_: Le triangle syro-libano-israélien : scénarios de crise May Chartouni-Dubarry Chartouni-Dubarry May Chartouni-Dubarry , chargée de recherche à l' Institut français des relations internationales . C' est devenu presque une tradition : chaque premier ministre en Israël entame sa législature en relançant l' option " Le Liban d' abord " . Dès son élection et la formation de son gouvernement en juin 1996 , Benyamin Netanyahou a tenté de négocier via les Syriens un retrait israélien unilatéral du Liban-sud assorti de garanties de sécurité draconiennes , sans offrir aucune contrepartie sur le Golan , si ce n' est une vague promesse d' une réouverture des négociations syro-israéliennes interrompues en mars 1996 . Manoeuvre tactique de la part d' un gouvernement qui a annoncé haut et fort sa détermination de ne céder aucun pouce du Golan ou prélude à un revirement de stratégie par rapport à la politique suivie par les travaillistes sous Itzhak Rabin puis Shimon Pérès , avec l' aval à peine déguisé des Américains , et qui n' envisageait de règlement au Liban-sud que dans le cadre d' un accord de paix global avec la Syrie ? Un an et demi après l' arrivée de l' équipe de Benyamin Netanyahou au pouvoir , l' option " Le Liban d' abord " semble avoir fait long feu . Cet écran de fumée s' est rapidement dissipé : le Liban n' est pas plus une priorité pour le présent gouvernement qu' il ne l' a été pour son prédécesseur . Loin de marquer une rupture avec la politique libanaise suivie par l' État hébreu depuis l' instauration de la zone de sécurité au sud Liban en 1985 , cette initiative ressemble davantage à une manoeuvre tactique visant tout à la fois à " tester " l' acteur syrien , à montrer à l' opinion publique israélienne que le gouvernement tente de trouver une issue à l' inextricable problème libanais et à rectifier auprès de la communauté internationale une image négative de fossoyeur politique et juridique du processus de paix en se déclarant prêt à se conformer " sous certaines conditions " à la légalité onusienne , en l' occurrence à la résolution 4251 . Ces " conditions " - un redéploiement progressif à négocier contre des garanties de la part de l' État libanais de désarmer la résistance libanaise et l' ouverture de négociations de paix séparées avec l' État hébreu - reproduisent dans leur formulation générale le schéma du traité israélo-libanais avorté du 17 mai 1983 , qui , quinze ans plus tard , fait figure d' anathème pour le couple syro-libanais qui s' est formé à l' issue des accords de Taëf en 1989 . Fait significatif , l' option " Le Liban d' abord " omettait délibérément de faire mention d' un retrait simultané du Golan . Au contraire , cette " ouverture " en direction du Liban s' accompagnait d' une volonté claire de clore les négociations syro-israéliennes , voire d' en annuler tous les acquis et les avancées , en niant formellement qu' un quelconque engagement formel ait été pris par Itzhak Rabin dès 1994 concernant le principe d' un retrait du Golan . Selon Benyamin Netanyahou , il ne s' agirait là que d' " hypothèses " parmi d' autres posées sur la table de négociations . Le gouvernement actuel ne s' estime donc ni politiquement , ni juridiquement lié par des promesses ou engagements qui n' ont fait l' objet de documents écrits , signés et ratifiés . Dès juin 1996 , le Premier ministre exprimait cette position sans ambiguïté : " Le gouvernement considère le plateau du Golan comme vital à la sécurité de l' État ; le principe de la souveraineté israélienne sur le Golan est à la base de toute forme d' accord avec la Syrie " . En même temps qu' il fermait la porte à toute négociation avec Damas , celui -ci demandait donc implicitement aux Syriens de l' aider à s' extirper du bourbier libanais . Alors que le gouvernement précédent avait totalement avalisé le principe de la " concomitance des deux volets " , syrien et libanais , Benyamin Netanyahou lançait un véritable défi à la Syrie en tentant de dissocier les deux occupations du Golan et du Liban-sud . Si cette manoeuvre était diplomatiquement prévisible , en revanche ce qui est plus étonnant depuis le retour au pouvoir du Likoud , c' est la prudence certaine dont il fait preuve dans sa gestion de la politique libanaise . Cette retenue contraste avec le discours musclé tenu tant à l' égard de Syrie ou de l' Iran , co-parrains du Hezbollah , qu' à l' égard de l' État libanais menacé et sommé quotidiennement de se comporter en acteur souverain et d' étendre son autorité sur l' ensemble de son territoire faute de s' attirer les foudres de la puissante machine militaire israélienne . Alors que l' on aurait pu en toute logique , dans un contexte non plus de gel mais de régression du processus de paix , s' attendre à une " réactivation " des options militaires israéliennes notamment au Liban , c' est l' inverse qui prévaut sur le terrain . Non que le Sud meurtri par plus d' un quart de siècle de guerre , dite de " faible intensité " , connaisse une période de répit . Mais le bilan plus que mitigé de la dernière opération israélienne en territoire libanais , appelée " Raisins de la colère " , a contribué avant même la victoire électorale de Benyamin Netanyahou à un rétrécissement des options israéliennes au Liban . En effet , le nouveau premier ministre hérite d' une situation ingérable au Liban-sud que son intransigeance vis-à-vis de Syrie ne fait qu' accroître . Le triangle syro-libano-israélien s' est rigidifié selon un schéma désormais bien connu où le Liban , bien que reconnu aux termes des accords de Taëf comme un État pleinement souverain , demeure le théâtre central où s' affrontent les deux acteurs syrien et israélien . Si cette configuration triangulaire n' a rien de bien nouveau , en revanche , les paramètres en ont été substantiellement modifiés par rapport au modus vivendi syro-israélien instauré au lendemain du redéploiement israélien de 1985 . Au " dialogue de la dissuasion " dont la principale vertu avait été de prévenir tout risque d' escalade incontrôlé entre les deux armées présentes sur le sol libanais , s' est substitué un déséquilibre stratégique notable au détriment de la partie israélienne . Le piège du Liban-sud s' est refermé sur l' État hébreu : aucune option militaire ne semble viable et une issue politique est plus que jamais fonction de la volonté syrienne . Cet article se situe précisément à ce tournant . Il vise à apporter un éclairage prospectif sur l' évolution , à moyen terme - dans les six ans à venir - de ce triangle syro-libano-israélien en fonction des scénarios qui nous semblent les plus plausibles . L' analyse de la configuration actuelle , les enjeux du volet syro-israélien du processus de paix et l' imbrication étroite du couple syro-libanais dans les dynamiques de ce triangle serviront de canevas à ces scénarios de crise . État des lieux Historique et enjeux des négociations L' année 1994 constitue probablement un tournant dans les négociations syro-israéliennes qui piétinaient depuis le lancement du processus de paix à Madrid en octobre 1991 . Trois événements majeurs vont contribuer à en relancer la dynamique : la rencontre à Genève entre Hafez al-Assad et le président Clinton au cours de laquelle le président syrien exprime officiellement son engagement pour la paix ; l' acceptation en juillet 1994 par Itzhak Rabin ( jamais confirmée officiellement ) du principe d' un retrait israélien du Golan jusqu'aux lignes du 4 juin 1967 ; et la signature de l' accord de paix jordano-israélien qui donne à la partie israélienne les coudées plus franches pour avancer sur le volet syrien . La définition de la position israélienne , résumée par la formule de Itzhak Rabin devenue célèbre depuis " la profondeur du retrait ( du Golan ) sera proportionnelle à la profondeur de la paix " , a permis de lever toute ambiguïté sur la reconnaissance par la partie israélienne de la résolution 242 des Nations unies comme la base des négociations de paix avec la Syrie . Itzhak Rabin a ainsi donné satisfaction à Hafez al-Assad qui exigeait comme point de départ des négociations un engagement israélien ferme sur un retrait total du Golan . Dès le départ , il était clair que Hafez al-Assad n' accepterait pas moins que ce que Anouar al-Sadate avait obtenu . La rétrocession du Golan dans sa totalité constitue un objectif vital pour le président syrien pour des raisons symboliques et de légitimité - réparer l' honneur perdu de la défaite de 1967 alors qu' il était ministre de la Défense . La partie israélienne voulait compenser la perte du Golan par des mesures de sécurité drastiques , seul moyen d' obtenir l' adhésion de l' opinion publique israélienne à un accord de paix avec la Syrie . La normalisation devait en outre être pleine et entière : ouverture des frontières , libre circulation des hommes et des biens , échange d' ambassades ... Mais ce sont véritablement les pourparlers engagés à Maryland , de décembre 1995 à février 1996 , qui ont permis d' avancer sur les quatre dossiers litigieux : l' étendue du retrait , les arrangements de sécurité , la normalisation des relations , et le calendrier de mise en oeuvre . Les discussions avaient comme base un document de travail élaboré et rédigé par les Américains , intitulé " Objectifs et principes des arrangements de sécurité " ( Aims and Principles of Security Arrangements ) qui réaffirme le principe selon lequel la sécurité de l' une des deux parties ne doit pas être aux dépens de la sécurité de l' autre partie . En l' espace de quelques mois à peine , Israéliens et Syriens auraient accompli des progrès fulgurants dans leur marche vers la paix . Une nouvelle ère allait s' ouvrir pour la région grâce à la " clef " syrienne sans laquelle il n' y a pas de paix globale viable au Moyen-Orient . L' État hébreu allait pouvoir consolider les acquis obtenus sur les autres volets du processus de paix et se désengager progressivement du Liban-sud . L' un des principaux objectifs israéliens était bien entendu de s' extirper de ce triangle infernal dans lequel l' état de guerre froide avec la Syrie l' avait enfermé au Liban-sud . Mais l' année 1996 ne sera pas celle de la paix syro-israélienne . Nous examinerons plus loin les perceptions et les interprétations syriennes et israéliennes de ce " rendez -vous manqué " avec l' histoire . Mais ce court épisode des négociations avortées est riche d' enseignements quant à la mécanique de fonctionnement de ce triangle . En effet , alors que la Syrie gère son couple avec le Liban sur la base de la concomitance et l' indissociabilité des deux volets , la partie libanaise a brillé par son absence avant de disparaître complètement du paysage des négociations . Il est vrai qu' en s' accrochant avec entêtement à l' application inconditionnelle de la résolution 425 , la délégation libanaise s' est engagée , dès l' ouverture du processus à Madrid en 1991 , dans un dialogue de sourds avec les représentants israéliens qui refusaient de négocier sur la base d' une résolution qui n' offre , selon eux , aucune garantie de sécurité pour l' État hébreu . Mais l' explication de l' inexistence des négociations libano-israéliennes réside ailleurs . Au moment où les pourparlers syro-israéliens démarrent sur des bases encore incertaines , le Liban - et non sa partie sud -constitue paradoxalement le seul point non litigieux entre les deux parties . Les projets grandioses du tandem Begin / Sharon au pays du Cèdre ne constituent plus aujourd'hui qu' une parenthèse amère dans une politique qui , depuis l' entrée des troupes syriennes au Liban en 1976 , s' est appuyée avec constance sur le " dialogue de la dissuasion " entre Damas et Tel-Aviv . Au-delà de ses aspects techniques , ce modus vivendi était bâti sur une reconnaissance mutuelle par ces deux puissances d' intérêts de sécurité vitaux dans ce pays . Loué par les uns pour sa fonction stabilisatrice , dénoncé par les autres pour son cynisme à l' égard d' un pays réduit à n' être plus qu' une zone-tampon , cet accord a été sérieusement menacé par l' opération " Paix en Galilée " en 1982 dont l' un des objectifs majeurs était d' éliminer toute présence syrienne du Liban en y installant un État dominé par les maronites et allié d' Israël . Le redéploiement israélien en 1985 renouait avec la politique libanaise suivie par l' État hébreu dans les années 70 privilégiant le maintien du statu quo dans les relations avec Damas et limitant le champ de son intervention à la zone de sécurité qu' elle a établie depuis dans le sud du Liban . La réalité stratégique du couple syro-libanais n' a pas constitué - et ne constituera pas - un obstacle dans les négociations syro-israéliennes . Résignés et même soulagés pour certains d' une prise en charge syrienne du Liban , les Israéliens soutiennent dans leur quasi-unanimité l' option d' un retrait conditionnel du Liban-sud qui renforcerait la sécurité de la frontière nord de l' État hébreu . L' un des leitmotivs des responsables politiques et des représentants de l' intelligentsia est qu' Israël n' a aucune visée territoriale ou revendication idéologique au Liban et particulièrement dans sa partie sud . L' autre réalité est le sentiment mélangé de désillusion , d' amertume et de ressentiment à l' égard des Libanais et plus particulièrement des maronites . David Kimche , qui a pris une part active aux négociations israélo-libanaises et à l' élaboration du traité avorté du 17 mai 1983 , parle de terrible déception alors que Yossi Olmert , avec beaucoup moins de distance et de retenue , affirme qu' aucun Libanais , qu' il soit chrétien ou musulman , ne mérite que lui soit versé une seule goutte de sang israélien . À propos de l' opportunité manquée ... La version syrienne la plus élaborée et la plus détaillée en est fournie par le principal négociateur syrien , ambassadeur de Syrie à Washington , Walid al-Moualem . La responsabilité de l' échec des pourparlers de Wye Plantation est rejetée sur la partie israélienne et plus spécifiquement sur Shimon Pérès qui a décidé , dans la foulée , la suspension des négociations , l' organisation d' élections anticipées et le déclenchement d' une vaste offensive au Liban en avril 1996 . Selon l' ambassadeur syrien , Itzhak Rabin et Shimon Pérès avaient chacun leur style et obéissaient à un rythme de négociations différent . Le premier était méfiant , réticent , avançait prudemment et à petits pas . Devenu Premier ministre , Shimon Pérès était mû par un sentiment d' urgence . Il désirait entrer en campagne électorale avec un accord syro-israélien clefs en main . Les deux pierres d' achoppement sur lesquelles butait l' accord final étaient liées aux arrangements en matière de sécurité et à la nature de la " normalisation " . Les exigences israéliennes en matière de sécurité étaient jugées inacceptables pour les Syriens qui réclamaient l' application du principe de symétrie concernant les postes de surveillance avancés et les zones démilitarisées . Sur le dossier de la normalisation , les Syriens opposaient à la vision israélienne d' une " paix chaude " , une normalisation graduelle , en faisant prévaloir qu' il est encore prématuré pour l' opinion publique syrienne d' assimiler et d' accepter un passage brutal d' une situation de guerre à une situation de paix . Sur le volet du retrait du Golan et de sa profondeur , Walid al-Moualem et le président Assad lui-même ont affirmé que les Israéliens , conformément à la condition posée par les Syriens comme préalable à la poursuite des négociations , s' étaient dès 1994 engagés sur le principe d' un retrait jusqu'aux lignes du 4 juin 1967 . Si l' on a une version monolithique prévisible en Syrie , les Israéliens en revanche sont partagés sur l' interprétation et les implications de cette opportunité manquée . Le débat oppose ceux qui croient que la paix était une option stratégique réelle pour la Syrie à ceux qui restent convaincus que les objectifs de Hafez al-Assad , une situation de non-belligérance , étaient fondamentalement différents de la paix telle que la conçoivent les Israéliens . Pour les tenants de la première thèse , un accord sous le forme d' une " Déclaration de principes " était sur le point d' être conclu . L' opportunité manquée serait due à une erreur de calcul de la part du président Assad qui n' a pas voulu comprendre et entendre qu' il était de sa tâche de convaincre l' opinion publique israélienne , très réticente et en majorité encore opposée à un retrait total du Golan , de son engagement réel pour la paix . Une rencontre au sommet avec Shimon Pérès aurait contribué à créer une dynamique propre . En refusant d' effectuer ce geste symbolique en direction des Israéliens , il aurait contraint celui -ci à suspendre les négociations et à provoquer des élections anticipées . Pour les tenants de l' autre thèse , le président syrien a fondamentalement peur de la paix en raison de ses implications sur la stabilité du régime et sur le poids stratégique régional de la Syrie . Son adhésion au processus de Madrid et au principe de " La terre contre la paix " n' aurait été qu' une manoeuvre tactique pour empocher les dividendes que lui valait en soi sa posture de négociation . À l' inverse , la paix aurait à terme contribué à la " banalisation " de l' acteur syrien en réduisant considérablement sa valeur stratégique . L' un des enjeux du débat porte , comme de coutume en Israël , sur la personnalité de Hafez al-Assad . De plus en plus de voix s' élèvent qui considèrent que le président syrien constitue un obstacle à la paix et qu' Israël devrait attendre l' après-Assad avant de relancer un quelconque processus de négociations avec la Syrie . Certaines figures traditionnelles du Likoud , tel Yossi Olmert , mettent en cause la légendaire habileté politique et man ? uvrière du président syrien en affirmant que celui -ci n' a jamais su transformer les " cartes " dont il disposait en atouts tangibles . De l' autre côté du spectre politique , des personnalités telles que Itamar Rabinovitch , principal négociateur et fin connaisseur des questions syriennes , ne disent pas autre chose en qualifiant Hafez al-Assad d' " homme du passé " , foncièrement conservateur et qui n' a jamais réussi à bien saisir les réalités de la société et de la politique israéliennes . Personne n' est en mesure aujourd'hui de confirmer ou d' infirmer la thèse courante selon laquelle si Shimon Pérès avait remporté les élections , une " Déclaration de principes " aurait été signée en l' espace de quelques mois , prélude à un accord de paix global . Rétrospectivement , il est assez troublant de constater que l' opinion publique israélienne ne conserve pas le sentiment d' une opportunité historique manquée avec la Syrie . Est -ce parce que Hafez al-Assad a , avec consistance , refusé de s' adresser directement à elle comme le lui demandait avec insistance la partie israélienne ? En outre , Itzhak Rabin s' était engagé à soumettre cet accord sur le Golan à référendum , prenant par là un gros risque , la société israélienne n' étant guère acquise à la formule " La paix en échange de la terre " appliquée à la Syrie . Enfin , deux visions quasi irréconciliables de la paix continuaient à s' opposer : la paix est conçue par Damas comme un moyen de contenir Israël dans ses frontières , alors que pour la partie adverse la paix constitue une fin en soi devant se traduire par une normalisation totale des relations tout en garantissant à l' État hébreu les conditions optimales de sécurité . Selon toute probabilité , un arrangement était sur le point d' être conclu bien qu' il soit difficile d' en déterminer les termes et le contenu . Les responsables israéliens qui ont été très impliqués dans les négociations sont très évasifs sur le sujet . Selon Itamar Rabinovitch , il n' y aurait eu aucun accord entre les deux parties sur les postes de surveillance avancés ou sur les zones démilitarisées . En outre , la délégation israélienne aurait bien demandé un redéploiement de l' armée syrienne mais non une réduction de la taille des forces armées , contrairement aux affirmations de la délégation syrienne . Quant au retrait du Golan , il n' aurait été abordé que de façon très hypothétique . La récurrence du terme " hypothétique " dans le discours officiel israélien , de droite comme de gauche , s' agissant du principe même du retrait laisse quelque peu sceptique quant à l' imminence de cette paix manquée . Il est évident que la grande prudence stratégique de Hafez al-Assad et ses réserves idéologiques concernant le processus de normalisation avec l' État hébreu ne sont pas seules en cause . Les perceptions israéliennes de la Syrie restent fondamentalement négatives et il n' est pas sûre qu' une poignée de main entre Shimon Pérès et Hafez al-Assad aurait suffi à calmer les craintes des Israéliens , nourries par trente ans de campagne selon laquelle renoncer au Golan , c' est renoncer à la sécurité de la Galilée . Enfin , on semble déceler quelques notes discordantes entre Shimon Pérès et Uri Savir d' un côté , et Itamar Rabinovitch -qui avait été nommé par Itzhak Rabin - de l' autre . Bien qu' il n' en ait jamais fait état publiquement , Itamar Rabinovitch ne semblait partager ni l' empressement de Shimon Pérès à vouloir conclure un accord , ni son enthousiasme pour donner un contenu nouveau plus économique et culturel aux négociations dans le cadre de sa vision du " Nouveau Moyen-Orient " . L' anecdote qui illustre bien la distance " psychologique " qui séparait les deux parties , syrienne et israélienne , est celle relative à la volonté de Shimon Pérès , en pilote averti , de " voler haut et vite " ( to fly high and fast ) . Il usait de cette métaphore pour convaincre ses interlocuteurs syriens qu' il était dans leur intérêt et leur sécurité réciproques d' accélérer le rythme des négociations et d' en changer les modalités , en provoquant une rencontre au sommet avec Hafez al-Assad et en élevant les négociations directes au niveau des chefs d' État et de gouvernement . À cela , les Syriens rétorquaient qu' il était certes important de " voler " mais qu' il était tout aussi important de ne pas se tromper sur le lieu et le moment de l' atterrissage . Les scénarios Les deux scénarios identifiés et analysés ici sont ceux qui déterminent une configuration spécifique du triangle syro-libano-israélien , avec ses prolongements sur les situations internes , et ses implications régionales et internationales propres : le scénario du statu quo et l' option d' un retrait israélien du Liban-sud . Ces deux cas de figure comportent des variantes intermédiaires que sont les risques d' escalade militaire et même de guerre ouverte ou les percées et les progrès sur le front diplomatique . Néanmoins , l' effondrement de la dynamique et de l' architecture du processus de paix israélo-arabe a réduit l' éventail des options . Le triangle syro-libano-israélien se situe aujourd'hui dans cette zone grise , intermédiaire , entre l' option de la paix et celle de la guerre , mais qui reste une zone de crise et de turbulences . Maintien du statu quo actuel Le scénario de " ni guerre , ni paix " est sans aucun doute le plus plausible aujourd'hui concernant l' évolution à moyen terme du triangle syro-libano-israélien . La perspective d' une reprise des négociations s' éloigne au fur et à mesure que la confusion politique s' accroît en Israël . Contrairement à ce qui se passe sur le front intérieur , en Palestine , il n' y a pas ici de sentiment d' urgence pour Israël , sauf au Liban-sud . Mais le gouvernement de Benyamin Netanyahou semble bien déterminé à ne céder sous aucun prétexte aux pressions qu' exerce Damas via le Hezbollah pour ramener la partie israélienne à la table des négociations , sur la base de la paix en échange du double retrait du Golan et du Liban-sud . D' ailleurs , le Premier ministre estime que le Golan ne constitue pas une priorité pour le président Assad . La stabilité interne , le rôle de la Syrie au Liban , ses relations avec les États-Unis et son poids régional sont , selon lui , des enjeux autrement plus vitaux . Parallèlement , les deux puissances israélienne et syrienne redoublent de vigilance pour éviter l' escalade et la confrontation militaire directe . Le retour de part et d' autre au discours belliqueux et radical qui caractérisait les relations entre les deux États avant Madrid , les rumeurs de surarmement et de mouvements de troupes , ne sauraient faire oublier que , depuis la guerre d' octobre de 1973 et les accords de désengagement sur le Golan , la frontière syro-israélienne est , comparée au foyer de tension permanent du Liban-sud , un îlot de paix . Certains stratèges israéliens , minoritaires , ont pourtant élaboré des scénarios de conflit entre Damas et Tel-Aviv , qui se fondent sur l' hypothèse centrale que la situation de statu quo n' est viable ni pour l' une ni pour l' autre des deux parties soumises à des échéances internes et à des pressions internationales croissantes . Il ne fait pas de doute que la Syrie maintiendra au Liban-sud une pression militaire indirecte aussi forte que le lui permettent les lignes rouges fixées par l' accord de cessez-le-feu d' avril 1996 - sans impliquer ses 35 000 soldats stationnés au Liban - et aussi longtemps que le gouvernement israélien en place refusera de reprendre les négociations là où elles se sont arrêtées . Délimitée géographiquement à la zone de sécurité , la guerre d' usure que se livrent le Hezbollah ( 1 500 hommes ) et l' armée israélienne épaulée par l' ALS ( Armée du Liban-sud qui compte 2 500 hommes ) , comporte certes des risques de dérapage , comme en 1993 et 1996 , lors des deux opérations " Justice rendue " et " Raisins de la colère " . Néanmoins , les règles du jeu scrupuleusement respectées par Israël et la Syrie depuis l' entrée des troupes de Damas en 1976 - règles que la création du Comité de surveillance du cessez-le-feu n' a d' ailleurs fait que formaliser vingt ans plus tard - ont instauré des mécanismes efficaces d' endiguement de ces risques . Une escalade militaire généralisée dont le Liban-sud serait le détonateur ne pourrait , dans le contexte actuel , que venir d' une décision stratégique israélienne visant à en découdre par la force avec le Hezbollah , pacifier sa frontière nord sans avoir à payer un quelconque prix à la Syrie . Mais le syndrome libanais en Israël pèse de tout son poids , psychologique certes mais également politique . La succession de revers que continue à subir Tsahal à l' intérieur même de sa zone de sécurité ne fait que raviver ce sentiment d' échec et d' impuissance , relançant le débat public interne sur le maintien de la zone de sécurité , sur lequel nous reviendrons plus loin . Outre les fortes résistances de l' opinion publique à toute nouvelle expédition chez le petit voisin au nord , le gouvernement israélien doit également compter avec les oppositions et les divisions qui se sont développées au sein de son propre état-major sur l' opportunité d' une nouvelle action militaire pour " casser " le statu quo actuel et y imposer un nouvel ordre garantissant la sécurité " absolue " à la fois des populations du nord mais également celle des soldats de Tsahal . Que ce soit une opération punitive massive prenant en otage la population civile libanaise ( à l' instar des " Raisins de la colère " ) ou l' extension de la zone de sécurité vers le nord ou encore une attaque ciblée contre les positions de l' armée syrienne au Liban : aucune de ces trois variantes de l' option militaire n' apparaît dans le contexte actuel comme une stratégie gagnante . Aucune ne semble susceptible d' échapper à la logique de l' enlisement qui , depuis 1982 - 1985 , est perçue comme une " malédiction " proprement libanaise où l' arme militaire finit par se retourner politiquement contre son utilisateur . En outre , il va sans dire que le contexte régional et international actuel ne se prête guère à une nouvelle action militaire israélienne au Liban . Le désengagement et la passivité relatives de l' Administration américaine au Proche-Orient sont incontestablement l' un des éléments du statu quo actuel . Dans le même temps , les conséquences diplomatiques du blocage du processus de paix et les réalignements géostratégiques qui se dessinent au Moyen-Orient , en même temps que la vague croissante d' anti-américanisme dans le monde arabe , n' augurent rien de bien rassurant à terme pour les intérêts et la position des États-Unis dans la région . L' activisme diplomatique tous azimuts que déploie la Syrie pour parer aux risques d' isolement que l' élection de Benyamin Netanyahou avait à un moment fait craindre , notamment par le biais de la consolidation des liens stratégiques avec la Turquie , a porté ses fruits . Le soutien réitéré apporté par l' Égypte et l' Arabie Saoudite à Damas , leur dénonciation quotidienne de la politique israélienne et de la complaisance américaine , leur refus de participer au sommet économique de Doha de novembre 1997 , puis leur participation au sommet de la Conférence islamique à Téhéran un mois plus tard , constituent autant de signaux d' urgence lancés à Washington par ses deux alliés les plus fiables dans la région . Il est peu probable qu' à un moment où la capacité de médiateur de l' Administration américaine est sérieusement mise en cause par ses partenaires arabes , celle -ci avalise une action militaire israélienne au Liban . Échaudé par le coup de poker électoral qui a précipité Shimon Pérès dans la désastreuse opération " Raisins de la colère " , Washington ne voudrait en outre surtout pas prendre le risque de condamner ainsi le volet syrien des négociations , ce qui signerait l' arrêt de mort du processus . Tant que la partie syrienne continuera à se montrer disposée à reprendre les négociations avec Israël sur la base de " ce qui a été conclu à Wye Plantation " , les responsables américains veilleront à éviter toute escalade militaire dont l' objectif premier serait pour le gouvernement israélien d' imposer par la force l' option " Le Liban d' abord " . Le maintien du statu quo est un pis-aller aujourd'hui pour Washington qui a tant investi dans le processus de paix et qui peut se targuer d' avoir réalisé de remarquables percées sur le dossier syro-israélien en un laps de temps assez court , compte tenu de l' antagonisme profond qui opposait les deux parties . Il n' est pas question de revenir sur les acquis de Wye Plantation , qu' il faut geler en attendant que le verrou israélien se débloque , soit par un bouleversement de la donne interne , soit par un changement de l' état d' esprit de la communauté juive américaine et de ses puissants groupes de pression dans le sens d' une plus grande fermeté à l' égard du gouvernement actuel afin qu' il réactive le processus de paix . À ce jour , il n' y a donc pas eu ce dangereux glissement que beaucoup redoutaient , entre le retour à un état de guerre froide entre Israël et la Syrie et une détérioration incontrôlable de la situation au Liban-sud . L' autre front , celui du Golan , pourrait -il se rallumer dans ce contexte de regain de tension ? Le gouvernement israélien pourrait -il être tenté de porter le conflit en territoire syrien pour résoudre le dilemme dans lequel il se retrouve pris aujourd'hui au Liban-sud du fait de sa propre intransigeance sur le Golan et de l' absence d' une alternative militaire crédible pour sortir du bourbier libanais ? Cette option ne recueille pratiquement pas d' échos en Israël même parmi les milieux les plus " syrophobes " au sein de la coalition gouvernementale qui , redoutant l' ouverture d' un nouveau front sur le Golan , préconisent d' infliger enfin un coup fatal à la présence syrienne au Liban . Toutes les opérations israéliennes dans ce pays n' ont effectivement jamais pris pour cible les positions de l' armée syrienne dans la Békaa ( à l' exception des frappes préventives de 1982 ) , alors même que c' était Damas et non Beyrouth qui était politiquement visée . Il est peu probable que l' option militaire contre la Syrie , avec toutes ses conséquences incontrôlables en termes de sécurité pour l' État hébreu , fasse plus d' émules au sein de l' opinion publique comme de l' establishment militaire et politique , et ce , tant que Hafez al-Assad continuera , comme il l' a toujours fait , de se conformer aux fameuses lignes rouges au-delà desquelles il exposerait son pays à la supériorité militaire écrasante de Tsahal . Certains stratèges israéliens , minoritaires , n' écartent pourtant plus l' éventualité d' une guerre limitée que déclencherait le président syrien pour sortir de l' impasse politique devenue intenable . Les tenants de ce scénario reprennent à contre-pied une thèse communément partagée - par des hommes politiques aussi différents que Itamar Rabinovitch et Benyamin Netanyahou - selon laquelle Hafez al-Assad n' aurait jamais été pressé de signer un accord de paix sur le Golan . Au contraire rétorquent ceux -là , le président syrien se trouve aujourd'hui dans la même situation d' urgence que Yasser Arafat ou que Shimon Pérès à la veille des élections qui allaient sceller politiquement son sort . Il partagerait également ce même sentiment d' amertume et de frustration d' avoir laissé la " victoire " lui échapper alors qu' il était si proche du but : le retour du Golan sous souveraineté syrienne . Privé d' options diplomatiques pour libérer le Golan et face à l' inertie de la communauté internationale , Hafez al-Assad pourrait être tenté par une opération militaire sur le modèle de la guerre d' octobre 1973 , sous la forme d' une incursion limitée au Golan dans la zone du mont Hermon , forçant ainsi Américains et Européens à intervenir rapidement pour prévenir les risques d' escalade et relancer les négociations . Ce scénario reste peu convaincant , ne serait -ce que par la place centrale qu' il accorde à la psychologie du président syrien qui , arrivant au seuil de son existence et à l' heure terrible des bilans , opterait brutalement pour un revirement de la stratégie qui a été la sienne depuis 1973 et qui a été globalement gagnante en termes de poids régional , pour se précipiter tête baissée dans une confrontation militaire avec Israël , dans une ultime tentative de jouer quitte ou double : c' est-à-dire récupérer le Golan ou perdre tous les acquis engrangés jusque -là , dont la mainmise sur le Liban . En outre et sans être un fin stratège , on voit mal selon quelle logique Israël céderait à une pression militaire syrienne sur le Golan , en acceptant de reprendre les négociations selon les conditions posées par Damas , alors que la guerre d' usure au Liban-sud n' a pas à ce jour entamé l' intransigeance du gouvernement israélien . Le président Assad - qui a toujours dans ses calculs accordé une place centrale aux équilibres stratégiques - sait qu' une tentative syrienne pour occuper par la force une partie du Golan entraînera une riposte israélienne dévastatrice . Les conditions qui prévalent aujourd'hui sont en outre radicalement différentes du contexte régional et international qui a permis à Anouar al-Sadate de récolter les fruits politiques d' une opération militaire limitée dans ses objectifs . Le président égyptien disposait alors d' atouts stratégiques majeurs qui font défaut à Hafez al-Assad - et qui expliquent d' ailleurs le choix historique de la Syrie de renoncer à la parité stratégique avec l' État hébreu et d' accepter l' option de la paix : l' effondrement de l' Union soviétique , le découplage des divers volets égyptien , jordanien et palestinien , la disparition d' un " front " arabe commun , etc. Enfin , une défaite militaire de cette taille infligée à l' armée syrienne risquerait fort de provoquer un cataclysme interne . La dernière chose que souhaiterait le président syrien est de se retrouver piégé dans une confrontation militaire avec Israël . Hafez al-Assad continuera à privilégier l' option actuelle de " ni guerre , ni paix " que la Syrie a connue de 1974 à 1991 avant qu' elle ne se rallie au processus de Madrid . La suspension des négociations a évidemment considérablement réduit ses options . Néanmoins , le président Assad a une longue expérience de ces situations de statu quo et il sait comment en exploiter les failles et tourner à son profit le processus de " pourrissement " actuel , pour préparer les conditions de nouvelles négociations de paix . Loin de le réduire à l' impuissance ou à la passivité , la perpétuation de ce scénario le poussera de plus en plus à jouer de sa capacité de nuisance en agissant sur quatre leviers : faire payer Israël un prix de plus en plus lourd au Liban-sud ; geler tout processus de normalisation entre Arabes et Israéliens et renforcer son soutien aux mouvements d' opposition aux accords d' Oslo ; jouer sur les tensions entre Tel-Aviv et Washington ; et enfin rentabiliser au mieux les deux cartes , iranienne et irakienne . Le scénario du statu quo réduit donc plutôt qu' il ne favorise les risques d' escalade militaire . En revanche , il n' est pas immuable en ce sens que l' on est entré , non pas dans une situation de gel du processus de paix , comme l' auraient souhaité ses architectes américains , mais dans une phase de régression . En effet , si certains acquis semblent aujourd'hui irréversibles , tels les deux accords de paix égypto-israélien et jordano-israélien , la paix des peuples régresse de façon assez inquiétante . Pour certains , cela relève d' une vision romantique et angélique de la réconciliation historique des sociétés arabes et israélienne , bien éloignée des véritables impératifs et intérêts politiques , économiques et stratégiques censés guider le processus de paix . Mais , si les États arabes peuvent décider de faire la paix dans un premier temps sans leurs peuples , ils ne peuvent la faire contre eux . Le raidissement et même la radicalisation des opinions publiques arabes vis-à-vis d' Israël ont aujourd'hui des réminiscences d' une époque que l' on croyait révolue depuis une dizaine d' année : celle du refus du fait accompli israélien . Un tel état de chose , s' il se prolongeait , aurait des incidences politiques et stratégiques dans la mesure où la marge de manoeuvre des États arabes se retrouverait progressivement réduite vis-à-vis d' Israël mais aussi de Washington . Déjà affaiblis sur le plan interne , ils seront de plus en plus contraints à répondre de leurs choix face à des sociétés qui ne voient guère se matérialiser les dividendes de la paix et face à une contestation politique interne , majoritairement islamiste , opposée à la normalisation avec l' État hébreu . Autant que l' évolution politique interne en Israël ou la question de l' après-Assad , cette donnée est essentielle dans l' évaluation des différents scénarios et de leur probabilité . La principale clef du statu quo actuel réside sans aucun doute en Israël . En dépit de l' opposition virulente de l' ensemble des élites - hommes politiques , intellectuels , armée , services de sécurité et de renseignements - et d' une position de plus en plus inconfortable au sein de son propre parti , le Premier ministre semble être passé maître dans l' art de la survie politique . Si le maintien de Benyamin Netanyahou au pouvoir et sa réélection en l'an 2000 semblent constituer une garantie contre la reprise des négociations syro-israéliennes , rien ne permet d' affirmer aujourd'hui qu' un changement de la donne politique israélienne , à moyen terme , débloquera l' impasse actuelle . Dans tous les cas de figure envisagés , motion de censure contre le gouvernement ( qui requiert 61 voix au sein de la Knesseth ) ou contre le Premier ministre ( 80 voix ) , provoquant des élections anticipées dans le premier cas , et la nomination d' un nouveau chef de gouvernement dans l' autre , il est probable que le Golan et la paix avec la Syrie ne constitueront pas des enjeux prioritaires tant au niveau de l' opinion publique que de la classe politique . Ce désintérêt s' explique par le fait que ces enjeux ne sont pas pour l' heure vitaux pour la sécurité d' Israël . Il est vrai que la frontière syro-israélienne est la plus sûre , à telle enseigne que le Golan et le lac de Tibériade sont aujourd'hui les lieux de villégiature privilégiés des Israéliens , les colons eux-mêmes se reconvertissant massivement dans le secteur touristique . En dépit de ses professions de foi préélectorales que le Golan restera israélien et qu' il s' y emploiera pour cela , la position de Benyamin Netanyahou sur la paix avec la Syrie est plus ambivalente qu' il n' y paraît . Ainsi , à la veille de la première tournée dans la région du secrétaire d' État américain , Madeleine Albright , au mois de septembre 1997 , des rumeurs persistantes ont circulé dans les médias israéliens sur des messages secrets que le Premier ministre aurait fait parvenir à Hafez al-Assad , via Dennis Ross et/ou Uzi Arad , son conseiller politique , pour examiner les possibilités d' une reprise des négociations avec la Syrie . Le Premier ministre aurait proposé une version édulcorée de la formule lancée par Itzhak Rabin et reprise par Shimon Pérès , selon laquelle la profondeur du retrait n' est plus proportionnelle à la profondeur de la paix , mais aux garanties de sécurité que Damas est prête à concéder à l' État hébreu sur le Golan . Bien que le cabinet du Premier ministre ait confirmé la nouvelle , il a refusé d' en divulguer la teneur . Benyamin Netanyahou est prisonnier non seulement de son approche idéologique - que l' on peut résumer concernant la Syrie par " la paix avec le Golan " - mais également de ses impératifs de survie politique au quotidien . Toute concession sur le Golan risque en effet de provoquer l' effondrement de sa propre coalition . Avigdor Kahalani , ministre de la Sécurité intérieure et leader du parti de la " Troisième voie " , l' un des officiers ayant combattu sur le Golan , est formellement opposé à toute forme de restitution du plateau vital , selon lui , pour la sécurité de l' État hébreu . Variations autour du scénario du retrait unilatéral du Liban-sud ... ou comment décomposer le triangle ? Impensable à la veille de l' opération " Raisins de la colère " , ce scénario avec toutes ses variantes fait désormais partie du domaine du " politiquement " envisageable . Il a été retenu ici en raison de l' évolution du débat en Israël sur le Liban qui , en moins de deux ans , a acquis une acuité sans précédent . Le tabou qui , depuis 1982 , inhibait la liberté de débattre de la politique libanaise de l' État hébreu a été levé . L' audience que recueille l' option du retrait unilatéral du Liban-sud s' est élargie de façon spectaculaire en l' espace de deux ans à peine . Les causes sont liées à la prise de conscience , déjà latente mais accélérée par le bilan négatif des " Raisins de la colère " , du fait qu' Israël n' a pas les moyens de gagner cette guerre d' usure au Liban-sud et que la zone de " sécurité " est devenue en soi une source d' insécurité où de jeunes soldats israéliens continuent de payer de leur vie une politique que certains jugent " archaïque " et dépassée . Une autre raison fondamentale à cette remise en question de la légitimité même des arguments sécuritaires , qui justifient le maintien de la zone de sécurité , est liée à l' arrêt net et brutal du processus de paix avec la Syrie . Tant que les négociations syro-israéliennes semblaient en bonne voie et sur le point d' aboutir à un accord global , incluant le règlement du problème libanais , les victoires de la guérilla remportées par le Hezbollah avaient moins d' importance . L' impasse au Liban-sud était vécue comme un mal nécessaire mais provisoire . Alors qu' aujourd'hui l' option de la paix avec la Syrie semble durablement enterrée , des voix de plus en plus nombreuses s' élèvent en Israël pour réclamer une révision de la politique libanaise et une redéfinition de ses objectifs à la lumière de la situation actuelle . Ce sentiment d' urgence au Liban-sud est exacerbé aussi par le nouveau cadre imposé par l' accord de cessez-le-feu qui a mis un terme à l' opération " Raisins de la colère " d' avril 1996 et a contribué à rétrécir considérablement le champ des options israéliennes . Cet arrangement impose des conditions restrictives à l' armée israélienne rendant à terme sa position intenable . Le système dans le cadre duquel opère l' armée israélienne au Liban-sud est devenu de plus en plus rigide , ne serait -ce qu' en raison de l' existence du Comité de surveillance du cessez-le-feu qui bride l' action de l' armée israélienne et neutralise en grande partie sa puissance de feu en lui interdisant de s' en prendre aux civils . En outre , la présence d' Américains et de Français au sein de ce comité a de facto contribué à une forme d' internationalisation du conflit . Sur le plan militaire et en dépit des récentes déclarations du ministre de la Défense sur les " bons résultats " obtenus par l' armée israélienne grâce à la mise en oeuvre de tactiques de combat plus performantes , Tsahal reste astreint à une position défensive face au Hezbollah dont les méthodes de guérilla se sont considérablement affinées au cours de ces dix dernières années et qui semble contrôler parfaitement le terrain . Pour la première fois depuis l' instauration de la zone de sécurité , le nombre de tués israéliens a dépassé en 1997 celui des Libanais , civils et combattants du Hezbollah confondus . La question du maintien de la zone de sécurité est devenue un facteur de division aussi bien parmi la classe politique qu' au sein de l' état-major de l' armée qui se garde pourtant d' étaler au grand jour ses discordances internes . L' option du retrait unilatéral , total ou partiel , provoque un débat public particulièrement vif entre partisans et opposants . Les prises de position sur cette question transcendent les lignes de clivages traditionnels Likoud / Parti travailliste et finissent par brouiller encore davantage un échiquier politique déjà confus . Ainsi , si la " colombe " travailliste , Yossi Beilin , et le " faucon " du Likoud et ministre des Infrastructures nationales , Ariel Sharon , soutiennent tous deux l' option du retrait unilatéral , leurs motivations sont loin d' être les mêmes . L' architecte de l' opération de 1982 " Paix en Galilée " , qui rejoint par là les positions du parti de la " Troisième voie " , est favorable à un retrait unilatéral , à la seule condition qu' il ne soit pas négocié avec les Syriens . L' objectif est non seulement de priver la Syrie de son atout-maître , mais également de dissocier les deux volets libanais et syrien . Il ne s' agit plus de l' option " Le Liban d' abord " , mais de l' option " Le Liban seulement " . Le retrait se transforme alors en une carte contre la Syrie . Mais l' un des arguments majeurs de Ariel Sharon reste qu' Israël doit pouvoir décider en toute liberté du moment , des modalités et des conditions d' un retrait . Yossi Beilin et d' autres , dont l' " Association des 4 mères " de soldats israéliens servant au Liban-sud , s' appuient davantage sur des arguments de type humanitaire pour démonter le raisonnement stratégique et sécuritaire qui sous-tend le maintien de cette zone-tampon . Le nombre de soldats israéliens tués au Liban ( 1 200 environ depuis 1982 ) et le bilan chaque année un peu plus élevé devraient , selon eux , inciter les responsables israéliens à changer de politique . Ils soutiennent que Tsahal serait bien plus en mesure de défendre la sécurité de l' État d' Israël à partir du territoire israélien . À l' extrême gauche de l' échiquier politique , on retrouve des opposants au retrait tels que le député Yossi Sarid ( Meretz ) - l' un des plus virulents critiques de l' opération " Paix en Galilée " - qui redoute dans ce cas de figure un déluge de katioushas sur le nord d' Israël , contraignant l' armée israélienne à revenir en force au Liban en y lançant une invasion massive , terrestre et aérienne . Le consensus apparent au sein des forces armées sur la nécessité de maintenir cette zone-tampon aussi longtemps qu' Israël et la Syrie ne sont pas parvenus à un accord politique semble sérieusement ébranlé . Le doute commence à gagner un nombre croissant d' officiers supérieurs du Commandement de la région nord quant à l' efficacité d' une politique dont le but déclaré est de protéger la sécurité de la frontière nord d' Israël sans pour autant exposer la vie des soldats israéliens . Bien que ces responsables militaires ne fassent aucune déclaration publique sur une nécessaire révision de la stratégie israélienne au Liban , certaines " fuites " laissent à penser que l' option d' un retrait unilatéral fait de plus en plus d' émules jusqu'aux plus hauts échelons de la hiérarchie militaire . De l' avis de ces militaires , l' enlisement de Tsahal au Liban-sud commence à affecter sérieusement le moral des troupes alors que l' assurance et la combativité du Hezbollah ne font que se renforcer sur le terrain . À l' inverse , l' ALS censée au départ être la cheville ouvrière de tout le dispositif israélien au sud est devenue au fil du temps et plus précisément depuis deux ans un allié de moins en moins fiable et de plus en plus difficile à gérer et à contenir . Plusieurs sources , israéliennes et autres , font état de défections de plus en plus nombreuses en son sein de jeunes combattants qui vont grossir les rangs du Hezbollah et/ou se transforment en agents doubles transmettant au Hezbollah des renseignements sur les mouvements et les opérations tactiques des troupes israéliennes . Contre les tenants de cette thèse , un noyau dur d' officiers continue à défendre fermement le maintien de la zone de sécurité comme un moindre mal . Un retrait sans garantie de sécurité , même avec menaces de représailles massives en cas d' attaques du Hezbollah sur le nord d' Israël , serait un coup de poker aux risques incontrôlables , qui exposerait directement les populations civiles . Les combattants du Hezbollah s' étendraient tout au long de la frontière et tenteraient des opérations d' infiltration en territoire israélien . Le retrait porterait également un coup fatal au prestige de Tsahal vis-à-vis de l' opinion publique israélienne mais également arabe , contrainte pour la première fois de se replier sous la pression d' une guérilla de quelques milliers d' hommes . Ainsi , selon Uri Lubrani , coordinateur des opérations israéliennes au Liban-sud , ce serait pure folie que d' envisager un retrait dans les conditions actuelles , même assorti de mesures sécuritaires et logistiques , impliquant une tierce partie , la France par exemple , qui en garantirait la bonne application . Il est convaincu que le maintien de la zone de sécurité est la situation la moins coûteuse pour Israël en termes de sécurité . Il considère l' option " Le Liban d' abord " , dans toutes ses formulations et déclinaisons , comme mort -née , mais n' est pas partisan pour autant de la réédition d' une attaque de type " Raisins de la colère " . La pression croissante de l' opinion publique relayée par le malaise dans les rangs de l' armée face aux succès militaires remportés par le Hezbollah - notamment contre le fameux char d' assaut Merkava , fleuron de l' industrie de l' armement israélienne - inquiète le gouvernement qui a pourtant réitéré par la bouche de son ministre de la Défense , Itzhak Mordechaï , son engagement à respecter les termes du cessez-le-feu d' avril 1996 . Néanmoins , la radicalisation de ce débat ne peut manquer à terme de faire éclater les contradictions - et peut-être bien les divisions internes - du gouvernement qui marche , par conservatisme ou absence de consensus interne , dans les pas de son prédécesseur mais sans avoir de direction précise . S' agit -il de ne rien entreprendre au Liban qui puisse y miner l' influence et la prédominance de la Syrie , seule puissance en mesure de garantir une pacification de la frontière nord d' Israël permettant aux troupes de Tsahal de se retirer en toute sécurité ? Mais alors comment résoudre cette contradiction inhérente à la position israélienne qui reconnaît à la Syrie les pleins droits sur le Liban mais ne lui en concède aucun sur le Golan ? Les probabilités d' un tel scénario de retrait unilatéral restent minces . En dépit de l' acuité du débat , l' opinion publique ne semble pas dans sa majorité gagnée par l' idée du retrait . L' une des raisons à cela est liée à la perception négative de la notion d' " unilatéral " qui équivaudrait à " inconditionnel " , donc à une forme de reddition de l' armée israélienne . En réalité , aucun des acteurs principaux ne souhaite qu' Israël le mette en pratique , surtout dans sa version inconditionnelle et non concertée : ni les Syriens qui se retrouveraient privés de leur principal levier de pression sur Israël , ni l' État libanais qui redoute l' installation d' un vide stratégique au Liban-sud favorisant les tensions et les règlements de compte intra-libanais , ni Washington et ses alliés arabes - notamment l' Égypte et l' Arabie Saoudite qui ont officiellement avalisé et soutenu la stratégie syrienne sur la " concomitance des deux volets " - convaincus que toute solution politique au Liban-sud doit nécessairement passer par Damas . Un tel cas de figure présente pourtant bien des avantages du point de vue israélien , l' isolement du couple syro-libanais n' en est pas des moindres . Non point que l' État hébreu cherche à défaire ce couple ; comme il a été souligné plus haut , aucun dirigeant israélien de droite ou de gauche ne souhaite aujourd'hui s' immiscer dans les relations bilatérales entre la Syrie et le Liban . Mais , en renonçant à sa zone de sécurité , Israël aurait réussi à s' extirper de ce triangle hors duquel duquel le couple syro-libanais perd l' un de ses éléments essentiels de cohésion et de légitimation . Le redéploiement des troupes syriennes , prévu par les accords de Taëf , serait de nouveau à l' ordre du jour . Par ailleurs , il n' est pas du tout sûr , contrairement aux craintes exprimées par les opposants à un retrait unilatéral , que le Hezbollah " poursuive " l' armée israélienne en Israël pour deux raisons majeures . La première est qu' il est très délicat pour la Syrie d' apporter sa caution implicite à des opérations militaires menées en territoire israélien , par crainte à la fois de l' ampleur prévisible de la riposte israélienne et de la réprobation internationale que cela ne manquera pas de susciter , de la part aussi bien des États-Unis et de l' Union européenne que des alliés égyptien et saoudien de la Syrie . La deuxième raison tient à la stratégie proprement interne du Hezbollah qui prime sur toute autre considération d' ordre régional . La direction actuelle du mouvement ne voudrait en aucun cas mettre en péril les bénéfices politiques de plus d' une douzaine d' années de résistance à l' occupation israélienne en " ouvrant " , en cas de retrait des troupes de Tsahal , un nouveau front sur la frontière libano-israélienne . Le capital de sympathie et de soutien dont il bénéficie sur le plan national et l' audience croissante qu' il s' est taillé au sein de la communauté chiite face au mouvement Amal pourraient en être durablement affectés et menacer la survie même du mouvement sur la scène politique libanaise . Malgré les avantages qu' elle présente , une telle initiative israélienne constituerait un coup de poker , tant les risques restent grands et imprévisibles . Un bien timide ballon d' essai a été lancé avec l' évacuation par l' ALS d' une douzaine de villages de la région de Jezzine . Cette manoeuvre visait à tester la capacité de l' État libanais à reprendre le contrôle des zones " libérées " , dans l' hypothèse d' un retrait par étapes ( autre variante du retrait unilatéral ) . Face à l' absence de réaction de la part tant du Hezbollah que de l' armée libanaise , le gouvernement israélien semble pour l' heure avoir renoncé à la carte " Jezzine d' abord " . Mais cette option comme celle d' un retrait total restent ouvertes . Beaucoup dépendra de la configuration future des rapports de forces internes en Israël dont il est difficile de saisir les contours , et de l' évolution de la relation avec Washington . Une impasse prolongée sur le dossier palestinien peut également pousser le gouvernement israélien à cette forme de fuite en avant en évacuant ses troupes de la zone de sécurité . Il n' est pas exclu que Benyamin Netanyahou ait , en son for intérieur , déjà pris cette décision et qu' il attende le moment opportun pour abattre une carte qu' il estime gagnante . L' ALS prend très au sérieux la possibilité d' un retrait subit et non concerté de Tsahal , comme le prouvent les déclarations de son commandant , Antoine Lahad , qui , pour la première fois , a publiquement menacé Israël de représailles en cas de retrait unilatéral . Mais , si un tel retrait s' effectuait dans le contexte actuel de blocage diplomatique , même sous la bannière de la résolution 425 , il ne contribuerait certainement pas à désamorcer le climat de tension . L' État libanais serait bien en peine de reprendre le contrôle du Liban-sud , bien que , techniquement , l' armée soit aujourd'hui tout à fait en mesure de remplir le rôle prévu par les accords de Taëf . Il devra faire face à un grave dilemme en cas de retrait : soit laisser le champ libre au Hezbollah - sur instructions syriennes - , soit déployer l' armée libanaise dans une région qui échappe totalement depuis 1978 à l' autorité du pouvoir central et remplir le rôle de garde-frontières au bénéfice d' Israël . La Syrie , quant à elle , célébrera à grands renforts de médias et de déclarations triomphalistes la " libération " du Liban-sud comme la victoire de la résistance libano-syrienne . Mais le temps des festivités passé , le président Assad devra relever ce défi qui met à plat sa stratégie de négociation face à Israël . Il pourrait opter pour l' escalade mais encore faudrait -il qu' il puisse justifier au regard de la communauté internationale la poursuite d' actions de " résistance " en territoire israélien . Des substituts au Hezbollah - trop identifié aujourd'hui à la résistance libanaise contre l' occupation israélienne -devront être trouvés qui agiront alors sous le slogan " Libérer la Palestine " . Le président Assad pourrait se servir des principaux mouvements d' opposition palestiniens qu' il abrite pour recréer un nouveau " fathland " au Liban-sud , comme aux heures de gloire de la résistance palestinienne au Liban . L' autre alternative - qui semble la plus probable - est qu' il prendra sagement le temps de la réflexion , en évitant surtout de se lancer dans une action précipitée qui risquerait de menacer son emprise sur le Liban . Son réflexe premier sera plutôt de chercher à protéger la solidité du couple syro-libanais même s' il doit dans le même temps mettre entre parenthèses son " combat " pour libérer le Golan . Il sait qu' il dispose d' atouts non négligeables en cas de retrait unilatéral israélien . Le premier d' entre eux et le plus important est que personne - ni la troïka libanaise , ni les pays arabes , ni Israël , ni l' Iran , ni les États-Unis , ni même la France ou l' Union européenne - n' exigera de la Syrie qu' elle se conforme enfin aux dispositions des accords de Taëf qui prévoient le redéploiement puis le retrait des troupes syriennes , selon un échéancier bien précis mais sans cesse repoussé en raison des " conditions exceptionnelles " que traverse le Liban , autrement dit l' occupation israélienne et la nécessité vitale d' y mettre un terme . La crainte réelle d' un basculement du Liban dans la guerre civile agit comme un repoussoir pour tous les acteurs régionaux ou internationaux impliqués directement ou indirectement sur la scène libanaise . Même l' Iran - qui figure en tête de la liste des " rogue states " établie par l' Administration Clinton - ne serait pas favorable à une rupture du statu quo intercommunautaire libanais issu de Taëf qui a considérablement amélioré la position et le poids de la communauté chiite . Il est important de souligner à cet égard , contrairement à la perception largement partagée en Israël , que Téhéran reste un acteur extérieur au triangle syro-libano-israélien et que son influence sur le Hezbollah a été démesurément exagérée . Il ne s' agit pas de nier la réalité des faits , à savoir que ce mouvement est né en 1985 de l' alliance syro-iranienne au Liban , à un moment où il y avait une véritable prolifération de milices au Liban . Mais ce mouvement a réussi à se hisser au rang de parti politique et à s' affirmer , à travers sa participation au jeu électoral et sa forte représentation parlementaire , comme un acteur à part entière sur la scène politique libanaise - pour autant bien sûr que l' on puisse qualifier de vie politique , l' immobilisme et la paralysie qui frappent les institutions de la IIe République libanaise . En tout état de cause , le jeu de Téhéran au Liban a toujours soigneusement évité de heurter de front ou de court-circuiter le " maître et seigneur des lieux " syrien . Les États-Unis s' abstiendront également d' exercer des pressions dans ce sens pour les raisons qui ont été évoquées plus haut - ménager la Syrie dans l' espoir d' un déblocage du processus de paix - et parce qu' ils ne font guère confiance à la capacité de l' État libanais à assurer la paix civile et à imposer son autorité sur l' ensemble du territoire . Quant aux Israéliens , ils seront plus que sensibles aux arguments que la Syrie ne manquera d' agiter comme autant d' épouvantails contre d' éventuelles pressions pour qu' elle retire ses troupes du Liban . Le premier de ses arguments concerne la " porosité " de la frontière libano-israélienne : seule Damas est aujourd'hui en mesure de contrôler les groupes potentiels qui voudront se lancer dans de nouvelles opérations de guérilla en territoire israélien . Le deuxième argument , tout aussi porteur , est lié à la question des 300 000 réfugiés palestiniens au Liban dont le sort est de plus en plus incertain , compte tenu à la fois du refus de l' État libanais d' envisager une quelconque solution d' " intégration " et du déraillement du processus d' Oslo . Là encore , le rôle de la Syrie peut s' avérer vital . Enfin , la position commune de la France , de l' Union européenne et de la majorité des pays arabes est que la Syrie doit demeurer une partie centrale de tout accord ou " désaccord " dans le cas d' un retrait unilatéral israélien ... Conclusion Le triangle syro-libano-israélien est aujourd'hui complètement verrouillé par l' impasse du processus de paix . Des trois parties prenantes à ce jeu triangulaire , c' est sans conteste l' acteur israélien qui détient la clef d' un " déblocage " . Au terme de cette étude , il semble probable que l' option du statu quo l' emportera côté israélien , tout au moins jusqu'aux prochaines élections législatives . Mais la scène politique israélienne reste confuse et son évolution , même à court terme , demeure imprévisible ; ce qui n' est pas sans déconcerter les amateurs de scénarios que nous sommes et qui avons appris qu' une démocratie offrait plus de transparence et de lisibilité au niveau de sa politique extérieure et de sa sécurité qu' une autocratie , et qu' elle était naturellement plus encline à opter pour la paix . Il n' est pas de notre propos ici d' analyser les mutations sociopolitiques diverses que connaît l' État d' Israël . Mais le processus de paix et son accélération en l' espace de trois ans à peine ont eu l' effet d' un séisme sur une société contrainte de se redéfinir dans son double rapport à son environnement resté étranger et à son identité propre . Le refus de l' assimilation que prône Benyamin Netanyahou n' est que l' une des expressions de ce choc historique . Il n' est dès lors pas acquis que son départ suffise à remettre sur les rails le processus de paix . Ehoud Barak , secrétaire général du Parti travailliste , lui-même , se garde bien de s' engager clairement sur le sujet . Homme secret , il fait très peu de discours et se présente toujours comme le successeur de Itzhak Rabin . On suppose qu' une fois au pouvoir et disposant d' une majorité confortable , il donnerait la priorité au volet palestinien . Concernant les négociations avec le couple syro-libanais , il adoptera à n' en pas douter la même approche que Itzhak Rabin et Shimon Pérès , à savoir que la Syrie reste le passage obligé de tout règlement global . Au mois d' août 1997 , il avait envoyé par l' intermédiaire de la délégation d' Arabes israéliens , en visite à Damas , une lettre au président syrien dans laquelle il s' engageait à suivre la voie de la paix tracée par Itzhak Rabin . Hafez al-Assad qui , à cette occasion , a loué les vertus d' homme de paix du président du Parti travailliste , continuera à observer avec beaucoup d' attention les évolutions politiques internes en Israël . À mi-parcours entre la suspension des négociations début mars 1996 et la fin du mandat de Benyamin Netanyahou en l'an 2000 , le président syrien n' a de meilleur choix que celui d' attendre en tablant sur le fait que le temps joue contre le premier ministre israélien et discrédite les options qu' il défend , en démontrant qu' il n' y aura pas de sécurité pour l' État hébreu sans paix réelle . Et cette paix doit passer par la restitution du Golan et l' évacuation du Liban-sud tout en préservant l' une des victoires les plus éclatantes de Hafez al-Assad : la consolidation de son hégémonie au Liban .