1: LE CENTRE FRANÇAIS SUR LES ÉTATS-UNIS ( CFE )
2: LES POUVOIRS DE GUERRE EN DEBAT À WASHINGTON
3: Barthélémy Courmont
4: Préparé pour le Centre français sur les Etats-Unis
5: Septembre 2003
6: L' Ifri est , en France , le principal centre indépendant de recherche , d' information et de débat sur les grandes questions internationales .
7: Créé en 1979 par Thierry de Montbrial , l' Ifri est une association reconnue d' utilité publique ( loi de 1901 ) .
8: Il n' est soumis à aucune tutelle administrative , définit librement ses activités et publie régulièrement ses travaux .
9: Les opinions exprimées dans ce texte sont de la seule responsabilité de l ?
10: auteur .
11: Le Centre français sur les Etats-Unis ( CFE ) , créé au sein de l' Ifri en septembre 1999 , a pour mission d' étudier les développements politiques , économiques et sociaux aux Etats-Unis , qui influencent l' image des Etats-Unis en France , ainsi que les relations européennes et transatlantiques .
12: Il organise régulièrement des réunions rassemblant des décideurs des secteurs public et privé , et publie articles et Policy Papers sur des sujets pertinents pour l' étude des Etats-Unis et pour la relation franco-américaine .
13: Résumé
14: La Constitution des Etats-Unis répartit habilement les pouvoirs entre l' Exécutif et le Législatif , notamment en ce qui concerne l' engagement des forces armées sur des théâtres extérieurs .
15: Ainsi , si l' Administration propose , le Congrès dispose et octroie ou non les pouvoirs de guerre au président .
16: Ces prérogatives , limitées pendant la guerre froide par l' existence d' une menace majeure , ont été réaffirmées en 1973 avec l' adoption du War Powers Act , qui offre aux parlementaires un pouvoir de décision renforcé dans le déclenchement des conflits .
17: Lors des différentes crises des années 1990 , le Capitole a ainsi indiqué à la Maison-Blanche sa volonté de mettre en avant ses prérogatives , y compris quand les arguments justifiant l' intervention militaire étaient unanimement acceptés .
18: La récente crise irakienne fut encore l' occasion de vifs débats institutionnels sur les pouvoirs de guerre , dans un climat politique marqué par l' après- 11 septembre , et le renforcement du rôle de l' Exécutif .
19: Les doutes exprimés récemment quant à la véracité des assertions de l' Administration Bush concernant les armes de destruction massive irakiennes sont susceptibles de relancer le débat sur les prérogatives de guerre des pouvoirs exécutif et législatif .
20: Analysant les mécanismes des pouvoirs de guerre à Washington , cette étude se propose , à la lecture des engagements militaires récents , de mieux comprendre comment se projette la puissance américaine sur les théâtres extérieurs .
21: The Constitution of the United States of America allocates adroitly the powers between the Executive and Congress concerning the dispatch of armed forces to foreign theatres .
22: Therefore , if the Administration proposes , Congress considers , then allocates , or denies , war powers to the President .
23: These prerogatives , which were limited during the Cold War because of the major threat , were reaffirmed in 1973 by the passing of the War Powers Act , which reinforced the capacity of congressmen to act in case of an outbreak of hostilities .
24: During the different crises of the 1990s , Congress made clear its desire to assert its prerogatives , including when arguments in favour of military intervention had bipartisan support .
25: The recent Iraqi crisis gave rise once again to heated institutional debates on war powers and the role of the Executive in a context which was still marked by September 11 .
26: Recent doubts over the veracity of statements of the Bush administration concerning Iraqi weapons of mass destruction are likely to set the debate on the martial prerogatives of the Executive and the Legislature raging once again .
27: By analysing the mechanisms of war powers in Washington , this study proposes , by taking into account recent military action , to cast light on how US power is projected on foreign theatres .
28: Introduction
29: L' objectif de cette étude est double .
30: Il s' agit de mesurer le rôle du Congrès des Etats-Unis en temps de guerre , que l' actualité récente de la question irakienne éclaire d' un jour nouveau , tout en dressant un tableau plus large qui s' appuie sur les crises majeures auxquelles Washington a fait face .
31: Un tel travail devrait également permettre de rappeler la répartition des pouvoirs instituée par la Constitution , que les parlementaires ne manquent d' ailleurs jamais de rappeler .
32: Il s' agit d' autre part , à la lumière des enseignements tirés du passé et du contexte actuel , d' évaluer les possibilités offertes à l' Administration Bush par les débats qui ont précédé la récente guerre en Irak , dont les parlementaires ont accepté le principe en septembre 2002 , bien avant que les opérations ne commencent , en mars 2003 .
33: Cette étude permettra de mieux comprendre le rôle du Congrès en matière de politique étrangère , en particulier en ce qui concerne l' envoi de forces armées sur des théâtres extérieurs , qui , vu de l' étranger , en représente incontestablement l' aspect le plus significatif .
34: Les pouvoirs de guerre , habilement répartis par les " pères fondateurs " , sont clairement définis dans la Constitution des Etats-Unis .
35: Par ailleurs , en 1973 , dans un climat général de détente , les membres du Congrès ont décidé , malgré le veto du président Richard Nixon , de voter le War Powers Act , qui donne plus de légitimité aux parlementaires dans les décisions prises en temps de guerre , en particulier dans le déclenchement des conflits .
36: Mais la Constitution a également prévu de donner davantage de prérogatives au chef de l' Exécutif , qui est aussi le chef des armées , lorsqu' il s' agit de répondre à une menace de grande ampleur .
37: En de telles circonstances , le président est le seul défenseur des institutions .
38: En fait , ce sont surtout les garants de la Constitution , c' est-à-dire les parlementaires , qui ont accepté de limiter temporairement leurs pouvoirs pour faire face à une situation exceptionnelle , en privilégiant l' unité plutôt que le dialogue .
39: Dans l' une de ses oeuvres majeures , Jean-Jacques Rousseau donne une définition du dictateur , investi de pouvoirs en cas de crise majeure : " Si le péril est tel que l' appareil des lois soit un obstacle à s' en garantir , alors on nomme un chef suprême , qui fasse taire toutes les lois et suspende un moment l' autorité souveraine . "
40: C' est de ce modèle que les pères fondateurs se sont inspirés , et sur la base duquel est assuré le bon fonctionnement des institutions des Etats-Unis depuis plus de deux siècles .
41: Depuis cette époque , toutefois , un certain nombre d' événements et d' initiatives ont quelque peu modifié les relations entre les pouvoirs exécutif et législatif en matière de politique étrangère .
42: Du président ou du Congrès , il est parfois difficile de savoir qui a le dernier mot dans la prise de décision , et leurs choix peuvent s' inverser selon les circonstances .
43: Les conséquences de cette double origine de la prise de décision ne sont pas les mêmes en temps de paix et en temps de guerre , quand les décisions doivent être prises rapidement et par un cercle restreint de dirigeants .
44: De même , le processus de décision varie selon le niveau de la menace , ou plus exactement de la façon dont celle -ci est perçue .
45: Durant la guerre froide , quand les intérêts des Etats-Unis pouvaient être rapidement menacés , le président avait la possibilité de prendre certaines initiatives dans l' urgence sans demander l' avis du Congrès , qui ne portait de jugement qu' a posteriori .
46: Cette " présidence impériale " avait le mérite d' offrir une lecture simple de la politique étrangère , qui permettait une efficacité totale du processus décisionnel .
47: C' est pourquoi " la plupart des professionnels de la politique étrangère estimaient que la concentration des pouvoirs dans les mains de l' Exécutif était une bonne chose " .
48: Mais , progressivement , à partir de la fin de la guerre froide et de la disparition de la menace soviétique , les gouverneurs des Etats - et surtout les membres du Congrès - ont pris une place de plus en plus importante dans les décisions de politique étrangère , considérant qu' ils devaient être consultés en cas d' intervention extérieure .
49: Bien que la question des pouvoirs de guerre n' ait jamais cessé d' être au coeur des débats de politique étrangère , elle connaît un regain d' importance avec l' intervention militaire contre l' Irak et la " croisade " antiterroriste engagée au lendemain des attentats du 11 septembre 2001 .
50: Les premières mesures proposées dans ce cadre ont été accueillies favorablement par une énorme majorité au Congrès , et souvent soutenues par autant de parlementaires démocrates que républicains .
51: Ainsi , la loi sur la lutte antiterroriste , également appelée Patriot Act , a été adoptée par les sénateurs le 25 octobre 2001 , en dépit d' un contenu parfois jugé attentatoire aux libertés civiles .
52: Fait rare , un texte était adopté à peine six semaines après les attentats , dans un Sénat pourtant majoritairement démocrate , et sans susciter beaucoup de discussions .
53: Les sénateurs ont également su taire leurs rivalités politiques pour critiquer les dysfonctionnements des services de renseignement , aussi bien lors des attentats du 11 septembre que dans le cadre des enquêtes sur le bio-terrorisme .
54: Ce n' est donc qu' une fois la " phase deux " de la campagne antiterroriste engagée que les parlementaires ont réellement montré un certain scepticisme quant à l' opportunité de reconduire les pouvoirs exceptionnels accordés au président George W. Bush par le Patriot Act .
55: Les divergences , qui avaient commencé à se manifester dès la campagne militaire en Afghanistan , ont pris une tout autre dimension avec les plans de guerre contre le régime de Saddam Hussein .
56: Ainsi , même si les parlementaires ont soutenu , pour des raisons essentiellement politiques , le principe d' une campagne militaire en Irak , en octroyant , en septembre 2002 , les pouvoirs de guerre au président George W. Bush , ils n' ont pas manqué de rappeler l' étendue de leurs prérogatives institutionnelles lors de multiples débats .
57: Le 11 septembre , s' il a profondément bouleversé la perception de la sécurité aux Etats-Unis , n' a donc pas eu d' effet majeur sur la relation Exécutif / Législatif en ce qui concerne les pouvoirs de guerre .
58: La position des parlementaires républicains en est la meilleure illustration :
59: Au-delà , il s' agit de promouvoir l' égal accès à diverses opportunités et l' assurance - pour ceux qui se retrouvent dans des emplois faiblement rémunérés - de pouvoir évoluer , plutôt que de poursuivre des efforts de redistribution des revenus au sens traditionnel .
60: Un tel constat permet de mieux appréhender les crises futures auxquelles les Etats-Unis devront faire face , et surtout de mieux décrypter les positions du Congrès .
61: I. Une querelle Exécutif / Législatif
62: La question des pouvoirs de guerre n' est qu' une composante de la rivalité opposant l' Administration au Congrès , qui caractérise l' ensemble de la vie politique aux Etats-Unis .
63: Dès lors que les conditions d' une intervention militaire sur un théâtre extérieur se trouvent remplies , les parlementaires mettent en avant les prérogatives qui leur sont offertes par la Constitution .
64: Moins présents pendant la guerre froide , durant laquelle ils ont laissé au président une plus grande liberté d' action , les membres du Congrès sont revenus , depuis le début des années 1990 , à une lecture plus fidèle des textes rédigés par les pères fondateurs , notamment à l' occasion de la guerre du Golfe ( 1990 - 1991 ) .
65: Il convient donc de s' attarder sur le principe constitutionnel de cette répartition des pouvoirs , puis sur la lecture qui en a été faite en fonction des circonstances et de la perception de la menace .
66: 1 . La Constitution et le War Powers Act
67: La Constitution des Etats-Unis définit les pouvoirs du Congrès en matière de relations internationales par " la défense des intérêts nationaux , la régulation du commerce , la déclaration de guerre , et le soutien aux forces armées " .
68: Ces prérogatives sont souvent rappelées par ceux qui défendent le rôle des parlementaires dans les affaires étrangères , en particulier depuis la fin de la guerre froide .
69: De son côté , le président ne peut déclencher une guerre ni mener d' opérations militaires qu' avec l' accord de deux tiers des sénateurs , tout comme il ne peut , seul et sans l' aval du Congrès , nommer des ambassadeurs .
70: En outre , le Congrès peut engager une procédure de destitution du président si celui -ci met en danger les intérêts de la nation .
71: Ces pouvoirs sont d' autant plus déséquilibrés qu' il appartient également au Congrès de financer les différentes opérations , ce qui lui donne les moyens d' influencer considérablement la politique étrangère , voire de l' orienter dans une direction opposée à celle de l' Administration .
72: En votant ou non le budget et les fonds accordés à des interventions extérieures , les parlementaires peuvent ainsi bloquer la politique étrangère de la Maison-Blanche chaque fois qu' ils considèrent qu' elle ne répond pas à leurs aspirations ou à celles des électeurs .
73: Cet équilibre a été délibérément souhaité par les pères fondateurs .
74: Rédigée il y a plus de deux siècles , la Constitution se présente avant tout comme un " garde-fou " et se veut la plus représentative possible des aspirations de la population .
75: Fait intéressant , les présidents américains ont longtemps été sensibles à cette répartition des pouvoirs , qu' ils jugeaient totalement justifiée puisqu' elle permettait de servir au mieux la démocratie ;
76: cela s' expliquait en grande partie à la fois par l' absence de menace extérieure pesant sur le pays et par la volonté de ne pas s' impliquer dans les questions internationales .
77: Ainsi , Abraham Lincoln pouvait déclarer que " le texte de la Constitution donnant le pouvoir de guerre au Congrès était dicté , comme je l' ai compris , par l' impératif suivant : les rois ont toujours entraîné leurs peuples dans des guerres qui les ont appauvris , tout en prétendant généralement qu' elles étaient faites pour leur bien . Notre convention a compris qu' il s' agissait là de l' une des plus grandes formes d' oppression , et a fait en sorte qu' il ne fût pas dans le pouvoir d' un seul homme d' opprimer ainsi tous les autres " .
78: Autre fait notable :
79: c' est le Congrès qui décida , à l' occasion de la guerre contre l' Espagne , en 1898 , de se lancer dans une opération militaire , ce qui eut pour effet de modifier en profondeur la politique étrangère du pays en mettant fin à un isolationnisme quasi continu depuis son indépendance .
80: Ce fut aussi sous l' influence du Congrès que les Etats-Unis opérèrent un repli sur eux-mêmes après le traité de Versailles , ouvrant une ère de non-intervention qui ne prit fin qu' en 1941 .
81: Dans ses relations avec la Maison-Blanche , l' initiative du Congrès la plus significative pendant la guerre froide a été l' adoption , en 1973 , du War Powers Act , dans un climat de détente caractérisé par les accords bilatéraux sur le désarmement , mais également par la guerre du Vietnam et le scandale du Watergate .
82: Certains parlementaires souhaitaient limiter les pouvoirs du président afin d' éviter une escalade , comme sous Lyndon B. Johnson .
83: D' autres , sensibles aux dérives du pouvoir présidentiel , illustrées par les problèmes du président Richard Nixon , ont simplement cherché à sanctionner l' Exécutif .
84: A ce titre , il convient de noter que le consensus sur le War Powers Act , qui émanait pourtant du camp républicain , a largement dépassé le traditionnel clivage partisan , preuve qu' il s' agissait bien davantage d' une question de prérogatives institutionnelles que de l' expression d' idées politiques .
85: Cette loi a pour objet de limiter les pouvoirs du président en cas de conflit armé , en faisant intervenir le Congrès de façon systématique dans la décision .
86: Elle prévoit que le président , s' il veut engager le pays dans une opération militaire , doit au préalable obtenir l' accord du Congrès , soit à la suite d' une déclaration de guerre , soit en invoquant l' urgence nationale provoquée par une attaque contre le territoire du pays ou contre ses forces armées .
87: Dans cette seconde hypothèse , le président doit , sous 48 heures , remettre un rapport aux présidents des deux Chambres pour rendre compte de ses actes , puis un autre six mois plus tard .
88: Ces rapports sont délivrés aux parlementaires , qui jugent de la légitimité de l' opération et de sa poursuite .
89: Les enseignements que l' on peut tirer de ce dispositif sont multiples .
90: D' une part , dans un climat marqué par la détente entre les deux blocs et la diminution de certaines menaces - la loi faisait suite à la signature des accords SALT ( Strategic Arms Limitation Talks ) avec l' URSS - , les parlementaires souhaitaient contrôler les opérations extérieures en allant au-delà de que ce que leur permettait la Constitution .
91: D' autre part , ce contrôle supposait une diminution du nombre d' interventions à l' étranger , qui seraient sélectionnées en fonction de leur importance .
92: Ce dispositif concernait en priorité les opérations de faible intensité , dans lesquelles les intérêts des Etats-Unis n' étaient , en général , pas menacés de façon substantielle .
93: Pendant les années 1980 , le retour d' une certaine tension internationale a permis de concilier l' affirmation de l' autorité du président sur les questions stratégiques majeures avec le rôle accru du Congrès dans les interventions plus limitées .
94: Celles -ci restent d' actualité après la fin de la guerre froide et offrent aux parlementaires la possibilité de bloquer les initiatives jugées inopportunes de la Maison-Blanche .
95: De cette manière , les pouvoirs du président dans la conduite d' un conflit armé sont encore plus limités , le chef de l' Exécutif devant faire approuver ses initiatives par le Congrès .
96: De nombreuses voix ont demandé la suppression de ce texte ou , au contraire , plaidé pour son maintien dans un environnement post-guerre froide .
97: A la suite des opérations en Bosnie , en 1995 , un certain nombre de parlementaires ont ainsi demandé que le Congrès exerce un contrôle plus étroit sur la politique étrangère du pays , exigeant notamment que toute opération extérieure souhaitée par le président obtienne l' accord explicite des parlementaires .
98: Ces initiatives , approuvées par la majorité des parlementaires et souvent bipartisanes , illustrent une tendance au renforcement des pouvoirs du Congrès - et en particulier de ceux de la Chambre des représentants - en matière de décision de projection de forces ou d' engagement dans un conflit armé .
99: La bonne conduite de la politique étrangère des Etats-Unis suppose une complémentarité des pouvoirs exécutif et législatif .
100: Le président , en vertu des pouvoirs qui lui sont conférés par la Constitution , peut proposer une opération militaire et l' engagement des forces armées .
101: De son côté , le Congrès a le pouvoir de juger et de décider si ces orientations doivent ou non être suivies .
102: Ainsi , le président propose et le Congrès dispose .
103: De cet équilibre , fragilisé en temps de cohabitation , dépend la cohérence des orientations du pays en matière de relations internationales .
104: Cependant , la Constitution elle-même , en donnant des pouvoirs aux différents organes , ne répond pas totalement à la question de savoir qui détient la véritable autorité dans la prise de décision .
105: En effet , les parlementaires ont le pouvoir de bloquer les propositions du président , influençant de cette façon les choix de politique étrangère .
106: Dans certaines circonstances , le Congrès peut même orienter positivement les choix de l' Exécutif en faisant pression sur des dossiers qui lui tiennent à coeur .
107: Ce fut le cas au cours des années 1980 , quand les parlementaires imposèrent au président d' adopter des sanctions à l' égard de l' Afrique du Sud , en proposant , à la suite de rapports des commissions concernées , un certain nombre de résolutions auxquelles la Maison-Blanche ne put se soustraire .
108: Ce fut également le cas pour les relations avec Cuba lors de l' adoption de la loi Helms-Burton sur les sanctions économiques et commerciales , en 1996 .
109: Dans l' ensemble , le Congrès dispose de prérogatives lui permettant , quand le cas se présente , de bloquer les initiatives présidentielles ou , à l' inverse , de les influencer , voire même de les forcer .
110: En temps de guerre , ou sous la pression d' une menace pesant sur les intérêts vitaux du pays , un consensus bipartisan offre en revanche au chef de l' Exécutif de plus larges pouvoirs en matière de politique étrangère , ce qui lui permet de prendre des initiatives sans en aviser le Congrès au préalable .
111: Certains experts remarquent que le président ne respecte que rarement le War Powers Act et ne laisse au Congrès l' appréciation d' une intervention qu' une fois celle -ci engagée .
112: Ce renforcement du pouvoir présidentiel s' explique principalement par les lenteurs du processus législatif et l' inefficacité des débats partisans en cas de crise soudaine .
113: C' est ainsi que le chef de la Maison-Blanche justifie le plus souvent l' engagement de forces armées , quand celui -ci n' a pas été décidé avec l' accord du Congrès , qui lui est normalement indispensable , par la lecture de la Constitution .
114: 2 . Les limites du Congrès pendant la guerre froide
115: La présidence " impériale " , héritée de la Seconde Guerre mondiale et maintenue pendant la guerre froide , a eu pour effet de neutraliser totalement les parlementaires dans le domaine des relations internationales .
116: Ce fut le cas lors de la guerre de Corée .
117: Le président Harry S. Truman n' a pas consulté les parlementaires pour engager le pays dans le conflit , et Dwight D. Eisenhower , son successeur , a habilement usé de son influence et des pouvoirs dont il disposait pour se retirer trois ans plus tard de la péninsule .
118: Par la suite , la guerre froide a été marquée par une multitude d' actions initiées par l' Administration , sans que le Congrès ait la possibilité de faire valoir ses droits constitutionnels , et ce , jusqu'à la fin des années 1980 et l' arrivée au pouvoir de George H.W. Bush .
119: Une telle attitude du président était légitimée par la menace que faisait peser l' Union soviétique , si bien que même les plus fervents défenseurs du War Powers Act , comme Jacob K. Javits , le sénateur républicain de New York qui avait été à l' origine du texte , ne discutèrent pas la décision du président Ronald W. Reagan d' envoyer , sans consultation préalable , des marines au Liban , en 1983 .
120: Avec autant d' admiration que de scepticisme , Michael Beschloss explique à ce propos que " le président était le centre du système solaire politique américain , le centre de la politique étrangère et intérieure , et la personne la plus puissante du gouvernement " .
121: Certains experts estiment légitime de donner au président des pouvoirs plus importants en cas de crise majeure ou quand les intérêts du pays sont directement menacés .
122: Dans de telles situations , les statuts sont exceptionnellement modifiés , et le président assume pleinement son rôle de chef des armées sans que le Congrès vienne s' interposer .
123: D' ailleurs , même les pères fondateurs n' avaient pas hésité à offrir au président des pouvoirs renforcés pour répondre de façon plus efficace aux menaces que représentaient les deux grandes puissances de l' époque , le Royaume-Uni et la France .
124: Les mêmes arguments justifièrent la " présidence impériale " de la Seconde Guerre mondiale , puis celle de la guerre froide , les Etats-Unis étant directement menacés par l' Union soviétique , notamment par le biais des armes nucléaires .
125: David Calleo estime ainsi que , " depuis Franklin D. Roosevelt , les Etats-Unis ont connu un long cycle de déséquilibre constitutionnel au profit d' un président - un cycle qui s' est prolongé avec la guerre froide " .
126: Ainsi , et même après le vote du War Powers Act , chacun était conscient que le président pouvait agir seul en cas de crise majeure .
127: Ce consensus sur la légitimité de la toute puissance de l' Exécutif a permis de clarifier la politique étrangère pendant plusieurs décennies , qui sont marquées par les bonnes relations qui ont prévalu entre les Administrations successives et le Congrès .
128: Dans le même temps , cela a eu pour effet d' affaiblir les commissions chargées des affaires internationales , tant à la Chambre des représentants qu' au Sénat .
129: Un officiel de l' Administration de Ronald W. Reagan a même déclaré , à propos de la perte d' importance de ces commissions , que " l' une était morte dans le vin , et que l' autre s' était fragmentée en petits empires " .
130: Cela s' expliquait notamment par le fait que les parlementaires privilégiaient d' autres commissions , grâce auxquelles auxquelles ils pouvaient avoir une plus grande influence , de façon plus nette encore à la Chambre des représentants qu' au Sénat .
131: Certes , quelques tentatives de reprise en main de la politique étrangère par le Congrès se sont manifestées , notamment en 1939 , quand ce dernier s' est opposé à l' intervention militaire en Europe ;
132: mais les parlementaires , jusqu'à la fin des années 1980 , n' ont pas été en mesure d' opposer de résistance significative à l' Administration , celle -ci prenant seule les décisions importantes en temps de crise .
133: En 1988 , certains parlementaires , conscients que le War Powers Act pouvait être utilisé à des fins purement politiques , et donc menacer la sécurité des citoyens , ont proposé de le remplacer par un Use of Force Act , qui laissait au président la possibilité de venir en aide aux ressortissants des Etats-Unis mis en danger hors du territoire national .
134: Cette requête répondait aussi bien aux nouvelles menaces émanant de groupes terroristes qui multipliaient les enlèvements et les prises d' otages , qu' aux conflits de faible intensité auxquels des Américains étaient directement exposés ( République dominicaine , Panama , Grenade ) :
135: l' Administration , paralysée par des contraintes constitutionnelles , n' avait pu régler rapidement ces questions .
136: Limité pendant la guerre froide , tant par la nécessité de se ranger derrière l' autorité du président que par l' absence d' une réelle expertise des questions extérieures , le Congrès , après la disparition de l' Union soviétique , a renoué avec une lecture plus fidèle de la Constitution .
137: C' est ainsi que les parlementaires ont peu à peu rassemblé de véritables équipes d' experts et usé de leurs prérogatives à chaque occasion , aussi bien du fait des clivages politiques les opposant à la Maison-Blanche ( la décennie 1990 a été marquée par une opposition partisane quasi permanente entre l' Exécutif et le Législatif ) qu' en raison de l' absence de menace extérieure qui , selon les textes de Jean-Jacques Rousseau et des pères fondateurs , pouvaient justifier l' apathie du Congrès .
138: 3 . L' expérience de 1990 :
139: la guerre du Golfe et ses opposants au Congrès
140: La guerre du Golfe est souvent citée comme l' exemple d' un parfait succès de la machine de guerre des Etats-Unis , de leur habileté à réunir des coalitions ad hoc et de leur unité dans l' épreuve .
141: Parallèlement à ces bons résultats , la crise du Golfe , qui a précédé l' intervention armée , a vu s' opposer au Congrès les partisans de l' intervention et les opposants à la guerre , plaçant souvent l' Administration de George H.W. Bush dans une position délicate , avant que les relations entre l' Exécutif et le Législatif se normalisent et que les opérations puissent commencer .
142: Rapidement conscient que l' argument de l' invasion du Koweït , s' il permettait de légitimer l' adoption de résolutions au Conseil de sécurité des Nations unies , ne pouvait justifier l' utilisation de la force , ni l' envoi de plusieurs dizaines de milliers d' hommes dans la région , le président George H.W. Bush n' a eu de cesse de placer les questions relatives à la défense de l' Arabie Saoudite au centre des discussions .
143: Par extension , la guerre contre l' Irak devenait peu à peu une croisade du " Bien " contre le " Mal " , dans laquelle les Etats-Unis ne défendaient pas uniquement des intérêts nationaux , mais l' équilibre du monde libre .
144: Ainsi , dès l' invasion du Koweït , le Sénat , suivi de peu par la Chambre des représentants , s' est rangé derrière le président , lui demandant d' agir avec tous les moyens nécessaires pour obtenir le retrait des forces irakiennes .
145: Comme l' expliquait à l' époque Yves Boyer , " cette harmonie entre l' Exécutif et le Législatif ne faisait que traduire le soutien massif de l' opinion publique , approuvant à 70 % cette action " .
146: En réalité , il s' agissait plutôt d' une manoeuvre de la Maison-Blanche , exécutée en période de congés parlementaires de façon à éviter les critiques du Capitole , une politique active de communication devant permettre de s' assurer un soutien populaire .
147: Dick Cheney , alors secrétaire à la Défense , reconnut d' ailleurs que " le fait que le Congrès soit en congé fut un avantage . Nous pouvions profiter du mois d' août pour faire ce que nous avions à faire , plutôt que de s' expliquer devant lui " .
148: L' harmonie masquait un choix délibéré de l' Exécutif pour éviter que les débats institutionnels ne retardent l' adoption de résolutions et n' empêchent l' envoi de forces armées au Moyen-Orient .
149: Mais l' euphorie du mois d' août fut de courte durée .
150: Le Sénat ne tarda pas à inviter le président à venir se présenter devant le Congrès pour expliquer ses plans .
151: L' argument de la défense du pays étant rapidement écarté , les parlementaires rappelèrent au chef de l' Exécutif que les pouvoirs de guerre étaient reconnus par la Constitution et que toute opération extérieure devait recevoir leur aval .
152: En effet , si des pouvoirs exceptionnels peuvent être attribués au président en cas de situation d' urgence , il n' en va pas de même en cas d' envoi de troupes sur un théâtre extérieur dans le cadre d' une grande offensive , quelle qu' en soit d' ailleurs la justification .
153: Et le fait que les deux Chambres étaient alors majoritairement démocrates n' a fait que renforcer la vigueur du Congrès face aux propositions de l' Exécutif républicain .
154: Le président George H.W. Bush , conscient que le soutien du Congrès ne lui était pas acquis , en dépit de l' approbation constante de l' opinion publique au principe d' une intervention en Irak , a longtemps justifié le fait de ne pas se présenter devant les parlementaires en se prévalant des résolutions du Conseil de sécurité des Nations unies .
155: Harry S. Truman avait fait de même en 1950 dans la guerre de Corée :
156: il avait envoyé des troupes sans en informer le Congrès , en se fondant sur les résolutions de l' ONU .
157: Mais le War Powers Act n' existait pas à cette époque , et le cas de la crise du Golfe est donc différent de celui de la guerre de Corée .
158: Toutefois , en 1990 comme en 1950 , le principe de l' intervention s' appuyait essentiellement sur les résolutions du Conseil de sécurité , qui devaient l' emporter sur les considération de politique intérieure , du moins aux yeux de l' Administration .
159: Le 17 septembre 1990 , interrogé sur la question des pouvoirs de guerre , Dick Cheney estimait que le War Powers Act pouvait être considéré comme inconstitutionnel , dans la mesure où il imposait des limites aux prérogatives constitutionnelles du président , notamment dans son rôle de chef des armées .
160: De tels propos illustrent l' option qui fut choisie par l' Administration :
161: adopter la même position que sous les Administrations Reagan et éviter autant que possible de se présenter devant des parlementaires hostiles , sans pour autant avoir le moindre argument permettant de justifier une telle attitude .
162: Cet épisode met en évidence le fait que , de façon générale , le War Powers Act n' a jamais été reconnu comme constitutionnel par l' Exécutif , qui a toujours considéré qu' il octroyait un pouvoir abusif au Congrès .
163: En ce sens , l' Administration de George H.W. Bush ne faisait que reprendre une rhétorique déjà utilisée précédemment , et qui a continué d' être employée par la suite .
164: Le sénateur Sam Nunn ( démocrate , Géorgie ) , alors président de la commission des Forces armées , fut le premier des parlementaires à s' élever contre la décision d' envoyer des troupes en Irak .
165: Parmi les initiatives les plus marquantes , il invita plusieurs personnalités à témoigner et à lui apporter leur soutien contre la guerre .
166: Ainsi se succédèrent au Capitole l' amiral William Crowe , le général David Jones , l' ancien secrétaire à la Défense James Schlesinger , l' ancien secrétaire à la Marine James Webb , et l' ancien directeur du National Security Council , William Odom .
167: Chacun s' éleva contre la guerre , usant d' arguments aussi variés que l' inutilité d' une telle campagne , la mauvaise adaptation des forces armées à ce type d' opération , les risques de pertes humaines , les conséquences du conflit sur la stabilité de la région et du monde en général , et la nature des objectifs à long terme ( ce point étant le plus intéressant , puisqu' il concerne les relations entre les pouvoirs exécutif et législatif en temps de guerre ) .
168: Seul Henry A. Kissinger , également invité par Sam Nunn , ne partagea pas l' opinion des autres personnalités , considérant qu' il n' y avait pas d' autre option que d' engager les forces armées , et que les parlementaires devaient soutenir en bloc l' Administration .
169: Les réactions du président aux critiques du Congrès montrèrent à la fois son agacement et son impuissance .
170: Considérant qu' il était de son devoir de prendre des décisions rapidement , notamment du fait des otages détenus à Bagdad , il refusa néanmoins toute option consistant à intervenir sans consulter le Congrès , à défaut d' obtenir son accord .
171: Comme il l' écrivait dans son journal , le 28 novembre 1990 :
172: " Le débat fait rage à présent , et Sam Nunn , qui , selon moi , vise la présidence , essaie de voir jusqu'où il peut aller . Richard Gephardt " rompt " avec le président en disant : " Non au recours à la force , les sanctions doivent porter leurs fruits .
173: '' Aucun d' eux ne semble se soucier du sort des otages ; aucun ne partage mon inquiétude pour notre ambassade ... Quelle ironie de voir la droite isolationniste se ranger aux côtés de la ( vieille ) gauche incarnée par Kingman Brewster ( qui exprimait le ) syndrome du Vietnam ! Bob Kerrey , un vrai héros de la guerre du Vietnam , et John Glenn , un autre héros , répètent : " Pas de recours à la force , pas de recours à la force " . "
174: " ( ... ) Notre rôle de leader mondial sera de nouveau réaffirmé , mais , si nous acceptons des compromis et que nous échouons , nous serons réduits à l' impuissance totale , et il n' est pas question que cela se produise . Peu importe que le Congrès vote ou non . Cela n' arrivera pas ... et je tiens à impliquer le Congrès . Le grand débat continue à propos de la déclaration de guerre , mais l' important , c' est que nous avons besoin d' eux ; et je continuerai à les consulter . "
175: Ce mépris de la Constitution , même justifié à certains égards , a eu pour effet de renforcer les rangs des opposants au principe de l' intervention , en radicalisant les positions des uns et des autres .
176: Comme l' expliquait à l' époque Stanley Hoffmann , " la réticence de l' Exécutif à soumettre sa politique au contrôle des parlementaires , en vertu de la législation sur les pouvoirs de guerre , a suscité de fortes tensions " .
177: Peu à peu , des élus républicains modérés se sont joints aux remarques de Sam Nunn , acceptant le principe d' une intervention , mais demandant à George H.W. Bush de se présenter devant le Congrès .
178: Ainsi , William Cohen , alors sénateur républicain du Maine , estimait que " le président devait énoncer sa proposition et demander au Congrès s' il approuvait ou non , et jusqu'à quel point , ses objectifs politiques " .
179: En d' autres termes , les parlementaires du propre camp du président souhaitaient que celui -ci respecte le War Powers Act , et ce , d' autant que le Grand Old Party ( GOP , le Parti républicain ) en avait été l' instigateur .
180: D' autres élus républicains , comme le très influent Richard Lugar ( sénateur de l' Indiana ) , se sont élevés contre la guerre en invoquant que le fardeau serait supporté essentiellement par les Etats-Unis .
181: L' argument était de faire payer davantage aux alliés le coût de l' opération ( notons au passage que ce sont des revendications que Richard Lugar a maintes fois répétées au cours de la décennie 1990 , et qui ont été suivies par un nombre croissant de parlementaires ) .
182: Ces demandes n' ont cependant pas été jugées recevables en 1990 , le Congrès applaudissant au contraire la capacité de George Bush et de James Baker à former une coalition et à répartir le coût des opérations entre les alliés .
183: Côté démocrate , l' opposition était encore plus radicale , certains sénateurs , comme Edward Kennedy ( démocrate , Massachusetts ) , voulant à la fois empêcher George H.W. Bush d' agir seul et prendre part aux décisions politico-militaires .
184: La presse libérale s' en est mêlée , le New York Times citant même à titre d' exemple Edouard Chevarnadze , alors ministre des Affaires étrangères de l' Union soviétique , qui jugeait que " toute utilisation des troupes soviétiques hors des frontières suppose une décision du parlement soviétique " .
185: Fait étonnant , ce fut George Mitchell , alors leader de la majorité démocrate au Sénat , qui vint au secours de l' Administration de George H.W. Bush , expliquant que le moment était mal choisi pour demander au président de s' expliquer devant les parlementaires , avant d' inciter le Sénat , avec Robert Dole ( républicain , Kansas ) , à adopter une résolution soutenant l' action du président ( finalement adoptée le 2 octobre 1990 , avec seulement 3 voix contre ) .
186: Cela ne l' empêchera pas toutefois de remarquer quelques semaines plus tard , à quelques heures du début de la campagne , que " le président n' a pas consulté le Congrès sur cette décision ; il n' a pas cherché le soutien du peuple américain . Il l' a simplement fait " .
187: Ce qui prouvait que , même en temps de crise , l' unité du pays restait fragile , et que la politique partisane demeurait au centre des discussions .
188: Au fur et à mesure que l' échéance du 15 janvier 1991 approchait , les positions des uns et des autres se firent de plus en plus nettes , certains n' hésitant pas à évoquer l' impeachment si le président choisissait de ne pas se présenter au Capitole .
189: George H.W. Bush s' inquiéta de la volonté du régime irakien de se doter d' armes de destruction massive , ce à quoi Al Gore , alors sénateur ( démocrate , Tennessee ) , répliqua qu' il s' agissait d' une manoeuvre maladroite destinée à gagner le soutien du Congrès .
190: Se sentant dans une situation de plus en plus délicate , le président comprit que la guerre était inévitable , et que son issue déterminerait son propre avenir politique .
191: Il estimait en effet que la mauvaise conduite des opérations pouvait lui coûter cher , tandis qu' une victoire facile ne renforcerait pas nécessairement sa position face au Congrès et à ses adversaires politiques .
192: Ainsi , comme il l' écrivait dans son journal , le 20 décembre 1990 :
193: " Si la guerre est rapide , avec le moins de pertes possible , quoi que cela veuille dire , et que Saddam essuie une défaite fulgurante , je devrai en partager le mérite avec le Congrès et le monde entier . En revanche , si cela s' éternise , non seulement on va m' en tenir responsable , mais on va probablement entamer une procédure de destitution contre moi , comme l' a dit Dan Inouye . "
194: Dernier acte avant le déclenchement des opérations militaires , et pas des moindres , James Baker rencontra Tareq Aziz , alors ministre des Affaires étrangères de l' Irak , à Genève , le 9 janvier 1991 .
195: Il lui remit une lettre de George H.W. Bush adressée à Saddam Hussein , enjoignant le dirigeant irakien de retirer ses troupes de Bagdad pour éviter une intervention armée .
196: Cette lettre contenait également les phrases suivantes : " Les Etats-Unis ne toléreront pas l' usage d' armes chimiques ou biologiques , ni la destruction des sites pétroliers du Koweït . Le peuple américain réclamerait à ce moment -là la riposte la plus violente possible " , sous-entendu l' utilisation d' armes nucléaires contre le régime de Bagdad .
197: En d' autres termes , le président brandissait la menace nucléaire - celle -ci , à l' inverse des pouvoirs de guerre , étant placée sous sa seule autorité - en justifiant sa fermeté par le soutien de l' opinion publique .
198: De tels propos sont à replacer dans leur contexte , dans la mesure où George H.W. Bush n' avait pas encore obtenu le soutien officiel du Congrès , qui n' interviendra que trois jours plus tard .
199: Le 12 janvier 1991 , la Chambre des représentants devait s' exprimer au sujet de la résolution Michel-Solarz , qui approuvait le recours à la force pour atteindre les objectifs fixés par les Nations unies ;
200: sa jumelle au Sénat était la résolution Dole-Warner .
201: La première fut adoptée à 250 voix contre 183 , et la seconde à 52 contre 47 , soit la plus petite majorité jamais constatée lors d' une déclaration de guerre de toute l' histoire des Etats-Unis .
202: Deux autres résolutions concurrentes avaient été proposées à la Chambre :
203: la résolution Durbin-Bennett , qui rappelait que le Congrès pouvait seul prendre l' initiative de déclarer la guerre , et la résolution Gephardt-Hamilton , qui encourageait la poursuite des sanctions économiques et refusait la guerre .
204: Toutes deux furent rejetées .
205: Ainsi , il a fallu attendre la date butoir du 15 janvier 1991 pour que les opposants à la guerre voient leurs initiatives repoussées et que le Congrès apporte son soutien à l' Administration .
206: Ces votes indiquent sans aucun doute que les parlementaires étaient conscients de la situation de blocage qu' aurait entraînée un refus à l' avant-veille des opérations , et du risque encouru pour la coalition dans son ensemble .
207: Une fois les troupes prêtes à l' assaut , ce refus aurait en effet été mal ressenti , tant par l' opinion publique aux Etats-Unis que par la communauté internationale .
208: George H.W. Bush a reconnu plus tard avoir alors compris que " la plupart des sénateurs et des parlementaires seraient obligés de nous soutenir si nous déclarions la guerre sans eux , mais qu' ils se trouveraient en mauvaise posture si je réclamais officiellement une déclaration de guerre ou bien une résolution de soutien au recours à la force " .
209: Mais , finalement , comme l' expliquent Lawrence Freedman et Efraim Karsh , " la décision critique ( de lancer l' offensive ) , comme tant d' autres pendant la crise , fut prise par un nombre relativement limité de personnes " .
210: Certains experts considéraient , après la fin des hostilités , que le Sénat serait , à l' avenir , moins hostile à l' envoi de troupes à l' étranger que lors du vote du 12 janvier , et prédisaient un avenir radieux pour les futures Administrations , qui disposeraient d' un " mandat " offert par les parlementaires en matière de pouvoirs de guerre .
211: Ce ne fut pas le cas .
212: En fait , les débats décrits ici , s' ils n' ont pas eu pour effet de bloquer la décision de George H.W. Bush de s' engager dans une guerre contre l' Irak , ont eu des conséquences à plus long terme .
213: C' est en effet à partir de la crise du Golfe que le Congrès a retrouvé une certaine légitimité en matière de pouvoirs de guerre , les parlementaires n' hésitant plus à faire valoir leurs prérogatives face à l' Exécutif .
214: L' absence de menace , l' opposition politique quasi constante et l' héritage de l' expertise acquise alors ( c' est pendant cette période que de véritables groupes d' experts vont se constituer au Congrès , ceux -ci se généralisant par la suite avec l' apport dans le camp républicain d' anciens membres des Administrations Reagan et Bush ) en furent la cause .
215: L' argument , présenté par Anthony Lake quelques années plus tôt , étant également que " le débat démocratique produit plus facilement que la doctrine des décisions importantes en matière de politique étrangère " .
216: II . Les pouvoirs de guerre sous Bill Clinton
217: Pendant les huit années de présidence de Bill Clinton , et de façon encore plus nette après le double succès des Républicains aux élections de la mi-mandat en novembre 1995 , le Congrès exprima son désaccord sur les questions relatives aux affaires étrangères , notamment en ce qui concerne l' envoi de forces armées sur des théâtres extérieurs .
218: Mais le président et l' Administration furent confrontés à une opposition qui se montra bien plus sensible à la question de la répartition des pouvoirs qu' aux clivages politiques traditionnels .
219: Ces débats , renouvelés à l' occasion des différentes crises auxquelles l' Administration Clinton fit face , nous permettent de mieux comprendre dans quelle mesure la fin de la guerre froide a bouleversé la relation Exécutif / Législatif dans le domaine des pouvoirs de guerre .
220: Pour la première fois , en effet , le Congrès a été en mesure de bloquer les initiatives présidentielles , ne se contentant pas d' exprimer des réserves , mais faisant pleinement usage de ses prérogatives .
221: C' est également pendant cette période que les réseaux d' influence du Congrès se sont considérablement renforcés , notamment par la montée en puissance des commissions chargées des questions internationales , ce qui marqua de façon durable le retour des parlementaires dans le processus d' élaboration de la politique étrangère .
222: 1 . Le retour du gridlock
223: Depuis que les Etats-Unis sont devenus la seule superpuissance , les débats portant sur les relations internationales et les interventions à l' étranger se sont déplacés vers des considérations de politique intérieure , où le Congrès , et plus particulièrement la Chambre des représentants , se fait directement l' écho de " la voix de l' Amérique " .
224: Pour conserver toute sa crédibilité et s' assurer une cote de popularité acceptable , le président doit se montrer sensible aux revendications de ses concitoyens , même si celles -ci vont parfois à l' encontre des engagements internationaux du pays ;
225: mais il doit aussi prendre en considération les débats au Congrès , pour que les deux pouvoirs ne soient pas en opposition .
226: Cela est d' autant plus perceptible en temps de gridlock ( littéralement " gros embouteillage " , mais il s' agit plutôt ici d' une forme de cohabitation politique ) , quand le président et l' une des deux ( voire les deux ) Chambres ne défendent pas les mêmes options .
227: Cependant , l' opposition entre le Capitole et la Maison-Blanche a largement dépassé , sous Bill Clinton , le simple clivage politique , répondant surtout à une différence d' appréciation de la Constitution .
228: Diriger sans le soutien du Congrès
229: En prenant le contrôle de la Chambre des représentants à l' occasion des élections de 1994 ( 230 sièges sur 434 ) , les Républicains retrouvaient la majorité pour la première fois depuis 1954 , mettant ainsi fin à 40 ans de domination démocrate .
230: Au Sénat , si le GOP a parfois gagné des élections législatives , les Républicains n' ont été majoritaires qu' à dix reprises depuis 1945 .
231: Au total , ils n' ont contrôlé simultanément les deux Chambres que six fois :
232: entre 1947 et 1949 , entre 1953 et 1955 , et entre 1995 et juin 2001 , soit seulement durant 10 années , contre 40 ans pour les Démocrates , et six ans de partage des pouvoirs .
233: Enfin , jusqu'à l' élection de George H.W. Bush , les Républicains n' ont été qu' une seule fois à la tête des trois pouvoirs ( Maison-Blanche , Sénat , Chambre des représentants ) :
234: c' était entre 1953 et 1955 , sous la présidence de Dwight D. Eisenhower .
235: Quant aux Démocrates , ils ont connu cette situation à dix reprises , soit durant 20 ans ;
236: mais le président Bill Clinton n' en a bénéficié que pendant les deux premières années de son premier mandat , entre 1993 et 1995 .
237: En 1994 , Louis Fisher signalait le souhait exprimé par Bill Clinton de poursuivre la politique de son prédécesseur de ne pas consulter systématiquement le Congrès en cas d' opérations militaires extérieures .
238: Fortement contesté par ceux qui défendaient les initiatives de l' Exécutif , le War Powers Act a même été présenté comme un texte dépassé et devant être redéfini , non seulement à la lumière des difficultés rencontrées par George H.W. Bush en 1990 , mais également en raison de la généralisation des crises de faible intensité .
239: En effet , Washington a été confronté à un nombre croissant de conflits limités n' engageant que de loin ses intérêts , et pour lesquels la consultation du Congrès n' était pas forcément jugée nécessaire , les parlementaires se montrant assez peu sensibles au déroulement d' opérations engageant des forces limitées .
240: Pourtant , c' est pendant cette période qu' ils ont mis en avant les prérogatives que leur offre la Constitution et qu' ils n' ont pas hésité à se prononcer sur toutes les initiatives de l' Administration en matière d' engagement des forces armées .
241: Ainsi , à l' occasion de toutes les opérations extérieures auxquelles l' Administration Clinton a pris part , de nombreuses voix se sont élevées au Congrès pour contrer la position de l' Exécutif .
242: Débats autour de la question irakienne
243: Entre 1992 et 2000 , l' Irak fut au centre des préoccupations des parlementaires , qui se sont intéressés aux différentes options recherchées par l' Administration et n' ont pas manqué de rappeler l' importance de la Constitution .
244: Ce fut notamment le cas en 1996 .
245: John McCain estimait alors que " notre capacité à entreprendre des actions disproportionnées et efficaces , nécessaires en de telles circonstances , ne doit pas être mise en cause par les conséquences de notre échec à préserver l' unité de la coalition " .
246: Ces débats se sont encore poursuivis , les parlementaires n' hésitant pas à proposer une résolution sur l' avenir du régime irakien , se donnant ainsi le premier rôle dans l' élaboration de la politique étrangère .
247: Défendant cette résolution , Thomas Lantos ( démocrate , Californie ) précisait que son " objectif ( ... ) était de montrer clairement et sans équivoque à Saddam Hussein et à son gouvernement que le Congrès soutient l' usage de la force militaire en cas de nécessité . Il ne doit y avoir aucun doute ni sur l' importance de la poursuite des inspections , comme le stipulent les décisions du Conseil de sécurité des Nations unies , ni sur la volonté du gouvernement des Etats-Unis , ni sur le soutien du peuple américain si une action militaire était nécessaire " .
248: Cette montée en puissance du Congrès allait de pair avec de vives critiques à l' égard de l' Administration Clinton , certains parlementaires allant jusqu'à juger que sa politique vis-à-vis de l' Irak n' était pas clairement définie .
249: Ainsi , le sénateur conservateur Charles Hagel ( républicain , Nebraska ) estimait que " notre défense nationale est garante de notre politique étrangère . Je ne sais pas si nous avons une politique de long terme en Irak , à part celle de maintenir les sanctions décidées par les Nations unies et d' imposer leurs résolutions , mais ceci ne constitue pas une politique étrangère . Si nous devons un jour conduire les Etats-Unis à la guerre , ce doit être pour imposer notre politique étrangère - faire seulement la guerre n' est pas suffisant . Nous devons imposer une politique d' ensemble et de long terme . Les raisons d' une entrée en guerre doivent reposer sur bien autre chose que la seule mise en oeuvre de sanctions à court terme " .
250: C' est donc sous la présidence de Bill Clinton que le Congrès a retrouvé ses prérogatives en matière de politique étrangère , non seulement du fait de l' opposition partisane entre les pouvoirs exécutif et législatif et de l' absence de menace extérieure pesant sur le pays , mais également en raison de la montée en puissance de certaines institutions -clefs du Congrès - les commissions - et de ceux qui les président .
251: 2 L' engagement dans les Balkans
252: Fil conducteur de la politique étrangère des Etats-Unis au même titre que la relation avec l' Irak , l' engagement dans les Balkans a révélé des divergences de vue entre les pouvoirs exécutif et législatif .
253: Mais , plus qu' une opposition liée à des particularismes politiques , les crises successives en Bosnie et au Kosovo ont surtout souligné la volonté des parlementaires d' être consultés préalablement à toute intervention extérieure .
254: La Bosnie
255: En 1993 , les débats sur la possibilité d' un engagement militaire en Bosnie se sont accompagnés de nombreuses critiques sur le coût des opérations , la nécessité d' engager les forces armées et la participation des alliés européens .
256: Les parlementaires se sont interrogés sur les pouvoirs de guerre accordés au président Bill Clinton et sur la nécessité d' engager des forces armées sur un théâtre d' opérations n' impliquant pas directement les intérêts vitaux des Etats-Unis .
257: Certains membres du Congrès se sont montrés sceptiques quant aux prétentions de la Maison-Blanche à jouer les " gendarmes du monde " .
258: Ils estimaient que le pays , en intervenant de façon excessive à l' extérieur , risquait de gaspiller ses ressources et de dévoiler trop aisément ses forces à ses adversaires .
259: Le sénateur John McCain ( républicain , Arizona ) pensait ainsi que , " si nous usons de nos forces et de notre prestige de façon inconsidérée , nous gaspillerons des ressources que nous n' avons pas " .
260: Des remarques du même type ont été exprimées en 1995 , notamment de la part d' élus démocrates , qui jugeaient que l' Administration avait prêté une trop grande attention aux aspirations de l' aile conservatrice du Congrès en décidant d' envoyer des troupes dans les Balkans .
261: Le sénateur Byron Dorgan ( démocrate , Dakota-du-Nord ) estimait ainsi que " l' envoi de forces pose un énorme risque pour nos troupes et notre pays , pour un gain potentiellement très faible pour la Bosnie " .
262: Pour sa part , et conscient de l' importance de la participation financière que supposait une intervention armée , le représentant Jerry F. Costello ( démocrate , Illinois ) considérait que la Bosnie concernait les Européens au premier chef et que ceux -ci devaient en assumer la principale responsabilité , écartant ainsi le principe d' un envoi de troupes américaines sur le terrain .
263: Le débat sur les pouvoirs de guerre s' est encore élargi avec l' intervention des Etats-Unis en Bosnie , car celle -ci s' effectuait dans le cadre de l' OTAN .
264: En effet , afin de soutenir des opérations menées sous l' égide des Nations unies ou de l' Alliance atlantique , Bill Clinton autorisa de multiples actions en Bosnie sans disposer de l' autorisation expresse du Congrès , et ce , en dépit des disputes permanentes entre le Capitole et le président sur les opérations à mener .
265: La question se posait alors de savoir si une action entreprise au sein de l' OTAN pouvait être conduite indépendamment des exigences de la Constitution et du War Powers Act .
266: L' article 11 du traité de l' Atlantique Nord répond à cette interrogation en consacrant le droit national des Etats :
267: l' application du traité doit être conforme aux " règles constitutionnelles " des Etats parties , ce qui , de fait , confère un pouvoir au Congrès dans l' éventualité d' une guerre menée au nom de l' OTAN .
268: Le War Powers Act précise également les conditions d' engagement des forces armées des Etats-Unis par rapport aux traités internationaux ou conventions .
269: Ainsi , destinée à empêcher le recours à un traité ( ou à une loi Military Appropriations Act ou même à une résolution des Nations unies ) pour autoriser l' engagement de troupes , la section 8-a prévoit qu' aucune intervention militaire ne peut être fondée sur la base d' un traité - antérieur ou postérieur à 1973 - à moins qu' une clause spécifique ne l' y autorise expressément .
270: Néanmoins , la section 8-b précise que les Etats-Unis peuvent participer - sans autorisation spécifique - , conjointement à un ou plusieurs alliés , aux opérations militaires de haut niveau décidées par les états-majors ( " in the headquarters operations of high-level military commands " ) établis avant 1973 , comme celles de l' OTAN .
271: Le 11 août 1992 , soit encore sous l' Administration Bush , le Sénat vota la résolution S. Res .
272: 330 , incitant le président à travailler à une résolution du Conseil de sécurité pour faciliter l' aide humanitaire à Sarajevo , mais précisant qu' aucune force militaire ne saurait être introduite sans objectif clair et précis .
273: De son côté , la Chambre des représentants votait la résolution H. Res .
274: 554 , qui incitait le Conseil de sécurité à prendre des mesures pour permettre l' assistance humanitaire , y compris le recours à la force .
275: Le lendemain , le Conseil de sécurité votait la résolution 770 , appelant les Etats membres à prendre " toutes les mesures nécessaires " pour faciliter l' acheminement de l' aide à Sarajevo .
276: Le 28 février 1993 , les Etats-Unis commencèrent à délivrer de l' aide humanitaire par avion , et , à partir du 12 avril , en application de la résolution du 31 mars ( autorisant les Etats membres à prendre toutes les mesures nécessaires pour imposer l' interdiction de survol militaire de la Bosnie ) , ils effectuèrent des actions aériennes dans le cadre de l' OTAN .
277: Celles -ci étaient destinées à imposer à la fois les sanctions et le respect de la zone de non-vol ( no-fly zone ) au dessus de la Bosnie .
278: Au lieu de l' annoncer avant les opérations , ce n' est que le lendemain que le président rendit compte de la conformité au War Powers Act de la participation des Etats-Unis .
279: De même , alors que le secrétaire d' Etat Waren Christopher annonçait , le 10 juin , l' envoi d' un effectif de 300 soldats en renfort d' une mission de maintien de la paix en Macédoine , en application de la résolution 795 du Conseil de sécurité ( votée en 1992 et destinée à éviter l' extension de la crise bosniaque aux pays voisins ) , ce n' est qu' un mois plus tard ( le 9 juillet ) que le président déclara cette action conforme au War Powers Act .
280: Dans la perspective d' un accord de paix , la Maison-Blanche envisagea de fournir la moitié des forces de l' OTAN ( 25 000 hommes sur 50 000 ) .
281: Certains parlementaires comme le sénateur Robert Dole ( leader de l' opposition ) ont alors exigé l' approbation du Congrès avant tout autre déploiement en Bosnie , ce qui poussa l' assistant du secrétaire d' Etat , Stephen Oxman , à garantir que l' Administration n' agirait pas sans le soutien des parlementaires en cas de mise en oeuvre de l' éventuel accord de paix .
282: Afin de formaliser cet engagement , le Congrès vota une disposition introduite par les sénateurs Dole et Mitchell , qui stipulait que les fonds destinés à financer la participation de troupes américaines pour assurer l' accord de paix ne seraient pas alloués sans autorisation préalable du Capitole .
283: Alors que le conflit bosniaque perdurait et que le président continuait de rendre compte des opérations seulement après que celles -ci avaient été engagées , la contestation parlementaire réclamant une plus grande implication du Congrès s' intensifia , en particulier au Sénat .
284: Ainsi , le 12 mai , les sénateurs acceptèrent à une voix de majorité les amendements proposés respectivement par Robert Dole ( approuvant la mission de la Force de protection des Nations unies ( FORPRONU ) ) et George Mitchell ( stipulant , entre autres , que les Etats-Unis ne pouvaient envoyer de soldats au sol sans l' accord du Congrès ) .
285: Mais la Chambre des représentants ne suivit pas ce vote , qui resta donc sans effet .
286: La section 8 100 du Defense Appropriations Act for FY 1995 ( P.L. 103 - 335 , signé le 30 septembre 1994 ) stipulait que les fonds octroyés par la présente loi ne devaient pas financer le déploiement des troupes chargées de mettre en oeuvre un accord de paix en Bosnie , à moins que le Congrès ne l' autorisât .
287: Fin 1995 , le débat sur les pouvoirs de guerre fit un retour sur le devant de la scène , après la décision présidentielle d' envoyer 20 000 hommes en Bosnie dans le cadre d' une mission de maintien de la paix de l' OTAN .
288: Le Congrès vota nombre de projets de loi et de résolutions , notamment trois dans chaque Chambre pour le seul mois de décembre , mais ni le Sénat ni la Chambre ne parvinrent à se mettre d' accord sur les mesures à prendre .
289: Cette absence de consensus permit au président de fournir l' année suivante ( décembre 1996 ) des troupes au sol ( 8 500 hommes ) pour participer à la Force de stabilisation ( Stabilization Force , SFOR . A nouveau , ce manque de clarté s' expliquait en grande partie par l' opposition de certains élus démocrates ( dont Joseph Lieberman et Joseph Biden ) aux propositions de l' Administration , tandis que les Républicains y étaient plutôt favorables .
290: En fait , les élus conservateurs pouvaient difficilement reprocher au président sa détermination après avoir longuement critiqué ses prises de position trop hésitantes .
291: Ce fut le cas de Robert Dole , futur candidat républicain à l' élection présidentielle de 1996 , qui ne put que rester silencieux sur cette question , sous peine de se contredire .
292: Devant cette absence de débat partisan au Sénat , ce furent des élus républicains réputés plus modérés qui émirent des réserves , notamment John McCain , John Warner et William Cohen .
293: Le dernier acte se joua le 18 mars 1998 , quand le Congrès rejeta à une majorité de 225 voix contre 193 la contre-résolution ( H. Con . Res 227 , introduite par le républicain Tom Campbell ) visant à retirer les troupes américaines de Bosnie .
294: Ce vote serré illustrait nettement la gronde des parlementaires , peu disposés à voir le conflit s' intensifier et qui étaient prêts à contraindre Bill Clinton à aller à l' encontre de ses engagements .
295: Cette situation marqua incontestablement un tournant dans la relation entre le Législatif et l' Exécutif en matière de pouvoirs de guerre , la Maison-Blanche se trouvant prise entre des engagements internationaux et des contraintes de politique intérieure .
296: La campagne du Kosovo
297: Avec l' intervention des Etats-Unis au Kosovo , le débat sur les pouvoirs de guerre franchit une nouvelle étape , certains parlementaires allant même jusqu'à recourir à la justice pour mettre le président en accusation .
298: Est -il nécessaire de rappeler ici que cette nouvelle crise dans les Balkans prit place au moment de l' affaire Monica Lewinski , à l' occasion de laquelle le président Clinton fut la cible des parlementaires conservateurs , y compris dans le camp démocrate ?
299: Cette affaire intervenait donc au plus mauvais moment pour un président déjà soumis à de fortes pressions internes .
300: Cela n' empêcha pas certains parlementaires de lui reprocher d' utiliser des considérations de politique étrangère pour détourner l' attention des questions de politique intérieure auxquelles il était confronté .
301: La controverse sur l' action au Kosovo s' amplifia le 26 mars 1999 , lorsque Bill Clinton annonça que des frappes aériennes menées avec les alliés contre le gouvernement yougoslave avaient commencé deux jours plus tôt .
302: Les parlementaires se montrèrent très partagés , refusant de désapprouver comme de soutenir la politique du président , ce qui eut pour effet d' affaiblir leur action .
303: Ainsi , le 28 avril , si la Chambre des représentants se mit d' accord pour refuser de financer l' envoi de troupes au sol à moins d' obtenir une autorisation spécifique ( H.R 1569 ) , elle ne trouva pas de consensus sur les propositions de loi proposant le retrait des troupes des opérations engagées ( H. Con . Res . 82 ) ou une déclaration de guerre contre l' Etat yougoslave ( H.J. Res . 44 ) .
304: Le même jour , la Chambre des représentants rejeta - lors d' un vote exceptionnellement partagé ( 213 voix contre 213 ) - la résolution introduite par le Sénat , le 23 mars ( S.con . Res . 21 ) , qui soutenait les frappes militaires aériennes contre la Yougoslavie .
305: Deux jours plus tard , une petite fraction du Congrès entreprit d' intenter une action en justice contre le président .
306: Sous la férule de Tom Campbell ( républicain , Californie ) , 17 parlementaires saisirent ainsi la Cour fédérale du district de Columbia pour réclamer que Bill Clinton obtienne l' accord du Congrès avant de continuer la guerre aérienne ou d' entreprendre d' autres opérations militaires en Yougoslavie .
307: Devant l' incapacité de s' accorder sur le principe de mesures bilatérales bloquant les opérations , ces parlementaires avaient décidé de porter devant la justice du pays la décision du président et de l' Administration .
308: Le seul point sur lequel les parlementaires étaient clairs concernait le soutien aux forces armées et le 20 mai , date à laquelle le Congrès soumit à la signature présidentielle le projet de loi de finances supplémentaires d' urgence ( H.R. 1141 ) accordant des milliards pour financer l' opération au Kosovo , on s' attendit à une accalmie .
309: Mais , le 25 , comme cela faisait 60 jours que le président avait rendu compte au Congrès des opérations militaires menées au Kosovo , les parlementaires qui contestaient l' action présidentielle ( le groupe des 18 ) signalèrent à la Cour que son comportement constituait une violation patente de l' esprit du War Powers Act .
310: En effet , celui -ci autorise le retrait des forces du champ de bataille au bout de 60 jours si le Congrès , dans ce laps de temps , n' a pas autorisé la poursuite des actions ou si le président n' a pas réclamé un délai supplémentaire de 30 jours .
311: Or le président n' avait pas cherché à obtenir ce délai supplémentaire , faisant valoir que le War Powers Act était constitutionnellement défaillant ( defective ) .
312: Cependant , le 8 juin 1999 , arguant du manque de fondement légal de la plainte , le juge du district fédéral Paul L. Friedman rejeta l' accusation selon laquelle le président avait violé le War Powers Act ou la Constitution dans la conduite des opérations militaires en Yougoslavie .
313: Loin de s' arrêter là , l' affaire prit une ampleur considérable .
314: Après avoir fait appel devant la Cour compétente ( celle du district de Columbia ) , qui accepta de recevoir l' appel mais confirma , le 18 février 2000 , la décision de la cour précédente , Tom Campbell et 30 autres parlementaires saisirent la Cour suprême des Etats-Unis , le 18 mai .
315: Celle -ci mit définitivement fin à l' affaire en refusant , le 2 octobre , de s' en saisir .
316: 3 . Les autres crises majeures sous Bill Clinton
317: La Somalie
318: L' autre dossier important concernant les forces engagées en 1993 est la Somalie .
319: Là encore , plusieurs parlementaires se sont demandés s' il était dans l' intérêt du pays d' envoyer des troupes sur place , et surtout de maintenir une présence militaire dans la région , notamment après le cuisant échec de l' opération commando lancée sur Mogadiscio , qui entraîna la mort de 18 soldats américains .
320: Le représentant Benjamin Gilman ( républicain , New York ) estimait que les " forces armées ( des Etats-Unis ) devaient rentrer à la maison le plus rapidement possible et être remplacées par des troupes des Nations unies provenant d' autres pays , afin de remplir la mission prévue initialement : nourrir ceux qui ont faim " .
321: Pour sa part , le sénateur Clairborne Pell ( démocrate , Rhode Island ) , qui souhaitait collaborer davantage avec l' Administration , menaçait celle -ci de mettre en avant les prérogatives définies par la Constitution si elle se refusait à consulter le Congrès : " Laissez -nous travailler main dans la main avec l' Administration afin de trouver une alternative viable à cette politique malmenée de toutes parts . "
322: Le cas somalien a conduit les parlementaires à débattre d' une autre question relative aux pouvoirs de guerre :
323: celle de savoir à partir de quand l' assistance humanitaire devait être soumise à une autorisation du Congrès .
324: Dès la fin novembre 1992 , le président avait proposé l' envoi de troupes pour permettre l' acheminement de l' aide humanitaire en Somalie ;
325: le 3 décembre , cette proposition fut accueillie avec joie par le Conseil de sécurité , qui vota la résolution 794 autorisant le recours à tous les moyens nécessaires pour y rétablir une situation propice à l' assistance humanitaire .
326: Mais , c' est avec la montée des violences dans ce pays ( assassinats de soldats de l' ONU , incluant des Américains ) , et surtout après le fiasco de l' opération commando lancée contre le général Aidid , que les interrogations au Congrès prirent de l' ampleur .
327: Ainsi , en septembre 1993 , le Congrès adoptait plusieurs amendements au Defense Authorization Act for FY 1994 .
328: Ils réclamaient que le président , avant le 15 octobre 1993 , consulte le Congrès sur sa politique en Somalie , notamment sur les objectifs de la mission confiée aux Etats-Unis , et précisaient qu' il devait obtenir son autorisation pour la poursuite du déploiement des forces .
329: Le président se conforma à ces décisions en consultant , le 7 octobre , les représentants des deux parties sur la question somalienne pendant près de deux heures et en envoyant la semaine suivante ( le 13 octobre ) un rapport de 33 pages au Congrès sur les objectifs de la mission en Somalie .
330: Le même jour , Bill Clinton déclara le retrait de la plupart des troupes avant le 31 mars 1994 ;
331: le Defense Appropriations Act for FY 1994 y apporta une garantie en mettant fin au financement des opérations à compter de cette date , sous réserve que le président n' obtînt pas de nouvelle autorisation du Congrès .
332: Le Congrès approuva l' emploi de forces militaires en Somalie dans un souci d' aide humanitaire et surtout afin d' assurer la protection du personnel et des bases américaines .
333: Aussi cette autorisation fut -elle assortie de la condition sine qua non que les forces de combat des Etats-Unis restent sous le contrôle du commandement américain , sous la stricte autorité du président .
334: Auparavant , quelques parlementaires avaient estimé que , si le Congrès ne permettait pas aux troupes de rester , elles devraient se retirer dans un délai de 60 à 90 jours .
335: Mais le département d' Etat affirma que l' autorisation du Congrès , si elle était bienvenue , n' était pas nécessaire dans ce cas précis .
336: Le 21 juillet 1993 , le secrétaire adjoint Wendy Sherman répondit à une lettre envoyée conjointement par Benjamin Gilman et Jesse Helmes ( membres des commissions des Affaires étrangères respectivement de la Chambre des représentants et du Sénat ) qu' aucune Administration n' avait jamais considéré que des engagements militaires intermittents pussent être interrompus au motif de la section 5-b et que , selon l' Administration , le War Powers Act ne s' appliquait qu' aux engagements prolongés .
337: Le 4 août 1993 , Benjamin Gilman déclarait que l' on devrait se souvenir de cette date comme de celle de la mort du War Powers Act , car les troupes n' avaient pas été retirées alors que des combats avaient éclaté le 5 juin et que le Congrès avait décidé de se détourner de l' affaire .
338: Le 22 octobre 1993 , le même Benjamin Gilman présenta la résolution H. Con .
339: Res .
340: 170 ordonnant au président , conformément à la section 5-c du War Powers Act , de retirer les troupes de Somalie avant le 31 janvier 1994 , proposition qui fut adoptée par la Chambre des représentants , laquelle repoussa la date butoir au 31 mars 1994 ;
341: mais le Sénat s' abstint de se prononcer sur cette mesure , qui resta , de fait , non contraignante .
342: Toutefois , le Defense Appropriations Act for FY 1995 ( P.L. 103 - 335 , signé le 30 septembre 1994 ) interdisait le financement d' une présence militaire en Somalie au-delà du 30 septembre 1994 , sauf pour protéger le personnel américain .
343: En conséquence , le 4 novembre 1994 , le Conseil de sécurité décida de mettre fin à la mission des Nations unies en Somalie avant le 31 mars 1995 , et les forces américaines achevèrent leur mission d' évacuation des troupes de l' ONU le 3 mars .
344: Une fois de plus , ce fut donc l' arme du budget qui vint à bout de la détermination du président Bill Clinton et l' obligea à se plier aux exigences du Congrès .
345: L' intervention en Haïti
346: Les propositions d' intervention en Haïti , fin 1993 et surtout en 1994 , furent à nouveau accueillies avec scepticisme par les parlementaires républicains , qui se montrent souvent réticents à l' envoi de troupes sur des théâtres extérieurs quand les intérêts vitaux des Etats-Unis ne sont pas directement menacés .
347: Pour le représentant Douglas Bereuter ( républicain , Nebraska ) , " une invasion mal définie , impopulaire et unilatérale ferait de la politique étrangère de Clinton non plus un simple mal de tête , mais une véritable migraine " .
348: Le sénateur Strom Thurmond ( républicain , Caroline-du-Sud ) estimait pour sa part que , " même si la situation en Haïti intéresse les Etats-Unis , elle ne présente aucune nécessité stratégique , aucune urgence nationale , aucune menace militaire ou économique pour Washington ou pour le monde . Nos intérêts se portent sur le traitement humanitaire du peuple haïtien et la promotion de la démocratie dans cette partie du globe . Aussi pourquoi la plus puissante nation de la planète irait -elle envahir cette petite nation insulaire ? "
349: Bill Clinton entreprit l' opération en Haïti ( qui prévoyait au départ l' envoi d' une mission de négociation pour assurer le départ de la junte militaire , tout en ordonnant aux troupes de se préparer à une invasion si nécessaire ) sans l' aval du Congrès , ce qui lui valut de nombreuses critiques .
350: Celles -ci conduisirent , en octobre 1994 , au vote de la résolution S.J. Res .
351: 229 ( P.L. 1032 - 423 ) , stipulant que le président aurait dû demander l' autorisation du Congrès avant le déploiement et ordonnant le retrait des troupes le plus rapidement possible .
352: Le 20 octobre 1993 , la décision d' appliquer l' embargo , décrété le 3 juillet par le Conseil de sécurité conformément au War Powers Act , entraîna le mécontentement de membres du Congrès qui se plaignaient de ne pas avoir été consultés au préalable .
353: Cette affaire intervenait deux jours après la proposition du sénateur Robert Dole d' amender le Defense Appropriation Bill ( H.R. 3116 ) de façon à requérir l' autorisation du Congrès pour tout déploiement militaire , naval ou aérien , en Haïti , à moins que le président n' ait au préalable émis des garanties ( certifications ) .
354: Après des négociations entre membres de l' Administration et du Congrès , l' amendement concrétisé par la section 8 147 ( de la P.L. 103 - 139 ) mentionna que le Congrès ne financerait pas d' opérations militaires en Haïti à moins que celles -ci ne soient ( 1 ) approuvées préalablement par le Congrès , ( 2 ) nécessaires à la protection ou à l' évacuation de citoyens américains , ( 3 ) la réponse à un cas d' urgence nationale , ou ( 4 ) que le président fixe auparavant certains critères au déploiement .
355: Alors que l' embargo se durcissait ( notamment avec la résolution 917 du Conseil de sécurité ) , que les pressions sur Haïti augmentaient et que la situation dans le pays se dégradait , Bill Clinton déclara ne pas exclure faire usage de la force .
356: Beaucoup de parlementaires continuaient à affirmer que l' autorisation du Congrès était nécessaire en cas d' invasion .
357: Le 24 mai 1994 , la Chambre des représentants adopta un amendement au Defense Authorization Bill ( H.R. 4301 ) , selon lequel toute action militaire contre Haïti devrait être justifiée , dans une déclaration du président au Congrès , par la nécessité de protéger les citoyens ou intérêts américain .
358: Mais , le 9 juin , cet amendement fut renversé par un nouveau vote de la Chambre des représentants ( 226 contre 195 ) , et le Sénat rejeta à deux reprises une mesure exigeant l' autorisation du Congrès préalablement à toute action militaire des Etats-Unis .
359: Par la résolution 940 , souhaitée par Bill Clinton , le Conseil de sécurité de l' ONU autorisa alors qu' une force multinationale pût utiliser tous les moyens nécessaires pour rétablir l' ordre en Haïti , ce qui permettait l' intervention .
360: Le président , conscient que le soutien des parlementaires ne lui était pas acquis , préférait s' en remettre aux Nations unies .
361: Le 3 août , le Sénat adopta , à l' unanimité , un amendement au Department of Veterans Appropriation ( H.R. 4624 ) , selon lequel la résolution du Conseil de sécurité ne constituait pas une autorisation pour le déploiement de forces militaires en Haïti en vertu de Constitution ou du War Powers Act .
362: Mais cet amendement ne fut finalement pas retenu en commission .
363: Le même jour , le président Bill Clinton déclara qu' il serait heureux d' avoir le soutien du Congrès , mais que celui -ci n' était pas nécessaire dès lors qu' il agissait sous couvert d' un mandat international .
364: Le 19 septembre , la Chambre des représentants accepta la résolution H. Con .
365: Res .
366: 290 , qu prônait le retrait des forces américaines d' Haïti le plus tôt possible , tandis que le Sénat votait une mesure similaire ( S. Res . 259 ) .
367: Le 3 octobre , la commission des Affaires étrangères de la Chambre rendait compte de la résolution H.J. Res .
368: 416 autorisant l' emploi des forces en Haïti jusqu'au 1er mars 1995 .
369: Cette résolution - qui reconnaissait que le président aurait dû avertir le Congrès avant l' envoi de troupes , soutenait le retrait rapide des forces et exigeait un rapport mensuel sur la situation en Haïti - trouva un écho favorable au Sénat ( avec la résolution S.J. Res . 229 du 6 octobre ) .
370: Elle fut votée par la Chambre des représentants le 7 octobre ( S.J. Res . 229 ) et signée par le président le 25 ( P.L. 103 - 423 ) .
371: Ainsi , dès le retour du président Aristide , le 15 octobre 1994 , les Etats-Unis commencèrent à rapatrier leurs troupes , si bien qu' à la mi-avril 1996 , il n' en restait qu' une partie ( une unité de soutien de 300 à 500 hommes ) pour mener à bien des opérations de reconstruction .
372: Le 17 décembre 1997 , le président Clinton ordonna au département de la Défense de maintenir des centaines de soldats pour un temps indéfini en Haïti .
373: Mais , deux ans plus tard ( en septembre 1999 ) , le Congrès vota le FY 2000 DOD Authorization Bill ( P.L . 106 - 65 ) , qui ne permettait plus au Pentagone d' y maintenir une présence militaire au-delà du 31 mai 2000 .
374: Aussi les troupes furent -elles retirées , cette fois de façon définitive .
375: L' approche commune des deux Chambres du Congrès à propos de Haïti se réduisit finalement à demander au président des rapports détaillés sur la mission des forces envoyées sur place .
376: Cette attitude frustra longtemps les défenseurs des prérogatives du Congrès en matière de politique étrangère , qui considéraient que son action était devenue insignifiante et sans mesure avec son rôle réel .
377: 4 . Le rôle croissant des commissions
378: Au-delà des considérations politiques que nous avons étudiées , la montée en puissance du Congrès au cours de ces dernières années s' explique par la généralisation des travaux d' experts émanant des deux Chambres :
379: auditions de spécialistes , rapports de grande qualité , débats sur tous les thèmes de la politique du pays .
380: Comme l' explique Justin Vaïsse , au Capitole " une bureaucratie de 35 000 fonctionnaires travaille pour les parlementaires , lui apportant l' expertise et l' information nécessaire à sa remontée en puissance " .
381: Ces spécialistes officient pour les commissions , chacune ayant une tâche clairement définie , et apportent à leurs membres tous les informations leur permettant de prendre des initiatives , en étant souvent mieux renseignés que les membres de l' Administration .
382: En effet , la spécialisation des commissions leur apporte une grande crédibilité , surtout si on la compare avec celle des ministères , qui doivent se pencher sur plusieurs questions et demeurent des " généralistes " .
383: En participant à ces commissions , les membres du Congrès deviennent ainsi de véritables experts dans certains domaines , en particulier lorsqu' ils restent plusieurs années à leur tête , comme c' est le cas au Sénat .
384: En ce qui concerne la politique étrangère , certains observateurs faisaient remarquer , il y a quelques années , que les membres du Congrès n' avaient pas les compétences nécessaires et prenaient des initiatives qui n' étaient pas de leur ressort .
385: C' est au cours des années 1990 que cette tendance s' est inversée ;
386: et si , pendant longtemps , l' Administration a fait autorité en la matière , les commissions ont maintenant gagné en respectabilité , illustrant le retour du Congrès sur le devant de la scène .
387: Aujourd'hui , en politique étrangère comme dans d' autres domaines , les commissions sont au coeur du Congrès , là où , autour d' un groupe restreint d' experts , toutes les options sont discutées et les décisions prises .
388: Placées au centre de la vie politique des Etats-Unis , elles se dégagent remarquablement des querelles partisanes qui divisent le Capitole et s' imposent comme un forum d' idées diverses .
389: En instaurant un dialogue bipartisan , elles apportent un nouveau souffle au pouvoir législatif , qui en sort renforcé .
390: Par contraste , les deux Chambres sont restées des assemblées inefficaces , déchirées par les luttes de partis , et souvent incapables d' apporter des solutions concrètes .
391: L' évolution des commissions
392: La création des commissions remonte aux origines de la démocratie aux Etats-Unis ;
393: mais leur composition , leur fonctionnement et leur importance ont considérablement évolué .
394: A l' origine , le nombre de parlementaires était limité ;
395: leur implication dans les commissions n' était que temporaire et variait selon les besoins et les circonstances .
396: Instruments du pouvoir législatif , les commissions servaient alors à renforcer l' autorité des membres du Congrès .
397: La Chambre des représentants , qui compte un nombre plus important de parlementaires , a développé des commissions plus tôt que le Sénat , si bien qu' en 1810 , dix commissions aidaient déjà les représentants dans leur travail .
398: En 1816 , le Sénat a rattrapé son retard , éliminant les commissions ad hoc au profit de structures permanentes .
399: Dès lors , l' importance des commissions s' est accrue , et elles se sont peu à peu imposées comme une composante indispensable du Congrès .
400: Pendant tout le XIXe siècle , leur nombre était relativement important , puis il s' est réduit de façon sensible pour en faciliter le fonctionnement .
401: Aujourd'hui , la Chambre compte 19 commissions , et le Sénat ,
402: 17 . Celles -ci sont directement rattachées à d' autres commissions , avec lesquelles elles partagent une partie des membres , qui divisent les tâches pour mieux traiter les différentes questions .
403: Les commissions dévolues à la politique étrangère sont , dans les deux Chambres , celles des Forces armées , des Affaires internationales et , accessoirement , pour le vote du budget , celle des Finances .
404: Tous les experts ès relations internationales s' y trouvent réunis , assurent le relais avec les médias , rédigent des rapports d' information , s' entourent de spécialistes indépendants et auditionnent les autorités militaires et les représentants de l' Exécutif sur ces questions .
405: Plus encore au Sénat qu' à la Chambre , ces commissions sont devenues un examen de passage obligatoire pour toutes les initiatives de la Maison-Blanche .
406: La présidence de chaque commission est assurée par le doyen du parti majoritaire , qui s' affirme comme le personnage principal , usant de son influence pour contester les initiatives présidentielles et orienter les débats de sa commission .
407: Si les autres membres , par la pertinence de leurs travaux , leur expertise sur certaines questions ou les nouvelles idées qu' ils apportent , généralement par le biais des sous-commissions , peuvent s' imposer , c' est en général le président qui occupe le devant de la scène et devient l' intermédiaire incontournable entre la commission et le reste de la vie parlementaire .
408: Le parti minoritaire dispose d' un représentant qui se fait l' écho des membres de son parti .
409: Dans un système partisan , ce représentant ne peut qu' exprimer des opinions contraires à celles du président , qui ne sont généralement pas retenues .
410: Cependant , avec l' accroissement du nombre d' initiatives bipartisanes , il est devenu , en quelque sorte , le bras droit du président et soutient parfois les initiatives de l' Exécutif en leur apportant l' approbation de la minorité .
411: Ce personnage a donc pris , au fil des années , un rôle de plus en plus important dans le fonctionnement des commissions .
412: Les limites des commissions
413: Parmi les principaux problèmes posés par le système des commissions , l' âge des présidents est sans doute l' un des plus sensibles .
414: En effet , la présidence de chaque commission est assurée par le doyen de la majorité parlementaire à la Chambre ( nous verrons dans quelle mesure ce système a évolué à la Chambre des représentants ) , ce qui a l' avantage de placer des experts aguerris à la tête des commissions mais le désagrément de les y installer pour de nombreuses années .
415: L' autre conséquence de ce système est l' inéquité de la répartition géographique des présidents de commission .
416: Si la Chambre est à peu près équitable , le Sénat offre quant à lui deux postes pour chaque Etat , ce qui n' est représentatif ni de la population , ni de l' importance de l' Etat .
417: Jusqu'à 2001 , les deux sénateurs du Delaware , un Etat pourtant minuscule , étaient William Roth et Joseph Biden .
418: L' un était président de la commission des Finances ( aujourd'hui à la retraite ) , l' autre le chef de file des Démocrates à la commission des Affaires internationales ( dont il fut président de juin 2001 à janvier 2003 ) .
419: L' âge des présidents des commissions peut également s' avérer néfaste pour le parti dont ils sont issus .
420: En effet , après un grand nombre d' années passées à la tête de commissions où ils ont réussi à s' imposer comme de véritables piliers du Congrès , les présidents des commissions les plus importantes négligent volontiers le jeu des partis .
421: Cela a pour effet de réduire encore davantage l' importance des querelles partisanes , mais aussi de créer des pôles autour de ces hommes d' influence , qui imposent leurs idées sans que leur parti puisse les contrôler .
422: C' est ainsi que des initiatives , en totale contradiction avec les recommandations des partis , sont parfois prises au sein des commissions sous l' impulsion de leur président , ce qui peut bouleverser les orientations du Congrès .
423: Le débat politique aux Etats-Unis s' en trouve plus difficilement prévisible .
424: Le système actuel du Congrès met en avant à la fois certaines personnalités et les commissions concernées par les débats de politique étrangère .
425: La représentativité des parlementaires fait leur force , mais elle ne profite malheureusement pas toujours aux intérêts de la nation .
426: En effet , les revendications de l' électorat ne sont pas du tout les mêmes selon les Etats et les membres du Congrès , en reprenant ces opinions de façon trop systématique , s' éloignent souvent considérablement des considérations nationales , les abandonnant à l' Administration .
427: Selon Stanley Sloan , Mary Locke et Casimir Yost , plutôt que de juger le président sur ses ambitions de fédérer l' ensemble des idées exprimées par le pays , les parlementaires devraient s' efforcer , eux aussi , de respecter des standards sur les questions extérieures , afin de ne pas prendre de directions trop opposées .
428: En effet , une trop grande disparité des opinions au Congrès diminue l' influence du pouvoir législatif en matière de politique étrangère et réduit le crédit des élus , experts en relations internationales mais insensibles aux vrais enjeux et qui se contentent trop souvent de ne répondre qu' aux considérations purement électorales .
429: Sans pour autant s' éloigner de leurs fiefs électoraux , les membres du Congrès devraient donc prêter plus d' attention aux affaires étrangères avant de juger les options choisies par la Maison-Blanche .
430: Vers un Congrès bipartisan ?
431: La généralisation des initiatives bipartisanes a eu comme effet immédiat de bloquer les initiatives présidentielles plus facilement encore que par le passé .
432: Le poids des résolutions proposées à la fois par des Républicains et des Démocrates leur permet de bénéficier d' une certaine crédibilité et de s' imposer .
433: Cependant , avec des groupes d' observation composés de parlementaires de différentes tendances et faisant appel à des experts indépendants , les commissions peuvent proposer des solutions en toute objectivité , qui ne heurtent pas systématiquement la Maison-Blanche , mais viennent au contraire apporter des éclaircissements ou des critiques constructives sur les options de l' Administration .
434: En outre , il est manifeste que les plus grands succès du Congrès au cours de ces dernières années ont été le fait d' initiatives bipartisanes , qui sont devenues un instrument essentiel du pouvoir législatif .
435: En se rapprochant des ministères , et donc de l' Administration , les opinions exprimées par les initiatives bipartisanes consolident la politique étrangère du pays , en proposant une meilleure communication entre les deux pouvoirs , essentielle pour mieux répondre aux impératifs extérieurs .
436: Il semble ainsi avéré que le rapprochement avec le département d' Etat , le secrétariat à la Défense et le National Security Council , sous forme d' un partenariat entre parlementaires de diverses tendances , sont les conditions par lesquelles le Congrès retrouvera sa crédibilité en matière de politique étrangère .
437: Mais une telle perspective demande des efforts aussi bien de la part du Congrès que de l' Administration .
438: La généralisation des initiatives bipartisanes a pour effet bénéfique de faire évoluer le débat entre le Capitole et la Maison-Blanche vers un plus grand partenariat , qui défend en priorité les intérêts du pays .
439: Il s' agit , pour le président , d' un moyen de s' assurer dans certains cas le support des membres du Congrès , comme ce fut le cas lors de la crise du Kosovo .
440: En effet , malgré la majorité républicaine dans les deux Chambres , le Sénat et la Chambre des représentants ont voté en faveur de l' intervention , laissant de côté les querelles de parti .
441: Cependant , il peut également s' agir d' une arme à double tranchant pour le chef de l' Exécutif , car les résolutions partisanes , du fait de leur autorité et de la représentativité qu' elles assurent aux opinions du Congrès , sont difficilement discutables et doivent être prises en compte pour définir les orientations de la politique étrangère .
442: L' autorité du Congrès , sa crédibilité et son influence sur la Maison-Blanche sont sensiblement renforcées par les initiatives bipartisanes , qui illustrent parfaitement la montée en puissance du pouvoir législatif ainsi que la nécessité de trouver un dialogue entre les deux pouvoirs , en vue de définir une politique étrangère cohérente et représentative de l' opinion publique , comme ce doit aussi être le cas pour les questions de politique intérieure .
443: Bill Clinton a éprouvé quelques difficultés à établir ce dialogue avec ses opposants politiques , et ce , malgré son habileté politique et la présence , lors de son second mandat , d' un Républicain à la tête du Pentagone ( William Cohen ) .
444: Plus encore qu' à une querelle opposant Républicains et Démocrates , les divergences de vues répondent donc davantage à des logiques institutionnelles .
445: III . L' engagement militaire des Etats-Unis après le 11 septembre 2001
446: Fortement critiqué pendant les premiers mois de son mandat pour son manque d' intérêt pour les questions internationales , George W. Bush se retrouve , depuis le 11 septembre 2001 , dans une situation qui semble totalement à l' opposé de ce profil tant décrié .
447: C' est même lui qui se montre favorable aujourd'hui à un renforcement de l' interventionnisme des Etats-Unis dans ce qu' il a appelé la " croisade " antiterroriste , celle -ci s' étant accompagnée d' un certain nombre de réformes et de mesures , toutes acceptées par le Congrès .
448: Il convient de distinguer ici les mesures qui ont été adoptées pour renforcer la sécurité du territoire et les débats concernant l' engagement des Etats-Unis sur des théâtres extérieurs .
449: Dans les deux cas , si l' on en croit les sondages , ces décisions ont été largement soutenues par l' opinion publique et le Congrès s' est montré à la fois bienveillant et incapable de contrer les initiatives de l' Administration .
450: Toutefois , certains parlementaires n' ont pas manqué de rappeler les limites , à la fois dans la durée et dans l' importance , des mesures proposées , affirmant qu' ils ne soutiendraient pas de façon aveugle des réformes en profondeur au nom d' une " présidence impériale " retrouvée .
451: 1 . La sécurité intérieure
452: Les premières mesures qui ont été adoptées après les attentats de New York et de Washington concernaient le renforcement de la sécurité dans les aéroports et le traitement des étrangers sur le territoire .
453: Elles ont marqué le début d' une campagne de plus grande ampleur dont les orientations ne sont pas toutes connues , mais qui ont pour objectif de renforcer la sécurité intérieure .
454: Les débats sur le recrutement d' agents fédéraux chargés d' assurer la sécurité dans les aéroports , tel qu' il a été proposé à la fin du mois d' octobre 2001 , a rapidement divisé Républicains et Démocrates à la Chambre des représentants , chacun profitant de l' occasion pour défendre des valeurs partisanes .
455: Ainsi , ce sont surtout les Républicains , et parmi eux la branche conservatrice , qui se sont montrés les plus hostiles au fait que la " bureaucratie fédérale " ( c' est ainsi qu' ils la nomment ) était appelée à se substituer aux entreprises privées chargées de la sécurité des compagnies aériennes .
456: Ils estimaient que cette proposition accroissait le rôle des pouvoirs publics , comme le souhaitaient les Démocrates , mais reconnaissaient la nécessité de renforcer la sécurité .
457: John Warner ( républicain , Virginie ) a noté à ce propos que cette mesure pourrait être effective pendant trois ans , mais qu' ensuite les compagnies aériennes devraient pouvoir de nouveau faire appel à des agences de sécurité privées .
458: Les Démocrates se sont montrés favorables à cette mesure , tout en déplorant qu' elle s' accompagne de certaines restrictions en matière de droit du travail , puisque les employés n' ont pas le droit de grève et peuvent être licenciés s' ils n' accomplissent pas efficacement leur travail .
459: En accord sur le principe du renforcement de la sécurité aérienne , Démocrates et Républicains se sont opposés sur la façon de le mettre en place , les uns voulant faire appel à des agents fédéraux , les autres demandant un accroissement de l' aide aux compagnies privées .
460: Les propositions de l' Administration en matière de sécurité dans les aéroports ont ainsi eu pour effet de diviser les membres du Congrès , et les deux Chambres n' ont pu s' opposer de façon efficace ( car bipartisane ) au pouvoir exécutif , quand bien même elles l' auraient souhaité .
461: En conséquence , nous assistons aujourd'hui à une remontée en puissance du pouvoir fédéral sur les questions intérieures , comparable à ce qui s' était produit entre 1917 et 1980 , avant deux décennies de stagnation .
462: Certains considèrent même que le 11 septembre marque le début d' une nouvelle ère de l' Etat fédéral dont les prérogatives continueront nécessairement de s' accroître dans les prochaines années .
463: Depuis le 11 septembre , les problèmes de sécurité intérieure sont étroitement liés aux questions de politique étrangère .
464: Le 26 novembre 2001 , à l' occasion d' une réception donnée à la Maison-Blanche en l' honneur de la libération des deux Américaines détenues à Kaboul , George W. Bush a souligné la volonté des Etats-Unis de lutter contre le terrorisme dans le monde entier : " L' Afghanistan ne constitue que le début . Quiconque abrite un terroriste est lui-même un terroriste . Quiconque aide financièrement un terroriste est un terroriste . Quiconque met au point des armes de destruction massive destinées à terroriser des Etats devra rendre des comptes . "
465: Le 3 octobre 2001 , dans le cadre de la coordination des moyens de lutte antiterroriste , le sénateur républicain du Maine , Olympia Snowe , a proposé un texte relatif à la participation de toutes les ambassades des Etats-Unis à la détection des groupes terroristes , par le biais de commissions spécialisées dans chaque ambassade .
466: Jesse Helmes ( républicain , Caroline-du-Nord ) , ancien président de la commission des Affaires internationales du Sénat , a apporté son soutien à ce texte une semaine plus tard et il est à présent placé sous l' autorité de ladite commission , présidée par Joseph Biden .
467: Par ailleurs , un projet de loi sur les visas accordés aux étudiants étrangers a été proposé au Sénat , par des élus tant républicains que démocrates , et apparaît à bien des égards comme moins restrictif que ne le craignaient certains responsables universitaires .
468: Il prévoit entre autres choses que :
469: les universités accueillant des étudiants étrangers fournissent des renseignements apportant la preuve que ces étudiants suivent réellement les cours ;
470: les universités communiquent l' adresse des étudiants et toute information concernant leur scolarité .
471: A contrario , ce texte n' est ni restrictif en ce qui concerne le nombre d' étudiants pouvant obtenir des visas , ni sélectif en ce qui concerne leur origine .
472: Sur ces deux points , les parlementaires ont été sensibles au fait que les étudiants étrangers constituent un atout pour les universités du pays , répondant ainsi aux attentes des universitaires .
473: En effet , selon un rapport communiqué le 13 novembre 2001 par l' Institute of International Education , 547 867 étudiants étrangers étaient inscrits dans une université aux Etats-Unis en 2000 - 2001 , 13 % d' entre eux étant issus de pays à forte majorité musulmane .
474: 2 . Les campagnes sur les théâtres extérieurs
475: Depuis le 11 septembre 2001 , fidèle à sa déclaration de " guerre " contre le terrorisme , George W. Bush a entrepris de renforcer les pouvoirs présidentiels en matière de politique étrangère , à un niveau nettement plus important que ses prédécesseurs , y compris Franklin D. Roosevelt .
476: Ces pouvoirs renforcés se justifient en temps de guerre , comme le rappelait récemment Ari Fleischer .
477: Ainsi , les prérogatives du Congrès , élargies sous les trois Administrations précédentes pour des raisons liées à l' environnement international et au cadre institutionnel , semblent s' être fortement affaiblies .
478: Assumant pleinement son rôle de chef des armées , le président s' est lancé dans une guerre contre un adversaire à sa mesure ( Al-Qaida ) , mais aussi dans une bataille politique contre ceux qui n' hésitent pas , au nom de Constitution , à contester son autorité .
479: Concernant les questions de surveillance et de renseignement , par exemple , l' Administration Bush a été critiquée par les parlementaires , qui refusent de laisser l' Exécutif prendre des décisions sans concertation de façon systématique , comme l' Attorney General John Ashcroft le demandait , renforçant ainsi le pouvoir de la Maison-Blanche .
480: Paradoxalement , c' est dans l' aile conservatrice des Républicains que les critiques de la conduite des opérations en Afghanistan se sont fait entendre , notamment en ce qui concerne les buts et le financement de la campagne militaire .
481: Ce sont d' ailleurs souvent les Républicains qui manifestent leur désaccord quand des pouvoirs de guerre trop importants sont octroyés au chef de l' Exécutif .
482: A l' inverse , les Démocrates ont largement soutenu la riposte armée contre le régime des Talibans , soupçonné d' apporter une aide importante à Al-Qaida .
483: De même , les Démocrates ont accueilli favorablement les initiatives diplomatiques de l' Administration .
484: De ce fait , la majorité sénatoriale voit d' un bon oeil le rapprochement avec Moscou ( sur lequel les Républicains se montrent beaucoup plus méfiants ) , le dialogue avec Pékin et la concertation avec les alliés , sans oublier les partenaires du monde arabo-musulman .
485: Ce renversement des rôles traduit le profond consensus sur la nécessité de mener une lutte sur tous les fronts contre Al-Qaida .
486: Les parlementaires du camp démocrate n' ont pas manqué de rappeler que le président Bush , plutôt que de précipiter la riposte contre des installations terroristes connues , a pu rassembler une coalition internationale jetant les bases de la lutte antiterroriste , grâce notamment aux initiatives de Colin Powell .
487: Les craintes de voir les Etats-Unis se lancer dans des opérations à la hâte et sans concertation se sont révélées infondées dès lors que la Maison-Blanche s' est engagée dans la lutte contre Al-Qaida en faisant appel aux services de renseignement de plusieurs Etats .
488: Walter Russell Mead remarque sur ce point que le multilatéralisme proposé par l' Administration Bush dans la riposte militaire en Afghanistan et la lutte antiterroriste ne peut en aucun cas être assimilé au wilsonisme .
489: Il s' agit plutôt d' un unilatéralisme suivi par des Etats qui partagent les mêmes convictions ( Europe ) , qui n' ont pas de raison de critiquer l' attitude des Etats-Unis , ou qui pourraient en tirer profit ( Russie et Chine ) .
490: Il est vrai qu' après le 11 septembre , la communauté internationale a approuvé de façon générale les initiatives de Washington , mais sans être invitée pour autant à en discuter la forme .
491: Au fur et à mesure que la campagne militaire en Afghanistan a progressé , certains intellectuels démocrates ont cependant dénoncé l' influence des " faucons " qui , au sein de l' Administration , défendent les opérations militaires , particulièrement au Congrès , et le rôle joué par les lobbies économiques dans la définition de la politique étrangère .
492: Même en temps de guerre , selon eux , les intérêts prennent le dessus sur le sentiment patriotique originel et l' argent continue d' influencer les décisions politiques .
493: Par ailleurs , certains Démocrates , relayés en cela par la presse , n' ont pas manqué de faire un rapprochement entre la riposte en Afghanistan et la gestion de la crise du Kosovo par le président Clinton , en 1999 .
494: A cette époque , le gouverneur George W. Bush reprochait à l' Administration de ne pas utiliser tous les moyens possibles pour atteindre les objectifs fixés .
495: Or , Ivo Daalder et Michael O'Hanlon remarquent que le nombre de sorties aériennes en Afghanistan est de très loin inférieur à celui constaté au Kosovo .
496: De même , les objectifs politiques n' ont pas été clairement définis , en dehors de ce que l' Administration a appelé la " croisade " antiterroriste .
497: Dans une lettre adressée au président Bush , le 6 décembre 2001 , le représentant Tammy Baldwin ( démocrate , Wisconsin ) estimait qu' il se sentait concerné , avec ses confrères , " par ceux qui cherchaient , dans l' Administration et au Congrès , à étendre la campagne militaire au-delà de l' Afghanistan " , considérant que " sans une présentation claire et sans équivoque de la responsabilité d' autres nations dans les attentats du 11 septembre , il était inapproprié d' étendre le conflit " .
498: C' est pourquoi le soutien apporté à Bush par les Démocrates a commencé à diminuer quand l' Administration a décidé d' aller au-delà de la campagne antiterroriste en visant le régime irakien .
499: A l' inverse , les Républicains les plus conservateurs ont revu leur jugement critique , considérant que la question irakienne , en suspens depuis plus de 10 ans , pouvait enfin trouver une issue .
500: IV . Le cas irakien
501: Après une restructuration en profondeur des mesures de sécurité intérieure , l' Administration s' est lancée dans une campagne militaire en Afghanistan et a annoncé très rapidement , après la fin des opérations en Asie centrale , que la cible suivante de ce que le président Bush a appelé la " lutte sans fin " serait l' Irak .
502: L' objectif , qui ralliait un large consensus dans les camps tant républicain que démocrate , consistait à renverser le régime de Saddam Hussein , même si d' autres arguments ont été mis en avant pour justifier un déploiement militaire .
503: Malgré une vive opposition internationale , la guerre a été déclenchée en mars 2003 , sans l' aval des Nations unies , les Etats-Unis assumant la quasi-intégralité des opérations militaires , soutenus par le Royaume-Uni et l' Australie sur le terrain et par un total de 48 Etats favorables à la cause défendue par la Maison-Blanche .
504: Au Congrès , la perspective d' une campagne militaire à grande échelle a définitivement tourné la page de l' " union sacrée " , perceptible après le 11 septembre 2001 , et qui avait permis à la campagne afghane de se dérouler sans encombre .
505: Une fois terminée cette période d' absence totale de débat politique , les parlementaires ont repris leur rôle de contrepouvoir de l' Exécutif , annonçant clairement qu' aucune campagne militaire en Irak ne pouvait être décidée sans leur accord .
506: Ainsi , avant de convaincre la communauté internationale , l' effort de l' Administration Bush a consisté à plaider le bien-fondé d' un déploiement militaire devant les membres du Congrès .
507: 1 . Les arguments en faveur d' une intervention militaire
508: Dans les semaines qui ont suivi les attentats du 11 septembre , tandis que se préparait l' offensive militaire contre le régime des Talibans , l' Irak a été désigné comme la prochaine cible possible de la " croisade " contre le terrorisme lancée par George W. Bush .
509: Le 20 septembre , celui -ci recevait une lettre ouverte signée par plusieurs dizaines d' officiels , mettant l' accent sur la nécessité de " châtier " Saddam Hussein afin d' éradiquer les sources du terrorisme international .
510: Les autorités se sont depuis lors efforcées de rassembler des éléments permettant d' établir un lien entre le régime de Saddam Hussein et le terrorisme .
511: Ces éléments sont :
512: la tentative d' assassinat de l' ancien président Bush , en 1993 , au Koweït , dont l' Irak a été rendu responsable par la CIA et le FBI ;
513: l' attentat du World Trade Center en 1993 , dont plusieurs pistes permettent de remonter jusqu'à la " filière " irakienne .
514: Deux des cerveaux de l' opération , Yassin et Ramzi Youssef , étaient détenteurs de passeports irakiens et semblaient liés à Bagdad ;
515: les liens entre Mohammed Atta , l' un des terroristes du 11 septembre , et les autorités irakiennes , comme l' ont confirmé les rencontres successives entre le terroriste et des responsables des services secrets irakiens , notamment Al Ani , à Prague ( c' est à la suite de leur dernier entretien que le compte bancaire d' Atta aurait été crédité de 100 000 dollars , en provenance des Emirats arabes unis ) ;
516: l' aide financière apportée par le gouvernement irakien aux familles des " kamikazes " palestiniens , considérés à Washington comme appartenant à des groupes terroristes ;
517: le lien possible , bien que non prouvé , entre les attaques à l' anthrax aux Etats-Unis et les installations biologiques en Irak , notamment Salman Pak au sud de Bagdad ( on sait cependant que la piste interne est privilégiée dans l' affaire de l' anthrax , mais tout lien avec l' Irak n' a pas été écarté ) .
518: Ces éléments se sont renforcés dans la mesure où Bagdad refusait , depuis 1998 , d' ouvrir son territoire aux inspecteurs des Nations unies .
519: Par ailleurs , les soupçons selon lesquels le régime cherchait à se procurer des armes de destruction massive constituaient un argument avancé par les conservateurs aux Etats-Unis et repris par les membres de l' Administration Bush .
520: Depuis quelques années , les thèses des conservateurs sur la capacité de l' Irak à reconstituer un arsenal d' armes de destruction massive ont été alimentées par plusieurs ouvrages " grand public " , dont ceux de Khidhir Hamza , chef des services de recherches nucléaires irakiennes jusqu'en 1995 , de Richard Butler , ancien chef de la Commission spéciale des Nations unies ( UNSCOM ) aujourd'hui au Council on Foreign Relations à New York , et de Scott Ritter , ancien inspecteur de l' UNSCOM .
521: Ce dernier , opposé toutefois à une campagne militaire en Irak , proposait une description minutieuse de l' arsenal irakien d' armes de destruction massive et de missiles balistiques .
522: Enfin , l' abondante littérature sur le terrorisme et la prolifération des armes de destruction massive , mise en avant depuis le 11 septembre , et surtout les attaques à l' anthrax , placèrent généralement l' Irak au centre de la menace .
523: Plus récemment , trois personnalités importantes dans l' entourage du président Bush , Donald Rumsfeld , Dick Cheney et Condoleezza Rice , n' ont pas manqué d' accuser l' Iran , l' Irak et la Syrie d' être à l' origine des multiples attentats commis en Israël , invoquant le lien présumé entre le régime de Bagdad et les réseaux du terrorisme international .
524: L' ensemble de ces considérations ont fait de l' Irak la cible suivante de la campagne antiterroriste menée par l' Administration .
525: Enfin , en publiant un rapport accablant sur la volonté de Bagdad de reconstituer un arsenal d' armes de destruction massive et de l' utiliser dans un avenir proche , les autorités britanniques ont apporté leur contribution aux accusations , revenant largement sur la mauvaise volonté affichée par Saddam Hussein depuis plus de 10 ans .
526: La plupart des experts européens considérèrent rapidement que les frappes des Etats-Unis contre l' Irak étaient inévitables , à moins que le régime ne cède et que Saddam Hussein ne quitte le pouvoir , ce qui semblait évidemment peu envisageable .
527: L' un des premiers efforts consista à s' assurer le soutien de l' opinion publique .
528: Selon un sondage publié par le Washington Post fin 2002 , 64 % des personnes interrogées étaient ainsi favorables à des frappes contre l' Irak .
529: Par ailleurs , plusieurs membres de l' Administration - dont le secrétaire adjoint à la Défense , Paul Wolfowitz - , plaidèrent en faveur d' une extension des opérations militaires en Irak .
530: Une intervention sur le sol irakien nécessitait des moyens nettement plus importants que la guerre en Afghanistan , et les alliés de Washington , tant dans la région qu' ailleurs , semblaient peu réceptifs à la perspective de reconstituer la coalition de 1991 .
531: En effet , les alliés ne partageaient plus , pour la grande majorité d' entre eux , la position des Etats-Unis vis-à-vis des sanctions imposées à l' Irak depuis 10 ans .
532: Ils furent relayés en cela par certains think tanks et centres d' expertise américains .
533: Par ailleurs , une guerre contre l' Irak pouvait se faire selon trois scénarios .
534: Le premier consistait à renouveler l' expérience de 1991 ( sans doute avec une coalition amoindrie ) ;
535: il nécessitait des mois de préparation et posait de réels problèmes de politique intérieure aux Etats-Unis .
536: Le deuxième scénario consistait à répéter l' expérience de décembre 1998 , à savoir des frappes contre des cibles précises en Irak .
537: Une telle option était plus facile à mettre en oeuvre et ne posait pas trop de problèmes en termes d' aval du Congrès .
538: Mais les résultats n' avaient pas été très concluants en 1998 et n' avaient pas permis , en tout état de cause , d' atteindre les objectifs affichés , à savoir le renversement du régime de Saddam Hussein .
539: Le troisième scénario consistait à envoyer sur place plusieurs commandos de services spéciaux chargés de liquider le dictateur irakien .
540: Là encore , il n' y avait guère de difficulté pour obtenir l' accord du Congrès , mais le succès d' une telle mission était plus que discutable , notamment au vu des résultats médiocres obtenus par les forces spéciales en Somalie ou , plus récemment , en Afghanistan .
541: De fait , la première option semblait être la seule permettant de poursuivre l' effort de 1991 , en poussant cette fois les armées jusqu'à Bagdad pour liquider Saddam Hussein , comme le souhaitait l' Administration .
542: Ce fut l' option retenue .
543: Mais l' objectif principal était d' assurer un succès rapide et à moindre coût , à la fois pour profiter du large soutien de l' opinion publique aux Etats-Unis et pour éviter de laisser le temps au régime irakien de s' organiser .
544: Kenneth Pollack , ancien directeur des affaires du Golfe au National Security Council , remarquait à ce propos que , les capacités de résistance de l' Irak étant nettement supérieures à celles des Talibans , la préparation de l' intervention ne devait pas prendre de retard , même s' il se montrait par ailleurs sceptique quant à sa pertinence et aux résultats pouvant être obtenus .
545: Les limites d' une telle option étaient avant tout d' ordre externe .
546: En effet , il fut très difficile , et même impossible , de reconstituer une coalition du type de celle de 1990 .
547: La tournée de Dick Cheney dans les pays arabes , en mars 2002 , répondait nettement à l' objectif de rassembler un tel soutien , mais celui -ci était difficilement justifiable .
548: politiquement proches de l' Administration , ils sont favorables aux mesures de sécurité adoptées depuis les attentats de New York et de Washington , mais aussi particulièrement réactifs quand il s' agit de défendre leurs prérogatives constitutionnelles .
549: Depuis , les voisins de l' Irak se montraient sceptiques quant à la poursuite des sanctions , qui avaient été plus nuisibles à la population qu' au régime et avaient refusé de soutenir les frappes de décembre 1998 .
550: Par ailleurs , si les alliés des Etats-Unis souhaitaient condamner et combattre l' Irak il y a 10 ans , ils n' avaient jamais affiché la volonté de détruire le régime de Saddam Hussein .
551: Ainsi , la Turquie , l' un des plus fidèles soutiens à Washington dans la région , voyait d' un mauvais oeil la dislocation de l' Etat irakien , qui pouvait entraîner la création d' un Kurdistan indépendant .
552: De façon générale , les alliés de 1991 dans la région n' acceptaient de participer à une campagne militaire que si celle -ci était mandatée par l' ONU .
553: Au Conseil de sécurité , le consensus a éclaté après le renvoi des inspecteurs de l' UNSCOM par Bagdad , en 1998 , et la décision conjointe des Etats-Unis et du Royaume-Uni de frapper l' Irak en représailles .
554: De fait , les objectifs de Washington ne furent pas compris , et encore moins partagés , par les autres membres du Conseil de sécurité .
555: Comme le demandait , en mars 2002 , Philippe Droz Vincent , " s' agit -il de faire appliquer les résolutions de l' ONU , de renverser Saddam Hussein ou de mettre sous tutelle un Irak potentiellement hégémonique dans la région ? "
556: Les mêmes critiques se sont fait entendre de la part des alliés européens des Etats-Unis , qui estimèrent pour certains d' entre eux , malgré leurs divisions , que la campagne proposée contre l' Irak ne répondait qu' à une volonté de vengeance de l' Administration Bush et d' hégémonie dans la région .
557: Toutefois , les proches de George W. Bush ont démenti les soupçons selon lesquels la Maison-Blanche accepterait de se plier au calendrier du Conseil de sécurité des Nations unies .
558: Très vite , ils n' écartèrent pas la possibilité de frapper quand ils le jugeraient nécessaire , que ce soit avant ou après la décision de l' ONU concernant les sanctions et les missions d' inspection sur le sol irakien .
559: " Le président a dit que nous ne pouvions attendre d' avoir la preuve que quelqu' un utilise des armes de destruction massive contre les Etats-Unis pour faire quelque chose afin de l' en empêcher " , déclarait ainsi Paul Wolfowitz dans une interview sur CNN , le 21 mars 2002 .
560: Dès lors , et malgré les efforts diplomatiques en vue de convaincre Paris , Moscou et Pékin , Washington annonçait pouvoir se passer d' un mandat de l' ONU .
561: 2 . Les contraintes internes
562: Maintes fois critiquée depuis quelques mois pour son unilatéralisme , notamment en Europe , l' Administration Bush a envisagé d' intervenir sans l' appui de ses alliés - ou de la majorité d' entre eux - , prenant exemple sur l' opération menée conjointement avec les Britanniques en 1998 contre l' Irak et sur la campagne en Afghanistan .
563: La puissance logistique , organisationnelle et destructrice de l' armée des Etats-Unis le leur permet en effet .
564: Au cours des 10 dernières années , l' évolution du matériel leur a permis de fournir des résultats plus rapides et plus significatifs .
565: L' opération " Tempête du désert " de 1991 avait exigé 110 000 sorties aériennes , contre seulement 6 500 en Afghanistan , le différentiel , même notable , des capacités de résistance des adversaires ne pouvant expliquer à lui seul un tel décalage .
566: De même , la campagne du Kosovo a été faite exclusivement depuis les airs , grâce notamment à un matériel hautement sophistiqué .
567: Cette évolution sensible de son arsenal militaire offre à Washington un avantage nettement plus décisif qu' en 1991 , d' autant que les forces armées irakiennes n' ont pu , en seulement 10 ans , reconstituer un arsenal conséquent , et ne disposaient , à la veille du conflit , que de capacités assez limitées .
568: Dès lors , une campagne rapide était envisageable et Washington pouvait faire l' économie d' une coalition à la fois difficile à organiser et fort contraignante à bien des égards , en comparaison de son faible apport .
569: De nombreux experts aux Etats-Unis , considérant qu' une coalition briderait les capacités militaires du pays , trouvèrent là des arguments pour justifier une intervention unilatérale .
570: L' exemple de l' Afghanistan joua un rôle important dans le soutien apporté à une attaque de grande ampleur contre l' Irak .
571: En effet , alors que les résultats obtenus dans ce pays étaient présentés comme significatifs par l' Administration ( à savoir un régime stable et une prospérité plus notable qu' au temps des Talibans ) , celle -ci plaida rapidement en faveur d' une intervention contre Bagdad , avec comme argument qu' une telle campagne apporterait la stabilité dans la région .
572: A l' inverse , comme l' expliquait Thomas Friedman , si le nouveau régime afghan ne parvenait pas à s' imposer sur l' ensemble du territoire et à faire l' unité du pays , il serait d' autant plus difficile à Washington de " proposer " une poursuite de la campagne contre l' Irak .
573: Invité à l' Institut français des relations internationales , le 28 mars 2002 , Steve Szabo , de la Johns Hopkins University ( Washington , D.C. ) , a noté que la Maison-Blanche ne prévoyait pas une intervention aussi longue et importante que celle de 1991 , notamment du fait de l' affaiblissement des forces irakiennes ( n' oublions pas qu' en 1990 , l' Administration Bush qualifiait l' armée de Saddam Hussein de " quatrième armée au monde " ) .
574: Il s' agissait donc d' une quick war , c' est-à-dire d' une intervention rapide engageant moins de forces .
575: S' il convenait , comme Steve Szabo , de rester mesuré quant à ces perspectives , force est de constater que ces arguments répondaient également à la volonté de ne pas se présenter devant le Congrès pour déclencher des hostilités , en considérant que celles -ci n' engageraient que des moyens relativement limités et ne dépasseraient pas 60 jours .
576: Mais , à prendre de tels risques , l' Administration s' exposait , en cas de résultats peu probants , à des critiques qu' il lui aurait fallu assumer seule , car les parlementaires n' auraient pas manqué l' occasion de rappeler qu' ils n' avaient pas été consultés .
577: C' est en effet au niveau de la politique intérieure que les contraintes les plus vives , mais aussi les plus neutralisantes , se sont manifestées .
578: Comme nous l' avons vu , le Congrès a le pouvoir de limiter , voire d' interdire , des opérations militaires extérieures .
579: En 1990 , le régime de Saddam Hussein s' était rendu coupable de l' invasion du Koweït et il avait été unanimement condamné par les autres Etats de la région .
580: Déplorant l' absence de bonne volonté de la part de ses membres , Paul Reynolds notait que " le Congrès avait refusé d' être contraint d' étendre les pouvoirs des agences d' investigation , comme John Ashcroft l' avait demandé . Les parlementaires ont approuvé les mesures d' urgence , comme celle étendant le droit de surveillance d' un téléphone à tous ceux appartenant à la même personne . Ils se sont cependant interrogés sur les mesures de fond , comme le droit de garder quelqu' un à vue indéfiniment , bien que le FBI ait déjà adopté de telles méthodes , à travers le service de l' immigration , pour interroger des personnes . Le Congrès était encore une fois aveuglé par la Constitution " .
581: Unie jusqu'alors dans la lutte contre le terrorisme , la classe politique aux Etats-Unis a commencé à se diviser à la suite du discours sur l' état de l' Union du 29 janvier 2002 , dans lequel le président George W. Bush a avancé sa thèse d' un " axe du Mal " , inaugurant ce qu' il convient d' appeler la " phase 2 " de la campagne antiterroriste .
582: Le 11 mars 2002 , à l' occasion de la célébration des six mois des attentats , il annonçait , de façon encore plus nette , que la seconde étape de la guerre antiterroriste avait débuté : " Nous n' enverrons pas de soldats américains sur tous les champs de bataille , mais les Etats-Unis prépareront activement les autres pays à d' éventuelles batailles . "
583: Vivement critiqué à l' étranger , un tel discours a reçu un écho favorable aux Etats-Unis , Pascal Riché Riché estimant que " l' unilatéralisme de l' Administration Bush s' accordait parfaitement avec l' isolationnisme , qui séduit traditionnellement l' électorat républicain " .
584: Prenant la place tenue par George Mitchell en 1990 , le leader du camp démocrate à la Chambre des représentants , Richard Gephardt , souvent cité comme candidat potentiel aux primaires démocrates de 2004 , a exposé la " réponse " officielle de son parti au discours sur l' état de l' Union .
585: Mettant l' accent sur la nécessité de rester unis dans la lutte contre le terrorisme , il a rappelé que les Démocrates ne soutiendraient pas de façon aveugle toutes les initiatives de l' Administration , notamment dans le domaine des réformes sociales , cherchant ainsi d' autres terrains que la sécurité extérieure pour affirmer leurs différences .
586: Thomas Daschle , leader de la majorité démocrate au Sénat , a lui aussi rappelé le besoin d' unité nationale , sans omettre cependant les points de divergence .
587: Ainsi , comme l' expliquait Eric Lesser , tous deux " se sont livrés à l' exercice impossible consistant à mettre de côté l' esprit partisan en étant à 100 % avec le président dans la guerre contre le terrorisme et à tenter , dans le même temps , des critiques sur sa politique économique et sociale " .
588: Côté républicain , Trent Lott , leader du GOP au Sénat , et Dennis Hastert , leader de la majorité à la Chambre , ont tous deux rappelé que les électeurs s' attendaient à une coopération parfaite entre les deux partis au Congrès , réduisant indiscutablement la marge de manoeuvre des Démocrates .
589: Par ailleurs , si le principe de l' engagement militaire a été discuté depuis le 11 septembre , la perspective d' une intervention en Irak a fait apparaître de véritables fractures au sein du Congrès .
590: Ce soutien massif et sans équivoque est à mettre en parallèle avec la résolution H.J. RES .
591: 27 , proposée par la Chambre le 6 mars 2001 , et dans laquelle Ronald Paul ( républicain , Texas ) , John Doolittle Doolittle ( républicain , Californie ) , Pete Stark ( démocrate , Californie ) , Roscoe Bartlett ( républicain , Maryland ) , Virgil Goode ( démocrate , Virginie ) , Barbara Lee Lee ( démocrate , Californie ) et Barbara Cubin ( républicain , Wyoming ) rappelaient le rôle du Congrès dans le déclenchement des conflits .
592: Un an plus tard , seul Pete Stark se montrait encore sceptique quant aux propositions de l' Administration Bush , mais il est resté fort isolé à la Chambre .
593: C' est donc une fois de plus le Sénat qui s' est montré le plus actif dans ses réactions aux projets de guerre de l' Administration .
594: Dès le 29 janvier 2002 , Joseph Biden ( démocrate , Delaware ) , alors président de la commission des Affaires étrangères , calmait ses collègues en précisant que les propositions de l' Exécutif restaient vagues et qu' il fallait attendre un réel plan budgétaire pour en discuter .
595: Dans les semaines qui ont suivi , plusieurs élus se sont exprimés pour rappeler que le Congrès pouvait seul décider d' envoyer des troupes sur des théâtres extérieurs .
596: Le 11 février , Russel Feingold ( démocrate , Wisconsin ) écrivait dans le Washington Times que " le président devait également respecter les termes de la résolution sur les pouvoirs de guerre " .
597: En effet , " en vertu de notre Constitution et de la résolution sur les pouvoirs de guerre , le président et le Congrès doivent d' abord se mettre d' accord sur une telle extension de nos engagements militaires " .
598: Le sénateur n' a pas hésité à rappeler que la répartition des pouvoirs avait été souhaitée dès les origines de la démocratie aux Etats-Unis , et qu' il serait par conséquent dommageable de la remettre en question ( les arguments étaient sensiblement proches de ceux énoncés en 1990 ) :
599: " En divisant le pouvoir de faire la guerre , les rédacteurs de la Constitution ont signifié que l' unité nationale était essentielle à tout effort de guerre , et que cette unité pouvait se trouver renforcée en répartissant l' autorité entre les deux pouvoirs démocratiques du gouvernement . Cette division du pouvoir de déclarer la guerre nous force à rechercher un consensus national avant de mettre des Américains en danger . "
600: Le sénateur Patrick Leahy ( démocrate , Vermont ) , qui présidait la sous-commission des Opérations à l' étranger au sein de la commission des Attributions budgétaires , a poussé plus loin cette idée dans le domaine budgétaire .
601: Il affirma qu' il appartenait aux parlementaires de chercher à concentrer les efforts sur les " zones grises " , afin d' éviter les déséquilibres , offrant une lecture totalement opposée à celle de l' Administration Bush .
602: Ainsi , selon lui , " le Congrès , qui tient les cordons de la bourse , devrait s' assurer qu' une part de l' augmentation budgétaire proposée est consacrée à la lutte contre la pauvreté " .
603: Mais c' est surtout depuis le mois de mars 2002 que les oppositions les plus vives à la perspective d' une intervention en Irak se font entendre .
604: Le sénateur Robert Byrd ( démocrate , Virginie occidentale ) a mis en avant les prérogatives des parlementaires en temps de guerre , notamment celle consistant à exiger que le chef de l' Exécutif vienne expliquer sa stratégie au Capitole .
605: Selon lui , " le Congrès a non seulement le droit , mais aussi le devoir d' examiner d' un oeil critique la politique du président . Demander des explications , ce n' est pas accuser ou condamner . Demander des explications , c' est rechercher la vérité " .
606: Par ailleurs , Bob Stump , président de la commission des Forces armées à la Chambre , a mis l' accent sur la nécessité de débloquer les fonds nécessaires pour renforcer le budget de la Défense , lançant ainsi un appel aux Démocrates .
607: Thomas Daschle a repris les mêmes thèmes dans un article publié dans le Washington Post , en mettant l' accent sur le budget nécessaire à une intervention : " Le Congrès a l' obligation constitutionnelle de demander où et comment ces fonds vont être utilisés . "
608: Si les remarques énoncées par les deux sénateurs sortaient du cadre partisan , les réactions qui ont suivi ont été , en revanche , nettement plus politisées , soulignant le besoin d' unité du pays dans une guerre qui n' est pas comme les autres .
609: L' éditorialiste du Washington Post , Charles Krauthammer , a ainsi pu écrire : " La guerre contre l' islam radical est une nécessité . Les guerres nécessaires n' ont pas de stratégie de sortie . Elles doivent être gagnées . "
610: Les prises de position contre une guerre en Irak ont également eu pour effet de diviser le camp démocrate au Sénat , certains considérant , à l' instar de Mitchell en 1990 , que le moment était mal choisi pour s' opposer au président , et plaidant donc en faveur de l' unité nationale .
611: Joseph Lieberman ( démocrate , Connecticut ) , colistier malheureux d' Al Gore lors de l' élection de 2000 , a adopté une position éloignée de ses confrères démocrates , plaidant au contraire , comme il l' avait déjà fait lors de la crise du Golfe en 1990 , pour un soutien aux initiatives présidentielles .
612: Parallèlement aux propositions de frappes contre l' Irak , d' autres voix se sont élevées pour réclamer un règlement du cas irakien devant la justice internationale , prenant exemple sur le cas de Slobodan Milosevic , jugé à La Haye .
613: En accusant Saddam Hussein de crimes contre l' humanité , les autorités américaines renforcèrent la légitimité de l' opposition interne ( comme ce fut le cas en Yougoslavie ) et espérèrent même qu' un règlement se ferait sans recours à la force , ce qui semblait pour le moins peu évident .
614: De façon générale , c' est la doctrine Bush concernant la croisade contre le terrorisme et l' utilisation de la force pour dissuader les adversaires qui fit l' objet de critiques de plus en plus franches .
615: Dans l' entourage du président , les arguments en faveur du renforcement des prérogatives de l' Exécutif n' étaient pas jugées essentielles dans la seule perspective du règlement d' une crise ;
616: elles s' imposaient également dans le bon fonctionnement d' une politique étrangère .
617: Dans un entretien en date du 21 février 1997 , Colin Powell , pourtant considéré comme l' un des modérés de l' Administration , estimait ainsi que " la menace militaire fonctionne uniquement quand les dirigeants américains ont réellement décidé de se préparer à utiliser la force " .
618: Pour le secrétaire d' Etat , il convenait de faire en sorte que les adversaires des Etats-Unis se sentent perpétuellement menacés , et il fallait pour cela concentrer les pouvoirs de guerre entre les mains d' un nombre limité de personnes , ce qui est loin de conforter les prérogatives des membres du Congrès .
619: 3 . Le vote au Congrès
620: Le 19 septembre 2002 , après avoir présenté à l' Assemblée générale des Nations unies sa position sur la situation en Irak , George W. Bush s' est adressé au Congrès pour lui demander un vote l' autorisant à faire usage de la force , afin de " faire appliquer les résolutions susmentionnées du Conseil de sécurité des Nations unies , de défendre les intérêts de sécurité nationale des Etats-Unis contre les menaces émanant de l' Irak , et de restaurer la paix internationale et la sécurité dans la région " .
621: Secondé par Donald Rumsfeld et Colin Powell , le président a justifié la nécessité de ce vote , dans un souci d' unité , pour faire face de façon plus crédible à la " menace que fait planer le régime de Saddam Hussein " .
622: Cette initiative a été saluée par les parlementaires , qui y ont vu une volonté d' ouverture en direction du pouvoir législatif , et une reconnaissance de leurs prérogatives .
623: Plusieurs parlementaires démocrates se sont cependant élevés contre cette proposition de la Maison-Blanche .
624: Constatant un décalage de plus en plus perceptible entre les orientations politiques et l' opinion publique du pays , Dennis Kucinich ( démocrate , Ohio ) , meneur du groupe opposé à la proposition , a souligné que " ( ses ) administrés ( étaient ) choqués de voir la direction que ( prenait ) l' Amérique " .
625: De son côté , Russel Feingold estimait que " l' Administration ( demandait ) la lune sans nous donner d' informations sérieuses " .
626: De même , plusieurs élus démocrates se méfiaient d' un amendement qui donnait au président tout pouvoir pour gérer la sécurité et la paix de la région .
627: Pourtant , la plupart des élus démocrates , à commencer par les dirigeants du Parti , estimaient être capables de travailler de concert avec l' Administration pour mettre au point une résolution sur l' Irak soutenue par le plus grand nombre .
628: L' objectif était d' atteindre rapidement un compromis sur les termes du texte et un vote à la Chambre et au Sénat .
629: Nancy Pelosi ( démocrate , Californie ) espérait que les deux camps pourraient travailler ensemble en ce sens .
630: Mais elle avertit l' Administration qu' elle-même et les autres parlementaires démocrates souhaitaient des réponses concrètes sur le coût d' une offensive en Irak en termes d' opération militaire , d' occupation , d' économie et de guerre totale contre le terrorisme .
631: Le représentant John Spratt ( démocrate , Caroline-du-Sud ) , de la commission des Finances au Congrès , estima ce coût à 93 milliards de dollars , sans compter les opérations de maintien de paix et les efforts de reconstruction qui pourraient suivre .
632: Cependant , le camp démocrate restait divisé entre ceux qui estimaient qu' une campagne était nécessaire et qu' il convenait de soutenir l' Exécutif ( Joseph Lieberman et John Edwards au Sénat ) , et ceux qui préféraient se concentrer sur les dossiers de politique intérieure pour attaquer l' Administration .
633: Ce fut le cas de Thomas Daschle , qui exprima son soutien à l' idée d' une campagne militaire en Irak , ce qui lui laissait le champ libre pour critiquer l' Administration sur d' autres dossiers .
634: Dans une intervention remarquée au Sénat , le 25 septembre 2002 , le leader de la majorité démocrate apporta ainsi son soutien à la campagne militaire , tout en accusant la Maison-Blanche d' utiliser la menace irakienne à des fins électorales .
635: En soutenant l' initiative de l' Exécutif , il se mettait à l' abri de critiques politiciennes , ce qui lui permit de condamner l' instrumentalisation qui , selon lui , était faite de la crise .
636: Ainsi , si les parlementaires furent généralement en accord avec l' Administration sur la nécessité de régler le cas irakien , les critiques reposaient sur l' absence de débat sur les autres points sensibles , la Maison-Blanche étant accusée de faire la distinction entre les Républicains , soucieux des questions de sécurité , et les Démocrates , supposés s' en désintéresser .
637: Le 23 septembre 2002 , le représentant Alcee Hastings ( démocrate , Floride ) introduisit au Congrès un projet de résolution ( H.J. RES . 110 ) autorisant le président à faire usage de la force en Irak .
638: Mais ce texte comprenait un certain nombre de conditions que l' Exécutif devait remplir , et sans lesquelles les parlementaires pouvaient émettre des réserves .
639: Parmi ces conditions figuraient alors :
640: un effort préalable en vue de régler la crise par la voie politique , en obtenant si possible le retour des inspecteurs des Nations unies et le respect des résolutions du Conseil de sécurité ;
641: des éléments de preuve attestant que l' Irak cherchait à se procurer des armes de destruction massive et pouvait menacer le territoire des Etats-Unis ;
642: un plan précis sur l' après-Saddam Hussein , afin de garantir la stabilité dans la région ;
643: des engagements selon lesquels la lutte contre le terrorisme demeurait la priorité en matière de défense ;
644: ce texte rappelait enfin le rôle du Congrès dans le déclenchement des conflits , comme pour informer l' Exécutif qu' une telle décision ne pouvait être prise qu' au Capitole .
645: Barbara Lee , seule membre du Congrès qui vota , après les attentats du 11 septembre , contre une résolution autorisant l' usage de la force contre les terroristes , a reconnu que cette résolution serait probablement adoptée par une grande majorité parlementaire .
646: Ce qui ne l' empêcha pas de proposer sa propre résolution :
647: les Etats-Unis devaient , selon elle , s' atteler à résoudre le problème irakien à travers les Nations unies , grâce à des inspections , des négociations et autres moyens pacifiques .
648: Elle rejoignait en cela les propositions avancées par certains partenaires européens des Etats-Unis , en particulier la France .
649: Enfin , Robert Byrd , qui bénéficiait alors de sa position de président pro-tempore du Sénat ( en l' absence du président , il était chargé d' assurer l' intérim ) , rappela que les engagements de l' Administration n' étaient pas recevables , la preuve que l' Irak posait une réelle menace n' ayant pas été encore apportée .
650: De même , il condamna vivement l' idée selon laquelle les critiques adressées à l' Exécutif étaient un acte d' antipatriotisme .
651: En cela , il resta fidèle à la position qu' il avait affichée tout au long de l' année 2002 .
652: Selon lui , la Maison-Blanche cherchait à obtenir des pouvoirs de guerre dépassant de loin ceux dont elle disposait , ce qui pouvait lui permettre de se lancer dans d' autres opérations futures sans consultation préalable du Congrès .
653: Il se positionna ainsi indiscutablement comme le chef de file de ceux qui se montraient méfiants au Sénat .
654: De leur côté , plusieurs républicains , dont le chef de la majorité à la Chambre des représentants , Dick Armey ( Texas ) , mirent en garde l' Administration contre les dangers d' entraîner le pays dans une guerre en Irak .
655: Mais les parlementaires du GOP devaient apporter leur soutien de façon quasi unanime à la résolution finale , au nom de valeurs d' unité en temps de crise , ralliant derrière eux de nombreux démocrates .
656: C' est finalement le 10 octobre 2002 que les deux Chambres ont autorisé le président Bush à déclencher des opérations militaires contre l' Irak , par 296 voix contre 133 à la Chambre des représentants , et 77 voix contre 23 au Sénat .
657: Le succès de ce vote s' explique par la prise de position des leaders démocrates en faveur de la résolution , notamment Richard Gephardt ( à la Chambre ) qui en était l' auteur ;
658: mais il convient de relativiser ce plébiscite , car plus de la moitié des représentants démocrates votèrent contre .
659: Au vu des éléments évoqués plus haut , ce vote n' était pas une surprise , et , s' il est venu conforter l' Administration dans ses positions à l' égard de l' Irak , il n' illustre pas pour autant un regain d' influence de l' Exécutif sur les questions de politique étrangère , et apparaît plus conjoncturel qu' autre chose .
660: En tout état de cause , le soutien des parlementaires a eu pour effet de clarifier la position des Etats-Unis , la Maison-Blanche disposant d' un véritable mandat interne dans sa lutte contre le régime de Saddam Hussein .
661: Dans sa version finale , la résolution donnait au président Bush tous les pouvoirs qu' il avait réclamés .
662: Cependant , si elle l' autorisait à agir indépendamment des Nations unies , elle tenait compte des inquiétudes de certains parlementaires en encourageant le président à épuiser d' abord tous les recours diplomatiques , et exigeait de lui qu' il remette au Congrès , tous les 60 jours , un rapport au sujet de toute action unilatérale qui aurait été entreprise .
663: L' issue des débats est devenue évidente lorsqu' une version modifiée de la résolution , soutenue par la plupart des démocrates , a été battue par un vote de 270 voix contre 155 en début de journée .
664: Cette version exigeait que le président Bush demande au Congrès de se prononcer une seconde fois sur le recours à la force lorsqu' il aurait conclu que les démarches diplomatiques par le biais de l' ONU n' avaient pas abouti .
665: Le représentant John Spratt ( républicain , Caroline du sud ) , qui avait parrainé la version modifiée , déclara : " En l' absence d' une action multilatérale , ce sera les Etats-Unis contre l' Irak et , pour certains , les Etats-Unis contre le monde arabe et musulman . "
666: Et Jay Inslee ( démocrate , Washington ) de renchérir : " A mon avis , frapper un tyran et créer 10 000 terroristes ne constitue pas une victoire . "
667: En d' autres termes , de nombreux parlementaires attendaient l' Administration Bush au tournant et étaient prêts à multiplier leurs critiques si l' intervention militaire en Irak n' était pas un succès .
668: En fait , il a fallu attendre la fin des opérations en Irak , et surtout le triple attentat suicide de Riyad , pour que l' unité nationale , généralement perceptible en temps de guerre , recommence à se diluer , et que les critiques les plus vives concernant la lutte antiterroriste menée par l' Administration se fassent à nouveau entendre au Congrès .
669: Conclusion
670: En s' attardant sur quelques exemples précis , en particulier depuis la fin de la guerre froide , cette étude permet de mieux comprendre le rôle du Congrès en matière de pouvoirs de guerre , et dans quelle mesure les engagements extérieurs des Etats-Unis font systématiquement l' objet de débats institutionnels opposant le Législatif à l' Exécutif .
671: Ces divergences sont d' autant plus marquées quand le Capitole est politiquement opposé à la Maison-Blanche , comme ce fut souvent le cas depuis 1994 .
672: Mais la domination de toutes les institutions par un seul parti n' empêche pas les parlementaires de défendre des prérogatives qu' ils placent à un niveau supérieur aux traditionnelles querelles politiques .
673: Ainsi , ce n' est pas parce que le président bénéficie d' une majorité dans les deux Chambres du Congrès qu' il se retrouve dans une situation plus favorable .
674: Un tel constat est indispensable dans le contexte actuel .
675: A l' occasion des élections de la mi-mandat organisées le 5 novembre 2002 , en effet , les Américains ont voté pour désigner l' ensemble des 435 représentants ( mandat de deux ans ) , 34 sénateurs sur 100 ( mandat de six ans ) et 38 gouverneurs d' Etat sur 50 ( mandat de quatre ans ) .
676: Il s' agissait ici d' une critique qui concernait davantage les pouvoirs de guerre que la stratégie de l' Administration elle-même .
677: Par ailleurs , cette opposition partisane était souvent perçue , de l' extérieur , comme une certaine forme de cohabitation .
678: Or , si cela est exact sur les dossiers de politique intérieure , il n' en est rien en ce qui concerne les questions internationales .
679: Pour la première fois depuis les élections de 1934 , à la suite desquelles le crédit de Franklin D. Roosevelt en tant que président avait été renforcé , aucun président des Etats-Unis n' avait vu son parti politique progresser au cours des élections de la mi-mandat consécutives à son élection .
680: En ce sens , le succès du Parti républicain est une victoire historique :
681: comme entre janvier et juin 2001 , le parti de George W. Bush contrôle désormais l' Exécutif , les deux Chambres du Congrès et la majorité des Etats .
682: Cette victoire est -elle due au soutien de l' opinion publique à son président ?
683: Après la défection de Jim Jeffords en juin 2001 , les Démocrates étaient majoritaires au Sénat , ce qui leur permettait d' y contrôler les commissions et de faire pression sur certains dossiers présentés par l' Administration Bush , comme la ratification du protocole de Kyoto et le bouclier antimissile .
684: Mais la victoire des candidats républicains s' explique bien davantage par des campagnes de terrain que par une stratégie d' ensemble à la tête de laquelle se serait porté le président .
685: Enfin , la campagne électorale a été marquée par l' importance des financements , ceux -ci ayant été majoritairement le fait d' initiatives locales .
686: Mais le seul point sur lequel cette élection apparaît comme une victoire personnelle de George W. Bush est qu' il a lui-même choisi la plupart des nouveaux candidats , et que ceux -ci ont connu des résultats largement positifs .
687: Ainsi , parler d' un vote de soutien au président semble caricatural , mais il s' agit indiscutablement d' une victoire personnelle du chef de l' Exécutif , et Thomas Daschle n' hésite pas à expliquer la défaite de son camp par la campagne menée par George W. Bush , justifiant ainsi les mauvais résultats des Démocrates .
688: De même , il est difficile de voir dans cette élection une réelle victoire du camp républicain , la campagne ayant peu porté sur des questions partisanes , mais plutôt une défaite des Démocrates , qui n' ont pas été en mesure de proposer une alternative , ni de mettre en avant leurs différences de vues , sur les questions tant internes qu' externes .
689: En tout état de cause , le résultat de ces élections a renforcé la position de l' Administration et mis entre parenthèses la constante opposition partisane qui existait entre le Sénat et la Maison-Blanche depuis 1994 ( à l' exception de la période de janvier à juin 2001 , quand les Républicains étaient majoritaires dans les deux Chambres ) .
690: Jusqu'aux élections de novembre 2002 , l' Administration Bush pourrait être exempte de toute critique dans sa gestion des affaires internationales , notamment au Moyen-Orient , même si la plupart de ces questions font l' objet d' un fort consensus entre les différentes composantes politiques du Congrès .
691: Par ailleurs , dans le contexte actuel , les Démocrates ont tout intérêt à privilégier les questions intérieures dans leurs critiques adressées à l' Administration , laissant ainsi de côté les problèmes internationaux , à l' instar de Bill Clinton qui , en 1992 , s' était concentré sur l' économie et les problèmes sociaux et avait totalement délaissé les affaires étrangères .
692: Dans ces conditions , les résultats des élections de novembre 2002 devraient avoir pour effet de laisser le champ libre aux Républicains sur les questions internationales dans les deux prochaines années .
693: C' est donc à l' intérieur du Parti républicain que les tendances lourdes en matière de politique étrangère vont se dégager .
694: Il convient donc d' analyser à la fois les différents mouvements au sein du GOP et les relations de ce parti avec l' Administration , et aussi dans quelle mesure certaines conceptions recevront un écho plus ou moins favorable , et seront ainsi susceptibles , ou non , de participer pleinement à la formulation de la politique étrangère du pays .
695: Parmi les personnalités les plus influentes se trouvent les nouveaux présidents des commissions des Relations internationales et des Forces armées au Sénat , Richard Lugar ( républicain , Indiana ) et John Warner ( républicain , Virginie ) , tous deux réputés pour leurs prises de positions conservatrices .
696: Plus que des divergences opposant Républicains et Démocrates , les futurs débats sur les questions internationales mettront en évidence les désaccords existant au sein du GOP entre des parlementaires conservateurs et d' autres plus " centristes " , à l' instar de ceux opposant les " faucons " et les " colombes " au sein de l' Administration .
697: Ils permettront aussi de mesurer clairement l' importance des prérogatives constitutionnelles , que les parlementaires républicains ne manqueront pas de mettre en avant à l' occasion des futurs engagements de l' Administration Bush sur la scène internationale .
698: Si la victoire des Républicains a ainsi des effets importants sur les questions intérieures , le Congrès se rangeant derrière les propositions de lois de l' Administration , il n' en sera pas forcément de même en ce qui concerne les affaires internationales , et l' équipe de George W. Bush devra faire face , sur ce point , à la fois à l' aile droite du Parti républicain et aux initiatives bipartisanes derrière lesquelles pourraient se ranger des parlementaires plus " centristes " , susceptibles de s' associer aux Démocrates en certaines circonstances .
699: Il sera indispensable pour l' Exécutif de savoir compter habilement sur ces différentes tendances .
700: index
701: Références bibliographiques