ça en fait c' est il y a des priorités quoi je veux dire enfin ça c' est autre chose mais je veux dire bon c' est sûr que mais il y a pff j' ai pas je comprends pas ça je veux dire il y a il y a on dépense beaucoup d' argent pour ces animaux familiers c' est très bien j' ai un chat moi vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: ah alors vous êtes pris en contradiction là vous avez un chat André_Morange: quelque oui exactement mais mais malgré tout on se dit Sonia_Branca-Rosoff: il est nourri de qu comment le chat André_Morange: ben de croquettes mais oui oui je fais comme tout le monde et pourtant je sais que c' est pas euh voilà qu' il y aurait autre chose à faire avant de faire ça mais le le chien oui ça me gêne des fois Sonia_Branca-Rosoff: vous faites comme André_Morange: tout le monde à Montreuil ce qui m' a gêné aussi c' est c' est la propreté des rues pendant un moment bon euh mais c' est pas de la faute de de la municipalité c' est pas avoir l' esprit citoyen peut-être pour euh je sais pas vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: donc les gens sont pas très soigneux André_Morange: et n' étaient pas très soigneux peut-être à une époque ça je l' ai ressenti on peut pas être bien dans sa ville tout le temps sans qu' il y ait des des des comment dirais-je des Sonia_Branca-Rosoff: c' était un problème dans votre immeuble les parties communes par rapport euh André_Morange: non Sonia_Branca-Rosoff: non là non les gens étaient André_Morange: les gens étaient citoyens avaient un comportement citoyen donc c' était pas euh oui c' était pas euh il y avait quand même ah oui je vous disais les pistes cyclables elles sont apparues très tard dommage mais bon c' est bien il faut par contre euh les panneaux voltaïques à Montreuil ils sont bien développés grâce à Brard voilà vous voyez enfin bon il y a des choses bien des choses comme partout je veux dire Sonia_Branca-Rosoff: c' est ça doit être lié quand même aussi à la pression des des conseillers municipaux si si la population en fait une priorité ou pas ça doit jouer un rôle André_Morange: peut-être que dans le budget municipal il est prévu euh de développer ce genre de d' énergie alternative je sais pas vous voyez c' est une question de effectivement de de de de municipalité là cette fois-ci en l' occurrence Sonia_Branca-Rosoff: je reviens à mes chiens André_Morange: oui oui Sonia_Branca-Rosoff: euh indépendamment des problèmes de de priorité ou pas ça n' a jamais été un problème les chiens agressifs les rottweilers vous n' avez André_Morange: pas j' ai pas senti ça Sonia_Branca-Rosoff: non hein c' est d' une certaine façon vous décrivez une ville paisible une ville qui n' a pas de de problèmes de sécurité André_Morange: oui absolument non j' ai jamais eu de problèmes de écoutez depuis que je suis à Montreuil je je enfin bon j' ai je suis allé ailleurs mais sur mes cin-~ j' ai cinquante-huit ans j' ai dû passer euh cinquante ans à Montreuil peut-être Sonia_Branca-Rosoff: et donc jamais vous André_Morange: jamais jamais je me suis jamais senti peur de Montreuil je me suis jamais senti en insécurité à Montreuil Sonia_Branca-Rosoff: jamais vous vous êtes vu et vos enfants non plus non plus ils n' ont jamais eu André_Morange: de jamais jamais Sonia_Branca-Rosoff: jamais donc André_Morange: c' est ah c' est pas du tout lié aux populations ça n' a rien à voir contrairement à ce qu' on voudrait nous faire croire des fois c' est jamais jamais jamais vraiment Sonia_Branca-Rosoff: jamais d' accord André_Morange: vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: euh j' ai une question sur les le mode de circulation enfin vous en avez un peu parlé avec les la piste cyclable mais vous circuliez comment à Montreuil André_Morange: alors dans dans dans dans ma jeunesse là euh dans les années cinquante on prenait le métro hein on circulait en métro ou alors euh en mobylette si je me souviens les vieilles mobylettes les M B K là et puis ben après euh après c' est c' est c' est le métro c' est essentiellement le métro tout de même les transports en commun je veux dire Sonia_Branca-Rosoff: oui oui André_Morange: si possible Sonia_Branca-Rosoff: mais euh les courses ah oui vous aviez André_Morange: les alors on faisait les courses en voiture alors der~ euh sur les dernières années on faisait les courses en voiture moi je faisais mes courses à Monoprix à la Croix de Chavaux de la mairie où j' habitais j' allais j' allais en voiture faire les courses parce qu' il y a tellement de bon il y a un volume puisqu' on les faisait une fois par semaine il y avait un volume important donc euh on avait pas vraiment le choix quoi donc circulation en voiture et pour circuler en voiture à Montreuil Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: surtout Carrefour en coeur de ville maintenant c' est pas Sonia_Branca-Rosoff: bien donc ça c' est la voiture pour le une fois par semaine les courses le travail c' était à côté André_Morange: alors le travail c' était à pieds j' allais travailler à pieds en règle générale d' accord ou alors en vélo parce que j' avais un V T T pendant un moment ou alors en trottinette parce que j' avais une trottinette aussi vous voyez il y a mais j' évitais de prendre la voiture Sonia_Branca-Rosoff: ah oui euh euh donc ça c' est le travail et le dimanche avec les enfants vous faisiez André_Morange: euh quand j' étais tout petit ou quand non Sonia_Branca-Rosoff: quand oui non non au contraire quand ben si j' ai bien compris quand vous étiez petit mais je sais pas non en fait qu' est-ce qui se passait André_Morange: qu' est-ce qu' on faisait le qu' est-ce qu' on faisait le dimanche je sais plus pff Sonia_Branca-Rosoff: d' accord il y avait pas la voiture familiale André_Morange: ah non Sonia_Branca-Rosoff: non les enfants dedans et on s' en va au bois André_Morange: d' j' ai pas souvenir de ça dans ma prime jeunesse Sonia_Branca-Rosoff: oui et vous alors comme père qu' est ce qui se passe le dimanche avec vos enfants André_Morange: alors quand mon fils est né j' étais plus à Montreuil donc j' étais euh en Seine-et-Marne donc je l' ai je l' ai élevé tout seul en fait hein et euh ben le le le dimanche on sortait oui on allait se promener on allait dans les bois dans les forêts euh Sonia_Branca-Rosoff: donc la voiture André_Morange: la voiture la voiture pour aller se balader le dimanche la voiture et quand je suis revenu à Montreuil ben mon fils était autonome hein on on allait à Paris on a fait beaucoup on était abonnés au Louvre donc on allait souvent au musée on allait on aimait bien ça les musées les expositions les choses comme ça mais sans prendre la voiture cette fois-ci ou on marchait dans Paris on faisait les quartiers vous savez Paris à pieds il y a des bouquins Paris à pieds Sonia_Branca-Rosoff: vous avez fait systématiquement des dans Paris André_Morange: oui voilà il y a Paris à pieds balades Paris à pieds donc on faisait une balade un jour on se trouvait un petit resto on faisait une balade et puis la semaine d' après on faisait une autre balade Paris à pieds c' était très agréable on découvre des coins qu' on connaît pas forcément voilà Sonia_Branca-Rosoff: d' accord donc là aussi il y avait pas la voiture c' était plutôt et et Paris Paris vous intéressait comme ville finalement André_Morange: non et Paris oui finalement oui Sonia_Branca-Rosoff: après avoir dit c' est ailleurs André_Morange: c' est c' est ailleurs voilà Sonia_Branca-Rosoff: mais André_Morange: c' est ailleurs dans la jeunesse hein mais après évidemment c' est quand même Paris quand on s' intéresse un peu aux choses on est un peu curieux et il y a quand même pas mal de choses à faire à voir enfin Sonia_Branca-Rosoff: vous se~ vous vous serviez aussi des des spectacles parisiens ou c' étaient plutôt les musées André_Morange: les non alors les spectacles on en a fait très peu c' est plutôt les musées ouais plutôt les musées on allait au Musée d' Orsay très souvent on allait euh à l' Institut du Monde arabe très souvent parce qu' on était abonnés aussi on aimait bien ça on aime Sonia_Branca-Rosoff: bien vous avez été vous continuez André_Morange: oui mais on a plus de mal parce qu' on habite en banlieue en banlieue un peu plus loin donc il faut qu' on vienne là du coup il faut qu' on prenne la voiture pour aller à Paris vous voyez parce que c' était plus pratique à Montreuil Sonia_Branca-Rosoff: vous allez à Branly euh André_Morange: alors non est on est allé à Guimet au musée Guimet on aimait bien aussi mais le le Musée de des arts Sonia_Branca-Rosoff: premiers oui pas encore André_Morange: on l' a pas enco non l' a pas fait pas encore Sonia_Branca-Rosoff: donc c' est un de ces jours André_Morange: ben si on si on avait continué à vivre à Montreuil je pense qu' on l' aurait fait mais là euh là du coup on va moins on va moins à Paris du coup là Sonia_Branca-Rosoff: d' où et harmonieux quand même hein vous aviez votre André_Morange: oui très harmonieux Sonia_Branca-Rosoff: Paris comme je sais pas lieu de haute culture André_Morange: culturel oui voilà Sonia_Branca-Rosoff: et puis Montreuil pour la convivialité André_Morange: la convivialité la culture la culture la culture quotidienne oui non c' est très très euh très agréable c' est c' est on a toujours eu Montreuil pour moi ça toujours été une ville agréable sans souci enrich~ très riche très enrichissante Sonia_Branca-Rosoff: euh alors vous avez parlé des courses à Monoprix et vous vous êtes servi aussi des petits commerçants de quartier du marché vous alliez au marché André_Morange: alors marché on allait au marché aussi ou alors on allait chez le le le petit commerçant arabe chez l' Arabe comme le petit commerçant arabe quand on avait oublié un truc ça c' est voilà on Sonia_Branca-Rosoff: parce qu' il est ouvert le soir André_Morange: il est ouvert le soir jusqu' à minuit une heure du mat c' était pratique quoi mais bon c' était vraiment cas Sonia_Branca-Rosoff: de c' est le dépanneur André_Morange: dépanneur c' est le mot Sonia_Branca-Rosoff: et les Canadiens ils appellent ça des dépanneurs André_Morange: ils appellent ça des dépanneurs d' accord d' accord Sonia_Branca-Rosoff: nous on dit l' Arabe mais le dépanneur André_Morange: ben le dépanneur alors donc c' était enfin ça faisait partie d' un Sonia_Branca-Rosoff: tout oui André_Morange: hein il y avait le marché Sonia_Branca-Rosoff: le marché André_Morange: parce que il y avait des produits exotiques on pouvait acheter des produits exotiques des machins quand on a quand on voulait manger exotique aussi on on allait au marché Sonia_Branca-Rosoff: ah vous m' avez dit que vous n' avez pas changé de cuisine si quand même André_Morange: si ben c' est-à-dire que c' était pas enfin c' était pas on si quand même Sonia_Branca-Rosoff: oui et qu' est-ce que vous avez changé alors André_Morange: si ah la cuisine africaine couscous mais couscous moi j' ai toujours mangé du couscous hein à Montreuil quand j' Sonia_Branca-Rosoff: oui André_Morange: étais môme il y avait Sonia_Branca-Rosoff: toujours on achetait non on achetait la non vous alliez chez le au restaurant André_Morange: enfin quand j' étais môme voilà quand jusqu' à vingt ans bon par contre après quand je suis revenu à Montreuil euh au marché on achetait des des produits mais on a jamais fait le couscous nous on on allait pour le couscous on allait au resto Sonia_Branca-Rosoff: d' accord André_Morange: mais Sonia_Branca-Rosoff: pour qu' est-ce vous allez acheter justement André_Morange: ben tout ce qui est africain j' achè-~ je sais pas du colombo par exemple Sonia_Branca-Rosoff: pour oui donc la poudre vous achetiez la poudre André_Morange: on a-~ on achetait les ingrédients pour pouvoir du colombo ou alors pour pouvoir faire des plats africains du mafé ou des choses comme ça vous savez vous voyez des choses comme ça Sonia_Branca-Rosoff: non le mafé je vois André_Morange: pas ou alors ou le le mafé c' est un plat africain oui à base d' huile d' arachide ou on allait à on achetait des accras on achetait des choses qu' on faisait vous voyez ou alors de la bouffe chinoise aussi Sonia_Branca-Rosoff: toute faite André_Morange: là toute faite vous voyez Sonia_Branca-Rosoff: et les fruits vous avez changé et ouvert aussi je sais pas les mangues André_Morange: les oui toujours on achète toujours des fruit exotiques enfin toujours on achète beaucoup de fruits exotiques parce qu' on aime Sonia_Branca-Rosoff: bien oui donc quand même il y a beaucoup de choses André_Morange: qui ben la culture la culture si vous voulez c' est normal que on intègre quelque part une culture différente et c' est bien parce que ça veut dire quand même que euh à tous les niveaux Sonia_Branca-Rosoff: quoi oui absolument André_Morange: ben sauf la langue parce que la langue c' est compliqué peut-être c' est difficile mais euh la culture la culture différente il faut l' in-~ il faut un peu l' intégrer enfin je sais pas c' est euh c' est pas quelque chose qui passe comme ça Sonia_Branca-Rosoff: sans et euh pour pour ce qui est alors de des informations sur le quartier sur la ville André_Morange: il y a un quotidien Sonia_Branca-Rosoff: que vous avez lu André_Morange: que je lusais que je lisais toutes les semaines qui est qui est comment dirais-je édité par la mairie depuis euh je crois des décennies il me semble que j' ai toujours connu moi je parle pas de ma période jusqu' à vingt ans je sais pas je pourrais pas vous répondre mais après j' ai toujours connu moi j' ai toujours connu ce quotidien voilà et c' est à travers ce quotidien Sonia_Branca-Rosoff: oui Nasser: que vous savez qu' il y a les concerts André_Morange: bien sûr il y avait tout dedans il y avait même un endroit où il y avait la parole à l' oppo-~ au aux groupes d' opposition donc là c' était nickel quoi il y avait tout ce qui fallait pour savoir vivre la vie des différents quartiers de Montreuil Sonia_Branca-Rosoff: ça c' est euh c' était votre moyen d' information vous n' aviez pas besoin de compléter par euh je ne sais pas par internet vous avez André_Morange: ben fonda-~ ben fondamentalement non c' était largement pour moi suffisant si vous voulez euh pour voir la vie des quartiers globalement Sonia_Branca-Rosoff: quoi il y a des comités de quartier à Montreuil comme il y a Paris André_Morange: mais je je crois pas qu' on peut parler on peut alors ce qu' est comités de quartier euh non c' est moi qui appelle ça comité de Sonia_Branca-Rosoff: quartier euh je me trompe de nom je crois que André_Morange: c' est euh Sonia_Branca-Rosoff: euh mais enfin les habitants qu' on réunit où tout le monde peut venir discuter André_Morange: une fois par an une fois par an il y a le fameux repas de Sonia_Branca-Rosoff: quartier ah repas ça c' est autre chose vous participiez André_Morange: c' est autre chose ça mais ça ah oui oui ah c' est c' est agréable parce qu' on peut dé-~ découvrir des gens qu' on voit jamais même dans le même immeuble parce qu' on voit pas tout le monde forcément hein on é- les trois immeubles où on était bon là on voyait des gens qu' on connaît pas forcément Sonia_Branca-Rosoff: quoi vous faisiez ça sur le trottoir André_Morange: non non dans la cour il y a une cour il y avait une cour qui nous permettait de faire ça ça c' est c' est très agréable c' est très convivial en plus mais c' est pas c' est pas forcément nécessaire à Montreuil mais c' était un quelque chose en plus quoi c' était pas convivial sinon l' information sur les quartiers à Montreuil c' était vraiment à travers ce ce quotidien quoi enfin ce cet hebdomadaire pardon vous voyez parce que quand on est dans un quartier on s' intéresse à son quartier c' est idiot Sonia_Branca-Rosoff: c' est pas idiot justement André_Morange: et les autres quartiers on les zappe un peu Sonia_Branca-Rosoff: quoi et et vous pouviez euh essayer d' intervenir sur tel ou tel point vous l' avez fait je ne sais pas moi faudrait nous planter des arbres euh faudrait André_Morange: non non non Sonia_Branca-Rosoff: non à partir du moment où vous avez été désenchanté euh par les années soixante-huit ça se vous avez vécu votre André_Morange: oui il y a ça je pense parce que c' était tellement euh c' était c' était un un choc si vous voulez qui qui m' a fait dire bon c' est c' était voilà quoi si parce que c' est un choc important quoi peut-être que ça vient des racines de ça d' un désengagement viennent de là certainement viennent de là certainement quand on découvre une monstruosité alors qu' on croyait un paradis un paradis entre guillemets je caricature hein mais si vous voulez c' est quand même un choc important donc euh effectivement après ça m' a vous voyez ça n' empêche de de vivre une vie de Sonia_Branca-Rosoff: quartier oui visiblement c' est ce que vous avez André_Morange: hein mais euh de de voilà quoi ce qui pour moi pour nous était euh largement suffisant Sonia_Branca-Rosoff: écoutez moi je crois que ce que vous m' avez raconté donne quand même une idée très intéressante de votre rapport avec le André_Morange: quartier je sais pas j' espère hein parce que voilà c' est pas très j' ai fait ce que j' ai pu avec les souvenirs que j' ai eus Sonia_Branca-Rosoff: euh est-ce que il vous semble que j' ai oublié des choses essentielles dans mes questions André_Morange: non je pense que ça correspond vraiment à une vision Sonia_Branca-Rosoff: c' est grâce à vous hein parce que vous aviez vraiment des choses à dire André_Morange: oui c' est ça correspond à une vision euh que j' ai moi de de de ce que j' ai vécu à Montreuil oui Sonia_Branca-Rosoff: en tout cas c' est une vision sympathique ça donne envie de venir y vivre André_Morange: oui ben écoutez euh non c' est très agréable hein vraiment c' est c' est ma ville mes racines Sonia_Branca-Rosoff: bien écoutez j' espère que André_Morange: ben je vous remercie ça m' a fait du bien de discuter avec vous de ça sur ce sujet là Sonia_Branca-Rosoff: merci beaucoup